Chapitre 21 : "La haine est une forme d'amour, pas vrai ?"


Mon cœur s'accélère et la sensation de m'être faite piégée monte en moi.

-Qu... Quoi ? Mais ... non !

Je n'ai même pas le temps de réfléchir à une potentielle rebuffade qu'il m'attrape par la main et m'emmène dans la salle, en direction de la déesse brune qui, accoudée à un bar, semble en pleine discussion avec de grands hommes d'affaires.

A la manière dont ils la regardent, je comprends qu'ils ne cherchent pas uniquement à parler business avec elle. Mais son attitude reste professionnelle, et elle ne montre aucun signe de faiblesse. Elle sait ce qu'elle veut, et ça se dégage de sa personne.

Adam conserve ma main dans la sienne, et la sensation de sa peau douce et chaude contre la mienne me projette des ondes de bien-être inattendues.

Lena, ma chère Lena.
Tu es incorrigible.

Il se plante devant la fameuse "Alessandra" qui, se rendant compte de sa présence, décide de congédier tous les hommes attroupés autour d'elle. Adam leur lance un regard mauvais qui a le don de me faire froid dans le dos. Il semble laisser Alessandra gérer la situation –chose, je dois le dire, plutôt étonnante– mais ne semble pas enchanté par la présence de tous ces rapaces. 

L'un d'entre eux –qui avait posé sa main sur l'épaule de la déesse brune– reçoit un râle de rage de la part d'Adam. A leur place, j'aurais détalé en moins de deux secondes.

C'est d'ailleurs ce qu'ils finissent par faire. Ils obtempèrent tous, et ce sans rechigner. L'instant d'après, nous ne sommes plus que tous les trois, et Adam se décide enfin à se détendre. Il rive un regard de reproche en direction de la jeune femme qui, en guise de réponse, lui lance un immense sourire.

Il se détend instinctivement. Je regarde la femme, ébahie ; aurait-elle des super-pouvoirs ? A moins que ce ne soit réellement une déesse. Qui d'autre pourrait arriver à obliger Adam à se détendre en moins de deux secondes ?

-Alessandra, la salue-t-il en lui lançant un clin d'œil amusé.

-Adam, répond-t-elle avec un léger accent italien.

Je plisse les yeux, étonnée. Je pensais que tout le monde le connaissait sous le nom de "Marc". Ces deux-là doivent être vraiment proches. En y regardant de plus près, la complicité entre les deux est indéniable. Elle le couve du regard et il lui sourit avec une telle sincérité que j'en éprouve un pincement au cœur.

Bon sang, qu'est-ce que je fais ici ?

Alessandra semble alors réaliser ma présence, et son regard se fige sur le mien, puis sur nos deux mains toujours entrelacées. Il m'a traînée de force ici, et le contact de nos deux peaux était si naturel que je ne me suis pas rendue compte que nous étions toujours dans cette position.

Je retire la mienne automatiquement, peu amène à m'attirer les foudre de la sublime brune qui me fait face.

Etrangement, son regard sur nous n'est pas colérique, ni hargneux, et encore moins envieux –en même temps, pourquoi cette magnifique jeune femme serait envieuse de moi, Lena Miller, jeune maladroite au comportement pré-pubère à votre service ?

Elle a de beaux yeux en amandes et de très longs cils qui s'allient à merveille avec son teint halé. Je ne lui donnerais pas plus de vint-cinq ans et pourtant, elle possède cette sérénité quasi palpable des gens beaucoup plus âgés.

Elle a le profil d'un mannequin international, et la poigne des femmes d'Italie. Je comprends qu'Adam ait été charmé par elle. Elle possède un magnétisme et une assurance qui font d'elle une personne sur laquelle on se retourne.

Son regard délaisse nos mains –qui ne sont maintenant plus en contact– pour s'attarder sur mon visage. Mais une fois de plus, aucune négativité ne s'en ressort. C'est même le contraire ; elle semble me couver du regard, et m'analyser pour tenter de comprendre qui je suis vraiment.

-Alessandra, reprend Adam en tournant son regard dans ma direction. Je voudrais te présenter Lena.

Je fusille Adam du regard. Dans quelle situation a-t-il encore décidé de me fourrer ?
Je me retourne vers Alessandra en lui lançant un sourire penaud. Je n'ai rien demandé, certes, mais elle non plus. J'aimerais m'excuser de l'imbécilité de son compagnon, mais j'aurais peur qu'elle le prenne mal. 

