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Pendant le voyage, ni lui ni moi n'avons parlé. Pour ma part, je n'avais pas le courage de lui poser des questions de peur de le déranger ou de paraître trop curieuse ; encore une fois. Il avait été si gentil de me ramener alors qu'il avait probablement mieux à faire. Je l'ai remercié comme il se devait et j'ai attendu que sa Jeep ait quitté la rue pour rentrer à l'intérieur de ma maison. Ma mère rentre tard se soir car nous sommes vendredi et qu'il y a toujours plus de monde à la boutique, je serais donc seule.

Je soupire en refermant la porte à clef derrière moi, pose mes chaussures et fonce dans la cuisine pour me prendre de quoi grignoter. Quand je suis stressée ou énervée, je mange. C'est juste de l'anxiété que j'extériorise par quelque chose. En l'occurrence, la nourriture et plus spécifiquement : les chips au fromage. Un délice !

Après trois heures passés devant Grey's Anathomy, mon téléphone se met à sonner sur mon lit. J'enclenche la pause de mon épisode pour décrocher.

— Allo ? demande Léon paniqué.

— Salut.

— Tu vas bien ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

— Ça va, t'inquiètes. J'ai pris un coup en sport et l'infirmière m'a obligée à rentrer chez moi.

Des bruits de lycéens riant, et les portes de casiers se claquant m'indiquent qu'il est toujours au lycée. Je vérifie l'heure: cinq heures de l'après-midi. La sonnerie de la fin des cours sonne à travers mon portable.

— Mais tu es rentrée comment ? s'étonne t-il.

— Euh...Kevin Hawkeyed m'a ramenée, lui murmuré-je d'une voix tendue.

Je sais très bien qu'il va me poser pleins de question. Et c'est ce qu'il fait sans hésiter, il est décidément plus curieux que moi, je crois. Oui, oui, on trouve toujours pire que soit !

— Sérieux ? s'exclame t-il.

Je recule brusquement l'appareil de mon oreille tellement sa voix m'a tiraillé les tympans.

— Oui, sérieux. Il s'est gentiment proposé.

— Ouais, ouais. Ne me fais pas croire n'importe quoi, Jocelyne Brenton !ricane t-il. Alors comme ça tu fricote déjà avec l'ennemie, hein !

Je m'affale le long de mon lit en éclatant de rire et soupire en m'ébouriffant les cheveux.

— Je fricote avec personne, ha, ha ! Je te jure qu'il n'y a rien, Léon. Tu me connais, mon slogan c'est : No love no-

Problems. Oui, je sais... mais tu es bien certaine de tout me dire ?

Je mets un temps à répondre à cette question dont la réponse est si évidente. Bien sûr, j'ai ressenti quelque chose, de très fort même. Cependant, ce n'était pas ce à quoi il pense. J'étais simplement mal à l'aise par ce geste que rare sont les personnes à avoir été protectrice avec moi mis à part ma mère et mon meilleur ami. Je ne veux pas avoir de sentiment ou d'attachement pour quelqu'un, et encore moi m'inventer de faux espoirs amoureux d'ado un peu trop excitée par ses hormones. Les histoires d'amours et moi... eh bien, justement, ça n'a jamais été une grande histoire d'amour.

— Rien qui te satisferait, mon cher, je réplique avec mon habituel ton sarcastique.

Je l'entends gémir de fausses tristesses. Une bruit de moto résonne soudain dans l'appareil.

— Mon frère est là, je te laisse. Rétablie-toi bien pour demain soir, si tu vois ce que je veux dire.

S'il avait été devant moi, je l'aurais vu me faire un clin d'œil narquois. Je ris à cette pensée.

— Merci, on se voit demain. Bonne nuit, Léon.

Je raccroche et jette mon téléphone sur l'oreiller où sont posés mes pieds. Ma main sur mon front, je remets mes idées en placent. J'ai une robe pour le bal, je n'ai pas de chaussures et j'ai été personnellement invitée par Kevin Hawkeyed, le riche bel homme sur qui je craque – involontairement. Mais que sais-je vraiment de cette nouvelle famille apparemment riche, apparemment célèbre et assurément étrange ? J'en connais déjà deux : Dereck, le présumé solitaire insociable qui aime la nature et Kevin le supposé lunatique qui change souvent de personnalité, qui est très, très beau, à mon sens et aussi extrêmement gentil.

