Chapitre 45...
– Et si on reprenait tout à zéro Alexanne, propose Juliette Robert, la psychologue en charge de la jeune fille.
Alexanne serre les dents en fixant cette femme aux cheveux noirs en carré à la Blanche Neige.
– Elle est conne ou quoi ? Se demande la jeune fille intérieurement. Ça fait dix fois au moins que je lui raconte toute l'histoire...
Alexanne se redresse doucement sur son fauteuil velours verre. Ses blessures ne sont pas totalement guéries mais depuis une semaine, la jeune fille a quitté l'hôpital. Elle doit néanmoins revenir tous les lundis et jeudis pour son suivi psychologique.
Juliette porte son regard sur les mains d'Alexanne. Celles-ci n'arrêtent pas de s'ouvrir et se fermer sous la colère de la jeune fille. Juliette baisse alors les yeux pour noter des choses dans son carnet.
– Est-ce que Oliver, Lexy et Gabin représentent la vérité pour toi Alexanne ?
Alexanne ne répond pas. Elle sait que cette femme ne la croit pas. Cela ne sert à rien de discuter avec elle. Elle jette un coup d'œil à l'horloge en bois au dessus du bureau.
– Encore quarante cinq minutes... ça ne fait que dix minutes que je suis là...
Alexanne inspire un bon coup avant de daigner répondre à la psychologue :
– Je ne sais pas ce que vous entendez avec cette question de psy mais tout ce que je peux vous dire c'est que j'ai trois amis qui ont disparu. Trois amis dont personne ne semble se souvenir. Comme s'ils n'avaient jamais existé...
Juliette note encore des choses sur son carnet avant de poursuivre :
– Mais ces trois amis dont tu me parles, tu as une photo d'eux ? Sur ton téléphone peut-être ?
– Vous savez très bien que je n'avais plus mon téléphone quand on m'a retrouvée. Donc non je n'ai pas de photos. Et celles qui étaient chez moi on disparut également.
– Ces photos... réfléchit la médecin, les vois-tu en mémoire ?
– Oui.
– Peux-tu me dire comment elles sont quand tu les vois ?
– Bah... ce sont les photos comme je les avais chez moi. Avec mes amis et moi dessus.
– Ces photos ne sont pas des fantasmes ? Des choses que tu voudrais être vraies pour oublier ce qui t'es arrivée ?
– Qu'est-ce qu'elle raconte ? Se demande Alexanne.
– Je crois, continue Blanche Neige, que tu as besoin de te dire que tes amis sont vivants et existent pour te donner une raison d'oublier ce qui t'es arrivée Alexanne.
La jeune fille lève les yeux au ciel face à ce diagnostique.
– Ouais en gros je suis schizophrène c'est ça ? Traduit Alexanne en croisant les bras.
La médecin ne répond pas et se contente d'écrire une nouvelle fois dans son carnet.
– Vous savez quoi ? Lance Alexanne en se levant, créant de la surprise chez Juliette Robert. Je crois que vous avez raison. Oui je suis schizophrène et je m'invente une autre vie pour oublier (elle dit le dernier mot en créant des guillemets avec ses mains). Alors vu que je suis ce que vous dites, j'ai également des troubles du comportements qui me font quitter votre cabinet plus tôt que prévu car j'en ai marre. À jeudi docteur.
Sur ce, la jeune fille quitte la pièce sans prêter attention au docteur l'appelant. Elle rejoint sa mère dans la salle d'attente. Sophie est plongée dans un magasine de cuisine et semble apprécier une recette de tarte aux poivrons. Elle lève les yeux en sentant une présence s'approcher et est surprise de voir sa fille.
– Alexanne ? Sophie regarde sa montre pour vérifier l'heure. Mais tu as encore trente minutes de consultation...
– J'ai fini. Lui répond sa fille d'une voix sèche. Je veux rentrer.
Sophie Genêt baragouine quelque chose tout en récupérant ses affaires et puis suit sa fille dans le couloir de l'hôpital. Dehors, les deux femmes montent dans la Skoda Fabia grise puis Sophie les ramènent jusqu'à chez elles.
Arrivées, Alexanne monte dans sa chambre avant de claquer la porte. Sophie entre à son tour dans la maison et sursaute en entendant la porte. Elle fixe un instant l'escalier avant de se décider à monter voir sa fille. Mme Genêt toque doucement avant d'ouvrir la porte et de voir sa fille allongée sur son lit.
– Chérie... il faut que tu me parles... si tu ne me dis rien, je ne peux pas t'aider... Dit Sophie d'une voix douce en venant s'asseoir à côté d'Alexanne.
Alexanne se met en position assise avant de répondre :
– Pour quoi faire ? Personne ne me croit quand je parle de mes amis.
Sophie regarde sa fille tristement. Elle aimerait pouvoir aider sa fille mais elle ne comprend pas d'où lui vient cette obsession.
– Et si... pense sa mère. Et si tu téléphonais à un ami ? Tu n'as contacté personne depuis que tu es rentrée.
– Mes amis maman ont disparu. Je ne vois pas qui je contacterais.
– Et Matteo ?
– Qui ? Alexanne regarde sa mère en ne reconnaissant pas ce prénom.
– C'est un garçon qui est en classe avec toi, vous étiez très proches.
Alexanne ne connaît aucun Matteo. Du moins, c'est ce qu'elle se dit.
Sophie finit par se lever.
– Il faut que je prépare le déjeuner.
– Attends, tu as le numéro de Ma...rco ? Demande Alexanne en réfléchissant.
– Matteo ? Moi non mais je crois que tu l'avais noté dans ton agenda.