J'aurais également peur qu'elle s'en prenne à moi. Ses talons sont si hauts qu'ils feraient de magnifiques armes de pointe. Et je ne tiens pas à me retrouver borgne.

Ses yeux s'illuminent, et sa bouche s'étire en un rictus proche de l'amusement. Sa réaction ne manque pas de m'étonner, mais je fais mon possible pour le cacher et rester stoïque.

-Ah, Lena ! s'exclame-t-elle en s'avançant pour me prendre dans ses bras. Enfin je vous rencontre !

Elle enroule délicatement ses bras autour de mes épaules pour me saluer, et je fais de même. En plus de le rendre un peu craintive -on ne sait jamais ce qu'elle pourrait me faire- ce genre d'étreinte me mets toujours mal à l'aise.

Je n'ai jamais trop aimé le contact avec les autres -à part évidemment si on parle de Taylor Lautner ou de Jaimie Dornan. D'ailleurs, je pourrais amplement me contenter de Theo James !

Pour en revenir à mon problème, certaines personnes sont très démonstratives et aiment se câliner pendant des heures, se toucher, et ce même avec des inconnus !

Moi, je préfère en rester au stade du « Madame » et de la poignée de main ferme.

Alessandra se recule, envoyant ses effluves de parfum directement dans mes orifices nasaux.
En plus d'être magnifique, de posséder un corps à se damner et un caractère de guerrière, elle possède une odeur florale que même dans mes plus beaux rêves, je n'aurais jamais.

J'essaie encore de me débarrasser de mon haleine matinale.

Ses paroles me reviennent alors à l'esprit.
« Enfin, je vous rencontre ! »
Enfin ? Ce qui signifie qu'Adam lui a déjà parlé de moi ?

Je jette un regard noir à Adam qui, de côté, observe la scène avec grand intérêt. Bien évidemment, toute cette situation doit le mettre en grande joie !
Il a dû se réveiller ce matin en pensant : « Pourquoi ne pas ridiculiser Lena une fois de plus aujourd'hui ? »

-Lena, dit-il en me lançant un regard amusé, je vous présente Alessandra...

Juste ce qu'il me fallait dans ma vie. Je suis sûre qu'il fait ça uniquement pour que je puisse me comparer à la sublime déesse et me sentir aussi nulle qu'une ...

-... ma sœur.

Il pince les lèvres, tentant de retenir un fou rire.
Ma bouche s'ouvre légèrement. Sa... sœur ? Je secoue la tête, confuse.

A y regarder de plus près, il est vrai qu'ils possèdent quelques ressemblance physique. La forme du visage, le teint halé, la beauté hypnotisante,... et les yeux couleur chocolat.

Je lance un regard furieux à Adam, priant secrètement pour qu'il soit foudroyé sur-le-champ. Je rougis un peu, honteuse d'avoir marché dans son jeu. 

-Votre....

Je referme la bouche, incapable de terminer ma phrase. Sa ... sœur ? Ce que j'ai pu être stupide, bon sang !

Quelle ironie ! Moi qui priait pour que sa première copine -qui s'est finalement avérée être Judy- soit sa sœur, voilà maintenant qu'il me la présente réellement.
Le karma. C'est le karma.

Un coup d'œil en direction d'Adam m'informe qu'il ne manque pas une miette de la situation, et qu'il prend beaucoup de plaisir à s'en moquer.

Je me racle la gorge et me ressaisis. Alessandra me fixe du regard, avant de jeter un coup d'œil à son frère qui n'a pu retenir un sourire moqueur. 

Elle le regarde, me regarde, puis lève les yeux au ciel. 

Moi, je ne connais pas Adam depuis si longtemps que ça. Evidemment, pour elle, c'est bien le cas. Et elle semble avoir compris qu'il tentait de me faire tourner en bourrique.

Étonnamment, elle lui lance un regard affectueux avant de lever les yeux au ciel, l'air de me dire « ne vous inquiétez pas, un jour ça lui passera ». Lorsqu'elle reprend la parole, elle ne peut empêcher un sourire de s'étendre sur ses lèvres.

Le sourire d'une sœur fière des imbécillités de son frère.