Je sais aussi qu'ils possèdent une énorme baraque super flippante et qui, je suis persuadée, est hanté par les fantômes de Skylock qui dorment au cimetière. Une famille bien étrange sous leur air supérieur. Ils sont vraiment bizarre quand même, leur posture, leur allure élégante, leur regard vide et leur peau froide. On dirait des vampire ! riai-je, intérieurement.

Finalement, je me suis endormie dans cette position, laissant mon ordinateur se mettre en veuille. Je me suis réveillée le lendemain, une couverture m'entourant de sa douce chaleur. Ma mère n'a pas dû vouloir me réveiller, je l'entends d'ailleurs s'affoler avec des résonance de casserole. Je tourne paresseusement ma tête pour regarder l'heure sur mon radio réveil et comprends pourquoi elle est pressée. La porte claque furieusement, je reste après ça, un moment, dans mon lit, observant le plafond. Puis, je me décide à me lever lorsque les rayons du soleil atteigne ma tête.

Je me vêtis d'un pull sans épaules et d'un jean sombre, et sors prendre les transports en commun. Direction : le centre commercial. J'ai prévu de m'acheter ses fameux escarpins noirs pour ce soir, ma mère m'a justement laissée un peu d'argent sur le comptoir de la cuisine. Ce devait être probablement pour manger mais j'aurais bien assez pour les deux. Si je trouve des chaussures d'occasions, bien sûr.

Le bus me dépose à l'arrêt juste en face de l'épicerie locale. Il y a énormément de monde aujourd'hui, tout le monde semble se mettre sur leur trente et un. J'observe les passants, Madame Devar, la fleuriste d'origine russe, charge une camionnette de plusieurs ensembles floraux pour le bal. Tandis que Monsieur Adamson, le boulanger, finit de préparer les derniers petits gâteaux. C'est vraiment la foire dans cette ville, on dirait que c'est le pape qui vient de débarquer.

Je me promène sur l'allée principale en regardant à travers les vitrines arborant les murs de leurs magnifiques présentations de Noël. Je m'arrête devant une boutique de chaussures disposant en avant des escarpins rouge vernis. Je me penche plus près pour voir le prix, quand soudain, une ombre apparaît derrière mon reflet.










— Hey ! Comment on se retrouve ! s'écrie t-il en levant sa main en signe de salue.

Je sursaute et plaque mon dos à la vitre tellement son corps est près du mien.

Josh.

L'odeur de shampoing de sa chevelure légèrement bouclée me revient en narine à cause du vent. Et ses yeux noisettes toujours aussi effrayant me dévisagent. Depuis qu'il a disparu au cimetière, je ne l'avais pas revu. Mais son visage ne s'était pas pour autant effacé de ma mémoire. Je n'ose même pas le regarder en face. Alors, je choisis de fixer son t-shirt rose flachy et sa veste en jean de couleur marron, à la place. Je m'oblige cependant à lui répondre en enfonçant nerveusement mes mains dans mes poches.

— S-salut...

— Alors ? Il paraît que tu viens à notre fête ? C'est cool ! dit-il en souriant.

— Votre fête ? Tu es le frère de Kevin ? m'exclamé-je.

Tout joyeux d'apparence, son regard pétillant et son sourire, ne se décollent pas de son visage.

— Oui, tout à fait. Tu peux me tutoyer, tu sais, ricane t-il en mettant ses mains dans ses pochettes de jeans.

J'acquiesce et me décolle de la vitrine où je m'étais adossée. Tout en évitant de le fixer droit dans les yeux, j'observe sa mâchoire.

— Tu es là pourquoi ? lui demandé-je.

— Acheter un cadeau à ma mère. Et toi ?

Je me racle la gorge, mal à l'aise.

— Des chaussures pour ce soir.

Son sourire s'élargit, il se dirige en direction de la porte du magasin et me fait un signe théâtrale d'entrée. Cette joie presque enfantine qu'il dégage change de ses frères, ils sont l'opposé de lui. À vrai dire, même physiquement, aucun d'eux ne se ressemble mis à part la lueur dans leurs yeux. Ce qui est étonnant d'ailleurs, puisque dans une même famille on est obligé d'avoir quelque chose en commun. Je passe sous son bras et m'essuie les pieds sur le tapis du magasin.

