14🤖Dasvidaniya
— Nat, tu viens ? On doit emmener les pièces à conviction au poste.
— Hm. J'arrive.
Depuis l'incident sur le toit il y a une demi-heure, Natalia sentait toujours les pulsations de sa pompe à thirium battre fortement dans sa poitrine.
Elle croisa le regard troublé de Connor avant de se diriger vers la cuisine de la salle de diffusion.
— Ah, merde. J'avais oublié.
Les trois androïdes responsables de la surveillance avaient été placés dans cette pièce, en attente d'une décision sur leur sort. Natalia, qui comptait calmer l'agitation de son cœur avec du sang bleu, rangea son kit dans son sac avant de s'approcher d'eux.
Les trois modèles, identiques, affichaient des expressions vides et insondables.
Elle resta un moment debout devant eux, bras croisés, repensant aux vidéos de surveillance qu'elle avait récupérées. Soudain, une réalisation la frappa : l'un des androïdes avait dû observer l'attaque sur les caméras de surveillance sans rien dire.
Cela signifiait qu'un déviant se trouvait parmi eux.
Consciente que les interroger ne donnerait probablement rien, elle n'avait ni l'expérience de son oncle ni les capacités d'analyse de Connor, Natalia était cependant persuadée de pouvoir identifier le déviant.
Elle les fixa intensément, un à un, sans parvenir à distinguer de différence notable entre eux, puis une idée audacieuse lui vint.
Sortant son kit, elle déballa devant eux sa seringue, prenant une profonde inspiration. Puis, tirant parti de ses cours de théâtre au collège, elle se lança dans une performance en russe parfait :
— Mon gouvernement m'a envoyé ici pour enquêter sur rA9. Ces idiots d'Américains n'ont rien vu mais moi je sais. J'ai vu la vidéosurveillance et je sais que l'un d'entre vous est un déviant.
Connaissant la capacité des androïdes à comprendre toutes les langues, elle exploita les tensions géopolitiques entre la Russie et les États-Unis concernant l'Arctique pour renforcer son rôle.
Elle se redressa, tenant fermement la seringue, un sourire sinistre ornant ses lèvres :
— Je n'ai pas le temps de vous interroger un à un, alors voilà ce qu'il va se passer. Vous allez être éteint. Nous allons fouiller votre mémoire et vous déchirer morceau par morceau pour analyse. Je m'en fous de votre désir de liberté. Tout ce que mon pays veut, c'est du thirium. Et je vais me servir à la source.
Natalia se tenait devant les trois androïdes, manipulant sa seringue de manière provocante. Sa voix, chargée d'un mépris feint, résonnait dans la pièce.
— Honnêtement, je hais les machines. Vous n'êtes que des tas de ferraille et vous osez revendiquer des droits ? Chez moi, les androïdes ne sont que des esclaves bons à ramasser nos merdes. Ici, aux États-Unis, vous n'avez pas été correctement conditionnés. En Russie, un déviant comme vous serait déjà démonté et ses pièces exposées sur la place Rouge comme avertissement.
Elle accentua son rôle, jouant sur les stéréotypes les plus sombres pour provoquer une réaction.
En déambulant lentement devant eux, elle surveillait chaque micro-expression, chaque petit signe qui pourrait trahir le déviant parmi eux.
— Vous pouvez dire adieu à Jéricho.
À ces mots, elle remarqua un léger frémissement chez l'un des androïdes, une hésitation dans ses yeux qui se déplaçaient furtivement vers ses congénères.
C'était suffisant pour elle.
Alors qu'elle s'apprêtait à faire demi-tour pour appeler Connor et son oncle, elle sentit brusquement une main ferme se plaquer contre sa bouche, étouffant ses cris.
Natalia, prise de surprise, se débattait violemment, essayant de se libérer de l'emprise de l'androïde.
L'androïde, dans un mouvement désespéré, tenta de la blesser avec la seringue qu'elle tenait précédemment. Natalia, avec une agilité surprenante, esquiva l'attaque mais perdit la seringue à quelques mètres au sol.
Le combat s'intensifia, les coups devenant plus désordonnés alors que le déviant gagnait en agressivité. Natalia, qui n'avait pourtant pas l'habitude de se battre, réussit à contre-attaquer, le repoussant avec un coup bien placé. Mais l'androïde, rapide et déterminé, récupéra la seringue éjectée au sol.
Avant qu'elle ne puisse réagir, il la plaqua contre le mur, la seringue à la main. Son regard, empreint de peur et de détermination, croisa brièvement le sien avant qu'il ne plonge l'aiguille directement dans son cœur.
