3 - Le dragon incandescent (Ⅱ)
Un dragon incandescent.
Ce n'était pas sa taille ou sa forme qui retient son attention – de ce côté là, il était semblables aux autres phénix et poissons fluorescents qui l'entouraient. Mais c'était le feu dont il était couvert. Il ne s'agissait pas de simples flammes rougeâtre, comme le premier oiseau qui était apparu, mais d'un mélange d'une infinité de teintes. Il resplendissait. A chacun de ses mouvements, le feu semblait lui aussi se mouver, comme une entité à part entière.
Marzia n'arrivait pas à détacher ses yeux du spectacle. Ce dragon volant avait quelque chose de spécial - mais elle n'arrivait pas à mettre les mots dessus. Elle n'était pas non plus la seule à l'avoir remarqué : la plupart des habitants rassemblés sur la place suivaient eux aussi la machine du regard, tandis qu'elle traversait lentement le ciel.
Sans même s'en rendre compte, la jeune femme esquissa un pas en avant. Elle ne voulait pas perdre le dragon de vue. Ses yeux brillaient du reflet des flammes du dragon mécanique. Et enfin, elle comprit.
Oui, les flammes, pourtant composées de millions de teintes, resplendissait le vrai. Le réel. Mais ce n'était pas cela qui hypnotisait Marzia.
Tandis que les autres machines n'étaient que des copies de la réalité, ce dragon était tout le contraire. Il semblait vivant – ses yeux sombres reflétaient une lueur d'intelligence. Le souffle de Marzia se bloqua à cette constatation. Maintenant que cette idée avait surgit dans son esprit, elle n'arrivait plus à s'en détacher. Elle sentait le dragon la scruter.
— Qu'est ce que tu fais ?
Le contact de la main de Rhysa sur la peau nue de son bras la ramena brusquement à la réalité.
— C'est splendide, non ? Ce n'est pas à la capitale qu'on verrait un spectacle comme ça, reprit son amie.
Marzia esquissa un sourire, tentant de retrouver ses esprits. Mais ses yeux brillaient encore du reflet des flammes quand elle répondit :
— C'est fantastique.
Les machines se faisaient de moins en moins nombreuses dans le ciel. La jeune femme, soudainement piquée de curiosité, balaya le cercle des participants du regard. Elle devait trouver le créateur du dragon.
Un nouveau frisson la parcourut soudain : l'ambiance sur la place s'était définitivement trop ancrée en elle. Pourquoi devrait-elle trouver l'identité de celui manipulant le dragon ? La magie de la soirée resterait si elle ne cherchait pas à tout savoir, se rabroua-t-elle. Ses parents lui avaient toujours reproché sa curiosité. Après tout, n'était-ce pas mieux de garder un peu de magie dans un univers où tout avait une réponse ?
Mais ces pensées n'empêchèrent pas Marzia de scruter chacun des membres du cercle, à la recherche d'un indice. Quelque chose, n'importe quoi, qui prouverait l'identité du créateur du dragon. En vain.
Elle se tourna finalement vers Rhysa, qui discutait activement avec d'autres habitants. Cette dernière remarqua le mouvement de la jeune femme et son sourire s'étira, tandis qu'elle l'invitait dans la conversation :
— Alors, Wolf, à ton avis, lequel sera vainqueur ?
— J'ai beaucoup aimé le phénix et l'hippocampe transparent..., éluda-t-elle avant de chercher ses mots.
Les conversations animées autour d'elle parvenaient de nouveau à ses oreilles. La bulle qui l'avait entouré quelques minutes plus tôt avait complètement disparu : elle ressentait de nouveau le contact des habitants qui la frôlait. Elle respirait l'air clair et sain, si différent de celui de la capitale.
— Mais je crois que mon préféré reste le dragon.
Un garçon, celui qui parlait à Rhysa juste avant, poussa une exclamation et lui tapa dans la main. La jeune femme devina qu'il était le créateur de l'une des machines qu'elle avait cité. Soudain, sa respiration se ralentit.
— Merci ! C'est moi qui ai conçu l'hippocampe !
— Félicitation, alors, souffla-t-elle.
Rhysa secoua la tête d'un air amusé. Elle lança un regard en direction du cercle qui ne s'était pas dispersé.
