R.E.I.T.E.R.E.R.

Comme un bon gentleman après un rendez-vous, j'ai raccompagné Sahel chez lui, tout en continuant à discuter, même si je l'avoue, j'étais complètement mort avec l'heure tardive. Je n'ai jamais été une personne couche-tard ni lève-tôt. Je dormais toujours énormément, au début je croyais que c'était avec ma croissance mais plus le temps passait, et plus je me rendais compte que non, j'avais juste besoin de beaucoup de sommeil.

Devant son immeuble, il se stoppa et se tourna vers moi, silencieux.

— Tu vas retrouver ton chemin ? me demanda-t-il soucieux.

Je hochai la tête, les paupières lourdes malgré le fait que j'aurais aimé rester avec lui toute la nuit. Un petit rit se fit entendre et une main se posa délicatement sur ma joue.

— On dirait que t'es à deux doigts de tomber par terre et de t'endormir à même le sol, remarqua-t-il.

Je souris, il n'avait pas totalement tord, je m'étais d'ailleurs déjà endormi plusieurs fois dans une position inconfortable : en classe quand j'étais petit, dans le bus, sur un banc, dans mon bain, dans le métro, partout. Je fermai les yeux quelques secondes contre sa main.

— Je suis mort, confirmai-je.

— Ça va aller pour rentrer ?

Je rouvris les yeux pour sonder les siens, redevenus étonnement sérieux. C'était mignon, il s'inquiétait pour moi.

— T'en fais pas, je vais m'en sortir, tentai-je de le rassurer.

Il pencha sa tête et me sourit une nouvelle fois, avant de venir déposer ses lèvres sur ma joue et d'y laisser un baiser sans bruit.

— Bonne nuit Aislin, lança-t-il joyeusement.

— Bonne nuit, souriais-je.

Je le regardai taper son code et entrer avant de disparaître à l'intérieur de son immeuble.

En reprenant le chemin inverse, je n'arrivais pas à me départir de mon sourire niais qui me collait depuis un petit moment déjà. J'avais été, au final, stressé pour rien car Sahel n'avait rien tenté, pour mon plus grand soulagement. Tout était resté platonique entre nous.

Je clignais des yeux plusieurs fois pour me réveiller, cette journée m'avait vraiment épuisé et je désirais plus que tout rejoindre mon lit douillé. En repensant à notre étreinte de tout à l'heure, j'en eus des frissons. J'étais si bien dans ses bras, j'aurais tellement aimé dormir là, avec lui. Il avait quelque chose d'indéniablement rassurant et surtout d'attirant.

Je sentis mon téléphone vibrer dans ma poche, pensant que c'était Haël, mais je fus surpris en voyant un numéro inconnu.

De inconnu : Grand asiatique recherche petit Irlandais, intéressé ? Sérieusement, j'ai déjà envie de te revoir.

L'enfoiré ! Cependant, je fus attendri par sa dernière phrase. J'avais moi aussi envie de le revoir. C'est dingue l'effet qu'a eu ce premier rendez-vous, j'avais l'impression que nos sentiments se sont accélérés en quelques heures seulement.

A inconnu : Donne moi envie de te revoir, dans ce cas.

J'avais envie de le taquiner, et le faire un peu galérer, j'avoue.

De inconnu : Mmmh... J'ai ton lubrifiant ?

Je sentis aussitôt mon corps chauffer. Je passai une main sur les poches arrières de mon pantalon et effectivement, elles étaient bien vides.

A inconnu : Comment t'as fait ? Et pourquoi l'avoir pris ?

De inconnu : Je t'ai déjà montré mes talents pour le vol innocent. 😉 Et je l'ai pris car ça te donne une raison de plus de me voir, ainsi que tes casquettes que je t'ai « emprunté ».

Suite à cette réponse, une question me brûla les lèvres.

A Sahel : Et tu fais ça à tout ceux qui te donnent des rendez-vous ?

De Sahel : Non juste toi.

Je fronçai les sourcils.

A Sahel : Pourquoi ?

De Sahel : Parce que je veux te revoir. Les autres, tant pis s'ils ne donnent pas suite.

