69 - Le secret de son existence
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Si Eowyn a toujours été émerveillée par les aventures des voyageurs, comme si on lui contait des histoires qu'elle aurait pu lire dans des holo-romans d'aventures au coin d'une fenêtre sur laquelle dégouline la pluie, constater l'ampleur de la galaxie et des milliards de monde qui s'y trouvent à travers ce cours de géographie galactique n'a pas de prix pour la mécanicienne. Elle qui pensait que connaître les noms des planètes qui reviennent le plus souvent dans les récits de ses clients suffirait à faire d'elle une géographe hors pair, elle s'est bien mit le doigt dans l'œil.
Ils ont parlé de Coruscant et de Chandrila, siège ancien et actuel de la République ainsi que de Kessel qu'elle connaît très bien de réputation. Puis a été abordé la maelstrom Akkadais qui entoure Kessel et ses trois lunes. Ongarth aussi possède trois lunes. Les définitions de « système » et de « secteur » ont été rappelé aux enfants, un concept qu'Eowyn avait déjà intégré et dont elle fut fière de pouvoir leur expliquer les différences. Puis leur ont été rappelées les huit régions de la galaxie que tout le monde connaît par cœur.
L'enfant est resté bien sagement sur sa chaise et n'a pas écouté une seule seconde ce qui se passait autour de lui. Eowyn le sait car elle a senti son attention divaguer tout du long. Le seul moment où elle a pris la peine de poser son regard sur lui, elle l'a découvert en train de grignoter des petits gâteaux turquoise. Et en visualisant la tête déconfite du garçon assis à côté de lui, elle en a déduit qu'il les lui avait volés. Din disait vrai, il prend ses aises.
Finalement, la pause de milieu d'après-midi vient mettre un terme au cours de géographie galactique. Les enfants s'empressent de rejoindre la sortie pour prendre l'air et jouer. Eowyn, elle, est toujours assise en tailleur, regardant une nouvelle fois la carte sur le tableau transparent.
— Excusez-moi, demande la jeune femme au droïde qui n'a pas bougé de sa place à côté du tableau, vous pourriez me dire où se trouve Nevarro sur cette carte ?
— Bien évidemment, elle se trouve ici dans la Bordure Extérieure.
— Et pourriez-vous me montrer Tatooïne ?
Le droïde lui présente la position de la planète sableuse. Eowyn constate la distance qui sépare les deux planètes. C'est tellement loin. Intriguée par les distances qu'elle a parcourues, elle demande au droïde de localiser Ongarth, Todorim, ainsi que Trask. Une fois les planètes reliées et les distances grossièrement calculées selon une échelle grandeur nature, l'affranchie réalise tout son cheminement depuis sa planète pluvieuse. C'est incroyable.
— Est-ce que vous pourriez m'en dire plus sur Nevarro ? Qu'est-ce qui fait que sa surface est-elle si sombre ? Quel âge à la planète ? Combien d'habitants vivent ici ? Quelles sont les espèces primitives qui étaient là avant les côlons ? Existent-elles toujours aujourd'hui ?
Avide de savoir, il est impossible d'arrêter Eowyn dans ses questions, questions auxquelles le droïde ne se prive pas de répondre une à une après les avoir mémorisé sans aucun problème. Loin d'être saturée par toutes ces connaissances, elle continue à s'instruire, en redemandant sans arrêt.
— Avez-vous d'autres questions ? lui demande poliment le droïde.
Eowyn sent son cœur tambouriner dans sa poitrine. Elle réfléchit, elle assimile les informations qu'on lui a données, inhibant les potentielles questions qu'elle pourrait avoir.
— Pas pour le moment, merci ! C'était vraiment passionnant.
— Je peux vous donner des cours en dehors des périodes scolaires, si vous le souhaitez. Je suis au service du savoir et de sa transmission.
Eowyn sourit. Elle ignore bien combien de temps elle restera sur cette planète, mais elle compte en profiter le maximum.
— Avec plaisir. Vous pouvez me raconter tout ce que vous voulez, je prends tout !
— Très bien, dans ce cas, je peux vous parler d'un peuple nommé les Khaalists. Il y a de forte chance que vous n'ayez jamais entendu parler d'eux car c'est un peuple qui a subi un génocide.
— Oh... Que c'est-il passé ? demande Eowyn en sentant son cœur se serrer.
— L'Empire... Il n'a eu aucune pitié pour cette population fort à part. Ils étaient des philosophes aux grands cœurs dans leur essence profonde. Ils ont toujours entrepris des actions humanitaires pour les planètes ayant subi des catastrophes naturelles ou en soutien en temps de guerre. Ils avaient beaucoup d'influence au Sénat de l'Ancienne République grâce à leur altruisme naturel. D'apparence humaine malgré leur peau blafarde et leurs yeux mauves, ils étaient pourtant bien plus évolués que les autres espèces.