— Qui a créé le dragon à votre avis ? Parce que je suis d'accord avec Marzia, c'était le plus impressionnant.
La jeune femme jeta un coup d'œil au créateur de l'hippocampe, mais il ne semblait pas vexé. Il approuva même les paroles de son amie d'un mouvement de la tête. Marzia suivit finalement le regard de Rhysa en direction des autres participants. Elle tenta de les dévisager un à un malgré les mouvements de la foule autour d'eux.
— Aucune idée. J'imagine qu'on le saura bientôt, s'il gagne, lança quelqu'un.
Marzia cligna des yeux quand des enfants passèrent en courant devant elle, l'arrachant à sa contemplation des participants. L'un d'eux tenait entre ses doigts un oiseau coloré miniature, qu'il lança devant lui. Un autre le contrôla à l'aide d'un minuscule écran.
Cette compétition semblait vraiment être un évènement important dans la ville. Elle glissa un regard vers son amie pour en savoir plus :
— La compétition a lieu chaque année ?
— Ouais. Il me semble que je t'avais raconté l'histoire de Zetenia, non ?
Marzia chercha dans sa mémoire, et ses souvenirs lui revinrent rapidement.
— La planète était destinée à abriter uniquement des usines de machines et de technologies, mais les familles des ingénieurs s'y sont tellement plu qu'ils ont décidé de rester et d'inviter leurs amis à venir aussi.
Rhysa hocha lentement la tête, le regard perdu dans le vague. C'était évident que cette histoire la passionnait. Marzia se rappela vaguement que son amie avait fait des études d'Histoire avant d'abandonner pour déménager ici. Visiblement, l'Histoire était une passion. Elle pouvait facilement comprendre : si ses parents ne l'avaient pas poussé à étudier les voyages interplanétaires, c'est probablement ce domaine qu'elle aurait choisi.
— Exactement. La plupart des habitants sont des descendants de ces ingénieurs et leur amis. Cette compétition représente un souvenir... la mémoire de l'histoire de la planète est célébrée. Non seulement ils rendent hommage à leurs ancêtres en continuant à créer des machines, mais c'est également un moyen de découvrir de nouveaux talents.
— Comme le créateur du dragon.
Marzia n'avait pas pu s'empêcher d'intervenir. Rhysa lui lança un regard amusé.
— Ouais. Le vainqueur gagne un voyage à la capitale où il peut visiter l'usine la plus perfectionnée de l'univers.
Cette déclaration balaya l'excitation que ressentait Marzia. Un voyage à la planète-capitale... ce n'était pas vraiment un prix rêvé, à son avis. Elle se réprimanda rapidement : pour un simple habitant de Zetenia, c'était une opportunité professionnelle en or. Tout le monde n'avait pas des parents haut-fonctionnaires et une place reservée dans le monde du travail.
— Demain, on continue de te faire découvrir les meilleurs endroits de la ville... et crois moi, celui là va être intéressant.
Rhysa glissa un regard brillant à ses amis, qui approuvèrent. La jeune femme haussa un sourcil : même si elle ne les connaissait que depuis une semaine, elle se doutait qu'ils n'avaient pas la même conception de ce qui était « intéressant » qu'elle. Mais elle s'était promis de découvrir tout ce qu'il y avait à découvrir durant cette année de liberté, et rien n'allait l'arrêter.
Après avoir salué le groupe une dernière fois, Marzia traversa la foule de moins en moins dense pour retourner chez elle. Elle habitait hors du centre-ville, un peu plus haut, mais le voyage à pied ne la dérangeait. Ses pensées étaient toujours occupées par le spectacle splendide auquel elle venait d'assister.
Le regard dans le vague, marchant prudemment pour éviter de bousculer quelqu'un, Marzia ne sut pas ce qui lui fit relever la tête. Mais ses yeux se posèrent sur une silhouette au milieu du cercle des participants. Son attention était fixé sur la tablette entre ses mains. Il redressa la tête, et son regard croisa brusquement celui de la jeune femme.
La moitié de la place les séparaient. Et pourtant, Marzia fut persuadée de voir des flammes se refléter dans ses yeux. Les flammes aux millions de teintes, qu'elle reconnut rapidement.
Un groupe passa devant lui et brisa leur regard. Marzia sortit de sa torpeur puis reprit son chemin, sans oser jeter un coup d'œil derrière elle.
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