Austin - Copenhague, 26 août 2024
Les rues de Copenhague sont toutes plus belles les unes que les autres, mais la rue qui longe le canal Nyhavn les surpasse largement. Avec ses maisons aux couleurs éclatantes et les rives où sont amarrés de petits bateaux, j'ai l'impression de pouvoir respirer pour la première fois en deux mois.
Pourtant, la présence des quatre gardes du corps derrière nous me rappelle que je n'ai pas le droit de baisser la garde. Tout comme Rose et Ivy, qui doivent marcher plusieurs mètres sur notre droite en espérant que ça passe inaperçu si des paparazzis nous suivent.
D'ordinaire, c'est Ivy qui m'évite après un dérapage entre nous. Or, aujourd'hui, c'est à mon tour, et je tente d'éviter de tourner les yeux vers elle par peur des pensées qui pourraient surgir dans ma tête.
— On pourrait faire le musée national, propose Isaac lorsqu'on décide de s'arrêter à la terrasse d'un café. C'est à vingt minutes à pied.
Je suis tenté de me moquer en le voyant avec le GPS de son téléphone devant lui, mais c'est le seul qui tente encore de sauver les meubles et de rabibocher tout le monde. À la table d'à côté, les filles haussent les épaules pour nous signifier qu'elles nous suivront dans tous les cas, mais pour être honnête, je ne suis pas super emballé par l'idée.
— Y'a pas autre chose ? lancé-je en me penchant pour voir l'écran.
Je dézoome légèrement la zone et fais glisser mes doigts pour déplacer la carte, puis me tourne vers Ivy.
— Les jardins botaniques, c'est ton truc non ?
Elle me lance un regard noir, et je sais qu'elle a mal interprété mes paroles. Après notre dispute à Barcelone, Warren est allé la chercher dans toute la ville pour finalement la retrouver dans le jardin juste avant la fermeture, et j'ai bêtement pensé qu'elle devait aimer les plantes.
— Sinon, il y a un château à côté, ajouté-je en grimaçant. À vous de voir.
— Je vote pour le jardin, marmonne Ethan sans se dérider pour autant. Histoire de pouvoir vous semer plus facilement.
Les autres cèdent également, et on reprend la route à pied après avoir terminé nos boissons. Les dix-sept minutes de marche prévues se transforment en vingt-huit alors que plusieurs petits groupes n'arrêtent pas de nous aborder, les filles ronchonnant en essayant de se mettre dans un coin reculé. Isaac refuse de signer les seins d'une nana en rougissant jusqu'aux oreilles alors que Jack, lui, ment une nouvelle fois et dit à une fan que notre prochain album est en cours d'écriture.
Bien que ça fasse huit mois qu'aucun de nous n'a pris un stylo et un papier pour gribouiller des paroles à deux balles.
De mon côté, je me moque discrètement lorsque Ethan se fait foudroyer du regard par Rose alors qu'il accepte une étreinte non loin de l'arrivée. Finalement, avoir les filles avec nous ajoute une touche d'amusement dans une tournée qui aurait, sans leur présence, été morose.
— On a deux heures avant que Ben débarque, observé-je lorsque nous finissons par passer l'entrée du jardin botanique.
— Vas-y, plombe un peu plus l'ambiance, toi !
Je dévisage Rose sans comprendre pourquoi elle m'offre sa mauvaise humeur, puis cherche une explication en rattrapant Ivy.
— Ethan refuse toujours d'annoncer leur couple sur les réseaux, m'apprend-elle en se concentrant sur une plante dont j'ignore le nom. Du coup, elle t'en veut de jouer le jeu aussi facilement alors que rien n'est réel entre nous.
Ouch. Ça pique.
— Et que son mec m'ait refait le portrait, ça, elle s'en tape ? feins-je d'être vexé.
Ivy roule des yeux alors que je remarque un type louche traîner plusieurs mètres plus loin, qui jette des coups d'œil dans notre direction bien trop souvent pour être un simple touriste. Je serre les dents avant d'attirer la blondinette à moi, mes bras entourant sa taille, et me penche pour lui chuchoter à l'oreille :
— Paparazzi juste derrière toi.
— Et tu te sens obligé de m'étouffer pour me prévenir ? ronchonne-t-elle, me faisant sourire.
Je profite de la situation pour déposer mes lèvres dans ses cheveux, alors que l'autre con sort son appareil photo pour nous mitrailler. Puis, tout en la gardant contre moi, je fais quelques pas vers la droite pour rejoindre le reste du groupe et desserre légèrement mon étreinte.
— Il aurait pris ton visage en photo, l'informé-je enfin. Et je te signale qu'on est censé être en couple, toi et moi.
— D'ailleurs, j'attends encore mes places en carré or, mentionne-t-elle lorsqu'elle se détache de moi.
Je râle en laissant tomber ma tête contre son épaule, elle me repousse et croise les bras devant elle avant de me tourner le dos.
— Elles attendent sagement dans ma valise, Salazar, lancé-je alors qu'elle a déjà pris de la distance. Mais tu vas devoir être un peu plus sympa pour que je te les donne !
Je l'entends rire d'ici, mon visage se fendant d'un large sourire alors qu'elle balaie ma demande d'un geste de la main.
Dans le jet privé qui nous amène à Prague, seule Harper ne semble pas se rendre compte de la tension à couper au couteau. Elle nous dévoile le planning pour le mois de septembre, qui ne se résume pas à grand-chose : repos dans une villa en Australie, petit tour pour voir des kangourous, lives Instagram et TikTok déjà planifiés et interviews pour la télévision et la radio australienne. Je ne retiens que la toute première partie de la liste.
— Et pitié, profitez-en pour discuter sans vous foutre un poing dans la gueule, ajoute Ben en s'adressant majoritairement à Ethan.
Aucun de nous n'ose répondre, pas même le concerné. Ça fait pourtant quinze jours que le cauchemar des dates à Munich est terminé, mais les cris continuent en coulisses alors que sur la scène, on tente de donner le change et de montrer ce que tout le monde attend de nous : un groupe uni, qui s'amuse sous les projecteurs.
Je m'enfonce un peu plus dans mon siège et regarde les nuages qui cachent les reliefs plus bas. On devrait se prendre une flotte de malade en arrivant sur le lieu de notre dernière date en Europe, ce qui jouera très certainement sur mon humeur. Je déteste la pluie. Faut dire que la météo de Miami est clémente la majeure partie du temps, et que j'ai grandi avec le soleil et la chaleur.
— Je vous préviens de suite, ce soir, on garde les chambres comme elles doivent être. Vous vous démerdez pour la prochaine partie de la tournée, mais là, vous avez déjà dépassé mon quota de patience prévu jusqu'en décembre.
Je lève les yeux au ciel, me prends je ne sais quoi dans la tronche et proteste en offrant une grimace à Harper – qui ne prend pas la peine de s'excuser et reconcentre son attention sur les deux énergumènes qui ont déclenché la guerre puérile entre nous.
Las d'entendre toujours la même chose en boucle, je finis par sortir mes écouteurs et lance une série sur mon téléphone, bien que je n'aie aucun souvenir de l'épisode précédent.
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