Chapitre I
Les chansons sont juste des paroles qui nous rappellent le passé, qui nous font pleurer, et qui nous détruisent peu à peu à cause des souvenirs douloureux.
1 mois plus tôt.
— Je refuse de filmer ce reportage.
— Mais vous n'avez pas le choix, c'est indispensable pour l'émission.
— Indispensable ? S'il vous plait ! Il y en a une centaine de participants qui passent inaperçus.
— Exactement ! Et il est hors de question de vous laisser passer invisible ! Incognito ! Donc vous allez faire ce putain de reportage.
Une grimace étire aussitôt mon visage, je n'aime pas recevoir des ordres, surtout de quelqu'un qui ne cherche qu'à assouvir ses propres intérêts.
Des traitements de faveur, des privilèges, du favoritisme... je ne veux pas de ces futilités. Je suis née avec une cuillère d'argent dans la bouche, je l'avoue, mais à force tout devient lassant, sans valeur. Les rêves perdent leur éclat, et l'espoir n'a plus aucune importance, tout devient noir et blanc, comme dans les années 50. Sauf qu'à cette époque, la vie était bien plus colorée que ma terne réalité.
— Je vais le faire... mais à une condition ; pas de couper pas d'action. Je vais dire ce qui me passe par la tête et tant pis si ça ne vous plaît pas.
— Magnifico ! s'écrie Jason, l'assistant-réalisateur.
Je lève les yeux au ciel. Sa tentative de jouer au mec italien avec son accent merdique est lamentablement pathétique.
— Vous avez un lieu particulier où vous voulez filmer ? Un endroit chaleureux avec des souvenirs de votre enfance ?
Malgré son sourire narquois qui me donne plus envie de l'étrangler que de l'aider dans son délire, l'idée qui vient de me traverser la tête me rend légèrement enthousiaste. Alors à contre cœur, je hoche la tête et laisse échapper un soupir, vaincue.
— Bello bello bello ! Vous l'avez entendu guys ! Rangez votre équipement et mettez-le dans la caravane. On a un reportage à faire !
***
— Heaven Hart. Je suis vraiment nulle pour les présentations. Une fois quand j'étais encore au lycée, un prof m'a demandé de me présenter devant la classe. Je lui ai dit que ce n'était pas la peine, mais... comme le connard de l'assistant-réalisateur, il m'a obligée à le faire.
Le visage choqué de Jason me donne envie de rire, pourtant, j'essaie de conserver une expression neutre alors que je me déplace entre les vinyles et les anciens albums qui jonchent chaque recoin de la pièce, éclairée exceptionnellement par la lumière des flashs projetée par les parapluies blancs et les réflecteurs.
— Et ainsi, le cours de mathématiques s'est transformé en une séance de dédicaces et d'autographes. L'impôt d'être une star depuis mon plus jeune âge.
Je hausse mes épaules sur cette dernière remarque et m'assois sur le bord de la console analogique, les doigts parcourant la froideur de ses boutons.
— Félicitations ! Vous avez résolu le mystère, je suis la fille d'Oscar Hart. Ravie de vous rencontrer.
Je rejette mes cheveux en arrière et adresse un sourire moqueur à la caméra, alors que Jason secoue la tête et se tape la main sur le front.
— Non plus sérieusement, désolée les gars. Jason, -le connard d'assistant-réalisateur- commence à s'énerver, donc je vais arrêter mes délires et faire comme les autres, puisque l'originalité ne plaît pas. Ils font comment déjà ?
Amusée, je tapote mon doigt sur mes lèvres comme si j'étais à la recherche de mes mots, et finis par abandonner la console pour me poser sur le canapé noir, sur lequel mon père avait passé des nuits blanches pour écrire ses chansons.