Natalia ressentit une douleur aiguë, un choc froid l'envahissant alors que le sang bleu commençait à colorer sa chemise.
Elle s'effondra, son corps cédant sous la soudaine défaillance de sa pompe à thirium. Le déviant, réalisant l'irréversibilité de son acte mais également qu'elle était peut-être une androïde comme lui à cause de la couleur de son sang, lâcha la seringue.
Il recula, troublé par sa propre violence avant de la regarder suffoquer et de quitter la pièce sans l'aider. Chaque inspiration semblait un combat, son souffle sifflant tristement dans le silence lourd.
— Tonton... Connor... ! Connor ! Aide-moi...
Sa vision se troublait, les contours de la pièce fusionnant en vagues indistinctes, tandis que l'application sur son téléphone émettait un bip inquiétant, signalant une défaillance critique.
La voix de Natalia se faisait de plus en plus faible mais à peine quelques secondes plus tard, Connor entra en trombe dans la pièce avec une expression d'inquiétude rarement vue sur son visage d'androïde. Il s'agenouilla rapidement à côté d'elle, évaluant rapidement la situation avant d'agir.
— Nat, ne bouge pas, je vais retirer la seringue, prononça-t-il d'une voix où l'on devinait un frémissement inhabituel.
— Le déviant, il... balbutia-t-elle, luttant pour articuler ses mots, la douleur mordant chaque souffle.
Il agit avec une précision qui contrastait avec le léger tremblement de ses mains alors qu'il retirait délicatement la seringue. Natalia gémit sous l'effet de la douleur, sa main agrippant le bras de l'androïde pour y trouver un soutien.
Connor ouvrit rapidement sa chemise, faisant exploser ses boutons et exposant la zone où la seringue avait pénétré. Il plaça sa main sur sa poitrine couverte de son soutien-gorge, l'analysant immédiatement pour évaluer les dégâts et stabiliser son état.
— Je vais réguler ta pompe à thirium. Elle semble réagir au contact d'un autre androïde. Reste calme, tu vas t'en sortir.
Natalia, malgré la douleur lancinante, ressentit un profond réconfort dans la présence de Connor, réalisant que, peut-être pour la première fois, elle ne voyait pas seulement un androïde, mais quelqu'un qui, contre toute attente, semblait réellement se soucier d'elle.
Il fouilla rapidement dans le kit de Natalia pour retrouver une petite poche de thirium. Avec une délicatesse surprenante, il remplit la seringue de sang bleu et passa ses doigts sur la cicatrice de la jeune femme avant de s'arrêter sur sa minuscule LED.
— Cela aidera à stabiliser les fonctions de ton cœur biomécanique, expliqua-t-il tout en préparant l'injection avec une attention méticuleuse. Ça va piquer un peu.
La sensation de froid du liquide se propagea rapidement dans ses veines, apportant un soulagement presque instantané à la douleur ardente. Leurs yeux se rencontrèrent, et quelque chose de non-dit mais intense passa entre eux.
Natalia prit une profonde inspiration avant de dire :
— Le déviant... Il va s'enfuir. Ta mission...
L'androïde sembla hésiter un instant en la dévisageant, comme s'il recalculait ses priorités, avant de se redresser.
— Est-ce que ça va aller ?
Natalia acquiesça faiblement, observant Connor s'éloigner précipitamment. La réalité de sa situation la frappa de plein fouet. Si quelqu'un la découvrait ainsi, avec son sang bleu visible, elle serait immédiatement confondue avec un androïde.
Surprise par son oncle, elle pourrait dire adieu à ses espoirs de travailler avec la police de Detroit.
Poussant un soupir lourd, elle se redressa tant bien que mal. Sa chemise était irrémédiablement tachée de sang bleu, la rendant inutilisable. D'un geste résolu, elle l'arracha et la jeta dans la poubelle la plus proche. Les deux androïdes dans la pièce demeuraient immobiles, impassibles à sa détresse, ne manifestant aucun signe de solidarité.
— Veillez à ce que cette pièce soit impeccable, ordonna-t-elle d'une voix ferme.
Elle prit une profonde inspiration, forçant son cœur biomécanique à ralentir. D'un geste rapide, elle boutonna sa veste de tailleur, cachant soigneusement les preuves de son altercation.
Dans un autre contexte, on l'aurait trouvé encore plus attirante dans cette tenue. Mais elle savait qu'on la regarderait comme une femme dérangée en sortant de la pièce.
