33- Soirée et cauchemar (1)
La semaine se déroule à une vitesse folle, et plus les jours passent, plus la randonnée de Leonhard approche. Pourtant, ce n'est pas ce qui inquiète le plus Thomas. En ce samedi soir, il s'apprête à partir à la soirée organisée par Simon, et cet événement occupe tout son esprit. Assis sur son lit, il ne cesse de triturer ses doigts.
– Chris, dit-il nerveusement, je ne sais toujours pas comment tu as réussi à me persuader de venir avec toi.
Ce dernier occupé à chercher des vêtements dans l'armoire ne l'écoute pas. Mais il finit tout de même par sortir deux sweats, et les présente à Thomas.
– Tu préfères le bleu ou le bordeaux ?
– Le bordeaux.
– D'accord, mais tu es sûr que c'est correct de s'habiller comme ça en soirée ? S'inquiète l'adolescent.
– Peu importe, rétorque Thomas, tu vas pas à un mariage non plus.
Au même moment, quelqu'un se met à toquer à la porte de la chambre. Chris enfilant son sweat, c'est Thomas qui se lève pour aller ouvrir, mais à peine s'approche-t-il de l'entrée que la porte s'ouvre brusquement sur son front, le faisant chanceler en arrière.
– Ça... Ça va Thomas !? S'écrie Chris.
Il ne répond pas encore étourdi à cause du choc, et se rassoit immédiatement en frottant sa tête. Il aperçoit Yann dans l'encadrement de la porte joignant ses mains pour s'excuser.
– Ça fait deux fois, s'énerve Thomas, t'essaye de me tuer ou quoi ?
– Je suis désolé, grimace Yann, mais t'es toujours derrière une porte quand j'arrive.
– C'est ma faute maintenant, soupire le jeune homme.
Yann fouille la pièce du regard, observant chaque meuble tout en avançant jusqu'au lit de Chris afin de s'y asseoir.
– C'est dingue, dit-il en levant un sourcil, en fait toutes les chambres sont pareilles. À part ça... Vous aussi vous allez à la fête de l'hyperactif ? Moi il m'a invité avec les autres du dortoir, mais ils sont partis sans moi. Apparemment je prenais trop de temps dans les douches. Mais regardez-moi, je suis pas le plus beau mec de la terre comme ça. Les filles vont toutes tomber à mes pieds.
Il se met débout et écarte un peu les bras pour montrer sa tenue aux garçons, une chemise blanche et jean noir. Chris écarquille les yeux, tandis que Thomas se retient d'éclater de rire.
– Tu vois Thomas ! Je devrais peut-être mettre une chemise aussi.
– Pourquoi ? Tu comptes draguer les filles comme Yann ?
Yann se met à pouffer de rire, puis jette un œil à son téléphone.
– Faudrait partir maintenant si on veut avoir le temps de draguer... Vous venez ?
Il arbore un sourire radieux en disant cela, alors que Thomas et Chris partagent tous deux un regard déconcerté.
***
C'est ainsi que les trois adolescents quittent l'enceinte de l'école militaire sous une nuit couverte d'étoiles, se voilant peu à peu par d'épais nuages. Thomas marche les mains dans les poches, observant les environs tout en suivant ses camarades. Chris vérifie l'adresse sur son téléphone et tente de repérer le bon chemin, mais son mauvais sens de l'orientation le rend perplexe. Yann subtilise alors rapidement son téléphone pensant être plus efficace, laissant le jeune homme ahuri.
– C'est à une quinzaine de minutes d'après le plan, il habite juste à côté en fait Simon !
– Donc c'est bon on peut y aller ? Questionne Thomas d'un air las.
Il hoche la tête, puis tous se mettent enfin route. Le trajet se déroule presque silencieusement, seul Yann s'exprime pleinement au milieu des ruelles, faisant son propre éloge et prédisant le nombre de ses futures conquêtes de la soirée. Thomas se contente de marcher près de Chris et de ne pas l'écouter. L'atmosphère qui règne dans le groupe lui rappelle la soirée de ses quatorze ans, lorsqu'il marchait dans la rue avec ses deux amies à la lueur des lampadaires et sous la brise glacée. De bons souvenirs en soi, et pourtant quelque chose le perturbe. Il ne peut s'empêcher d'être nerveux, de penser que quelque chose de traumatisant pourrait se produire. Il repense alors à son ancienne camarade de classe, un peu rondelette, les yeux rouges et gonflés de larmes, un filet de sang s'écoulant le long de son bras. « Si proche de la mort... » Soudain, des centaines d'images de sa mère et de son frère baignant dans une mare de sang apparaissent en flash dans sa tête. Il est alors pris d'une forte nausée et s'arrête instantanément de marcher, plaquant une main sur sa bouche. Son geste alarme Yann et Chris qui se placent autour de lui.
– Est-ce que ça va ? Demande Chris sur un ton affolé.
– T'es pas encore bourré et t'as déjà envie de gerber, plaisante Yann.
Thomas respire fortement et tente de calmer son haut-le-cœur, puis se sentant mieux, il lance un regard à Yann qui cesse immédiatement de rire.
– C'était juste une blague, pardon.
– Je me sens bien, on peut y aller.
Après quelques minutes de marche supplémentaire, de la musique électro provenant d'une maison au coin de la rue se fait entendre, ainsi que les rires et les cris d'adolescent s'enivrant sans modération.
