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– C'est là que tu travailles ? m'étonnai-je alors.
– C'est le siège de la boîte, je n'ai qu'un petit bureau dans ce bâtiment.
Ouais, enfin, c'était déjà pas mal ! Les bureaux se situaient dans un grand immeuble classe et chic, aussi impressionnant qu'intimidant pour moi. C'était la première fois que je mettais les pieds dans une ville aussi grande, aussi dynamique... Et ça me rendait nerveux. Les voitures, les va-et-vient des gens pressés, les bruits incessants tout autour de moi... Il y avait de quoi donner le vertige.
Maximilian, lui, restait stoïque et impassible. Il était sur son terrain et ça se sentait. Ses iris me cherchaient régulièrement, pour vérifier que je ne paniquais pas trop... Ses iris croisaient régulièrement les miens, il me souriait, et ça m'apaisait un peu.
Nous étions entrés dans le bâtiment, puis une fois être passés devant le personnel d'accueil, nous étions montés au quatrième étage avec un ascenseur.
Tout le monde ici était tiré à quatre épingles – même Maximilian avait fait un effort supplémentaire – au téléphone via des oreillettes, parcourant l'étage avec des papiers à la main dans un brouhaha étourdissant. Je suivis Maximilian de près, intimidé par l'agitation. Il salua plusieurs personnes, sans que je ne sache si je devais l'imiter ou non.
Nous avions traversé le large couloir pour nous diriger vers un bureau spacieux différent des autres. Il se situait en face d'un autre, identique, où un homme qui devait avoir le même âge que Maximilian discutait tout seul. Enfin, il devait parler au téléphone, mais avec le haut-parleur. Il avait des cheveux blond coupé court et des yeux d'un vert émeraude intense qui fusillèrent Maximilian avec une froideur assassine. Son visage était terriblement beau et cette expression le gâchait complètement.
– Installe-toi, m'invita Maximilian, me sortant de mes pensées. Je risque d'en avoir pour un moment, mais je ferais de mon mieux pour écourter au maximum.
Un hochement de tête maladroit lui répondit. Ne voulant me retrouver seul en pleine ville, j'avais insisté pour l'accompagner. Enfin, il me l'avait proposé, gêné de me laisser seul à l'hôtel – je m'y serais fait, même si j'étais curieux de voir où il travaillait. Pour le moment, je n'étais pas déçu.
– Je détonne un peu, marmonnai-je, tandis qu'il sortait ses affaires de sa sacoche.
Je portais les vêtements trop grands et démodés d'Edward. Ils tenaient bien chaud et c'était nécessaire pour combattre le froid qui s'était abattu sur la région ces derniers jours... Mais je regrettais un peu d'avoir chaud quand je voyais à quel point j'étais mal habillé par rapport aux autres.
– Ne fais pas attention à tout ça, c'est clinquant à cause des clients de marques.
– Ça n'empêche pas que je détonne.
Il m'observa une seconde avant d'ouvrir son ordinateur portable. Mon regard vagabonda dans la pièce, aseptisée au possible. Même pas un bibelot ou un cadre. Il n'y passait pas beaucoup de temps, c'était sans doute pour ça.
– On est passé devant le coin café, reprit-il en pianotant sur son clavier, si tu veux quelque chose dis, que tu viens de ma part.
– Tu crois qu'on va me croire ?
Son regard trouva le mien, puis il me concéda le point. Sa main chercha quelque chose dans sa veste, puis il me tendit sa carte d'accès :
– Fais-toi plaisir, il est possible que le déjeuner soit retardé.
Je l'avais pris par politesse, je ne comptais pas dévaliser les placards après le petit-déjeuner de roi auquel j'avais eu droit ce matin, à l'hôtel...
Un long silence s'installa, tandis qu'il pianotait frénétiquement sur son clavier. Le blond du bureau d'en face ne le quittait pas du regard, contrarié. Moi, je n'existais pas – et ça m'allait plutôt bien.
– Ne fais pas attention à William, me dit-il alors sans lever les yeux de l'écran. On a du mal à cohabiter tous les deux.
Ça ne m'étonnait qu'à moitié. Le problème que rencontraient les Alphas comme lui se situait clairement au niveau des relations avec d'autres meneurs du genre... Même si ce William n'était pas un Lycan. Malgré tout, j'avais du mal à imaginer Maximilian mal s'entendre avec quelqu'un. C'était un type calme, avec du sang-froid – il arrivait à m'apaiser, malgré tout ce que j'avais pensé en le voyant, ce qui n'était pas rien quand même !
Je fus sorti de mes pensées brutalement : on ouvrit la porte sans frapper, j'avais sursauté en loupant un battement de cœur. L'homme qui avait ainsi troublé mon calme avait la vingtaine, une touffe blonde claire qu'il avait tenté de dresser en vain, un large sourire et des yeux brillants de malice. Sa voix était claire, agréable et chaleureuse :
– Max ! s'exclama-t-il sans m'accorder un regard. Déjà de retour ?