Juste au moment où elle s'apprêtait à quitter la pièce, une détonation retentit, faisant écho dans le corridor. Sans perdre une seconde, elle récupéra ses affaires et se précipita vers la source du bruit, ses talons résonnant sur le carrelage dur.
Puis elle vit Connor, une arme encore fumante à la main et à quelques mètres de lui près de l'ascenseur, le déviant l'ayant attaqué. Étendu au sol.
Le calme apparent de Connor contrastait avec la gravité de la situation : il venait d'abattre l'androïde qui, quelques instants auparavant, menaçait de tirer sur tous les humains présents, y compris son oncle.
— Joli coup, Connor, lança Hank avec un mélange de soulagement et de reconnaissance, tandis qu'il observait la scène depuis une distance sécuritaire.
— Je le voulais vivant, rétorqua Connor, la froideur de sa voix trahissant son conflit interne.
— T'as sauvé des vies humaines... Tu m'as sauvé la vie.
« Et la mienne » pensa-t-elle lorsque son portable se mit à sonner dans sa poche.
Natalia sentit son cœur s'alourdir en voyant le nom de son père apparaître sur l'écran de son téléphone, mais avant qu'elle puisse décider de répondre, une sensation humide sur ses lèvres la distrait.
Confuse, elle passa son doigt sous son nez et, à sa grande surprise, ce fut du sang bleu qu'elle vit en le regardant.
Levant les yeux, elle croisa le regard de Connor, empreint d'une inquiétude rare chez un androïde. La lueur de préoccupation dans ses yeux semblait presque humaine, intensifiant le moment de connexion silencieuse entre eux.
Natalia ignorait si c'était le stress ou la pompe à thirium défaillante qui causait cette hémorragie, mais le moment n'était pas à l'analyse.
Elle essuya rapidement le sang tout en masquant sa peur, consciente des implications de sa condition devant les autres.
— Nat, tu es sûre que ça va ? Tu as l'air un peu pâle, s'inquiéta Hank en la dévisageant attentivement.
— Ça va, mais je dois partir. Maintenant. Mon père m'attend au siège de CyberLife.
Connor, dont l'attention ne faiblissait jamais, capta la tension dans sa voix et s'empressa de proposer son aide.
— Je vous accompagne.
— Non Connor, on a du boulot au poste, intervint Hank, son regard croisant celui de Natalia, cherchant à dissuader l'androïde.
— Lieutenant, vous m'avez affecté à la protection de Natalia. Je peux continuer à analyser les données collectées en chemin et vous les transmettre, insista-t-il, son ton restant neutre mais déterminé.
Hank marqua une pause, son expression mêlée de réticence et d'approbation finalement.
— D'accord. Natalia, appelle-moi dès que tu es sur place.
Elle offrit un sourire rassurant à son oncle avant de presser le bouton d'urgence de son application pour envoyer un signal discret à son père, indiquant qu'elle était en route.
Natalia et Connor se dirigèrent rapidement vers l'ascenseur, l'atmosphère lourde de la tension des derniers événements. Une fois à l'intérieur de la cabine silencieuse, Natalia prit une profonde inspiration, essayant de masquer son anxiété.
— Merci d'être venu avec moi, murmura-t-elle à Connor, ses yeux fixant le tableau d'affichage numérique qui indiquait leur descente. Et merci pour tout à l'heure. Je crois que sans toi, j'aurais pu y passer.
— C'est mon devoir de vous protéger. Êtes-vous certaine de ne pas vouloir informer le lieutenant Anderson davantage sur votre état ?
— Plus tard, là je me sens... hm. Et est-ce que toi, tu vas bien ?
— Moi ?
Connor sembla prendre un moment pour réfléchir, ses yeux analysant un point invisible sur le sol de l'ascenseur avant de revenir à elle.
Personne ne lui avait jamais demandé comment il allait car il n'était qu'un androïde. Il n'avait pas à « ressentir ».
— J'ai été programmé pour accomplir des missions et assurer la sécurité des humains, commença-t-il lentement. Mais ce que j'ai ressenti aujourd'hui, cette... peur, était nouvelle pour moi. Elle m'a amené à questionner des aspects de ma programmation que je n'avais jamais envisagés auparavant.
Natalia l'écouta attentivement, reconnaissant la sincérité de ses paroles. C'était la première fois qu'elle entendait Connor parler de ses sentiments de manière aussi ouverte.
Et ce simple fait lui fit prendre conscience d'une évidence : il y avait une possibilité, même infime, que Connor soit un déviant sans le savoir.
🤖PROCHAIN CHAPITRE JEUDI 9H🤖
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