-Je suis enchantée de faire votre connaissance, Lena, dit-elle en plongeant ses yeux magnifiques dans les miens. Cette fête est tout simplement splendide, vous avez fait un travail admirable !

Je lui souris en tentant de cacher mon étonnement devant un tel élan de gentillesse de la part d'un membre de la famille Marciello.

-Euh...Merci.

Je me racle la gorge pour cacher ma gêne.

-Et moi, alors ? demande soudainement Adam d'un air envieux.

Il me lance un regard mauvais. Quoi ? Ce n'est pas ma faute si sa sœur sait reconnaître le travail bien fait. 

Je souris un peu, amusée par le caractère jaloux d'Adam. Il aime que toutes l'attention soit rivé vers lui, et vers personne d'autre.

Sa sœur balaie sa remarque d'un geste de la main, l'air d'avoir l'habitude des demandes de reconnaissance de son frère.

-Tu n'as rien fait d'extraordinaire à part dresser une liste d'invités, et choisir la musique. Deux choses pour lesquelles –fort heureusement – tu es incroyablement doué.

-Merci du compliment, répond Adam sans cacher son mécontentement.

Mais derrière son regard se lit sa joie de s'amuser de la sorte avec sa sœur. Ce ne sont que des petites disputes entre frères et sœurs, le genre de dispute que j'aurais aimé connaître durant mon enfance.

-Comme si tu en avais besoin, fait remarque Alessandra en me lançant un clin d'œil.

Je ne peux m'empêcher de rire devant la justesse de cette phrase.

-Je n'aurais pas mieux dit ! je m'exclame en souriant à Alessandra.

Cette dernière sourit à pleines dents.

-Ah ! s'exclame-t-elle en direction de son frère. Tu vois !

Adam soupire et passe une main sur son visage, comme exaspéré de nous voir toutes les deux lui faire face.

-Lena, dit-il en secouant la tête d'un air mécontent, vous êtes supposée me soutenir, pas m'enfoncer encore plus.

Je garde la tête haute, heureuse d'avoir enfin repris le contrôle de la situation. S'il croit que je vais le sortir de son pétrin sachant ce qu'il m'a fait –et ce qu'il me fait toujours– subir à longueur de journée, il se met le doigt dans l'œil jusqu'à la rétine.

-Je ne suis supposée rien faire d'autre que vous battre dans cette compétition pour le poste de directeur, j'assène, fière de moi.

Alessandra lâche un sifflement qui ne manque pas d'énerver Adam. Elle semble impressionnée et moi, je n'en suis que plus heureuse.
Il plonge son regard dans le mien, et son doigt fait un mouvement entre nous deux lorsqu'il dit :

-Je vous rappelle que sur ce projet, nous sommes en équipe.

Je lève les yeux au ciel. On est en équipe quand ça l'arrange. La dernière fois aussi c'était supposé être le cas. Mais ça ne l'a pas empêché de me voler mon investisseur, Monsieur Aldwin, et de lui faire signer les papiers à ma place.

Bon, c'est vrai qu'il a su se faire pardonner par la suite en avouant tout à notre patron.
Mais tout de même !

-Quand ça vous arrange... je réponds doucement, comme pour moi-même.

Ma remarque lui arrache une mimique d'étonnement, mais je ne lui laisse pas la possibilité de répliquer.

-Etant donné que vous avez déjà tenté de m'avoir, je préfère encore me débrouiller toute seule !

Alessandra s'esclaffe, provoquant la colère d'Adam qui regard autre part. Il serre la mâchoire, mais une brève étincelle de malice traverse son regard. Je sais que d'un côté, il adore quand je lui répond.

-Je l'aime bien, glisse Alessandra à l'oreille d'Adam.

Ce dernier se rebiffe et je me retiens d'exploser de rire.
Tel est prit qui croyait prendre.

-Ça m'aurait étonné, siffle-t-il entre ses dents.

Je lance un regard de remerciement à Alessandra qui me répond par un clin d'œil amical.
Moi aussi, je l'aime bien.

La sonnerie du portable d'Alessandra retentit. Elle le sort de son sac à main et lit le message qu'on lui a laissé.

-Je suis désolée mais je vais devoir y aller, dit-il en nous lançant un sourire radieux. Ça a été un réel plaisir de vous rencontrer, Lena, ajoute-t-elle à mon intention. J'espère que nous aurons le plaisir de nous revoir !