— Salut ! Je suis Heaven Hart. On se trouve actuellement dans le studio d'enregistrement Hart, SEH pour les intimes, dans lequel je garde mes plus beaux souvenirs avec mon père. Bref, je participe à The Voice parce que j'aime beaucoup l'émission, et je veux surtout rencontrer le jury et leur demander un autographe ! Non, je déconne, je suis là pour prouver au monde que j'ai une belle voix et que je ne profite pas de la célébrité de mon père, et surtout de ma pseudo-célébrité pour arriver à mes fins. Tout n'est pas gagné, et j'ai un long chemin à traverser. Je ne compte pas profiter de la compassion des gens, ou l'amour qu'éprouvent les spectateurs pour mon père, pour gagner la compétition, parce que cela sera si facile pour être amusant. Ne votez pas si vous n'êtes pas convaincu, n'applaudissez pas si vous n'aimez pas, personne ne vous oblige. Et pour finir, que le meilleur gagne, Heaven vous donne un grand bisou sur les fesses.
Je conclus mon discours en envoyant un baiser volant à la caméra, et Jason a enfin le privilège de prononcer son mot magique, alias, couper !
— C'était... commence-t-il.
— Je n'ai pas besoin de ton avis, ce n'est pas comme si tu allais me payer pour mon monologue par exemple. dis-je en me dirigeant vers la porte.
En tout cas, vu sa grimace, il n'était pas sur le point de me jeter des fleurs.
— Connasse ! marmonne-t-il dans mon dos.
Le sourire aux lèvres, je regagne ma voiture et me dirige à nouveau vers le studio The Voice.
Quelques minutes plus tard, la sonnerie de mon téléphone vient interrompre le calme qui règne dans le véhicule. Je passe mon doigt sur l'écran pour décrocher et appuie sur le haut-parleur.
— Coucou Heaven !
Rien qu'entendre la voix enfantine de ma sœur allège la tension qui parcourt mon corps. Je laisse échapper un rire radieux pour camoufler la douleur qui perce mon cœur et secoue la tête. Elle me manque, alors que ça ne fait qu'une semaine que je l'ai quittée.
— Salut princesse ! Tu vas bien ?
— Oui ! Et toi ?
— Ça peut aller.
— Tu me manques Heaven ! S'il te plaît reviens... Je ne trouve plus personne avec qui jouer depuis ton départ.
Sa voix triste me brise le cœur et je sens la boule amère me monter à la gorge. Elle ne mérite pas tout ceci, elle ne mérite pas de rester avec une mère insouciante, irresponsable, loin de sa sœur et son père.
Je ne suis pas proche de ma mère et mes sentiments envers elle touchent à la haine. Malgré sa quarantaine d'années, elle ne semble pas franchir l'âge de maturité. Elle a raté notre éducation, échoué comme mère et comme femme, à cause de ses délires d'adolescence retardée.
Elle essaie de nous sauver, seulement, elle nous noie davantage à cause de ses caprices de maman poule. Elle ne semble pas remarquer que tout lui échappe. Son mari n'est plus avec elle, ses filles n'attendent que l'âge de maturité pour quitter le nid familial. Ça fait de la peine, on est censé être une famille parfaite, digne de l'image que nous projettent les médias. Seulement, ce n'est qu'un cliché déformé loin de l'excellence.
— Heaven ? Tu es encore là ? Je te passe maman.
J'entends maman râler de l'autre bout du fil, mécontente de devoir me parler. Apparemment, elle boude toujours à cause de ma décision de la quitter, et de revenir là, à Los Angeles.
— Salut maman.
— Parce que tu viens de te rappeler que tu as une maman qui s'inquiète pour toi ? Tu étais où depuis une semaine ? Je t'ai pourtant ordonné de m'appeler quand tu arrives ! Sans Noah, je n'aurais...
— En effet ! Ordonner ! Tu sais très bien que je n'aime pas recevoir des ordres ! Et je sais très bien que tu traces mes déplacements, alors tu es consciente que je suis arrivée saine et sauve, ça ne sert à rien de me réprimander sur des telles sottises.
— Parle mieux à ta maman !
— Oui maman, oui ma chère, tu as tout à fait raison. J'ai fait une grosse erreur et je te demande pardon ! je marmonne, amère.