Un sourire illumina mon visage et je semblais idiot, là à marcher dans les rues sombres seul pour regagner mon appartement.

A Sahel : Donc tu me fais du chantage ?

De Sahel : Juste un coup de pouce. 😉

Je rigolais tout seul en repensant que sous ses airs d'enfant, il pouvait être un très bon voleur. Je ne l'avais même pas senti toucher mes fesses, ce qui était d'autant plus inquiétant.

A Sahel : Tu as eu d'autres rendez-vous ?

Je ne pouvais pas m'empêcher de lui poser cette question, malgré le fait qu'il m'ait appris n'avoir eu qu'une relation. Mais peut-être avait-il des plans ? Juste pour le sexe quoi.

De SahelÇa t'intéresse ?

A Sahel : Peut-être.

De Sahel : Ah si ça n'est pas une certitude, alors inutile que j'y réponde.

Je grinçai des dents. Il avait de la repartie, je ne pouvais pas le nier. J'avais mentionné vouloir le faire galérer, mais en réalité, c'était lui qui le faisait pour moi.

A Chiant Sahel : Ok ça m'intéresse.

De Chiant Sahel : 😃 Pourquoi ça t'intéresse ?

Cette fois-ci, je n'eus pas la force de rabaisser ma fierté et lui envoyai :

A Chiant Sahel : Bonne nuit.

De Chiant Sahel : Seulement trois, de deux personnes différentes. Une nana en seconde, elle m'avait invité à aller au ciné mais ça n'a jamais été plus loin. Une autre il n'y a pas longtemps, elle m'avait invité à une soirée et une seconde fois chez elle, quand ses parents n'étaient pas là.

La curiosité grimpant en moi, je poursuivis :

A Sahel : Et ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

La réponse tarda à arriver, faisant monter une pression en moi que je n'arrivais pas à comprendre. J'étais à deux doigts de me ronger les ongles inconsciemment.

J'arrivais enfin dans mon appartement et soufflai de soulagement, j'allais enfin pouvoir dormir ! Je me dépêchai d'enfiler un pyjama, brosser mes dents et me jetai littéralement dans mon lit, mais toujours mon téléphone dans les mains. Mes yeux me piquèrent mais je ne voulais pas m'endormir avant d'avoir eu une réponse.

Au moment où je commençai à sombrer, la délivrance me parvint :

De Sahel : Ce que font tout les garçons accompagnés d'une jolie fille très sexy, dans sa chambre fermée et sa maison vide.

C'est à ce moment que je me dis que je n'aurais pas dû lire ce message avant de dormir. J'eus un pincement au cœur, mais me repris rapidement en me disant que c'était normal, naturel pour un garçon de son âge d'avoir des rapports. Il était célibataire et libre de son corps. Malgré ce fait, je n'arrivais pas à l'oublier et y réfléchis encore un moment avant de définitivement m'abandonner dans les bras de Morphée.

En me réveillant le lendemain, je me sentais de très mauvaise humeur, alors que j'avais passé une excellente soirée hier. La première chose que je fis, comme chaque matin, était de regarder mon téléphone. J'y vis un nouveau message de Sahel, mais n'osais l'ouvrir. J'avais la terrible impression que cela allait amplifier mon humeur exécrable.

Dans la petite cuisine, les gars étaient déjà en train de manger en échangeant quelques paroles. Lorsqu'Haël remarqua ma présence, il s'empressa de me poser des questions sur hier.

— Alors beauté, c'était comment hier avec ton rencard ? demanda-t-il devant les autres.

— Quoi, Aislin a eu un rencard ? s'étonna l'un d'eux.

— Genre l'irlandais a une vie sentimentale ? se moqua un autre.

— Je t'emmerde, dis-je à l'intention du dernier. Et c'était bien, c'est tout, répondis-je évasif.

— Vous avez baisé ? lança un de mes coloc.

Je levai les yeux au ciel, encore une fois, ils ne pensaient qu'à ça. C'était le genre de personnes à assimiler fille à sexe, obligatoirement.

— Ça te regarde sûrement pas.

— Oh ça, ça veut dire non. Donc soit elle est moche, soit elle t'a mis un vent, se prit-il pour un psychologue.