-Moi aussi, je réponds avec enthousiasme.

Elle fait mine de s'éclipser mais se retourne au dernier moment en direction de son frère. Elle fronce les sourcils, arborant une expression sévère sur le visage.

-Ne fait pas l'idiot, dit-elle en lui lançant un regard lourd de sous-entendus.

Il soupire longuement, et lève les yeux au ciel.

-Ce n'est pas mon genre, lui répond-t-il en lui lançant un clin d'œil.

Elle pouffe en lui lançant un regard emplit de fierté. Elle fait demi-tour, et s'éclipse rapidement.

Nous restons tous les deux là, figés, sans rien faire, jusqu'à ce qu'elle ait totalement disparu de la salle. Un silence gêné s'installe entre nous deux ; et j'ai une sainte horreur de ces moments où personne ne sait quoi dire. Alors je prends la parole en première.

-Je l'aime bien, je dis en essayant de ne pas regarder Adam dans les yeux.

Il lève les yeux au ciel et un sourire immense arbore son visage.

-Ça m'aurait étonné.

Ses yeux s'illuminent alors d'un éclat malicieux. Une fois de plus, je ne peux m'empêcher de penser qu'il manigance quelque chose, et que ce n'est rien de bon pour moi.

-Vous savez ce que vous aimerez aussi ? continue-t-il comme si de rien n'était. Dîner avec moi.

Je me retiens de pouffer. J'ignore sa remarque et entreprends de m'éloigner de lui le plus vite possible.
Je fais demi-tour et pars à la recherche de mes amis que j'ai dû abandonner depuis un bon moment.

-Hors de question, je réponds fermement en voyant qu'il me suit, bien décidé à ne pas lâcher l'affaire.

-Disons, demain, 19h00 ? poursuit-il derrière moi, comme si de rien n'était.

Je me retourne d'un coup, l'obligeant à s'arrêter net devant moi.

-Vous m'avez bien entendue ? Je vous ai dit non.

-Vous avez raison, dit-il en acquiesçant plusieurs fois.

Je soupire de soulagement, heureuse qu'il ait comprit le message.

-20h00 c'est bien mieux, ajoute-t-il d'un air entendu.

Je lève les yeux au ciel et reconcentre mon attention dans la recherche de mes amis que j'avais, un peu plus tôt, laissés devant le bar. J'avance dans cette direction, ignorant l'homme à l'attirance magnétique qui me suit.

-Vous êtes un grand malade ! je m'exclame sans prendre la peine de me retourner.

Ils ne sont pas au bar. Je marque un temps d'arrêt. Mais où ont-ils bien pu passer ?
Adam en profiter pour me contourner et venir me faire face.

-Malade de vous, Lena...

Il m'exaspère. Son regard est emplit de séduction, et je sais pertinemment qu'il cherche à me faire céder.

-Préférez-vous que je vienne vous chercher, ou devrais-je vous envoyer une voiture ?

Je plonge mon regard dans le sien, déterminée à me débarrasser de lui.
Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez lui ? Ne comprend-t-il pas la signification du « non » ?

-Si vous avez des problèmes d'audition, vous devriez songer à consulter.

Il s'esclaffe une fois de plus, amusé par ce petit jeu. Son rire magnifique qui m'envoi des papillons dans le ventre. Son hilarité est belle à voir ; elle me donne toujours envie de me joindre à lui. Je plisse la commissure de mes lèvres, refusant de laisser ne serait-ce que l'esquisse d'un sourire s'y inscrire.

Adam continue sa tirade, insensible à mes réticences.

-Nous sommes bien d'accord que si vous refusiez de sortir avec moi, c'était uniquement à cause d'Alessandra.

Son sourire est grand. Il a l'air d'un chat qui aurait pris au piège une souris.
Je m'arrête, tentant de réfléchir un instant à une parade.

-Oui, mais...

-Et maintenant que vous savez que c'est ma sœur, dit-il sans me laisser le temps de finir ma phrase, il n'y a plus rien qui vous empêche d'accepter.

Merde.
Il se rapproche d'un pas ; son geste me donne l'impression d'être prise en étau.
Malgré tout, je m'astreins à garder mon calme et je garde le silence en attendant de trouver une réponse imparable.

