Chapitre 1 : un pacte avec la mort

Cinq mois plus tard, quelque part, dans un hôtel de Baltimore...

La cocaïne a un goût de craie, putain...

Je frappe violemment le rebord du lavabo du plat de ma main et je me dis qu'avec ma chance... c'est peut-être ce que le dealeur m'a donné. Après tout, je suis le gars que tout le monde peut baiser, apparemment...

Ouais. Voilà où j'en suis.

Assis sur le rebord du bain de ma chambre d'hôtel, je me redresse vers le miroir où j'y croise par horreur mon reflet.

Ça va faire cinq mois que j'ai tout perdu. Cinq mois depuis que mon compte bancaire s'est vidé d'une traite et que ma vie, telle que j'ai voulue qu'elle soit, avec ses artifices et son engouement pour la dépravation, m'a laissé palettant sur le carrelage de ce que je peux aujourd'hui considérer comme mon chez-moi. Et peut-être que ce sera encore le cas pendant quelques semaines, tout au plus... Avant que je ne finisse à la rue pour de bon.

Et à en juger ce que me renvoie ce fichu miroir...

J'ai déjà l'apparence qui va avec mon futur mode de vie.

Durant une seconde, je vivais au sommet de l'Everest... Ce qu'on oublie de dire, c'est qu'à force d'avoir le souffle coupé... 

On s'écrase en beauté.

D'un revers de pouce, j'essuie mes narines poudrées et me redresse pour passer de l'eau sur mon visage. Un grognement furieux se détache de mes lèvres à peine recouvertes de peau, mais celui-ci se renforce lorsque je me vois à nouveau. Mes cheveux blond foncé sont tiraillés dans tous les sens et les quelques mèches qui restent collées à mon front sous le coup de l'eau, sont aussi noires que les pupilles qui ont chassé le bleu de mes yeux. Ma chemise blanche ouverte sur mon torse vibrant sous l'adrénaline qui fuse déjà dans mes veines, pend comme la loque que je suis.

Il n'y a malheureusement pas assez de drogue dans le monde pour me faire oublier la raison de ce changement de style de vie si brusque.

J'enfonce donc avec rage le petit sachet dans la poche arrière de mon jean noir et regagne ma chambre qui est à peine illuminée par un chandelier jaunâtre sur lequel j'essaye de m'accrocher.

Ce n'est surement pas prudent de claquer ses dernières économies dérobées à ma ruine dans un hôtel de luxe... Mais franchement, je n'en ai rien à secouer. Pas plus que des oreillers éventrés qui tarissent la chambre aux murs, draps et meubles rouges de plumes blanches. De mes draps rejetés sur le côté d'un matelas creusé. Des dizaines de boîtes de pizza et de nourriture chinoise qui jonchent le sol et des cadavres de bouteilles de whisky.

Parce que cette nuit, je vais quitter ce monde.

Je m'assois si brutalement sur mon lit que d'autres plumes se mettent à voler, mais je les ignore fermement et attrape un paquet de cigarettes près d'un cendrier qui déborde de mégots. Mais alors que je porte mon briquet à ma bouche pour en allumer une, je grogne de douleur.

Mes jointures violacées qui sanguinolent encore grincent à chaque mouvement que je fais... Mais je ne regrette rien. Au point où un sourire s'immisce enfin sur mes lèvres.

C'est à coups de poings que je suis allé confronter Judd. Cette enflure m'avait dépouillé. Ruiné. Saccagé. Et comme si ça ne suffisait pas, il m'a renvoyé sans aucune raison valable. 

Sauf que se voir expulsé de sa propre maison et finir par vivre dans un hôtel comme un rat avec aucun projet d'avenir... Ça pousse à la vengeance. 

Et peut-être que j'avais trop bu ce soir-là, quand je l'ai vu sortir d'un restaurant étoilé, sa fiancée d'au moins trente ans plus jeune, pendue au bras, en attendant que le valet leur remette les clefs d'une Porsche étincelante... Peut-être, que c'était le sourire arrogant qu'il affichait lorsqu'il m'avait aperçu depuis l'autre bout de la rue...

Ou peut-être était-ce parce qu'il a osé prétendre m'ignorer après m'avoir adressé le plus fourbe des sourires. 

Si je n'allais pas me tuer ce soir, j'enroulerai l'ordre de restriction qu'il a lancé contre moi, dans une boule inconfortable et le lui enfoncerai bien profondément dans le cul. J'achèverai ce que mes poings ont laissé sur son visage de traître... Et bien plus encore.

À la place, je tire de sous mon oreiller une arme que je contemple en expirant lourdement la fumée de ma cigarette. 

Je n'ai jamais pensé à la mort, auparavant. Surement parce que la seconde avant la naissance de cette idée macabre, je me sentais comme un dieu... 

J'avais Skylar Saint-George pendu à mon cou... Un compte bancaire qui allait doubler de volume... Et une vie faite de pierres précieuses et autres folies de riche qui m'attendait.

Et aujourd'hui, c'est ici que je croupis.

Je renifle brutalement, sentant le goût du sang envahir l'arrière de mon œsophage et presse le canon contre ma tête. Mon doigt n'est pas encore sur la détente, mais je veux juste sentir ce froid si fatal se dissoudre dans ma tempe. 