Le bruit d'un klaxon derrière moi me fait sursauter, j'ai tourné à droite sans allumer le clignotant. L'impact d'être distraite par ma chère maman. Je sors ma main de la vitre, et adresse un doigt d'honneur au conducteur qui ose critiquer ma conduite, avant de me concentrer sur la route.
— C'est quoi ce vacarme ? Tu es dans la voiture ? Je t'ai déjà dit à mille reprises de ne pas parler au téléphone quand tu conduis ! Ton irresponsabilité va te-
— Oui c'est ça ! Au revoir maman !
Et je raccroche. Je réagis comme une garce, j'en suis consciente. Je dois me comporter mieux avec ma mère, mais... je ne peux rien y faire. À cause d'elle, on a perdu notre papa, notre raison de vivre. On est devenues orphelines sans l'être vraiment. Elle a commis des erreurs impardonnables, pourtant, il l'avait pardonné à chaque fois, parce qu'il l'aimait ! Parce qu'il nous aimait. Mais il y a toujours cette goutte d'eau qui fait déborder le vase. Et du jour au lendemain, on n'a plus revu mon père.
Elle a préféré son bien être sur notre bonheur, et elle en paie les frais.
Peut-être me fais-je des idées, mais j'ai toujours eu la sensation que maman ne nous a jamais aimé. Être enceinte de moi à ses dix-huit ans, à cause d'une déchirure dans le préservatif, a fait que sa carrière de mannequin divague légèrement. Devoir se marier avec mon père à ses vingt ans, était une obligation pour m'éviter l'étiquette de « bâtarde », malgré le mal qui fût déjà fait. Tomber à nouveau enceinte après dix-sept ans, parce qu'elle a oublié de prendre la pilule le jour de l'ovulation, a donné naissance à ma petite sœur. Ce qui a poussé ma mère à délaisser sa carrière et de rester coincée à la maison, pour prendre soin de son bébé. Je dois bien avouer que nous ne l'avons pas épargnée, si nous, on souffre à cause de sa nonchalance et son irresponsabilité, elle, elle a été victime de nombreux obstacles à cause de notre présence à ses côtés. Le Karma ne rate personne.
Enfin arrivée au studio, je gare la voiture dans le garage souterrain et coupe le moteur. Je me dirige ensuite vers l'ascenseur et monte au premier étage, où les participants attendent sagement dans les salles conservées pour cet effet.
Plusieurs tables et canapés sont éparpillés un peu partout, afin de pouvoir accueillir les centaines de participants qui n'attendent qu'à être devant le jury et pouvoir dépasser la première étape : les auditions à l'aveugle. L'ambiance chaleureuse et le doux éclairage servent à détendre l'atmosphère et diminuer le stress. Les distributeurs automatiques des marques de confiserie qui sponsorisent l'émission, jonchent chaque recoin de la salle, permettant aux participants de grignoter quelque chose entre temps.
Dire que je suis calme serait un mensonge, certes, je crois en mon talent et j'ai l'habitude d'être sous les projecteurs, mais seul le fait de monter sur scène sans mon père me rend anxieuse.
J'ai pris l'habitude depuis mon plus jeune âge de chanter avec mon père, lors de ses nombreux concerts à travers le monde. Mon père est, peut-être dois-je utiliser le passé puisque personne ne sait où il est, était un chanteur de Jazz, connu à travers le monde entier grâce à ses tubes qui dépassent les milliards de vue sur YouTube. Dire que je suis fière d'être sa fille sera un euphémisme, et si je dois consacrer un petit laps de temps pour parler de lui, je resterai une éternité sans pouvoir me lasser ou lui rendre hommage.
La vaste pièce est désormais déserte, contrairement à ce matin où elle ressemblait à une fête foraine. Il commence à se faire tard, et tous les autres participants ont dû passer alors que je perdais mon temps avec ce connard de Jason. En tout cas, je suis la dernière à performer.