Voilà pourquoi je ne voulais pas en parler devant eux. Je lançai un regard noir à Haël pour qu'il comprenne son erreur et celui-ci haussa les épaules pour s'excuser, mais son sourire en coin m'apprit qu'il était amusé par la situation.

— Mets ta phrase au masculin, ajouta Haël.

Tout le monde se tourna vers moi avec des yeux écarquillés, comprenant la réplique de mon meilleur ami. Je pris rapidement mes tartines beurrés avant de m'enfuir dans ma chambre, ne souhaitant entendre leur réaction. Je hais définitivement Ha.

En parlant de lui, ma porte s'ouvrit sur son visage rayonnant et plein d'entrain. Je fis la grimace et il rit comme un enfant avant de refermer la porte et de venir s'asseoir à mes côtés.

— Alors, tu m'as toujours pas dit, comment ça s'est passé avec le nippon ?

Je pris un de mes pains au beurre et lui écrasai sur le visage en riant à mon tour, étalant la graisse fondant sur sa peau.

— C'est ma vengeance pour tout à l'heure, me justifiai-je.

Ce fut à son tour de me dévisager.

— C'est bon pour la peau, ne pus-je m'empêcher d'ajouter avant d'exploser de rire devant son air ahuri.

— Tu as de la chance que je meurs d'envie de connaître ton rendez-vous, sinon je t'aurais égorger sur ton lit.

On rit tout les deux avant de reprendre notre sérieux. Je fis tourner mon téléphone nerveusement entre mes doigts pour me préparer à lui parler. Je lui racontai donc tout ce que l'on avait fait, n'omettant aucuns détails – d'ailleurs il avait bien rit pour le lubrifiant – et terminai sur cette phrase :

— C'était vraiment super tu vois, mais je sais pas, y'a un truc qui bloque.

— Je vois pas ce qui pourrait te « bloquer », peut-être qu'au fond, tu espérais qu'il te saute dessus et que vous finissez l'un sur l'autre ? proposa Ha après quelques secondes de réflexion.

Je réfléchis moi-aussi, mais je sentais que ce n'était pas ça. Je loupai mon jonglage et fis tomber mon smartphone à terre, quand je le ramassais en me pliant, j'eus soudainement une explication : le message d'hier ! Je déverrouillai donc mon téléphone et ouvris la conversation que l'on a eu dans la nuit. Je vis par la même occasion son nouveau message, qu'il m'avait envoyé juste après que je me sois endormi.

De Sahel : Je déconne, on a rien fait 😝

Sans que je ne pus me contrôler, mes lèvres s'étirèrent en un large sourire.

— En fait j'ai rien dit, c'était vraiment trop bien ce rendez-vous, j'annonçai à Haël de but en blanc.

Je lui fis un gros bisou sur la joue beurrée et partis prendre ma douche tout joyeux, presque en sautillant.

Pour une fois, je décidai de bien m'habiller et sans mettre de casquette, j'avais décidé d'utiliser la manière « innocente » que l'asiatique m'avait apprise dans les rues de Paris.

Le lendemain matin, je me réveillais avec un message du japonais.

De Sahel : Ce soir, ça te dit qu'on se voit ?

Auquel je répondis bien évidemment positivement, déjà très excité de le revoir. Je passai donc toute la journée en espérant que celle-ci se finisse rapidement, apprenant à Haël la manière douce de voler dans les sacs des femmes.

 A dix-sept heure, je filai mettre une casquette et repartis dans le métro, m'asseyant sur un banc et regardant chaque personne sortir du métro attentivement. J'attendais plus spécialement Sahel, dont je me souvenais avoir déjà vu à cette heure et bingo, je le vis sortir, son sac en bandoulière accroché à son épaule, son éternel uniforme et chignon. Il avait ses écouteurs dans les oreilles et n'avait même pas remarqué que quelqu'un était en train de le mater. Je me levai donc et me glissai derrière lui, sans me faire remarquer. Il marchait vite, ce qui me poussait à en faire de même. Puis discrètement, je posai une main sur la hanse de son sac et quand j'estimais le bon moment pour lui tirer, je le fis d'un geste brusque. Je l'embarquai avec moi et me mis à courir en riant de ma blague.

