34- Soirée et cauchemar (2)
– Voilà, je te l'ai amené Alex chéri ! Déclare la jeune femme suivi d'un clin d'œil.
– Merci Alya, rétorque le jeune homme avant de prendre une nouvelle gorgée de sa boisson.
– C'est un complot ? Questionne sérieusement Thomas.
Alex se met à rire d'une forte voix, puis se lève pour se placer aux côtés de son amie tenant toujours son verre en main. Thomas remarque qu'il n'est pas dans son état normal, et que l'alcool lui est monté à la tête. Il reste alors sur ses gardes.
– Je te présente Alya, dit-il d'un ton enjoué en tenant son amie par les épaules. Elle est la seule à savoir que je suis gay.
– Il m'a raconté ce qui s'est passé entre vous, reprend-elle.
– Comment ça !?
– Je lui ai tout dit, révèle Alex. Quand je t'ai embrassé au gymnase, quand tu m'as repoussé et quand je me suis pris le râteau du siècle. Je lui ai aussi dit que t'en préférais un autre.
Une des parties les plus gênantes de sa vie a été dévoilé, sans même qu'il le sache, à une simple inconnue dont il connaît tout juste le prénom. Thomas devient alors pâle, tiraillé entre l'embarras et la colère. Il aimerait s'exprimer clairement sur la chose, mais les mots restent bloqués dans sa gorge.
– Ecoute, poursuit Alya en s'approchant de lui, je voudrais que tu laisses une chance à Alex, et que vous arrêtez de vous faire du mal.
Elle se retrouve encore à quelques centimètres de Thomas, et attend une réponse de sa part. Le jeune homme recule de quelques pas afin de rester éloigné le plus possible d'elle, et heurte la cuisinière. Il fixe Alya droit dans les yeux et lui répond d'un ton catégorique :
– C'est impossible. Et ne joue pas les cupidons avec moi.
– Mais enfin pourquoi !? S'indigne Alex.
Alya fait signe à l'adolescent de se taire, tout en gardant les yeux rivés sur Thomas.
– Dans ce cas...
Mais à peine commence-t-elle sa phrase que la porte de la cuisine s'ouvre avec fracas laissant entrer une dizaine de personnes les bras chargés de bouteilles et de canettes de bières vides.
– On va pas vous déranger longtemps, s'écrie un garçon, on refait juste le plein de bière.
Alex se rassoit et les laisse se servir dans le réfrigérateur, en profitant même pour remplir son verre. Une jeune femme tenant plusieurs ustensiles de cuisine dont un tire bouchon, entreprend de ressortir bousculant Alya au passage.
– Eh ! Se plaint-elle. Fait attention, t'as abîmé ma robe avec ton truc.
Elle passe sa main sur une déchirure se formant au niveau de ses hanches, et s'agrandissant à ses moindres faits et gestes à cause du tissu trop fin de sa tenue. Thomas l'observe marmonner les pires insultes et chercher de quoi cacher cet accroc embarrassant.
– Qu'est-ce que t'as à me regarder ? Aide-moi à trouver quelque chose qui peut cacher ce trou énorme plutôt.
Il croise les bras un instant, et se rappelle à quel point cela peut être gênant pour une fille de voir sa tenue détruite, surtout lorsque celle-ci est censée la mettre en valeur.
– Je peux recoudre ta robe, déclare-t-il. Et ensuite vous me laissez tranquille.
Alex et Alya se regardent tous les deux sans réellement comprendre ce qu'il vient de dire.
– Comment ça, ensuite on te laisse tranquille ? Demande Alex en mimant des guillemets.
– On verra ça ! S'impatiente Alya. D'abord recoud ma robe.
– Ok. Mais il me faut du fil et une aiguille.
– Hum... Simon doit certainement en avoir, il faudrait lui demander.
– Je sais qu'il y a tout un bazar dans le dressing sous l'escalier, déclare Alex, il y a certainement un kit de couture.
– Cool, allons-y !
Alya attrape le bras de Thomas avant même qu'il n'est le temps de répliquer quoi que ce soit, et l'entraîne hors de la cuisine. En repassant par le salon, il aperçoit distinctement Théo, Billy et Simon en pleine conversation dans un coin. Il ne peut pas entendre ce qu'ils se disent, mais d'après l'expression de leurs visages, ils ne s'amusent pas, mais ils ne se disputent pas non plus. Billy et Simon semblent dissuader Théo de faire quelque chose. Mais impossible pour Thomas d'en savoir davantage, malgré la curiosité qui le ronge.
Alex qui le suit de près, pointe du doigt le dressing.
– C'est ici, par contre j'crois pas que la lumière fonctionne là-dedans.
– J'espère que tu sais coudre dans le noir Thomas, marmonne Alya en ouvrant la porte.
Ils entrent tous les trois dans la petite pièce, et par chance tombent sur une lampe de poche. Alex l'allume et éclaire faiblement les étagères afin de trouver un kit de couture.
– C'est ça je crois, dit-il en désignant une petite boîte en métal bleu.