-Je suis beau, intelligent, un très bon parti... poursuit Adam en énumérant sans modestie toutes ses qualités. L'homme parfait pour vous, conclut-il, fier de lui.

Une fois de plus, je lève les yeux au ciel.

-Et mon avis ne compte pas ?

Ce n'est pas la première fois qu'il essaie de s'imposer à moi en me montrant qu'il est l'homme idéal –même si ce n'est évidemment pas le cas.

Enfin... Sur ce sujet, je suis encore en pleine réflexion.

Compétitif, séducteur invétéré, sans morale ni éthique... Non. Non, Lena ; tu mérites mieux. Même si une autre partie de moi clame que jamais je ne mériterais d'avoir un homme si beau en tant que compagnon.

Il pose un doigt sur son menton, le front plissé comme s'il réfléchissait réellement à la question. Il marque un temps d'arrêt avant de déclarer :

-Non.

Il sourit à pleines dents, et pourtant, je vois dans ses yeux la sincérité de sa réponse durement murie.

-Très bien, je réponds en reprenant ma recherche.

Je n'ai pas que ça à faire. Je perds mon temps à essayer de ... je ne sais même pas ce que j'essaie de faire ! Pourquoi est-ce que je continue à lui parler ? Pourquoi ne puis-je pas tout simplement lâcher l'affaire ?

Derrière moi, Adam me suit une fois de plus. Mais cette fois-ci, il semble plus tendu qu'à l'habitude. Son amusement a laissé place au sérieux.

-Vous acceptez de sortir avec moi ? demande-t-il, une pointe d'espoir dans la voix.

Mes yeux s'ouvrent comme des soucoupes, mais je continue à avancer, sachant pertinemment qu'il ne peut pas voir mon visage. Il a vraiment pensé que j'accepterais sa demande alors qu'il n'a rien fait d'autre que me suivre toute la journée ?

Je ne peux m'empêche de m'esclaffer.

-Même pas en rêve.

Je perçois enfin Marcus ; il est en grande discussion avec Juliette dans les jardins extérieurs, près des tables sur lesquelles les apéritifs ont été disposés. Ivanna n'est pas très loin, et tient toujours compagnie à Peter qui semble écouter chacune de ses paroles avec grand intérêt.

Un instant, une onde de désespoir s'empare de moi ; pourquoi Adam ne peut-il pas être un peu comme Peter ? Non, moi j'ai la chance d'avoir eu droit à la conduite psychopathe de Monsieur Marciello.

A la vue de Marcus, si calme et si à l'écoute de Juliette, ma colère monte. Un scénario parfait se dessine alors dans mon esprit.

Je me retourne vers Adam qui arbore une expression indéchiffrable sur le visage.

-Je vois déjà quelqu'un en ce moment.

Je pince les lèvres, fière de moi. S'il est jaloux avec sa propre sœur, mon comportement risque de mettre le feu aux poudres –et c'est exactement ce que je recherche.
Le regard d'Adam se dirige vers Marcus avec dédain.

Sa mâchoire se contracte et son visage se renfrogne. Ses pupilles s'assombrissent et ses mains forment deux poings qu'il range instinctivement dans ses poches.

-Lui ? demande-t-il d'un air supérieur, presque moqueur. Je peux m'en charger si vous voulez !

Sa proposition on-ne-peut-plus sérieuse me fait quelque peu paniquer.

-Non ! je m'exclame précipitamment, de peur qu'il ne mettre vraiment sa menace à exécution.

Il lâche un petit sourire vainqueur.

J'ai peut-être sous-estimé sa réaction. Il est vrai que Monsieur Marciello fait parti de ces personnes complètement indéchiffrables, et donc, par la même, imprévisible.
Mon cœur s'accélère. Il ne manquerait plus que cet idiot ajoute « tueur en série » à sa liste que qualités déjà bien fournie.

-Seriez-vous jaloux, Monsieur Marciello ? je demande en souriant malgré la réelle envie de ne pas obtenir de réponse.

Mon cœur se met à battre la chamade. Le stress m'envahit à mesure que les battements de mon cœur résonnent dans mes tempes.

Non, Lena. Tu ne peux pas vouloir qu'il soit jaloux enfin ! En plus, tu sais bien qu'il ne l'est pas.

