Partie VII
Dévalant la cage d'escalier en trombe, je manquais de trébucher sur le carrelage blanc de neige de ton beau salon. Plus personnes ne discutaient, tout le monde ronflaient, paisiblement. Et toi, là-haut, tu devais sûrement vouloir me tuer, ou au moins me jeter par la fenêtre pour que je me brise le cou dans ton jardin. Que je me brise en milles morceaux, que je suffoque seul, sous tes yeux. Que je souffre autant que toi, tu avais souffert.
Comment ne pas m'en vouloir ?
Ravalant un relent d'alcool, je me traînais le plus silencieusement possible en direction de la porte d'entrée. Au même endroit, quelques heures plus tôt, j'étais tombais amoureux de toi. Mes mains avaient pâlies à cette confirmation de sentiments détestables. Puis tu avais, inconscient de ce qu'il se tramait dans mon estomac, passé tes bras autour de mon cou aguicheur de tes contacts. Le soulèvement insolent d'une mèche de cheveux avait brisé ma stupéfaction. Ton mince soupir l'avait faite se mouver, cette mèche de cheveux.
Tout cela m'épuisait bien plus qu'autre chose, ces temps-ci, au bord de l'explosion.
La porte ne résonnait pas. Elle ne grinçait pas, elle était emplit du silence de mon coeur, c'était peut-être un jeu d'écho stupide ? Peut-être que même la porte me trouvait minable, à cet instant, pantelant. Et toujours torse nu, ma chemise à la main.
Une brise inquisitrice venait me couper. Celle-ci s'insinuait sournoisement dans mes veines, frigorifiant jusqu'au dernier centimètres de mon esprit délaissé.
Refermant en vitesse la porte, je prenais sur moi pour ne pas trembler. Mon corps était alors traversé de frissons enclins au désespoir. J'étais vraiment stupide... Nous étions le premier janvier et la température extérieur frôlait dangereusement avec le zéro. Et moi, j'avais souhaité sortir, rentrer chez moi à pied, le torse mis à nu, une chemise de soirée à la main. L'alcool n'arrangeait rien et ne me réchauffait pas le moins du monde.
Je ne pouvais que me laisser glisser contre le bois frais, raclant mon épiderme dorsale avec force. J'allais peut-être avoir quelques marques rouges après cela, mais je m'en fichais un peu.
Alors je posais ma tête en arrière, laissant un résonnement sourd frapper les parois impénétrables de mon esprit. Rien de tout cela n'avait de véritable sens. Une soirée, un couple qui se brisait, le mien qui ne faisait que s'effriter, mes mains qui se posaient sur ton corps, toi qui m'embrassais... Oui, ça n'avait aucun putains de sens et pourtant... J'étais bien là, seul contre ta porte d'entrée, réfléchissant avec un soupçon de dépit à ta grande et majestueuse soirée.
Bordel... qu'est-ce que j'avais bien pu faire aux Dieux pour qu'ils osent me traiter ainsi, tel un moins que rien qui ne pouvait que voir son amour s'envoler loin de sa destinée. Mythologie et théâtre antique grecque de merde. Qu'est-ce que j'avais fait de si mal dans ma courte vie pour que l'on m'impose cela ? Sincèrement... Plus j'y pensais plus je me disais que non, je ne méritais rien de tout ce qui m'arrivait. Ou peut-être que si. Ou peut-être que non. Ou peut-être que c'était simplement fait pour arriver.
Plus j'y pensais, plus je me perdais dans les dédales sinueux de mon propre monde.
Bordel de Machine Infernale.
Bordel de Jeon Jungkook.
Pourquoi me faisais-tu subir tout ça ? Ne t'avais-je pas assez supplié de me pardonner pour mes fautes ? Pourtant, tu m'avais assuré avoir pardonné mes erreurs, trop nombreuses.
Bordel.
Bordel.
Bordel.
Bordel de merde...
