6- Chloé

    Thomas devient pâle, plus qu'il ne l'est en temps normal. Il ouvre doucement la porte, et voit une femme assise de dos dans un fauteuil, portant une blouse blanche. Les cheveux blond et ondulés, elle note quelques informations sur un papier.

Chloé... Murmure Thomas en ayant un serrement au cœur.

    L'infirmière se retourne, dévoilant de grands yeux bruns qui pétillent à la vue du jeune homme. Elle se précipite vers lui pour le serrer dans ses bras, Thomas en profite pour lui rendre son étreinte.

Eh bien ma belle ! Dit l'infirmière en riant, tu as survécu à la première nuit.

    Thomas s'éloigne, pose l'index devant sa bouche et referme la porte de la salle.

Chut Chloé, dit-il, tu sais bien qu'il ne faut pas m'appeler comme ça, ni par mon vrai nom.

– Ne devient pas trop parano non plus, lance Chloé d'un ton amusé. On avait fait des tests avec Milah et Joffrey, ton déguisement est impeccable.

Le jeune homme passe machinalement sa main sur sa nuque, c'est tic qu'il a développé récemment et qui représente des signes d'angoisse. Il repère la table d'auscultation et s'assoit dessus en gardant le regard baissé.

Contente toi juste de m'appeler Thomas, souffle-t-il, et puis c'était votre idée à la base... M'envoyer dans cette école militaire, déguisé en garçon pour ne pas qu'ils me retrouve.

– Tu peux remercier mon oncle William d'avoir fait de toi son fils, ajoute Chloé. Sans lui et sa vingtaine d'année au service de la patrie, tu ne serais pas ici.

    Thomas acquiesce faiblement sans dire un mot, Chloé a raison. Sans l'aide précieuse de son oncle, un ancien militaire, le jeune homme n'aurait jamais pu intégrer cette école. En ce moment, il serait à la merci de ces assassins. Il frissonne à cette pensée. Chloé remarque son malaise, et tente de réengager la conversation sur un sujet délicat. Ses lèvres tremblent :

T-tu sais, bégaye-t-elle, ta mère était ma meilleure amie... Et ton petit frère était adorable. Je suis désolé pour ce qui leur est arrivés... Je suis désolé que tu es assisté à ce massacre. Mais tu dois savoir, que je suis là pour t'aider. Moi, mais aussi Milah, Joffrey et l'oncle William...

– T'as pas à être désolé, interrompt Thomas d'une voix coupante. Ce n'est pas de ta faute s'ils sont morts.

Il se stop net, ce dernier mot l'étrangle. Des larmes lui emplissent les yeux, et sa voix reprend une tonalité féminine, de plus en plus aigu.

Ce serait plutôt de ma faute... Reprend-il. Je n'aurais pas dû me mêler des affaires de mon père... Et puis, est-ce que t'as des nouvelles de lui ? Parce que ça fait des mois que je ne lui ai pas parlé. La dernière fois que j'ai entendu sa voix, c'était pour me dire qu'il allait régler "ce problème familial".

De la colère se fait sentir dans sa voix tremblante, ses yeux se gonflent et deviennent rouge. Mais Thomas ravale ses larmes, il refuse de les laisser couler.

Je n'ai pas eu de nouvelles de ton père, répond Chloé d'une voix lente. Mais tu n'as pas à te sentir coupable, tu ne savais pas ce qu'il faisait réellement. Tu n'y es pour rien.

    Thomas ne répond pas, perdu entre l'angoisse de ne plus revoir le seul parent qui lui reste, et la colère qu'il éprouve envers lui, et lui-même. Il pousse un long soupir avant de se ressaisir.

En tout cas, dit-il en reprenant un ton grave, merci d'être ici... J'avais peur que tu ne soit pas là à temps.

– Ce n'est rien, rétorque Chloé en retrouvant le sourire. En plus, infirmière scolaire c'est mon métier.

    Un bref silence se met à régner dans la pièce, avant que le jeune homme se décide à prendre la parole.

Bon, je crois qu'il faut que tu m'examine, parce que l'heure tourne et j'ai cours après.

– Très bien, allons-y !

    L'infirmière commence par mesurer sa pression artérielle, puis lui fait passer un test de lecture. Enfin, elle note sa taille et son poids.

    – Un mètre soixante-treize, pour cinquante-six kilos, annonce Chloé. Mais comme tu es censé être un jeune homme, je noterais cinq kilos en plus. Eh bien, c'est terminé ! Par contre, fais attention avec les bandages que tu mets autour de ta poitrine. Tu as des rougeurs, alors ne serre pas trop.

– Je ferais attention, mais je ne veux pas qu'ils se doutent de quelque chose.

– Je comprends, mais ne mets pas ta santé en danger pour autant... Sinon, j'espère que tout c'est bien passé, tu t'es fais des amis ? Demande-t-elle.

    Thomas étouffe brusquement un rire, il se remémore les dernières mésaventures qu'il a vécu, et ne peut s'empêcher de rire sous les yeux interrogateur de Chloé.

Je suis pas venu ici pour me faire des amis, déclare-t-il, mais j'ai déjà quelques ennemis. Certains m'appelle "la macchina"... Je ne sais pas encore pourquoi.

– Tu es devenu populaire à ce que je vois ! S'exclame Chloé en levant le pouce.

– Je ne crois pas que "populaire" soit le bon mot...

    La sonnerie retentit, Thomas sursaute, le son est bien plus intense que la fois précédente... Il entend les lourds bruits de pas, et le chahut des élèves qui finissent leur heure de cours. Déjà exténués, alors que la matinée se termine à peine.

Je vais y aller Chloé, dit-il en tendant la main vers la porte.

– Bonne chance "mon grand", ajoute l'infirmière suivi d'un clin d'œil. Si tu as un souci n'hésite pas à venir me voir. Surtout, dit toi bien que ce n'est qu'une année scolaire comme les autres.

    Thomas esquisse un sourire, avant de sortir de l'infirmerie et tenter de dissimuler aux yeux du monde, la jeune fille qu'il est en réalité.

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