-Bien évidemment, déclare-t-il comme une évidence, en me dévisageant comme si j'étais aliénée. Je ne le suis pas souvent, ajoute-t-il comme si c'était un fait à souligner, mais vous imaginer dans les bras d'un autre homme me met dans une colère noire.

Son regard se durcit. Il hausse d'un ton, comme pour me réprimander. 

-Et le fait que vous vous obstiniez à refuser mes invitations n'arrange pas les choses. Vous me blessez dans ma fierté, Mademoiselle Miller !

Je cligne deux fois des yeux, bouche bée. Est-ce que j'ai bien entendu ? Bon sang, voilà qui va encore finir par me donner des insomnies. Cet homme ne sait rien faire d'autre que me mettre la tête en vrac ! Et en plus de cela, il me reproche, à moi, de le blesser dans sa fierté !

 Cet homme parle bien trop souvent de sa fierté, alors même que je n'en ai jamais vu la couleur.  

-Fierté par-ci, fierté par-là... je commence en haussant le ton moi aussi. Mais par contre, pour rabaisser la mienne en m'humiliant constamment, vous êtes toujours là !

Les yeux d'Adam s'écarquillent, ses sourcils s'haussent et sa bouche s'entrouvre légèrement. Il semble plus que jamais étonné par mon attitude. Son visage pâlit et son regard m'observe avec incrédulité.

Bon sang ; ce que ça fait du bien de se lâcher ! Je ne vois pas pourquoi ce serait lui, encore lui, et toujours lui !

Il secoue légèrement la tête, s'obligeant à sortir de sa transe. 

-Je ne cherche pas à vous humilier, commence-t-il en serrant les dents, furieux. Ne voyez-vous donc pas que je...

Mon cerveau dit stop ; j'ai trop d'informations à traiter, et pas assez de neurones pour déléguer le travail. Je ne le laisse pas terminer sa phrase, ne souhaitant pas m'éterniser dans cette discussion sans fond.

-Je m'obstine parce que vous ne voulez pas m'écouter, j'assène, glaciale.

Je ne veux pas sortir avec un séducteur invétéré. Et puis d'ailleurs, je ne sors pas avec n'importe qui, comme ça, sans même le connaître ! Qui est cet homme qui possède une infinie folie, un visage de mannequin, une sœur caractérielle et un goût très prononcé pour la compétition ?

-Très bien, dit Adam en appuyant son poids sur sa jambe droite.

Son regard est machiavélique. Il n'y a plus aucune séduction –juste un besoin de vengeance qu'il cherche à tout prix à assouvir. Lorsqu'il reprend, son visage ne reflète aucune autre émotion que la fourberie.

-Disons alors que si vous acceptez de dîner avec moi –de votre plein gré– je n'irais pas voir votre ami pour lui raconter notre petit moment d'égarement.

Je manque de m'étouffer. 

Je m'astreins à ne dégager aucune émotion, de peur qu'il ne comprenne qu'il a le dessus sur moi dans cette situation.

Le « de votre plein gré » suivi d'une menace me paraît assez peu approprié pour la situation, non ? 

Lui, me menacer à moi ? Je n'en reviens pas qu'il ose en arriver là. Tout ça parce qu'il ne supporte pas de perdre –et j'ai effectivement refusé à de nombreuses reprises d'entrer dans son jeu.

-Je ne vois pas de quoi vous parlez, je dis en regardant autre part.

Je ne sais pas mentir, tout le monde le sait.
Donc, si je regarde ailleurs et ne laisse pas mes yeux me trahir, peut-être qu'il pensera que...

-Vous savez, dit-il en coupant court à mes tergiversions, dans la salle du restaurant, lorsque vous avez fourré votre langue dans...

-Chhhhhht ! je m'exclame en plaquant ma main contre sa bouche.

Je regarde autour de nous pour m'assurer que personne ne nous ait entendus, ce qui ne semble pas être le cas. Si d'ici la fin de la soirée des rumeurs ne se sont pas ébruitées, je pourrais aller jouer au loto parce que ce sera mon jour de chance !

Il s'arrête automatiquement de parler. Sous mes doigts, je sens un sourire s'épanouir. Mon corps tout entier est parcourut de frissons car 1)je suis en train de le toucher, et mon corps se souvient de la sensation de nos deux êtres collés l'un contre l'autre et 2)ses lèvres sont tout contre ma peau, me rappelant le souvenir torride de notre moment d'égarement.