— Mais.. Que... Espèce de...

Avant qu'il n'ait pu finir sa phrase et avant de monter les escaliers, je me retournais pour lui faire face. Il fonçait droit sur moi l'air énervé, mais lorsqu'il vit mon visage, il parut d'abord étonné puis ensuite eut un grand sourire et me rejoignit en ralentissant le pas. Il s'approcha et s'abaissa un peu, entourant ses bras en dessous de mes fesses et me souleva contre lui en me rejoignant dans mon rire incontrôlable.

— Tu m'as fait peur espèce de petit con ! me gronda-t-il gentiment.

— Si t'avais vu ta tête, me moquai-je.

J'entourai mes bras autour de lui et il plongea sa tête dans mon cou où il mordit doucement ma peau. Aussitôt, je sentis une nouvelle fois cette chose étrange dans mon ventre et des bouffées de chaleur envahirent mon corps en me rendant compte de notre proximité. J'avais vraiment très envie de le serrer dans mes bras, aussi fort que je le pouvais, mais je n'en fis rien.

Il me posa enfin – ou pas – par terre et me sourit.

— Je te manquais trop alors tu es venu me chercher ? s'amusa-t-il.

Je levai les yeux au ciel en souriant et commençai à marcher vers la sortie, toujours avec son sac sur l'épaule et lui me suivant.

— A ce soir alors, annonçai-je en prenant la direction inverse de la sienne et après lui avoir rendu son sac.

Cependant, une main retint mon poignet.

— Non restes avec moi, dit-il très sérieusement. Je vais ramener mes affaires chez moi et on sort dehors ?

Je hochais la tête, conquis par l'idée de passer plus de temps avec lui. On discutait tout au long du trajet avant qu'il n'aille déposer ses affaires de cours chez lui, après quelques minutes, il ressortit de son immeuble et on partit marcher ensemble dans les rues, sans destination précise.

— Ah au fait, j'ai acheté ça pour toi, lança-t-il en me tendant un tube.

Curieux, je lui pris des mains et lis ce qui était inscrit sur l'emballage. Je me sentis rougir en voyant « crème hydratantes pour mains sèches » dessus. Je me rappelais de cette épisode... Vraiment très gênant et lui fis une grimace.

— Très drôle.

— Ça sera toujours mieux que du lubrifiant, pouffa-t-il, décidément fier de sa mauvaise blague.

Je lui donnai une tape dans l'épaule en riant à mon tour. Il fallait impérativement que je sache mentir, cela pourrait me trahir un de ses jours.

— Et mon lubrifiant ? demandai-je en me rappelant que c'était lui qui l'avait.

— Je le garde, il pourrait me servir, répliqua-t-il mystérieusement.

Je fis la moue. J'avais envie de lui demander pour quelles raisons cela pouvait-il lui être utile, mais ayant peur de la réponse, je laissai cette question s'évaporer de mon esprit.

Après quelques temps à discuter en marchant, on était entré dans un bar et avions bu quelques verres, sans alcool pour l'asiatique et des cocktails pour moi. Quand la nuit tomba, on s'allongea dans l'herbe, exactement comme la dernière fois, sauf que cette-fois, il y avait quelques personnes qui étaient assises ou allongées elles-aussi pas loin de nous.

— Hey c'est comestible ce truc ! remarqua Sahel en lisant le petit texte sur le tube de lubrifiant, qu'il avait embarqué avec lui. Tu crois que c'est bon ?

— J'en sais rien, tu n'as qu'à goutter, lançai-je en riant.

Il eut un moment de silence avant de se relever, m'enjamber et poser son bassin sur le mien. Il ouvrit le petit tube et en versa sur ses doigts, puis vint l'étaler dans mon cou sous mes yeux ébahis, ne comprenant pas sur le coup ce qu'il fabriquait. Après en avoir mis une petite dose sur ma peau, il jeta le contenu un peu plus loin et s'abaissa sur moi, son visage à quelques centimètres du mien. Je sentis des milliers de fourmis grouiller dans mon ventre.

— Je peux ? 

Quand je lui avais dit de goutter, je l'imaginais plus en mettre sur son doigts, pas en me léchant ! 

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