Rageant seul contre cette porte d'entrée, je n'entendais pas les pas descendre dans des grincements caractéristiques l'escalier en bois. Je n'entendais pas non plus les reniflements disgracieux qui accompagnaient ses fichues pas de géante en quête de pardon, elle aussi. Pour une fois que nous avions un point commun, mon ex et moi.
« Tae ? » avait-elle dit en manquant de trébucher sur la dernière marche.
Elle me fixait en plissant les yeux.
Seule la lumière de mon portable et du siens éclairait la pièce.
« Qu'est-ce que fait ici ? » son ton brisé m'indiquait qu'elle t'avait longtemps pleuré en compagnie de Yoongi.
Et moi, je me relevais tant bien que mal, m'accrochant aux rebords échancrés de ta porte.
« Tout le monde dort... » marmonnait-elle encore tout en bâillant.
Elle s'avançait encore un peu plus, reniflant une seconde fois. J'entendais parfaitement sa morve grappiller des centimètres dans ses narines. Cette morve qui grappillait autant de centimètres que mon amour pour toi dans mes veines alcoolisées.
Mes métaphores me donnaient la gerbe.
Et elle, cette idiote t'ayant trompé, elle ne semblait pas trouver cette situation gênante, tout le contraire de mon âme.
« Pas tout le monde, apparemment. » répondais-je tout en m'avançant d'un pas, flageolant.
Elle ne répondait pas, préférant de loin jeter un regard en direction du salon où les ronflements de Han avait ralenti pour laisser place à un silence paisible, brisant avec les tumultes de nos esprits, perdus que nous étions à cet instant.
« Ouais... continuait-t-elle encore, portant sa main de géante à sa nuque. Je... je voudrais m'excuser pour ce qu'il s'est passé dans le salon... tout à l'heure.
- Ce n'est pas à moi que tu dois des excuses, Yeseo.
- Oui, oui... je sais... répondait-elle, toujours aussi gênée de me parler. Mais, je t'ai vu entrer dans la chambre de Jeon alors... euh, j'ai pensée que tu pourrais lui faire passer un message de ma part. »
Je la fixais avec désarroi. Me demandait-elle vraiment de devenir l'entremetteur de votre putain de relation ?
Bordel.
« Je l'aime, Tae. »
Sa voix brisée m'avait pris de court.
Bien sûr qu'elle t'aimait.
Elle t'aimait à un tel point que te tromper n'avait été qu'un simple jeu stupide pour perdre sa virginité.
« Je ne pense pas que tu ai besoin de moi pour lui dire ça. »
Mon ton froid ne changeait rien à son regard de chien battu. Cela m'énervait tellement, mais je ne pouvais rien faire d'autre que de lui jeter mon mépris à la gueule.
« J'ai peur qu'il me rejette, je ne peux pas... insistait encore la brunette. Aide-moi, Tae, je t'en prie, je ne veux pas le perdre.
- Tu aurais dû y réfléchir avant de penser avec tes hormones. "
Elle me jetait à présent un regard blessé, presque troublé par mes paroles un peu trop crues peut-être. Mais j'en avais rien à foutre. Elle t'avait brisé encore plus que moi, je n'avais jamais osé le faire. Elle devait elle aussi, en payer les conséquences, je ne devais pas être le seul à m'en mordre les doigts. Les chances ratées, je les accumulaient. Ce soir, c'était son tour.
« Bonne nuit, Yeseo. »
Sans l'ombre d'un doute, je retournais grimper, titubant, les escaliers. Un soupire de désespoir ou de frustration résonnait dans mon dos, me portant encore un peu plus en avant. Ma décision était prise, bien que stupide. Mais je n'aurai plus jamais l'occasion, alors avant de succomber à la chute finale, je devais au moins profiter un peu, juste un peu.
Un tout petit peu, s'il-te-plaît, laisse moi espérer vivre.
La montée fut périlleuse et déséquilibrée car, un ennemi à terre, l'autre se réveillait, tout bonnement en forme et un immense sourire au visage. Un ange déchue, voilà ce à quoi je devais ressembler face à elle, la femme avec qui j'aurais dû finir ma vie.
