Chapitre 68...

Les joueurs restant se lèvent au centre de la place. Il ne reste plus que Oliver et Alexanne. Ces deux derniers se regardent en se demandant ce qui va leur arriver. La partie doit être terminée car la Bête a été trouvée et tuée. Et c'est Lexy qui l'a trouvée. Lexy que ses amis avaient condamnée.

– Tu nous trouves trop durs avec elle ? Demande alors Alexanne.

Oliver n'a pas besoin d'un nom pour savoir de qui Alex parle. Il plisse légèrement les lèvres avant de répondre en haussant les épaules.

– Il faut dire qu'avec ce qui s'est passé avant...

– Oui...

Soudain, le décor autour d'eux se met à bouger, devenant petit à petit la forêt dans laquelle ils se trouvent depuis le début. Là, Matteo, Caroline, Gabin et Lexy les attendent assis sur le sable du chemin. Lexy est la première à se lever. Elle adresse un regard au couple avant de dire simplement :

– Vous voyez ? J'avais raison.

Alexanne se tourne vers elle avant de s'excuser :

– Désolée Lex', on aurait dû te faire confiance...

La jeune femme prend un air confiant face aux excuses de son amie. Elle ne lui en veut pas. Elle sait qu'elle a merdé et qu'elle doit regagner leur confiance.

Caroline se lève à son tour, suivie par Matteo et Gabin.

– On continue ? Demande ce dernier en soupirant.

Les étudiants marchent depuis quelques minutes lorsque la forêt autour d'eux commence à devenir de plus en plus lugubre. Les arbres n'ont aucune feuille et le vent se met à souffler. Le soleil semble également s'être couché et une lune ronde devient leur éclairage.

Les joueurs se rapprochent tout en marchant, une légère angoisse au ventre.

Menteurs... Assassins... Pas dignes de confiance...

– C'est quoi ces voix ? Souffle Matteo en regardant autour d'eux.

Personne n'a de réponse.

Ils continuent à avancer tout en examinant les environs avec appréhension. L'atmosphère se fait de plus en plus lugubre.

Ils passent un tournant puis s'arrêtent soudainement. Un homme se tient debout dos à eux au centre du chemin. À la lumière de la lune, les étudiants ne le reconnaissent pas. Ils s'approchent alors doucement avec précaution.

Ce n'est qu'à quelques mètres de lui que les joueurs voient qui il est : le Forain. Ou plutôt l'une de ses apparitions.

L'homme en vert se retourne en direction de ses joueurs qui s'arrêtent net. Il les salue en levant son chapeau avant de le reposer délicatement sur sa tête.

– Mes chers joueurs ! Lance-t-il avec une voix enjouée.

Les étudiants se lancent des regards en se demandant ce qu'il va encore leur inventer. Le forain les fixe les uns après les autres, attendant une réponse. Voyant que ses joueurs restent silencieux, il se décide alors à continuer :

– Si nous faisions en sorte d'accélérer cette partie ? Je pense que vous, tout comme moi, avez envie d'en finir.

– Que voulez-vous dire par «accélérer» ? Questionne Gabin.

Caroline a bien une réponse mais elle préfère garder le silence.

Ernest Filibus apprécie cette question et donne son explication tout en prenant un air théâtral :

– Très simple mon cher Gabin ! Accélérer pour faire en sorte d'en finir avec vous le plus rapidement possible. Car voyez-vous, je suis las.

À ce dernier mot, l'attitude du forain devient plus froide et angoissante. Son visage arbore des yeux sombres et son timbre de voix est aussi grinçant qu'une vieille porte. L'homme se recule légèrement tout en tendant les bras sur le côté. Aussitôt une porte noire apparaît derrière lui.

– Avant votre avant dernière épreuve, j'ai une question à poser à chacun. L'honnêteté est recherchée bien entendue.

Un silence se répand par la suite parmi eux, silence voulu par Ernest afin de rendre son intervention encore plus spectaculaire. Il se tourne par la suite vers Matteo :

– Joueur Marron ! Avance toi.