— Ah te voilà ! je t'ai cherchée partout.
La voix forte de Brooklyn me fait sursauter, je pose une main contre mon cœur et me tourne vers elle, un sourire forcé sur les lèvres.
— Hey...
— Ferme-la et suis-moi à la scène, tu es en retard et ils commencent à s'impatienter.
Elle me tourne le dos et se dirige vers la porte qui mène aux coulisses. Les coulisses, sombres et légèrement éclairés par des reflets de lumière bleuâtre, insinuent le malaise dans mon être. Je regarde les employés qui s'activent autour de nous, sans nous prêter la moindre attention, déjà occupés à réaliser leurs propres tâches.
— Ce n'est pas de ma faute, blâme plutôt votre connard d'assistant réalisateur.
— Si tu ne faisais pas la tête pour ne pas filmer ce foutu reportage, tu aurais été là depuis deux heures déjà !
— Et subir le regard haineux de ces écervelées qui n'attendent que me sauter dessus ? Non merci.
Elle me jette un regard moqueur derrière son épaule, et demande à la maquilleuse de lui passer un rouge à lèvres.
— Comme si je ne te connaissais pas Heaven ! Je suis sûre que tu as réagi comme la star gâtée que tu es, et tu leur as jeté ton éternel regard hautain.
— Moi ?! Pas du tout. souris-je innocemment.
Elle m'adresse un regard qui en dit long et commence à appliquer le rouge à lèvres sur ma bouche.
Brooklyn est la présentatrice de The Voice, mais puisque ne nous sommes qu'aux auditions à l'aveugle, elle passe plus son temps derrière les coulisses que sur scène. Étant la petite amie de Noah, mon boss et le cousin de ma mère, je la connais depuis longtemps déjà. Elle est aussi présentatrice d'une émission télévisée sur les scoops de star, qui connaît un succès mondial.
— C'est bon, j'ai fini. Sors et éblouis tes spectateurs ! m'encourage-t-elle.
Elle m'ouvre la porte qui mène au plateau et m'adresse un clin d'œil. Je murmure un « compte sur moi » et avance doucement sur le sol glissant de la scène. Le bruit de mes escarpins retentit, et le « oh » des spectateurs se fait entendre dans la vaste pièce. Fébrile, je me dirige vers le piano qu'ils ont dû installer pour moi et m'assois sur le petit tabouret. Je fixe un moment les quatre chaises qui me tournent le dos, et laisse échapper un soupir. Mes chances d'être retenue sont minimes puisque les quatre équipes sont déjà bien remplies...
J'adresse un sourire aux spectateurs qui m'observent avec curiosité, et attends la voix qui me permet d'entamer la performance :
— Trois, deux, un.
Je presse mes doigts sur les touches du clavier et la légère mélodie qui résonne m'incite à fermer les yeux pour savourer le délice de ses notes. Ma voix retentit tremblante au début, j'ai toujours eu ce problème, le trac ou l'angoisse, j'en sais plus. J'essaie de repasser les conseils précieux de mon père dans ma tête, et de les appliquer sur ma performance. Je suis la fille d'Oscar Hart, je dois être digne de ce nom. Je dois rendre hommage à mon père...
Après quelques secondes, je reconnais enfin ma voix rassurée. J'ouvre les yeux pour regarder les spectateurs, au même moment, deux chaises se tournent et me font faces. Je souris aux deux stars, et regarde les deux autres membres de jury qui me tournent toujours le dos, anxieuse.
La peur s'empare de moi, l'angoisse me saisit les entrailles. Si je ne suis pas prise, maman va me renier. Déjà qu'elle m'a interdit toute affiche en média, savoir que je me suis rabaissée pour participer dans une émission d'amateurs, et sans être prise de plus est, va la conduire certainement à la folie. Heureusement, elle ne verra ça qu'après un mois, lors de sa diffusion sur la télévision et les chaînes internationales.