Son sang bat dans ses tempes, lui donnant des acouphènes désagréables.
— Leurs... leurs yeux mauves ?
— Tout à fait, ils étaient la seule espèce intelligente présentant une unique chromie irienne, malgré tout un tas de nuance possible au sein de cette couleur. Une autre particularité biologique de ce peuple est leur sang noir. Cela est dû à une oxydation de leur sang liée à une fonction pulmonaire considérée moins bonne que les autres humanoïdes en matière d'échange entre oxygène et dioxyde de carbone. C'est une capacité tout à fait intéressante pour une population de génies scientifiques, de combattants et de politiciens car cela les rend insensibles aux intoxications au dioxyde de carbone. C'est aussi une des raisons pour laquelle ils vivaient mieux dans les hauteurs, dans les montagnes, en raison de la faible teneur en oxygène.
Coup de massue pour Eowyn. À chaque mot qui sort du décodeur vocal du droïde de protocole, le poids qui s'est formée dans sa poitrine pèse de plus en plus lourd. C'est moi qu'il décrit. Des yeux mauves, une peau blafarde, du sang noir.
— Ce qui faisait la grandeur de ce peuple à l'époque de l'Ancienne République, continue le droïde qui ne réalise pas qu'Eowyn boit complètement ses paroles, c'est qu'ils ont toujours été des élèves qui apprennent trois fois plus vite que la plupart des espèces intelligentes. Les plus grands physiciens, astrophysiciens, chimistes, ingénieurs et mathématiciens sont des Khaalists. Leur planète, Jovak, possédait une immense vallée technologique abritant les principaux générateurs de protons et de positons de l'astre, ainsi que les grandes écoles pour former les ingénieurs du futur.
Eowyn prend conscience des choses en répétant le nom de cette planète dans sa tête. Jovak. Elle se remémore alors sa dernière conversation avec Tikala, quand elle essayait d'obtenir des informations sur les Mandaloriens et qu'il a demandé son bijou accroché à son oreille comme paiement.
« — À première vue, je dirais que c'est du fer Jovak. Étonnant pour une esclave. À qui l'as-tu volé ?
— Je n'ai jamais rien volé de ma vie, c'est un bijou de famille.
— Étonnant pour une famille d'Ongarth, dans ce cas. Ce genre de métal n'existe que sur une seule planète dont le peuple a subi un génocide. »
Le poids dans sa poitrine commence à lui faire mal. Bien au-delà de la simple douleur, Eowyn se sent en détresse. Sa fréquence respiratoire s'accélère sans pour autant l'aider à mieux respirer, elle sent ses joues rougir sans savoir si c'est de la colère, de la tristesse ou tout simplement le bouleversement de sa prise de conscience qui se manifeste de cette manière.
— Vous savez, c'est en constatant la couleur de vos yeux que j'ai pensé à ce peuple. Ce n'est pas une chromie répandue dans la galaxie, en tout cas pour des espèces d'apparence humaine, ajoute le droïde innocemment sans pour autant faire le lien lui-même. Ce peuple a d'ailleurs la particularité d'avoir une mémoire...
Mais Eowyn n'écoute plus. Ses mains se mettent à trembler, et cela interpelle le droïde-professeur.
— Tout va bien ? Vous ne m'écoutez plus, je le vois.
Elle se revoit en train de laisser son sang s'écouler de sa blessure à l'épaule, sa main dans celle de Basile. Elle se revoit escalader les pics rocheux autour de Vogartha et se sentir davantage mieux, respirant à plein poumon. Elle se revoit être draguée par nombre de clients ivres ou planant aux algues dobartans à la taverne, flattant son regard lavande. Elle se revoit en train de fixer son reflet à la surface de l'eau ayant comblé le creux des montagnes, regrettant parfois de ne pas avoir l'air plus basanée pour ressembler aux autres.
Elle porte instinctivement sa main à son oreille pour toucher son bijou. Du fer Jovak. Elle sent sa tête tourner, encore et encore. Elle se sent partir, rejoindre les étoiles comme elle aime le faire avant chaque combat pour son esclavagiste. L'espace infinie de la Force qui ne cesse de faire silence radio, encore maintenant alors qu'elle est à un tournant de son existence. Alors qu'elle comprend enfin qu'elle a été esclave toute sa vie uniquement parce que personne de son peuple n'a pu la protéger des rapaces.
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