Chapitre 24 (Adams)

 20 minutes plus tard, mon frère et sa femme arrivent à l'appartement en abandonnant leurs bagages dans l'entrée. Ils ont l'air tendus et épuisés. 

Heureusement, je viens tout juste de terminer de ranger pour ne laisser aucune trace du passage de Crazy girl et je suis installé sur la terrasse, une clope entre les doigts. L'air de rien et comme à mon habitude, détaché. Ne rien laisser paraître. Voilà le masque que je porte en permanence. Mais à l'intérieur, là, dans mes tripes, ça hurle à m'en faire arracher la gorge et exploser les poumons. Seulement le silence de cette douleur m'a été imposée depuis ma naissance et j'ai appris à le dompter et à le maîtriser à la perfection.

— Ah ! Tu es là ? me surprend ma belle-sœur juste derrière-moi avec son dédain habituel.

— Ma présence te fait toujours autant plaisir ! Moi aussi je suis super heureux de te voir, Caroline ! souris-je effrontément pour la défier.

— L'appart empeste le tabac ! Combien de fois va-t-il falloir te dire de fermer la porte quand tu décides de t'empoisonner ? peste-t-elle en me fusillant d'un regard noir.

— Laisse-le, Caro. Il ne fume pas à l'intérieur, c'est le principal, non ? apparaît derrière elle mon frangin, Mike. Comment vas-tu, Adams ?

Il me rejoint sur le balcon, ferme la porte derrière lui et s'installe à mes côtés. Pendant ce temps sa bécasse retourne vers l'entrée pour s'occuper d'autre chose que de ma santé qui de toute façon lui importe peu. Elle ne m'a jamais apprécié et c'est réciproque. Mes yeux se braquent sur Mike et chaque fois que je m'attarde sur son visage, c'est celui de ma mère que j'observe. Ce regard vert perçant, ce même nez fin, ce même menton en pointe, cette fossette sur la joue gauche lorsqu'il sourit et la couleur ébène de ses cheveux. Malheureusement, je n'ai pas eu la chance de connaître suffisamment la femme qui m'a donné la vie et tout ce que je sais d'elle ce sont des photos rangées précieusement dans un album que mon géniteur m'interdisait de regarder, parce que je ne le méritais pas. Son image s'est effacée à mesure du temps pour disparaître complètement de mes souvenirs. Et à cette pensée nocive, mon cœur se serre pour la énième fois dans ma poitrine depuis que je respire dans ce monde hostile qu'a instauré cet homme haineux à qui je ressemble en tout point physiquement. Et ça, ça me fout en rogne, putain !

— Vous êtes rentrés plus tôt ? Elle t'a pris la tête, c'est ça ? me moqué-je de mon frangin pour brider mon esprit qui part encore à la dérive. Le champagne français n'était pas à son goût ?

— Si ce n'était que ça, soupire-t-il. Tu n'as pas vu les infos ?

— Non, qu'est-ce qu'il se passe ?

— Une troisième banque a été braquée et Papa n'est plus capable de gérer les situations de crise, alors il fallait que je mette un terme à mes vacances pour régler la paperasse. Tu n'as rien entendu ?

Je me crispe et tire une énorme bouffée avant de relâcher dans les airs la fumée bleutée qui disparaît rapidement dans les cieux.

— Je ne te dirais pas que je suis désolé et tu sais pourquoi ! m'agacé-je.

Il soupire de plus belle et pose une main sur mon épaule en essayant de capter mon regard avec le sien, mais je refuse de tourner la tête, préférant fixer l'horizon plutôt que d'affronter ses yeux suppliants.

— Tu ne crois pas qu'il serait temps que vous fassiez la paix tous les deux ?

Je dégage sa main et serre les dents.

— Jamais, tu m'entends, grogné-je.

— Il est malade, Adams ! Il va mou...

— Arrête Mike ! le coupé-je.

Mes muscles se bandent. Comme à chaque fois que l'on m'oblige à penser à lui. Mais je refuse de m'en prendre à la seule famille qu'il me reste.

Lui... Mon frère. 

Je ravale ma rancœur et tente de maintenir ma rage pour ne pas exploser davantage.

— Tu crois que je ne le sais pas ? Que veux-tu que ça me fasse ? Il m'a banni de sa vie depuis la mort de maman en m'accusant de sa perte. J'ai vécu comme un clochard par sa faute. J'ai failli toucher le fond par sa faute ! Tu as oublié ? Parce que si tu as oublié, pas moi ! Il m'a détruit ! Alors jamais je ne pourrais pardonner à cet homme tout ce qu'il m'a fait subir ! Tu m'entends ? Pour moi, il est déjà mort depuis des années. Et ce putain de cancer est tout ce qu'il mérite. 

— Ok, lève-t-il les mains en signe de reddition.

Il baisse la tête, s'assoit dans un fauteuil en osier, pose ses coudes sur ses genoux et se passe les doigts dans ses cheveux bouclés, le visage triste.

— Je sais que ça te pèse depuis longtemps, Mike. Mais je ne peux pas. Tu comprends ?