Un soulagement me gagne quand la troisième chaise se tourne et me fait face, et un sourire se faufile sur mes lèvres quand je croise le regard de mon ancien ami, River Scott, célèbre chanteur et producteur. Seulement ce soulagement n'est que de courte durée. Il ne reste qu'une place, et peut-être est-elle dans l'équipe de celui qui me tourne toujours le dos. Mes doigts tremblent, mais je continue à sourire pour faire bonne figure.
J'arque un sourcil quand je vois River quitter sa place et disparaître derrière la chaise de son voisin. Après quelques secondes, ce dernier me fait enfin face. J'avale mon sourire quand je croise son regard hautain et sent l'arrogance qui se dégage de lui. Je comprends enfin la raison qui pousse les gens à me détester, personne n'apprécie de se sentir méprisé par autrui, et ô combien j'ai tendance à regarder de haut les gens.
Un sourire amusé sur les lèvres, mon ami fait le tour des chaises et monte sur scène. Il vient se placer derrière moi et se penche vers mon oreille.
— Je te sauve la mise.
Apparemment, la dernière place était dans l'équipe de celui qui me regarde ennuyé à présent, depuis sa chaise de jury. Je souris reconnaissante à River, alors que je répète le dernier refrain de ma chanson. Il s'adosse contre le piano alors que je maudis ma chance de ne pas pouvoir intégrer son équipe.
Soulagée, je me mets debout sous les applaudissements des spectateurs enthousiastes. Je m'empare du micro que j'arrache de son pied, et adresse un sourire à River qui passe son bras autour de mes épaules et me pousse au milieu de la scène.
— Votre nom ?
Je lui adresse un rictus moqueur et lève les yeux au ciel.
— Heaven... Heaven Hart.
— Vous avez entendu les gars ! On a affaire à une star pendant cette saison !
Les cris des spectateurs me brisent les tympans, avec un signe de la main, il leur demande de se calmer.
— Dis ma chère Heaven, m'acceptes-tu dans ton équipe ? me taquine-t-il.
Je rigole comme réponse, alors que certains membres de jury lèvent les yeux au ciel face à son sens d'humour.
— Arrête ton flirt à deux balles et reviens à ta place River. s'écrie Britney Walker, célèbre chanteuse et mannequin.
— Jalousie quand tu nous tiens !
Elle lui adresse un doigt d'honneur en guise de réponse, et tout le monde éclate de rire. Il m'embrasse sur la joue et retourne à sa place.
— Passons aux choses sérieuses, commence Clarity White, rappeuse internationale. J'adore la chanson que tu viens de chanter, elle est magnifique !
Je souris timidement, et replace quelques mèches de mes cheveux derrière mon oreille.
— C'est un titre que j'ai écrit avec mon père quand j'étais au lycée, c'est la première fois que je le chante en public, donc j'appréhendais votre réaction. dis-je, enthousiaste.
— Laisse-moi te rassurer ma chérie, il est sublime ! Après tout, on ne s'attend pas à moins de la fille d'Oscar Hart ! Je suis ravie de te voir devant moi, et toute aussi déçue de ne pas pouvoir t'accueillir dans mon équipe.
Je hoche la tête et lui souris chaleureusement, j'ai toujours aimé écouter ses titres, et je peux me permettre d'avouer d'être une grande fan d'elle. Elle me rend mon sourire, et c'est à Britney de prendre la parole.
— Que dire ? Pour la première fois, je ne trouve rien à dire pour critiquer une participante. Je suis d'accord avec tout ce qu'a dit Clarity, tu étais merveilleuse, et j'aurais été ravie de t'avoir dans mon équipe, mais... dommage.
Elle hausse les épaules et je hoche la tête compréhensive. En vrai, cela m'étonne un peu qu'elles n'ont pas mentionné mon trac au tout début. En effet, j'ai une belle voix, mais cela n'empêche que j'ai également droit aux critiques, comme tous les autres participants. Mais s'ils jugent que ça importe peu de mentionner mes quelques erreurs, et que ma performance était idéale, autant pour moi.