Jambe mise à nue part un mini-short, elle marchait d'un pas de vainqueur dans ma direction, fendant l'air de son corps si athlétique. Elle pourrait sûrement reprendre le poste du coach. Mais elle n'avait aucunes bonnes ambitions pour cela, cette imbécile heureuse que je haissais tellement à présent, en haut des marches, prêt à chuter plus bas que terre. Mais je devais résister, car non loin de là, je devais te récupérer, je n'avais plus qu'un joker.
Plus aucunes chances. Je ne devais pas chuter, par tout les moyens je devais survivre à cette douce confrontation.
Son cou marqué de couleur rougeâtres reflétait son adultère avec tellement de passion, que je devais me retenir de ne pas lui cracher à la gueule. Elle souriait, encore confiante et sûre d'elle. Moi, je la fixais, simplement, sans oser regarder si non loin de là, derrière sa silhouette de demi-Déesse, rôdait l'âme de vautour d'une certaine Soon.
Elle m'avait soutenue, au début.
Maintenant elle me plantait des couteaux dans le coeur, les tournant afin d'agrandir encore un peu plus ma plaie saignante d'amertume et de regrets. Oui, elle en jouait cette sibylle aux airs si enchanteurs.
Sans comprendre, des bras venaient entourer mon corps frêle de tes contacts.
Rien de tout cela n'avait de sens, sur l'instant. Puis je réfléchissais à la manière de m'enfuir.
Elle décrochait enfin ses crocs de mon corps, souriante encore un peu. Sa bouche de mérou laissait éclater des dents blanches. Mais son sourire paraissait si fade et sans intérêt comparé au tient.
« Tu étais où ? Je t'ai cherchée partout mon coeur. »
Elle débitait ses mots avec tellement de sincérité que j'étais dépourvu de répondant. Elle était douée, très douée. Sa poitrine sentait les caresses hideuses de mon amie, enfin, celle que je considérais depuis un an comme une amie. Mais je la détestais autant que ma copine maintenant. Quoi que, j'avais dû mal à les départageait.
« Ça va ? Tu as l'air un peu pâle. »
Me disait-elle encore, avant de venir déposer un baiser remplit de tendresse hypocrite sur mon front.
« Ne t'inquiètes pas pour moi... J'ai juste vu quelques-chose. » disais-je tout en souriant à mon tour.
Et elle fronçait les sourcils de manière idiote. Déposant une main froide sur sa joue, j'essayais de repérer les endroits que mon amie avait touché avec tant d'amour que j'aurais pu en être jaloux. La peau si saine de ma copine avait l'effet d'une lame de rasoir, aussi coupante et déchirante que du barbelé sur mes doigt de papier mâché.
« Encore un de tes cauchemar ?
- Oui, répondais-je, confiant de ma maîtrise parfaite du jeu. Mais... c'était pas le même que d'habitude. »
Elle avait un sourire tendre sur sa face de monstre sanguinaire. Cela me donnait froid. Mais je supportais. Toujours savoir encaisser avant de donner le coup final. Mon père m'avait appris cela avant de disparaître de ma vie, cet enfoiré.
« Tu veux bien me le raconter ? Comme on fait d'habitude. Tu verras, ça ira mieux après et tu pourras venir te coucher.
- D'accord. »
Elle posait alors ses mains sur mes épaules, doucement, comme si elle avait peur de me briser encore un peu plus. Mais c'était déjà trop tard pour empirer les choses.
« Je-... commençais-je, cherchant mes mots. J'ai vu deux silhouettes, cachées dans l'ombre d'une sorte de drap.
- Continu, disait-elle tout en me souriant, docilement, pour me calmer peut-être.
- Alors, comme attiré par leurs ombres, je me suis rapproché. Et je les ai découvertes, ces ombres, Jang-Mi... C'était horrible !
- Comment ça ? Questionnait-elle tout en fronçant les sourcils, inquiète. Tu les connaissais ?