Je retire ma main automatiquement, comme si j'avais été brûlée.

Adam n'est plus furieux –loin de là ! Il arbore un grand sourire, le même que celui qu'il a l'habitude de me montrer à longueur de journée. Vous savez, le sourire mi-narguant mi-victorieux.

-Décidément, Mademoiselle Miller, clame-t-il en me lançant un regard séducteur, vous ne savez plus quoi faire pour pouvoir me toucher.

Mes joues rosissent instinctivement, et mon regard scrute les alentours pour s'assurer que personne n'entend. J'ai l'impression de brûler de l'intérieur et d'avoir la peau ardente.

-Je ... je ne ... je bredouille, incapable de former une phrase compréhensible.

-C'est l'effet Adam Marciello, me coupe-t-il en remettre le col de sa chemise en place, ça m'a prit des années pour arriver à ce stade ! Et je ne suis pas peu fier de moi...

Je serre les dents en me traitant intérieurement d'idiote. De faible.
Reprends-toi, Lena !

- Ça s'appelle du chantage ! je m'exclame, furibonde.

Quel crétin de Marciello.

-Je sais, déclare-t-il, pas peu fier de lui.

-Ce n'est pas du jeu, je reprends en fixant le sol, tentant ainsi de dissimuler ma colère.

Je déteste l'injustice. Lorsqu'il y a deux poids, deux mesures...
Et là, je suis clairement prise au piège.

-J'en ai bien conscience, assène-t-il en hochant la tête, tout sourire.

Je soupire lourdement. Son regard est fixé sur le mien. 

Ses pupilles me vrillent et savoir qu'il m'observe avec autant d'attention me met mal à l'aise. Je prends appui sur une jambe, puis sur l'autre, tentant de me donner une contenance et de faire comme si je réfléchissais –alors que je sais pertinemment que mon destin est scellé.

-D'accord, je viendrais. Mais sachez que je détesterais chaque seconde de cette soirée passée en votre compagnie !

Un sentiment de frustration monte en moi. Savoir que j'ai été obligée d'accepter me reste en travers de la gorge, et je compte bien le lui faire regretter.
Je vais lui faire passer la pire soirée de sa vie !

Adam penche légèrement la tête, son regard perçant le mien. Il ne montre aucune joie particulière –et je pense d'ailleurs que c'est une de ses tac-tic. Jouer l'indifférence alors qu'intérieurement, il doit se féliciter d'être arrivé à atteindre son but.

-Je n'en attendais pas moins de vous, déclare-t-il en me lançant un clin d'œil aguicheur.

Il jette un coup d'œil au loin, en direction de Marcus, toujours en grande discussion avec Juliette.
Son regard s'assombrit.

-Tant que je vous sais loin de cet abruti pour une soirée, peste-t-il, je suis on-ne-peut-plus satisfait.

Ma mâchoire se décroche. Comment ose-t-il ...

-Marcus n'est pas...!

Je m'arrête net, sachant pertinemment que toute discussion avec lui est vaine. Ça ne ferait qu'envenimer la situation, et j'aimerais beaucoup m'éloigner le plus possible d'Adam Marciello, crétin de première.

-Bref. Juste un dîner.

Le dire me donne l'impression de m'arracher la bouche. Néanmoins, je veux lui faire comprendre que ce ne sera pas un dîner comme il l'avait imaginé. Ce sera le pire que toute l'histoire de l'humanité ait jamais connu.

Je passe une main dans mes cheveux et tente –tant bien que mal– de me donner un air déterminé. Je sais déjà que c'était une erreur d'avoir accepté.

-Vous éloignez vos mains baladeuses et votre bouche de mon visage, je déclare en pointant un doigt dans sa direction, provoquant une étincelle de malice dans son regard. Pas de regard séducteur, ni de...

-J'ai un regard séducteur, moi ? me coupe-t-il en s'approchant imperceptiblement de moi.

Ses yeux... Non, non, non. Je ne peux pas le laisser faire ce qu'il est en train de faire.

-Non, je déclare fermement malgré ma voix chevrotante.

Adam n'est pas dupe. Son sourire s'élargit et il semble au comble du bonheur.

-Est-ce qu'il fonctionne sur vous ? demande-t-il, rétrécissant la distance nous séparant.