Thomas la prend, et trouve en effet un nécessaire de couture. Il s'empare d'une aiguille et d'un peu de fil noir, puis s'accroupit afin d'être au niveau des hanches d'Alya pendant qu'Alex l'éclaire.
– Cette situation est totalement gênante, avoue-t-elle en rougissant. J'espère qu'Alex chéri est suffisamment bourré pour ne pas s'en souvenir demain.
– Normalement, dit Thomas en commençant à coudre, tu devrais enlever ta robe pour me faciliter la tâche.
– N'y compte même pas pervers !
Il se fige net, sentant peu à peu le sang lui monter à la tête. Mais la jeune femme se reprend un peu honteuse.
– Enfin je voulais pas dire ça... Bref, on devrait parler d'autre chose.
Mais personne n'ose lancer de sujet, un long silence prend place, seule la musique de l'autre côté de la porte se fait entendre. La lumière de la lampe de poche commence à vaciller, Thomas se retourne alors et voit Alex qui tremble des mains, il est anxieux.
– Tu m'as toujours pas dit en fait... Si tu me détestes ou pas, après ce qui s'est passé.
Sa réponse se fait tarder, et il s'impatiente en constatant le manque de réaction de Thomas.
– Encore ce silence hein... Reprend-il plus nerveusement.
– Les effets de l'alcool se font ressentir, affirme Alya en souriant. Alex ne va pas tarder à se donner en spectacle... Mais plus sérieusement, Thomas, ça lui fait réellement mal.
Il se racle la gorge et se met à respirer de façon saccadé, mais il ne perd pas la face et termine sa tâche.
– Je pense que vous devriez sortir ensemble un jour, continue l'adolescente. Juste une fois et voir ce que ça donne après.
Les yeux d'Alex s'écarquillent, et par mégarde il fait tomber la lampe de poche au sol. Thomas se relève subitement et range rapidement le matériel de couture dans la boîte.
– Désolé, dit-il avec précipitation, je ne peux pas.
Il sort ensuite du dressing et tombe directement sur Chris et Aurore, tous les deux surpris de le voir à cet endroit.
– Mais qu'est-ce que tu faisais là-dedans ? Interroge Aurore avec un sourire en coin.
Mais son sourire disparaît lorsqu'elle aperçoit Alya et Alex sortir à leur tour de la petite pièce sous l'escalier. Une lueur brille dans les yeux d'Alex, ses poings sont serrés et il ricane sans raison apparente. Il n'est pas dans son état normal, et cela effraie Thomas qui s'éloigne encore plus loin.
– Vas-y éloignes-toi Thomas ! Hurle-t-il attirant l'attention de plusieurs personnes.
– Bon sang calmes-toi Alex, prononce discrètement Alya.
– Va dans les bras de Théo ! Ajoute-il en criant plus fort. Puisque c'est lui que tu aimes, n'est-ce pas ?
Tout le salon fait silence après cette révélation, les regards sont braqués sur Thomas, puis sur Théo toujours en compagnie de ses amis. Il se décompose devant toute la salle et lance un regard mitrailleur à Thomas avant de partir à l'étage et de s'enfermer dans une pièce. Des murmures se font entendre peu à peu, des dizaines de chuchotements arrivent jusqu'aux oreilles de l'adolescent malgré la musique de fond. Des murmures discrets qui se transforment en rire, puis en moquerie. Il se laisse glisser lentement au sol, plaçant sa tête dans ses mains pour ne plus subir toutes ces personnes qui le fixent narquoisement. « Mais qu'est-ce qui vient de se passer merde... » Se demande-t-il en boucle dans sa tête. Il ne peut pas s'empêcher de se sentir humilié par ce qui vient de se produire, incapable de relever les yeux et de faire face au monde.
Pourtant, une main posée sur son épaule le fait réagir. Il relève alors la tête et observe le visage soucieux de Chris.
– Thomas... Est-ce que tu...
– Bon sang Chris ! S'exclame-t-il. Tu étais où ? Je t'ai cherché partout !
– Euh, en fait...
– Il était avec moi, interrompt Aurore en s'asseyant près de Thomas. Désolé on était dans le jardin, mais on t'a cherché aussi. Enfin, c'est vrai ce qu'a dit Alex à propos de Théo et toi ?
Voyant son visage blêmir, Aurore comprend que sa question était maladroite et tente donc de se rattraper.
– T'es pas obligé d'en parler bien sûr... Pas à nous en tout cas, mais à Théo peut-être.
À ses mots, Thomas réalise soudainement qu'il n'est pas le seul à s'être senti humilier. Dans une pièce à l'étage, Théo ressent certainement une émotion semblable et il lui doit quelques explications sur ce qu'Alex à divulguer. Car en effet, il a hurlé à plus d'une cinquantaine de personnes les sentiments qu'il éprouvait à l'égard de Théo.
Thomas ne sait pas comment aborder le sujet avec lui, il n'en a même pas envie. Mais maintenant que tout a été révéler et qu'il n'a plus à enfouir ce qu'il ressent, il a besoin d'entendre la voix de celui qui a été le centre de son attention. Même si ses mots lui feront encore du mal, il veut être fixé une bonne fois pour toutes.