– On est arrivés, annonce Chris sur un léger ton craintif.
La maison est grande, tout en restant assez sobre. En s'approchant, Thomas remarque que la porte d'entrée est déjà ouverte et qu'un groupe de personnes gêne le passage, mais Yann prend les devants et n'hésite pas à bousculer pour se frayer un passage. Il en profite alors pour passer avec lui. Les vibrations provenant des enceintes stéréos, et les effets de lumières colorées créés pour l'événement lui retournent déjà le cerveau. Il balaye le lieu du regard et ne voit qu'une cinquantaine d'adolescents s'amusant, dansant et riant dans le salon spécialement aménagé en piste de danse. L'ambiance paraît légère, pourtant Thomas continue d'être nerveux et soucieux. Il s'approche de la table où sont disposées les boissons et se sert un verre d'eau afin de se sentir un peu mieux.
À cet instant, il remarque que Yann et Chris ne sont plus avec lui. Il les cherche du regard dans toute la salle, mais Chris reste introuvable. « Quand est-ce que je l'ai perdu ? » Se dit-il. En revanche, il aperçoit Yann pas très loin, en compagnie de deux jeunes filles. Thomas s'approche un peu par curiosité, et tente de discerner quel genre de conversation il peut bien y avoir entre eux. Mais la musique étant trop forte, il n'entend que des bribes de paroles.
– ... C'est ma mère qui est dans l'armée, confie l'adolescent d'un air tapageur, mon père était chasseur.
– C'est trop cool ! Glousse l'une des filles.
Après avoir entendu le rire presque inhumain de la jeune fille, Thomas décide de s'en aller en grimaçant. Il traverse la salle, et se place dans un coin près des escaliers menant à l'étage. Il observe chaque personne de la soirée, tentant de retrouver Chris qui semble avoir réellement disparu. Il reconnaît de nombreux visages, comme Johan et Clara dansant ensemble, Alex discutant sur le canapé avec une fille un peu trop maquillée. Il aperçoit aussi Théo, debout près du balcon allumant une cigarette. Il est seul lui aussi, et son regard semble perdu dans le vide.
Des milliers de frissons commencent à parcourir Thomas, ses yeux n'arrivent pas à quitter Théo, et plus il l'observe plus il sent la chaleur lui monter aux joues. Il aimerait aller le voir, rester avec lui pendant la soirée et lui demander ce qui le tracasse tant. Mais il ne le fera pas, de peur de recevoir un coup de poignard en plein cœur, et de se sentir de nouveau pitoyable.
Il inspire profondément avant de reprendre une gorgée d'eau et de fermer les yeux, ne supportant plus les effets de lumière.
– Yo, la macchina, dit une voix familière. Content que tu sois venu.
Thomas prend une seconde avant de soulever ses paupières et de voir devant lui Simon et Billy tout souriants.
– J'aimerais trouver celui qui m'a donné ce stupide surnom, rétorque Thomas en levant les yeux au ciel.
– T'inquiète pas, ajoute Billy en riant, on a tous des surnoms maintenant avec Yann. Moi c'est le dépressif, Simon l'hyperactif et Théo c'est... Le camé.
En disant ce dernier mot, son sourire disparaît et ses yeux se dirigent vers le balcon en face de lui. Thomas ne remarque rien et change de sujet :
– Billy en fait, je suis désolé pour la dernière fois, de t'avoir accusé d'être...
– Pas de soucis, coupe-t-il, je comprends. On a tous nos problèmes.
Il donne un léger coup de coude à Simon et lui murmure furtivement une chose à l'oreille, ce dernier oriente alors lui aussi son regard vers Théo au balcon sous l'air étonné de Thomas.
– Bon ! Reprend Simon. On doit te laisser, j'espère que tu t'amuses bien la macchina !
Ils partent aussitôt en direction du fameux balcon.
– Qu'est-ce qui leur prend ? Dit Thomas tout haut en les regardant partir.
Il finit par soupirer puisque après tout cela ne le concerne pas. La musique qui bourdonne dans ses oreilles lui explose les tympans, à cran, il décide donc de sortir prendre l'air, voire de retourner à l'école militaire s'il ne retrouve pas Chris. Seulement, il doit encore se frayer un chemin à cause du troupeau de personnes qui bloquent la sortie. Ne voulant pas se faire bousculer, il se met sur le côté en longeant le mur le plus discrètement possible.
Il sent que quelque chose s'accroche à sa manche, puis l'attrape au bras. Surpris, il tourne la tête et se retrouve nez à nez avec une adolescente brune tenant fermement son bras. Il reconnaît brièvement son visage trop maquillé, c'était elle qui discutait avec Alex.
– Suis-moi, dit-elle en l'entraînant loin de la sortie.
– Mais t'es qui ?
– Quelqu'un qui ne veux que ton bonheur !
Il fronce les sourcils pensant qu'elle est probablement ivre, et tente de dégager son bras de ses mains qui l'agrippe fermement. Ils s'éloignent du salon, de la musique trop forte et des lumières, pour rejoindre la cuisine. À ce moment, la jeune fille le lâche et prend un air amusé. Assis en face d'une table de bar, Thomas aperçoit Alex prenant le même air qu'elle et sirotant une boisson.
---------------------------------------------
Hello ! À cause de problèmes informatiques j'ai encore dû découper la partie (vive open office TT). Mais j'espère que ce chapitre n'a pas été trop ennuyeux :)
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top