Pendant quelques secondes.

C'est tout ce que je demande.

Je ferme les yeux et essaye de reconstruire le schéma qui m'avait prédestiné à ce moment.

Le départ de chez mes parents. Un travail de courtier à la nouvelle branche de Bourse qui s'est ouverte à Baltimore. L'appât du gain, l'argent qui coulait à flots, les filles au cul d'enfer qui savent comment rendre dingue...

Et tout ce que ça me provoque maintenant, c'est un éclat de rire.

C'était si prévisible... Comment ai-je pu faire confiance à Judd, alors qu'il était comme moi ? Un homme fourbe, assoiffé de richesses qui ne reculait devant rien pour obtenir ce qu'il voulait ?

J'espère qu'il se posera cette question, autant que moi, quand il regardera la marque que je lui ai laissé sur le visage à coups de poing...

Je dépose finalement l'arme à mes côtés et pince ma cigarette entre mes lèvres pour attraper la bouteille de Whisky posée sur ma table de chevet. Comme si une audience invisible me scrutait depuis les pénombres de ma chambre d'hôtel, je lève le fond du liquide ambré dans leur direction et marmonne :

— À ma stupidité. À vous, les débris de mon succès. Je trinque aux rêves qu'on s'apprête à réaliser et la brutalité du réveil qui nous ramène à la réalité. Au whisky, et à l'anesthésie.

J'écrase ma cigarette dans une colline de cendres froides, attrape quelques pilules qui sortent d'un flacon orange et les avale avec une rasade d'alcool.

— Si je crève, jetez mon sang dans la figure de cet enfoiré de Judd...


D'un pas lourd, je titube jusqu'à une table basse et débarrasse le bordel qui la recouvre d'un coup de bras. Je tends la main pour rattraper mon flingue, sort une balle de ma poche et la glisse à l'intérieur.

Mon cœur n'a jamais autant pulsé. Et après tout, c'est normal non ? Dans un instant, cette chambre sera encore plus rouge.

Là où j'irai, ma ruine ne me suivra pas.

D'une main tremblante, j'aligne une dernière raille de cocaïne sur la table et ne prends même pas la peine de la couper.

Ça se termine ici et maintenant.

Les jeux qu'on peut jouer.

Les enflures qu'on peut rencontrer.

La vie qu'on choisit d'abréger.

Je baisse alors la tête, l'estomac noué, mais alors que je m'apprêtais à sniffer...

Trois coups secs s'abattent sur la porte.

Comme si mon âme quittait mon corps, je me redresse dans un bon en lâchant la lame de rasoir que j'utilisais pour aligner ma coke.

C'est quoi ce bordel ?

Je scrute ma porte, mais les coups ne reviennent pas.

Ça y est, je déraille complètement.

Je me reconcentre sur mon dernier repas, mais alors que je me baisse pour retrouver ma lame, on frappe à nouveau. La surprise me fait sursauter et je me prends le rebord de la table dans la tête.

— Bordel !

Aveuglé par la rage, je m'appuie sur un coude en me massant le front et hurle :

Qui que vous soyez, foutez-moi le camp !

Je tends la main vers mon sachet, bien déterminé à ne pas quitter le chemin que j'ai choisi d'emprunter ce soir, mais ma menace semble avoir fait mouche.

On peut même plus crever tranquille...

Dans une nuée de jurons, j'enjambe ma table basse et ouvre la porte avec fureur.

Quoi ?!

Mon sang ne fait qu'un tour, lorsque mon regard se pose sur l'intrus.

Enfin... L'intruse, plutôt.

Une main glissée dans son dos, l'autre arquée pour frapper un autre coup, elle se redresse avec une lenteur qui souligne chacun de ses traits fins... Mais surtout du sourire qui fait plisser des fossettes discrètes.

Je suis en train d'halluciner. Ce n'est pas possible autrement.

Robe écarlate et rouge à lèvres matte. 

Dépravation et luxure.

Cou élégant et yeux plus noirs encore que la nuit derrière elle.

Menace et danger.

Bonsoir, Zade. Je peux entrer ?

Avec une tendinite, tout est compliqué, qui aurait cru qu'un pouce est si utile dans la vie ? 😭😭

Bref, désolée pour ce retard, j'ai eu une journée terrible hier à cause de ça et aujourd'hui c'était médecin ! 😭

Mais passons au chapitre, parce qu'on s'en fout clairement de ma vie 😂😂😂

• Zade est au plus bas ! Et ce n'est pas la drogue, l'alcool et le suicide qui vont le remettre sur pattes. Mais bon, il n'a pas trop l'air de le vouloir ! En même temps, sa vie vient de s'écrouler sous ses pieds et ça... 😬

• Il vit dans une belle débauche, hein ? Imaginez un peu le boulot qu'auraient les femmes de ménage si ce con décidait de fuir ses responsabilités ! (comme je vous l'ai dit : je HAIS les capitalistes 😂😂)

Prochain chapitre ce soir ! Mais qui est donc cette fatalité enrobée de rouge qui vient de faire irruption dans la vie de Zade ? Et dans quels genre de pétrins va-t-elle encore l'entraîner ? 🤔

Je vous fait de gros bisous, à ce soir ! 🧡

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