« Aller, courage Judy, t'as vécu des choses bien pires. »
Il se met difficilement debout se sentant un peu engourdi. Toujours sous les regards mesquins, il avance jusqu'à l'escalier sans détacher les yeux du sol et monte jusqu'au premier étage. La pièce dans laquelle s'est enfermé Théo est au bout du couloir, il s'agit de la salle de bain, la seule pièce dont la lumière paraît sous la porte, toutes les autres sont plongés dans l'obscurité. Thomas avance en tremblotant comme s'il avait froid, et pourtant il a chaud, si chaud qu'il s'en sent presque étouffé.
Il arrive devant la porte et prend une grande inspiration avant de se décider à toquer.
– Théo ? Déclare-t-il tout bas. C'est moi, je peux entrer ?
Il ne reçoit aucune réponse en retour, mais patiente quand même une vingtaine de secondes avant de remarquer que la porte n'est pas verrouillée. Il abaisse alors la poignée mais hésite à ouvrir, ayant peur de ce qu'il va voir derrière. Il se souvient de s'être retrouvé dans une situation similaire il deux ans, l'image sanglante de sa camarade lui brouille encore la vue. Thomas n'avait rien fait pour l'aider, et aujourd'hui il ne veut pas commettre la même erreur. Prenant son courage à deux mains il entre précipitamment dans la salle de bain, laissant son regard vagabonder dans la pièce à la recherche de Théo. Et lorsqu'il le trouve, assis par terre et la tête reposant sur le rebord de la baignoire, son sang ne fait qu'un tour. Ses manches sont relevés et dévoilent les cicatrices de toutes ses blessures passées, un grand élastique est attaché autour de son bras. Dans sa main droite tient une petite seringue qu'il pointe vers son avant-bras. Thomas ne réagit pas, il est paralysé, ce qu'il voit ne lui semble pas réaliste. La musique se mélange à ses pensées et le martèle, il n'arrive plus à réfléchir correctement se tenant la tête à s'en arracher les cheveux.
Lorsqu'il voit Théo approcher la seringue de sa peau déjà couverte de piqûres, il se jette sur lui sans réfléchir et tente de le lui arracher des mains.
– Mais putain ! S'exclame Théo en résistant. Dégage et fous-moi la paix !
– Tu plaisantes j'espère ? Réplique Thomas usant de toutes ses forces pour qu'il lâche sa seringue. Je vais pas te laisser te foutre en l'air. Jamais.
Théo finit par le pousser et le plaquer sur le carrelage glacé, et afin qu'il ne bouge plus, il se place juste au-dessus de lui, immobilisant la main qui tente de lui subtiliser sa drogue. Désorienté, Thomas met plusieurs secondes avant de réaliser ce qui vient de se passer. Théo est tout près de lui, il peut même entendre son cœur battre à un rythme anormal, mais surtout, il voit dans ses yeux une lueur inquiétante et comprend que de la drogue coule déjà dans ses veines.
– Il y a plus de deux ans, raconte l'adolescent, ma camarade s'est ouvert les veines lors d'une soirée, et je n'ai rien fait. Aujourd'hui, tu prends de la drogue à t'en tuer et ne crois pas que je vais te laisser faire.
Thomas a toujours détesté les cours du sergent Leonhard, mais à ce moment précis il doit bien admettre que ses cours de défense lui sont utiles, puisqu'en une manœuvre il arrive à se dégager tout en récupérant la seringue, plaquant à son tour Théo sur le carrelage.
– Merde ! peste-t-il en se redressant. Je suis encore libre de faire ce que je veux.
– Si t'étais vraiment libre, t'aurais pas envie de prendre ce truc.
Il ne répond pas et s'adosse contre un mur en soupirant. Thomas avance jusqu'à l'évier et vide tout le contenu de la seringue.
– J'espère que tu ne recommenceras plus...
– J'en ai besoin.
– Est-ce que c'est à cause de ce qu'a dit Alex ? Interroge l'adolescent en s'asseyant en tailleur en face de lui.
Théo se met à rire soudainement à n'en plus s'arrêter, Thomas le regarde inquiet ne sachant pas quoi faire.
– C'est pas ta faute si t'es tombé amoureux d'un drogué suicidaire, dit-il en se calmant. Je t'en veux pas... Le problème c'est juste moi.
– J'aimerais faire quelque chose pour toi mais...
– Mais t'as tes propres problèmes, coupe-t-il. Occupes-toi de ça en priorité et ne penses plus à moi, je vais m'en sortir seul.
Les larmes commencent à monter aux yeux de Thomas, ses lèvres tremblent. Il ne peut plus parler car sa voix pourrait le trahir à cet instant. Il ne retient pas la première larme qui roule sur sa joue. Théo la remarque, et esquisse un sourire en voyant l'adolescent dans cet état. Il se rapproche de lui passant une main derrière sa nuque, et le serre dans ses bras tout en lui disant :
– Arrête de pleurer, tu ressembles à une fille comme ça.
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Bon ce chapitre ne traite pas d'un sujet très drôle, donc je tiens à faire mon petit commentaire et rappeler que la drogue c'est mal ;)
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