Sophie quitte la pièce pour aller préparer son poulet tandis que sa fille se rue sur son bureau pour trouver son agenda. Une fois qu'elle a mis la main dessus, elle tourne toutes les pages afin de chercher ce numéro. Alexanne en est sûre, elle n'a jamais rencontré de garçon s'appelant Matteo et elle se souvient qu'elle n'avait personne dans sa classe à la fac s'appelant comme ça. La jeune fille n'était peut-être pas bavarde avec ses camarades elle reste quand même très observatrice. Et elle connaît les noms de tous ceux qui ont partagés sa classe. Et aucun Matteo à recenser.
Sur la page du 18 octobre, elle tombe enfin sur une écriture qu'elle ne reconnaît pas. Le prénom « Matteo » ainsi qu'un numéro est indiqué.
Alexanne se rue à l'extérieur de la pièce pour appeler sa mère.
– Maman. Je peux emprunter le téléphone ?
– Oui bien sûr ! Lui répond Sophie ravie.
Alexanne dévale les escaliers avant d'attraper le téléphone sans fil posé sur son socle dans le salon.
– Merci ! Lance-t-elle avant de retourner dans sa chambre en courant.
La jeune fille referme la porte derrière elle, s'installe sur son lit avec le numéro puis le compose sur le téléphone. Elle ne décroche pas immédiatement mais vérifie le numéro au moins trois fois avant de le faire. Puis Alexanne patiente bouche bée.
« – Allô ? Lance finalement une voix masculine au bout du fil. »
Alexanne ne dit rien, elle ne sait pas vraiment quoi dire.
« – Allô ? Répète la voix. »
– C'est... c'est Alexanne... finit par répondre la jeune fille avec une petite voix.
« – Alexanne ?! Comment tu vas ? Je suis si content de t'entendre. Ça fait depuis que l'on a appris que tu avais été retrouvée que j'essaie de t'appeler sur ton portable mais tu ne réponds pas. »
La voix semble soulagée de l'entendre.
– Désolée mais j'ai perdu mon téléphone.
« – Ah c'est pour ça. T'inquiète c'est pas grave. Comment tu vas alors ? »
– Je... tu pourrais venir chez moi cette après-midi ? J'ai besoin de discuter avec quelqu'un...
« – Tu veux que je vienne chez toi ? »
Alexanne est surprise par la question.
– Oui. Enfin si tu es disponible.
« – Oui, oui t'inquiète c'est juste que c'est la première fois que tu m'invites chez toi. D'habitude tu ne veux pas que tes parents me voient. »
La jeune fille se demande pourquoi elle agirait comme cela.
« – Tu dis que ta mère est horrible, rigole le garçon. »
– Tant pis pour ma mère, abrège Alexanne, il faut que l'on se voit.
« – D'accord, d'accord, c'est noté. Je viens vers deux heures, ça te va ? »
– Parfait.
Alexanne coupe la conversation puis descend prévenir sa mère. Sophie la regarde un instant avant qu'un grand sourire étire ses lèvres. Puis elle se met dans l'optique de tout préparer pour la visite de l'ami de sa fille. Alexanne tente de la freiner en essayant de lui faire comprendre qu'elle n'a pas besoin de préparer un buffet de gâteaux. C'est là que la jeune fille comprend pourquoi ce Matteo a réagi comme cela au téléphone.
Elle soupire face à l'entêtement de sa mère qui va quand même préparer des muffins puis reste dans la cuisine afin d'aider à mettre la table pour le repas.
*
La vaisselle enfin terminée et son père reparti pour le travail, Alexanne tourne en rond dans l'entrée. Elle est impatiente de rencontrer ce garçon qui semble la connaître. Sophie Genêt est installée devant la télévision et regarde un feuilleton centré sur la rencontre entre un milliardaire et une jeune fleuriste pauvre. Comme dans tous les feuilletons de ce genre, Alexanne connaît déjà la fin : le milliardaire va tomber amoureux de la fille en allant acheter des fleurs pour sa copine du moment, il va quitter la blonde riche pour cette fille innocente et pleine de qualité, s'en suit une amourette qui sera brisée par une quelconque bêtise ou un malentendu entre les deux, puis des réconciliations par demande en mariage et happy end.
– Ce n'est pas en restant devant la porte que ton ami va arriver plus vite Alexanne. Lui lance sa mère en se penchant sur le canapé pour la regarder.
La jeune fille ne dit rien et finit par venir s'asseoir sur le canapé avec sa mère. Elle jette vite fait un regard à la télévision pour voir que sa théorie est vrai : scène de rencontre dans le magasin de fleurs.
– Je t'avais dis que ça allait se passer comme ça. C'était assuré. Affirme Alexanne.
– Rhoo tu comprends rien. C'est romantique comme histoire.
Alexanne retient un petit rire puis on toque à la porte. La jeune fille se lève d'un bond et va ouvrir.
En ouvrant la porte, elle découvre un jeune homme à la peau légèrement mate, aux cheveux marrons foncés coupés à la mode et aux yeux noirs. Alexanne a besoin de lever la tête tellement ce Matteo est grand.
Matteo lui sourit tandis que la fille reste bouche bée. Elle qui avait tellement de choses à dire et demander voilà qu'elle se retrouve sans voix.
– Salut. Lui lance Matteo pour entamer la conversation.
La jeune fille bouge les lèvres pour murmurer un « bonjour » quand elle se retrouve plaquée contre le garçon qui l'embrasse avec passion.
Alexanne ouvre les yeux en grand prise de surprise.
– Je pense que tu as beaucoup de choses à me dire Matteo... se dit-elle intérieurement.
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