Josh s'approche de moi et commence à analyser l'étendu de la boutique. Le pauvre, il semble perdu. J'ouvre la bouche mais aucun son n'a le temps de sortir car il me devance :

— Toi qui est une fille, tu n'aurais pas une idée de quel cadeau pourrait plaire à ma mère ?

À mon tour, je pose mon regard sur le grand espace devant nous et m'arrête sur le rayon des pantoufles. Je lui montre des doigts les articles et il explose littéralement de rire. Tous les clients se retournent pour observer ce jeune homme plié en deux, la main sur le visage. Mal à l'aise et complètement perdue par sa réaction, j'entame le couloir principal où sont exposées les bottes et les bottines. Histoire de m'enfuir de toute cette agitation. S'il continu à être aussi peu discret, les vendeuses vont lui demander de partir. Ce serait, dans un sens, un soulagement pour moi, mais bon. Je jette vite fait un œil aux modèles tout en poursuivant ma lancée.

Après s'être essuyé les yeux, tellement il avait rit, Josh me rejoint au fond de la boutique. Je commence à observer les modèles d'escarpins noirs présent sur les boîtes empilées devant moi. Je sens son coup d'œil, Josh ne me lâche pas depuis tout à l'heure. Je frissonne.

J'attrape l'une des paires avec une forme ronde sur la pointe. Je me dirige vers le miroir central, sans vraiment lui prêter attention. Il s'assoit sur le petit siège à coté du mien et me scrute entrain de les essayer. Je regarde le rendu en tournant le pied de droite à gauche. C'est plutôt pas mal, j'ai une préférence pour les gros talons et non les fins comme celui-ci. Mais, ce n'est pas trop haut et la forme me plaît bien. Le prix est même abordable. J'hésite, tourne à nouveau le pied, joue avec le talon. Je n'arrive toutefois pas à oublier la manière dont il me fixe, un sourire narquois collé à ses lèvres.

—Qu'est-ce qu'il y a ?

— Rien, c'est mignon...

— De quoi ?

— Ce que tu m'as montré, c'est des chaussures de vieilles.

Surprise, je me retourne vers lui, non sans cacher mon expression d'incompréhension. J'enlève la pièce que je viens d'essayer avant de venir le rejoindre.

— Ta mère a quel âge ?

— Moins que ce que tu lui donnes, répond-t-il en ricanant.

Je réfléchis en observant la paire que j'ai sous les yeux. Pour ma part, je suis sûre de mon choix. Elles conviendront parfaitement avec ma robe. Je regarde une dernière fois le prix pour m'assurer que je ne fais pas une bêtise. Josh dévisage chacun de mes gestes avec une lueur moqueuse dans ses pupilles. J'avoue que c'est un peu agaçant et en même temps, à regarder de plus prêt, il n'est pas si mal physiquement.

— Sinon, tu peux lui offrir un sac à main ? proposé-je avec une voix mal-assurée.

— Bonne idée, un à fleurs conviendra bien. C'est bien mieux !

Je lui souris. Il se fige sur place, semblant surprit. J'ai réussi je ne sais comment, à lui retirer son masque de clown ambulant qu'il gardé depuis notre rencontre. J'en profite pour me détourner de lui et ranger les autres boîtes de chaussures que j'avais sorti sans essayer le contenu. Je me mets à genoux et soulève difficilement les autres paquets. Soudain, l'une d'elle glisse de ma main moite et elles commencent toutes à me tomber dessus en suivant. Je n'ai pas le temps de réfléchir que mon corps est propulsé en arrière. Mes fesses s'écrasent sur l'un des sièges. J'entends quelques boîtes s'entrechoquer, Josh retenant les dix cartons dans un seul bras.

À une vitesse trop rapide pour mes yeux, il replace les boîtes comme elles étaient et me tend ses mains pour m'aider. Je les prends, encore abasourdie par la rapidité de la scène et son étrange force agile. Je ne suis pas sûre que des heures de musculation pourraient suffire à tenir dix lourdes boîtes de chaussures dans les bras. J'agrippe ses mains et il me relève avec une telle facilité. Comme avec Kevin, je semble être pour eux, aussi légère qu'une plume. Ma poitrine vient s'écraser sur son torse. Je sens mes paumes devenir moites au contact de son corps. Je remarque que sa poitrine a cessé de bouger, comme s'il... avait arrêté de respirer.