Je le rejoins et à mon tour, je presse son épaule entre mes doigts. Il a tenté à maintes reprises de se mettre en travers de mon géniteur lorsqu'il s'en prenait à moi. Parfois ça fonctionnait et à d'autre moment le coup il le prenait à ma place. Et quand cela arrivait, la rage était encore plus forte et je payais le double pour m'être servi de lui comme bouclier. Parce que c'est de cette façon que le voyait mon ordure de père. Je devais subir sa colère d'une manière ou d'une autre pour apaiser son déchaînement de foudre.

Mike a souffert autant que moi, mais pas de la même manière. Je le sais aujourd'hui. Mais de là à pardonner, j'en suis incapable et c'est inconcevable. Ça va bien au delà de mes capacités.

— Ne t'en fais pas pour moi. J'aurais essayé, se pince-t-il les lèvres. Sinon, le boulot pour toi ça va ?

— Ça va... Je ne vais pas dire que c'est un taff princier, mais je ne vais pas me plaindre. Tant que ça me permet de payer mon loyer, je m'en contente.

— Tant mieux si ça va. Mais t'es sûr que tu ne préfères pas être derrière un bureau, plutôt que de vider les poubelles dans les établissements familiaux ? Tu mérites ta place autant que moi, Adams !

— En aucun cas ! Je préfère mille fois ce job que de devoir rendre des comptes au grand patron.

Et surtout avoir accès à tous les plans de chaque banque pour mieux organiser mes petites affaires...

— Même si ce grand patron sera bientôt moi ? tente-t-il.

— On en recause quand ce sera le cas, OK ? souris-je en lui envoyant un clin d'œil. Bon je dois filer, j'ai des trucs à faire avec Max.

— Parfois je t'envie, frangin, murmure-t-il.

— Pourquoi ? l'interrogé-je, en fronçant les sourcils.

— Tu es libre comme l'air, alors que je suis blindé d'obligations. Tu as probablement raison de ne pas vouloir accepter ma proposition après tout, secoue-t-il les épaules. Allez files ! D'ailleurs moi aussi il faut que j'aille au bureau.

— On se voit plus tard ?

— OK.

J'écrase ma clope et prends la direction de la sortie en croisant le regard désapprobateur de ma belle sœur qui sort de la salle de bain.

— Tu peux me dire que tu as foutu là dedans ? me montre-t-elle une jupe déchirée qu'elle pince entre les doigts de peur de se salir les mains.

Merde, je l'ai raté celle-la !

— Je me suis déguisé en femme ! lui arraché-je d'un coup sec pour la récupérer C'est mon nouveau passe-temps. Tu devrais essayer de te transformer en femme aussi, tu verras c'est très divertissant.

Elle n'a rien de féminin, mis à part sa tonne de peinture qu'elle se colle sur la gueule pour se donner un air de diva. Son parfum entêtant qui me donne la nausée. Sa mâchoire carrée, son nez crochu, ses lèvres remplies de silicone pour leur donner le volume inexistant au naturel. Filiforme de la tête aux pieds. Pas une once de sensualité. Et son caractère de merde ne perd rien au change. Aucune personnalité. Tout ce qu'elle a aujourd'hui elle ne le doit qu'à Mike. Sans lui, elle n'est rien d'autre qu'une pauvre fille lambda sur laquelle je ne me retournerai pas, même complètement bourré et shooté à la poudre.

— Sale con !

— Ouais, tu as probablement raison. Mais j'en ai rien à foutre de ce que tu penses, chère Caroline, persiflé-je. Ton avis n'a rien d'important à mes yeux, donc inutile de perdre ton temps dans ce genre de sarcasme à la con.

— Ton père a raison. Tu es un bon à rien, tonne-t-elle. Je serai toi, je me ferai tout petit au lieu de jouer les arrogants immatures.

— Tu n'es pas moi et tu ne le seras jamais. Franchement, je ne sais pas ce que Mike a trouvé de bien chez toi, balayé-je mon regard sur elle. Il n'y a rien de baisable. Même dans ta grande gueule, je n'y mettrais pas ma queue.

Je tourne les talons et passe la carte magnétique pour appeler l'ascenseur privé qui s'ouvre aussitôt. J'y pénètre et juste avant que les portes ne se referment, elle ne peut s'empêcher de la ramener une fois de plus.

— Un jour tu paieras ton insolence, Adams ! Et tu seras seul. Alors que moi, j'aurai toujours Mike et pas toi !

— Ne soit pas aussi sûre de toi ! Mais si tu veux tenir les paris, il n'y a aucun soucis !

****

Hello !

Comment allez-vous ?

Je voulais vous souhaiter un bon weekend de Pâques et j'espère que vous vous êtes régalés de chocolats ! Miam !

Bon et bien nous connaissons un peu plus les motivations d'Adams concernant les braquages de banque. Aviez-vous deviner ?

En attendant la suite, soyez sage, mais pas trop...

Je compte sur vous !

Big Bisouxxx

Bina



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