— Pour être honnête, je suis le plus ravi de te voir ici ! Ça fait longtemps depuis la dernière fois qu'on s'est vu.
Je connais River depuis mon adolescence, disons qu'il était la découverte de mon père et que c'est lui qui l'a aidé à bâtir sa carrière. On était de bons amis, mais quand ma mère nous a obligés à fuir à Paris, j'ai perdu tous mes contacts.
— Six ans ?
— Le temps passe vite. N'oublie pas de me filer ton nouveau numéro avant de partir.
J'éclate de rire. À cause de son insouciance, il oublie presque qu'on est dans une émission qui va se diffuser à travers le monde entier.
— Si tu étais modeste, et tu répondais tes fans sur Instagram, tu aurais dû apercevoir mes nombreux messages... je marmonne en levant les yeux au ciel.
Les spectateurs éclatent de rire, alors que Clarity lève son pouce vers moi, signe d'encouragement.
— Peut-être que ta photo de profil ne me donne pas envie de te répondre.
Il m'adresse un clin d'œil alors que j'écarquille les yeux, outrée.
— Tu dois visiter un oculiste, pour ne pas voir une telle beauté, tu dois avoir des sacrés problèmes, me défend Britney.
— La solidarité féminine ! soupire River, mécontent.
— Chris ? Le chat a avalé ta langue ? se moque Clarity.
Ce dernier lève son regard vers moi et m'adresse un sourire moqueur.
— Tu étais nulle.
Je manque de tomber mais je tiens mes jambes, tout mon corps semble si lourd, choqué. Les spectateurs me regardent attentivement, attendant ma réaction, alors que les trois stars le fixent étonnés.
— Mec, tu as bu pendant la pause ? Ce n'est pas la meilleure manière pour souhaiter la bienvenue dans ton équipe, soupire River.
— Qui a dit que je la prends ? C'est toi qui as fait tourner ma chaise pour sauver la dignité de ta chère amie. Je n'en veux pas d'elle.
Je le regarde sans vraiment comprendre ? Qui est-il pour oser me parler ainsi ? Ah pardon, il est l'acteur le mieux payé d'Hollywood, le chanteur le plus célèbre et le directeur de la plus grosse maison de production à Los Angeles. Il a bâti une carrière de rêve en seulement dix ans, avoir vingt-six ans et le monde entier à ses pieds laisse à désirer. Mais soyons honnête, il est un nepo baby, tous ces exploits importent peu quand tu es destiné à prospérer avant même ta naissance.
Les larmes me montent aux yeux à force de me sentir si impuissante et rabaissée.
— Très bien, même si c'est contre les règles, je peux la prendre et tu peux choisir n'importe quel participant de mon équipe en échange. tente River alors que j'essaie de me concentrer sur ma respiration pour ne pas craquer.
— Ton équipe est nulle, je refuse. Elle peut tout simplement partir, en tout cas, même si elle reste, elle ne peut pas réussir la deuxième épreuve. lui réponds le connard.
— Si t'as des problèmes avec elle, tu les laisses en dehors de la compétition Chris ! Peu importe comment, ta chaise a tourné, donc elle doit intégrer ton équipe. déclare Clarity, sereinement.
— Je n'ai aucun problème avec elle, je ne la connais même pas. Je ne veux pas d'elle dans mon équipe parce que je ne suis pas convaincu de son talent. Tu as entendu comment sa voix a tremblé au début ? C'était pathétique.
— Ça s'appelle stage fright, ça arrive à tout le monde, en plus elle s'est vite rattrapée donc je ne vois pas où est le problème.
— Ça arrive à tout le monde ? se moque-t-il. Ce n'est pas mon problème si vous êtes une bande d'amateurs. Elle ne va rien ajouter à mon équipe donc j'ai le droit de ne pas la prendre. Si elle croit que son nom va lui permettre de...
Mon nom ? Je craque.