Son torse se rapproche de ma poitrine et je sens déjà la chaleur émaner de son corps. Son haleine mentholée se déverse dans mes narines, et une sensation de bien-être réchauffe mon corps tout entier.

Je relève légèrement la tête et observe la beauté de son visage, la forme de ses yeux, la structure de sa mâchoire, la perfection de ses lèvres...

-Euh... je... je bredouille. Non.

Aller, Lena ! Tu dois faire mieux !
Je me racle la gorge et me refuse à reculer –il prendrait certainement cela pour un dégonflement de ma part. Et je ne suis pas une dégonflée ! Même si, maintenant, j'aimerais vraiment m'enfuir.

-Seul celui de Marcus fonctionne sur moi, je réplique en touchant le seul sujet pour lequel il me semble arriver à maitriser la situation. Et il fonctionne à merveille !

J'ai conscience d'en faire un peu trop.
Bon, un peu beaucoup trop, mais après tout si ça peut éviter qu'il me poursuive pour le reste de la journée, je veux bien tenter.

Sa réaction est étonnante. Au lieu de provoquer sa fureur, ma réplique a pour seul effet de le faire sourire. Un faible sourire, certes, mais un sourire. 

Les yeux rivés vers le sol, il ne relève pas immédiatement le visage.

-Vous savez quoi dire pour m'énerver... dit-il en rigolant quelque peu.

Je ne vois pas en quoi la situation est amusante.
Pour ma part, je suis déçue. Je m'attendais à ce qu'il s'énerve et que je puisse enfin prendre ma revanche, mais la réalité est toute autre.

-Très bien, dit Adam en relevant la tête, une expression conquérante sur le visage. Dans ce cas, je vous montrerais que mes talents de séducteurs n'ont rien de comparables à ceux de votre « ami », dit-il en mimant les guillemets.

Je cligne deux fois des yeux, sonnée.
AH NON. Ça, ce n'est clairement pas la réaction que j'espérais.

-Je suis déçu de vous, Mademoiselle Miller, dit-il en haussant les épaules. Je vous pensais plus résistante.

D'accord. Là, c'en est trop.
Il a eu ce qu'il voulait –un dîner avec moi– donc maintenant, il est temps pour moi de déguerpir.

Je lui lance un regard mauvais, persuadée qu'il ressentira toute la colère qui émane de moi. Je plonge mon regard dans le sien lorsque je lui dis :

-Je vous déteste.

Et une fois de plus, sa réaction me surprend. Il hausse les épaules, comme s'il avait l'habitude qu'on le lui dise.
Je recule d'un pas, souhaitant me libérer de son emprise et réfléchir le plus sereinement possible.

-La haine est une forme d'amour, pas vrai ? réplique-t-il, une expression énigmatique sur le visage.

Oh non. Non, non, non.
Qu'il n'aille pas s'imaginer des choses qui n'existent pas, ce crétin de Marciello !

Je me détourne. Il faut que je parte, maintenant. La fille de Monsieur Davis ne va pas tarder à arriver, et il faut que je m'assure qu'aucun problème n'est survenu.

-Non, j'assène, sûre de moi, en lui tournant le dos. Pas du tout.

Je profite d'un moment de distraction pour m'éclipser, le laissant seul à ses tergiversions.

Et alors que je m'éloigne de lui, mon esprit ne peut s'empêcher de me reprocher ma réponse.
J'aurais dû lui dire ce que je pense vraiment 

« Si. Complètement. »


N'oubliez pas de voter ! :D

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Bon. Apparament, Monsieur Marciello c'est le genre de mec a obtenir tout ce qu'il désire (y comprit Lena qui, de base, n'avait rien demandé). En même temps, elle n'avait qu'à pas lui sauter dessus dans la salle de restaurant, ça lui aurait épargné toutes ces galères XD

Qui est pressé de savoir ce qu'il va se passer pendant ce dîner ? :p

PS : Si dans la vrai vie vous croisez un mec qui vous harcèle autant qu'Adam, envoyez-le balader s'il vous plait XD 

J'accepte toutes les critiques constructives et tous vos avis en commentaire ! :D

Si vous avez des questions, ou juste pour me dire ce que vous avez aimé/pas aimé, ou si vous attendez la suite, c'est dans les commentaires ! ;)

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19/07/2018

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