* Chapitre 16 *

̶   Tom ! Tom, attend-moi !

Le jeune homme se retourna. Granval lui courait après, chargé de son énorme sac et de toutes les affaires qu'il venait de récupérer en salle des professeurs. Il était rouge et haletant, comme s'il courait depuis qu'il était sorti du lycée : ce qui était bien évidemment le cas.

̶   Tom ! s'exclama-t-il lorsqu'il arriva à son niveau. Pourquoi es-tu parti ? On devait parler à la fin du cours, je te rappelle !

̶   Désolé, Monsieur, mais... Je dois rentrer. J'ai beaucoup de choses à faire.

̶   Juste cinq minutes ! le réprimanda Granval. Je ne demande rien de plus que cinq petites minutes pour te parler !

̶   Pardon, Monsieur...

Granval soupira.

̶   Écoute, Tom. Je vois bien que ce qu'il se passe en ce moment t'affecte. Tu es complètement épuisé. Beaucoup de personnes s'inquiètent pour toi, moi inclus.

L'adolescent baissa les yeux. L'inquiétude de son professeur le mettait particulièrement mal à l'aise.

̶   Mais ce qui m'inquiète le plus, c'est que tu n'en parles pas, continua-t-il. Il ne faut pas garder ses sentiments pour sois-même dans ces moments là : or, je ne t'ai jamais entendu en parler. Pourquoi ? Tu ne dois pas avoir peur de discuter, Tom !

Lejeune homme déglutit. Granval voulait l'aider, sauf qu'il ne savait pas ce qu'il lui demandait. Il ne pouvait pas imaginer toute la culpabilité que son élève ressentait à ce moment précis.

̶   Je vais bien, mentit Tom. Je n'en parle pas à l'extérieur de chez moi parce que j'essaie de me changer les idées, c'est tout.

̶   Et avec qui en parles-tu ? Ta mère ? Tes voisins ?

̶   Surtout avec Delmes et la police.

̶   Tu ne dois pas beaucoup t'exprimer car ils s'inquiètent tout autant que moi.

Tom jura intérieurement. Quelle gaffe magnifique. Il aurait du s'y attendre. Il n'avait jamais été bon pour mentir.

̶   Mais tu as l'air de beaucoup communiquer par écrit, continua Granval. C'est vrai que je ne te vois plus beaucoup traîner avec tes amis, ces derniers temps... C'est avec eux que tu discutes par téléphone ?

̶   Rarement, répondit l'intéressé. Enfin, je parle beaucoup avec un ami éloigné.

Son professeur avait sûrement discuté avec ses amis et savait tout aussi bien que lui qu'il ne leur parlait plus. Hors de question de dire une autre connerie. Tant pis s'il ne pouvait pas donner plus d'explications à Granval.

̶   Ah oui ? l'interrogea ce dernier. Qui est-ce ?

̶   Un ami d'enfance que je ne vois que très rarement.

Pardon, Keyros, mais j'ai besoin d'une couverture... S'excusa mentalement Tom. et puis, tu es un peu mon ami, quelque part. Non ?

̶   Oh ! se rassura le professeur. Je vois ! Ça te fait du bien ?

̶   Beaucoup.

̶   Bien. Je suis rassuré. Merci, Tom... N'hésites pas à venir me voir si tu as besoin d'en parler en face à face avec quelqu'un. Et la prochaine fois, ne t'enfuis pas comme un voleur ! Si je veux te parler ce n'est pas pour rien, encore moins pour te faire rater ton bus...

Le véhicule avait fait son apparition au milieux de la conversation : Tom recula en saluant son professeur de la main et se dirigea vers le transport scolaire. Sauf que le jeune homme était un boulet infini et que, tout en reculant, il trébucha sur un élève qui passait à côté du lui ; il se rattrapa in extremis au sac de l'autre, l'entraînant presque dans sa chute. L'élève se débarrassa de Tom d'un geste rageur de la main et s'éloigna en l'insultant, furieux. Le maladroit s'excusa et monta dans son bus les oreilles basses, adressant un dernier au revoir à Granval. Le professeur lui sourit et repartit vers le lycée le pas léger, écrivant déjà à Delmes un message rassurant.

L'élève que Tom avait bousculé, lui, avançait toujours en grommelant. Il avait emprunté une petite rue pas très éloignée de l'arrêt de bus, à deux pas de l'endroit où il habitait. Ici, il se sentait plus en sécurité, loin de tous ces débiles du lycée qui ne faisaient pas attention où ils mettaient les pieds. 

Mais il se trompait.

Un pied de biche s'abattit à l'arrière de son crâne : le jeune homme s'écroula lourdement sur le goudron, la tête en sang, inconscient. Ou peut-être mort. Mais son état n'avait rien d'important pour son agresseur. Il se contenta juste de tirer le corps à l'abri des poubelles et de fouiller dans le sac de sa victime. Il avait vu Tom y glisser quelque chose lorsqu'il avait « trébuché » sur ce type.

C'était une lettre blanche inscrite d'un pseudo, identiques à celles que le MJ donnait à ses joueurs. L'agresseur plissa les yeux. Il fit glisser la lame de son couteau de boucher dans l'enveloppe pour l'ouvrir : il y avait un message, accompagné d'une promesse de cadeau. Une fausse promesse, tout aussi fausse qu'était cette lettre.

L'agresseur la glissa dans sa veste. Il avait vu juste. Tom préparait bien quelque chose.

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