Ses yeux fixent intensément mon cou et sa bouche entrouverte laisse passer un filer d'haleine fraîche contre mon visage. Mon souffle se coupe également en m'apercevant qu'il n'a toujours pas lâcher mes mains, qu'il serre très fort, et que nous restons collés l'un à l'autre sans aucune raison. Josh commence à trembler et sa figure se rapproche de plus en plus de la mienne. Pourquoi je n'arrive pas à l'arrêter ou le repousser tout simplement ?

Quand soudain, le hautparleur transmet une voix féminine indiquant que le magasin va fermer ses portes. Il me lâche brusquement et part presque en courant.

C'est la douche froide, la déconnexion totale. J'ai littéralement l'impression que mon corps est comme poussé dans une baignoire remplie de glaçons. Il y avait une tension palpable entre son indescriptible regard face à la peau de mon cou et la chaleur qui m'a soudain envie contre son torse. Je reste un moment pétrifiée au milieu de l'allée centrale, mes main toujours en l'air comme si je le tenais encore.

Une employée vient me tapoter l'épaule, je la regarde incrédule, choquée par ce qui vient de se passer entre ce Josh et moi. Ou plutôt, ce qu'il s'est passé dans sa tête, que je n'arrive pas à déchiffrer.

— Madame, nous allons fermer. Veuillez vous dirigez en caisse, s'il vous plait.

Elle fronce les sourcils en me voyant ne pas réagir, puis finit par me laisser dans mes songes en rejoignant la caisse. La façon dont il m'a regardée, dont il a fixé mon cou, c'était tellement déstabilisant. J'ai du mal à reprendre ma respiration, mais mon téléphone qui sonne dans ma poche me rappelle à l'ordre. Le numéro affiché est celui de Léon.

— Léon ? dis-je d'une voix enrouée.

— L'unique ! Ça va ?

— O-oui, pardon. Je pensais à autre chose.

Je prends la boîte des escarpins dans ma main et me dirige en caisse pour payer.

— Vous réglez comment ?

— En espèce, répondis-je le téléphone collé à ma joue à l'aide de mon épaule.

Je donne le billet de vingt dollars à la caissière.

— Tu y vas comment au bal, ce soir ? poursuit mon meilleur ami.

— Je... n'y ai pas vraiment réfléchit. Avec ma mère, peut-être. Et toi ?

— En fait, je pensais venir te chercher avec Cathy. Mais si tu préfère avec ta maman, y a pas de soucis !

— Je vois avec elle et je t'envoie un SMS, ok ?

— Ça marche.

— De toute façon, je pense que je serais chez moi vers vingt heures vous n'avez qu'à passer à vingt et une heures, si jamais.

Je récupère le ticket de paye qu'elle me tend et lui souris en guise de au revoir.

— D'accord, on fait comme ça. Bon, je te laisse, ma chemise à finit d'être repassé par mon adorable frère !

Derrière le combiner, le concerné lui balance un juron avant que Léon ne raccroche. J'attrape mon bus de justesse qui me ramène chez moi, les dix minutes qui suivent. Pendant le trajet, je n'ai pas pu écouter de musique. J'étais trop pensif, anxieuse.

Lorsque je suis rentrée, ma mère était entrain de dormir. Alors, je l'ai recouverte d'une couverture bien chaude et je suis montée me préparer.

J'ai enfilé ma robe qui était parfaitement adaptée à mes formes et le buste n'a finalement pas grossi encore plus ma poitrine. Tout est parfait. Je me suis légèrement maquillée : d'un trait d'eye-liner, une touche de gloss très léger et du mascara. J'enfile mes chaussures et descends sans faire de bruit pour ne pas réveiller la belle au bois dormant. Quelqu'un sonne à la porte, avant que je n'ai le temps de prévenir mon ami. Je jette un œil en direction du salon, mais soulagement, elle n'a fait que tourner sa tête. Je prends rapidement mon petit sac en forme de rose en cuir noir, et ouvre. Mon cœur sursaute dans ma poitrine.

— Bonsoir.









Merci d'avoir lu ce chapitre ♡
À très vite pour le prochain !

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