- Oui... Il y avait Soon... et- et toi... »
Ses sourcils restaient dans la même position, fronçaient. Elle ne comprenait rien à ce qu'il se passait, et j'en étais fier, tellement fier que je ne me rendais pas compte de mon éloignement. Mon corps s'était comme échappé de sa prise d'héroïne mythologique au physique de demi-Déesse. Je la fixais, alors qu'elle venait se rapprocher pour me prendre dans ses bras, souhaitant me réconforter pour me susurrer des petits mots gentils comme : '' oh ce n'était qu'un cauchemar voyons, ce n'était pas la réalité chérie. ''
Ce mot qui résonnait faisait lui, cependant, partie d'une réalité sordide et dépressive.
Elle ne comprenait pas, la main posée sur ses joues rougit.
« Je ne suis pas un gamin que tu dois protéger, Jang-Mi. Et je ne suis pas non plus aveugle tu sais ? Alors dis-moi, avant que je ne te quittes, depuis combien de temps ça dure avec Soon ? Hein ? Peut-être deux semaines ? Peut-être même un mois, qui sait ? »
Elle déglutissait, simplement et durement. Comme pour s'échapper de la réalité dans laquelle elle venait de sombrer.
« Écoute, Tae je- »
Je n'attendais rien de plus pour lui asséner une seconde insulte, libératrice, pour le coup. Elle acceptait sans broncher, comme si cela était évident.
« Je suis désolée... finissait-elle par murmurer d'une voix si mince que j'avais peiné à l'entendre.
- Tu peux l'être, c'est vrai. »
Je passais à côté d'elle, frôlant sa cage thoracique qui montait et descendait lentement, prise d'un soudain regain de confiance.
« C'est... c'est finis alors, entre nous ? »
Pour toute réponse, je ne lui répondais pas. Et elle comprenait, car dans son soupir, je pouvais distinguer un léger remord mais une libération mal dissimulée.
Enfoirée.
Je ne faisais plus que d'errer dans les derniers mètres qui séparait mon corps désespéré de la porte de ta chambre. Je ne sentais plus la chemise fine de soirée que je portais à bout de bras, non, je l'avais sans doute laissée chuter dans les escaliers. Ce n'était qu'un poids en plus que j'avais dû abandonner sur mon chemin. Mais il fallait bien des sacrifices pour parvenir à atteindre ses objectifs, non ?
Stoppant toutes pensées, toutes actions, toutes réflexions, j'affichais un air impassiblement neutre. Devant la porte, d'entrée, de mon coeur ou de ma mort. Devais-je continuer ? Quitte à finalement sombrer, comme les autres héros grecques ? Ou pouvais-je encore tenter de vaincre une destinée débile en pénétrant dans l'arène ?
J'allais t'affronter, la tête haute et l'esprit emplit d'un espoir à crever des yeux, à brûler des langues, à briser des os, à marquer au fer rouge des paupières. Oui, je te le devais, je devais le livrer, ce dernier et impossible combat.
À ma destinée. À toi. À l'âme brisée que j'étais longtemps devenu. À l'improbable réalité qui se cachait peut-être derrière cette porte. À la peur qui me tenaillait l'estomac à chaque fois que j'entendais parler de toi. À mon père qui me trouvait toujours trop faiblard, trop pas assez. À ma mère qui me désespérait à espérait. À ma sœur trop parfaite. À mon ventre qui ne pouvait que vibrer en t'apercevant dans les couloirs. À ton sourire que je rêvais de voir apparaître à n'importe quel instant de ma putain de vie à chier. À tes lèvres que je me promettais de redécouvrir avec ton accord, total. À tout ce que j'avais gâché en bientôt trois ans de vie. À tout ce que j'avais cru vivre sans toi. À tout ce que tu étais. À tout ce que j'aimais en toi, chez toi, dans ton âme, dans ton coeur. À ma plaie si impatiente de s'ouvrir.
À ton être.
À ton âme qui ne pouvait vivre sans la mienne.
T'observer de loin, que ce soit en cours d'italien ou à l'extérieur, je n'en pouvais plus. Le supporter aurait signer mon arrêt de mort.
Je t'aimais, plus que de raison à vivre, mais je t'aimais à sacrifier toute saloperie de raison.
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