Enfin, son regard tomba sur moi. Je le dévisageai avec de grands yeux, encore choqué par son entrée. Son regard changea, devenant plus intense et plus mystérieux. J'avais l'impression qu'il m'évaluait. C'était le cas :
– Stagiaire, dit-il en me pointant du doigt.
– Client, corrigea Maximilian sans s'interrompre.
Le blond papillonna des yeux, confus et déstabilisé, hésitant à le croire. Je n'avais rien à voir avec le genre de client qu'ils devaient avoir, ici.
– Merde, excusez-moi, j'ai cru que...
– Langage, coupa Maximilian avec autorité. On frappe avant d'entrer. On se présente et on serre la main au client. Puis à moi.
Déconfit, le blond s'exécuta, se confondant en excuse sans lâcher ma main. Je n'osais pas le lui faire remarquer.
– Si tu comptes lui demander sa main, je vais devoir opposer mon veto, reprit Maximilian, taquin.
Enfin il me lâcha, se confondant en excuse à nouveau. Il serra la main de Maximilian, qui souriait, espiègle et moqueur :
– Kaeden n'est pas un client, mais il aurait pu, avoua-t-il finalement en se rasseyant. Imagine qu'il s'agisse du fils d'un client – on aurait l'air de quoi s'il racontait qu'on débarque dans les bureaux en brayant ?
– Euh, oui, pardon. Je m'emporte facilement. James.
J'avais hésité à serrer sa main, de peur qu'il me la prenne définitivement. Ce qui ne fut pas le cas.
– On va déjeuner ? Demanda le blond, plus timide. La carte a légèrement changé depuis la semaine dernière.
Maximilian hésita. Il cessa de pianoter sur son clavier et me lança un regard étrange, comme s'il attendait une approbation de ma part. Cependant, il ne me laissa pas le temps de répondre.
– Hamburger-frite, c'est possible ?
James le toisa avec incompréhension, balbutia une sorte de réponse positive, ce qui motiva Maximilian à accepter.
– C'est pour moi, le hamburger-frite, murmurai-je face à son incompréhension.
– Tu rigoles, rassure-moi ! Dans un trois étoiles ! Attends, je vais te trouver un plat que tu vas aimer manger, je suis doué pour ça !
Maximilian se contentait de sourire, reprenant son pianotage intempestif sur le clavier, m'abandonnant aux griffes du blond qui ne cessait de parler. Je le trouvais sympathique, mais bavard.
On se fit à nouveau interrompre par la porte du bureau qui s'ouvrit à la volée. Cette fois, je n'avais pas sursauté, même si j'avais été surpris. Bizarrement, James s'était tu, refermé comme une huître, et Maximilian restait imperturbable. C'était ce « William » du bureau d'en face qui venait d'arriver, pas franchement content d'avoir à parler à être en face de nous.
– Le grand patron veut te voir dans son bureau, adressa-t-il froidement à Maximilian, avant de se tourner vers James : et toi, t'as pas des choses à faire à la place de discuter avec les stagiaires ? Vous, vous descendez d'un étage et vous vous présenté à Kate, elle va vous briefez sur ce que vous avez à faire et la... tenue adéquate.
– Kaeden est avec moi, le reprit Maximilian, et pourrait bien être le fils d'un client.
Le regard de William me transperça, clairement renfrogné :
– Ne nous envahis pas avec les cas sociaux de ton frère, tu seras gentil ! Papa t'attend et il déteste attendre.
Sur ce, il ferma la porte dans un froid glacial. Je déduisais qu'il devait être le fils dudit « grand patron », ce qui expliquait son sans-gêne et son arrogance. James avait l'air déconfit. J'étais impressionné par ce que trahissait son visage, ça avait l'air si facile pour lui... J'enviais vraiment ce genre de personne, capable d'extérioriser ses émotions aussi facilement.
– J'imagine que j'ai des trucs à faire, souffla James. Je réserve pour trois, alors. On se voit tout à l'heure !
Sur ce, je m'étais retrouvé seul, planté comme un idiot devant le bureau. Maximilian croisa mon regard avec un petit sourire qui m'en arracha un :
– Je t'ai promis un hamburger-frite et je tiendrais parole, murmura-t-il alors. Si tu veux aller sur internet, tu peux, mais ne supprime rien et n'hacke pas le pentagone en mon absence...
– Je devrais réussir à l'éviter. Tu devrais y aller.
Il se leva et enfila sa veste de costume, puis remit sa cravate en place d'un geste sur. Il passa devant moi avant de faire volt-face :
– Si William vient t'embêter, remballe-le. Je t'expliquerai plus tard. Oh, ne perd pas ton sang-froid avec lui, ça ne sert à rien.
Il quitta la pièce sans franchement m'en dire plus ou me laisser le temps de poser la moindre question. Pourquoi viendrait-il m'embêter, ce type ? Et puis pourquoi je devrais faire attention à mon sang-froid? J'étais un mec calme si on ne me cherchait pas. Peut-être qu'il me mettait en garde contre ça.
Un peu perdu, j'avais pris sa place puis avais observé son ordinateur avec indécision. Je ne voyais pas trop quoi faire avec – même si ses derniers jours j'avais rêvé d'y avoir accès.
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