Matteo sursaute en entendant sa couleur et s'exécute docilement. Le forain ne le lâche pas des yeux ce qui le rend mal à l'aise.

– Assassin ? Menteur ? Ou pas digne de confiance ?

– Pardon ?

– Répond à la question ! Hurle le forain.

Matteo regarde autour de lui sans savoir quoi répondre.

– Je...

Il n'a pas le temps de terminer sa phrase que le forain, dans un geste plus rapide que la lumière, lui a coupé la langue.

– Menteur. Dit-il avant de le pousser en direction de la porte.

Matteo a les yeux exorbité et pousse des cris étouffés tout en essayant de toucher sa langue.

Le forain n'a que faire de ce dernier et il se tourne alors vers Caroline.

– Joueur vert !

La jeune femme s'avance, prête à recevoir un châtiment équivalent.

– Assassin ? Menteuse ? Ou pas digne de confiance ?

Caroline sait au fond d'elle même la réponse qu'elle doit donner. Elle sait également que si elle donnait une autre réponse, son sort serait funeste.

Alors la jeune femme déglutit une dernière fois avant de dire :

– Assassin.

Cette réponse surprend les autres joueurs. Mais Caroline sait très bien ce qu'elle a fait. Il est temps d'en assumer les conséquences. Elle aperçoit le forain esquisser un léger sourire avant que, d'un coup de vent, une entaille se forme au niveau de son ventre. Le sang se met à couler et Caroline s'empresse de presser la blessure avec son haut tout en se dirigeant vers la porte.

– Joueur Violet ! Continue le forain.

Lexy s'avance la tête haute. Elle sait déjà la réponse qu'elle va devoir donner.

– Assassin ? Menteuse ? Ou pas digne de confiance ?

– Assassin.

La jeune femme va devoir assumer ce qu'elle a fait à Gabin lors de la partie précédente. Elle attend sa blessure avec un mélange de crainte et de honte. Ernest Filibus l'entaille alors au ventre comme il a fait à Caroline. Puis la jeune femme est poussée vers la porte.

– Joueur Jaune !

Gabin s'avance la tête haute et ne laisse même pas le temps au forain de poser sa seconde question.

– Menteur.

Il sait où ses mensonges les ont conduit ses amis et lui. Le forain le regarde toujours avec son sourire machiavélique et Gabin passe également la porte, sa langue coupée comme Matteo. Puis, l'homme en vert se tourne vers Oliver.

– Joueur rouge ?

Il n'a pas besoin de poser la question à Oliver car celui-ci lui répond tout en regardant Alexanne :

– Je n'ai pas été digne de confiance... surtout à ton égard.

À ces mots, la magie du forain rend les yeux d'Oliver de plus en plus blancs si bien qu'ils ne ressemblent plus qu'à une pupille entièrement blanche et cerclée de noir. Par la suite, sa magie le pousse vers la porte où il disparaît comme tous les autres.

Alexanne se retrouve alors seule avec le forain en qui elle voue une haine inconsidérable. L'homme la regarde avec un air supérieur. Il sait le pouvoir qu'il a sur ses joueurs. Alexanne ne baisse pas le regard pour autant. Elle a déjà réussi à retourner dans l'attraction pour sauver ses amis alors que normalement il est impossible de retracer cette attraction magique. Déjà qu'il est impossible d'en sortir vivant. Grâce à ses amis, elle a défié l'impossible et compte bien ne pas s'arrêter là. Ils sont six à avoir entamé cette seconde partie et elle compte bien à ce que les six en ressortent vivants.

– Joueur bleu ? La questionne-t-il en haussant un sourcil par dessus son monocle.

– Pas digne de confiance. Mes amis avaient confiance en moi et je n'ai pas réussi à les sauver.

– Tu n'y arriveras pas, se permet Filibus tandis que les yeux d'Alexanne deviennent comme ceux d'Oliver.

– On verra ça, le contre Alexanne d'une voix confiante.

Elle est entraînée par la magie et dépasse la porte sans rien ajouter. Une fois disparut, le forain attrape son monocle avant de l'essuyer à l'aide d'un mouchoir brodé.

– Tu ne sais pas contre qui tu te bats...

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