— Mais ferme-la putain ! Si je profitais de mon nom comme tu le dis, je n'aurais jamais pensé à venir ici, dans une compétition d'amateurs et me mettre en question de telle façon. Si je profitais de mon nom, j'aurais fait signe à n'importe quel studio d'enregistrement qui sera honoré de me faire des dizaines d'albums. Mais non ! Je ne voulais pas de tout ça, si facile pour être passionnant. Je voulais prouver que je suis digne de ce nom. Je suis fière d'être la fille d'Oscar Hart, n'importe qui rêverait d'être à ma place, y compris toi. Donc ne viens pas douter de mon talent simplement parce que je possède déjà une renommée, tout le monde sait que tu n'en es pas là grâce à ton talent uniquement non plus. Alors tu sais quoi ? Ton délire ne me fait ni chaud ni froid. Tu ne me veux pas dans ton équipe ? Très bien, je m'en fous, or, je vais l'intégrer quand même parce que ça fait partie des règles, et tu ne peux rien y faire. Tu vas me mettre à la porte ? Essaie que je vois ça.
La salle est silencieuse, seul le bruit de ma respiration saccadée brise le silence. Tout le monde est choqué par ma tirade et semble attendre la répartie de Chris, qui n'arrive pas tout de suite.
Je me suis peut-être emportée. J'ai toujours eu ce problème, qui me cause des sacrés ennuies. Je m'abandonne à ma colère, je perds vite mon sang froid. Et c'est bien ce qui rend ma personnalité encore pénible. J'adresse un coup d'œil à River qui m'adresse un sourire rassurant, et détourne le regard vers Chris qui, contrairement à mes attentes, semble amusé par la situation.
— J'aime bien ton sale caractère. se moque-t-il.
Incrédule, j'arque un sourcil et le regarde de haut en bas. C'est tout ce qu'il trouve à dire ? Après tout ce que j'ai dit ? Je laisse échapper un rire son joie et lève mon bras pour faire tourner mon index à côté de ma tête, lui demandant silencieusement s'il est cinglé. Un rictus moqueur vient orner ses lèvres, et il commence à s'étirer sur sa grande chaise rouge, las.
— Je suis épuisé, on a fini pour aujourd'hui n'est-ce pas ? La dernière catastrophe était celle-ci non ?
Il s'adresse au réalisateur qui hoche la tête docilement. Tout le monde a peur de lui ou c'est quoi le délire ?
— Chris !
River le foudroie du regard et me désigne avec sa tête, alors que je me trouve toujours sur scène comme une idiote.
— C'est bon je la prends ! J'ai l'impression de marchander dans un bordel.
Une grimace étire aussitôt mon visage.
— Pour quelqu'un qui a l'habitude de se faire payer des putes pour assouvir ses désirs, ce n'est pas mal comme métaphore, mais tu dois faire plus d'efforts pour faire bonne figure.
Je déclare alors que je descends les escaliers qui mènent aux chaises des jurys. Apparemment, ma performance va être la cible des articles de presse et des réseaux sociaux. Pour passer inaperçue, c'est déjà peine perdue. Mais bon, j'ai ajouté un peu de piments à leur ennuyeuse journée.
Je serre la main des deux stars et fais la bise à mon ami.
— Ne t'inquiète pas, tout ça sera coupé et modifié en montage. Si seulement tu savais toutes les conneries qu'il nous a fait subir le long de la journée. me chuchote River, ennuyé.
Je hoche la tête et force un sourire à son intention. Je ne pense pas que le montage réussira à camoufler quoi que ce soit, il m'a humilié, j'ai riposté, et par conséquent je vais m'attirer les foudres de ses groupies. Comme si j'avais besoin de commencer ma carrière par provoquer les fans de la personne la plus influente de Hollywood.
Je laisse échapper un soupir et arrivée devant Chris, je pose mes mains sur mes hanches et le toise du regard.
— Je pense qu'on va se croiser suffisamment pour faire ample connaissance et se haïr davantage, non ?
— En effet Heaven, bienvenue dans mon enfer.
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