Quand j'entends la porte se refermer, mes épaules s'affaissent et j'inspire doucement sachant d'avance que la discussion sera compliquée. Je ne peux pas lui révéler cette partie de moi qui me fait prendre cette décision irrévocable. Ne sachant pas quoi faire ni quoi dire, je le laisse ouvrir les hostilités. Et puis s'il me hait cela sera plus facile pour lui de m'oublier. Car une chose est sûre en acceptant d'aller au Sanctuaire, j'accepte un aller simple pour l'enfer, . . . mon enfer.

Ses pas lourds se rapprochent de moi, je me prépare mentalement à ses mots qui seront sans nul doute cruels. Comment pourrait – il en être autrement sachant qui je suis et ce que je dois représenter pour lui.

_ Alors tu es sa . . . sœur, tu nous espionnais pour son compte ? Me demande – t – il d'une voix blanche, sans aucune émotion.

J'avoue que j'aurais préféré entendre de la colère dans sa voix que cette froide indifférence. Je me retourne et me heurte à son regard encore plus froid que sa voix. Même en y étant préparée, une douleur sourde irradie ma poitrine . . . mais je dois continuer.

_ Oui je suis sa sœur, . . . et non je ne vous espionne pas, répondis – je calmement.

_ Pourquoi n'as tu rien dit quand nous t'avons rencontrée . . . la première fois ? Poursuit – il toujours aussi froid. J'ai un aperçu de ce que devait être le shérif Grimes en plein interrogatoire d'un criminel avéré.

_ Si vous l'aviez su, . . . vous auriez accepté mon aide ? Non ! Et sans elle, Maggie aurait perdu son bébé en plus de Glenn. Et ça, . . . ce n'était pas possible, terminais – je en baissant les yeux et en soupirant.

_ Pourquoi ? Qu'est – ce que cela pouvait bien te faire ? Continue – t – il toujours aussi incisif.

Cette fois s'en est trop. Je comprend qu'il m'en veuille . . . mais je n'ai rien fait de mal. Je n'ai pas souhaité être la sœur d'un psychopathe maniaque du contrôle. J'ai juste gardé secrète une partie de ma vie qui m'est encore extrêmement douloureuse.

_ Oui, je suis la sœur de Negan et non je ne cautionne aucun de ses actes . . . Tu crois le haïr, . . . le détester, . . . mais crois moi, ce n'est rien en comparaison de ce que je ressens pour lui, lui rétorquais – je à bout de souffle et énervée.

Rick reste quelque peu surpris de ma réaction. Il reprend déstabilisé et moins froid.

_ Pourquoi ? . . . Pourquoi nous aider et te mettre en danger alors ? Me demande – t – il interdit.

_ Parce que même si je ne peux plus rien faire contre le mal qu'il m'a fait . . . je peux m'arranger pour limiter celui qu'il cause aux autres . . . Et en plus en retournant là – bas, j'ai une chance de faire sortir Daryl du Sanctuaire, . . .

_ Je . . . je ne te comprends pas, . . . Megan, me coupe Rick en se plantant devant moi pour capter mon regard.

_ Je ne te demande pas de me comprendre . . . je te demande de me laisser faire et d'accepter mon aide, terminais – je en plongeant mes yeux noirs dans le bleu océan des siens.

Nous nous sondons l'un l'autre, mais nous ne pouvons pas rester éternellement ainsi. En effet l'heure tourne et il ne me reste que peu de temps avant de devoir rejoindre Negan. Rick s'approche encore d'un pas. Son regard s'assombrit. Je déglutis connaissant que trop bien la suite des événements. Je ne sais pas si c'est la meilleure des idées mais dans quelques instants je ne serai plus là, . . . je ne serai plus moi . . .

Je comble l'espace qui reste entre nous et pose doucement mes lèvres sur les siennes. À ma plus grande surprise, il ne se détourne pas. Il ne me repousse pas. Il approfondit ce baiser sachant peut être lui aussi que se sera notre dernier. Je me perds alors quelques secondes dans cette bulle de bonheur.

Bulle de bonheur qui explose quand retentit le klaxon du camion de mon très cher frère. Je mets fin à ce baiser et lui souris pour la dernière fois. Je saisis mon sac et sors de la chambre avec un simple « au revoir » auquel je ne lui laisse pas le temps de répondre.

Je sors de la maison sans un regard pour les autres regroupés dans le salon. Je ne veux pas voir le dégoût que je leur inspire dans leur regard. Cela serait beaucoup trop douloureux à supporter.

J'avance doucement dans la rue principale d'Alexandria vers son camion. Au fur et à mesure que j'avance, je me blinde mentalement me préparant à affronter mon pire cauchemar.

Je quitte la ville sans un regard en arrière et m'installe dans le camion entre Negan et . . . Simon. Simon m'a toujours mise mal à l'aise, mais il n'osait pas m'approcher car Jake le maintenait à distance . . . mais maintenant je suis seule dans la fosse aux lions.

Personne ne parle dans la cabine du camion. Mais je n'ai pas besoin de regarder mon frère pour savoir qu'un odieux sourire illumine son visage. Ce silence n'est pas apaisant mais sinistre, . . . comme mon futur.

Lorsque j'aperçois enfin la lugubre usine désaffectée, que mon frère a baptisé le Sanctuaire se dresser devant moi, je frissonne malgré moi. Je ferme les yeux et serrent les poings jusqu'à ce que mes ongles entrent dans la chair de mes paumes de mains jusqu'à les faire saigner. J'essaie de repousser le plus loin possible mes souvenirs les plus insoutenables.

Je sursaute quand Negan donne un violent coup de frein devant le portail.

_ Bienvenue à la maison, me balance Negan avec un sourire en coin. Viens, je vais te montrer ta nouvelle chambre, l'ancienne n'est plus vraiment . . . habitable, termine – t – il avec un sourire sadique.

Je ne rétorque rien et descends à sa suite. Il me faut quelques secondes pour me réhabituer à l'obscurité et l'humidité qui règnent entre ses murs. Et comme à chaque fois que Negan se promène dans les couloirs, les membres de son groupe « Les sauveurs » se prosternent devant lui comme s'il était un roi. Cette pratique m'a toujours écœurée.

Il m'amène dans une partie du Sanctuaire que je ne me rappelle pas avoir exploré. Il finit par s'arrêter brusquement devant une porte et se tourne vers moi. Je recule d'un pas et lève la tête pour pouvoir le regarder dans les yeux. Car bien que nous soyons frère et sœur notre seul point commun venait de la couleur noire de yeux héritée de notre père. Pour le reste, il avait la stature de notre père et les cheveux bruns de notre mère. Alors que moi j'avais hérité de la petite silhouette de notre mère et de la blondeur de notre père. Mon dieu que penserait – elle si elle nous voyait maintenant. C'est idiot mais quelque part je suis contente qu'elle ne soit plus là pour voir ce que nous étions devenus . . . surtout son fils.

_ Bien, voici ta nouvelle chambre, dit – il en ouvrant la porte sur une grande pièce aménagée en studio avec une salle de bain. J'avoue que je suis surprise, je m'attendais plutôt à un cachot humide . . .

Je repose un regard interdit sur mon frère qui me regarde toujours avec cet horrible sourire sur les lèvres, puis il reprend.

_ Tout le monde n'est pas aussi heureux que moi de te revoir, . . . donc Big Joe te suivra comme ton ombre. Puis il se retourne en ajoutant, . . . on ne sait jamais ce qui peut arriver . . . avant de s'enfoncer dans les sombre couloirs de ma nouvelle prison.