20 - Victoire incontestable

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La cloche du ring sonne une nouvelle fois, la foule aboie comme des molosses corelliens. Eowyn s'assied, pour ne pas dire s'effondre, sur le petit tabouret dans un coin du tatami pendant que Wartob lui file autant de bouteilles d'eau qu'il a de bras. Elle est en sueur, son souffle est court mais pas désordonné. Elle fixe ses trois adversaires en face d'elle qui se remettent eux aussi de leur dernier round. Wartob lui hurle aux oreilles des conseils qu'elle ne cherche même pas à écouter. Elle sait très bien ce qui lui reste à faire.

Elle a toujours été du genre à se laisser marteler, en début de combat, pour apprendre à connaître la force de son adversaire, ses principales techniques afin de pouvoir mieux les esquiver par la suite. Prendre des coups, c'est probablement ce qu'elle sait faire de mieux, mieux que réparer des vaisseaux ou rebooter RK.

Les trois Aleenas, à peine plus grands que ses genoux, sont de fervents combattants. Ils possèdent une coordination des plus admirables. Chacun sait à quel moment il doit frapper, et tout cela dans une harmonie telle que cela désarçonne leur adversaire, l'empêchant de contre-attaquer, ou de parer les coups. Ils savent en donner, pour sûr, mais ils comptent un peu trop sur leur harmonie pour les défendre. Il suffit d'en dégager un seul pour que toute la structure s'effondre. Alors à partir de là, ce sera un jeu d'enfant de les mettre au sol. Et même s'ils venaient à posséder une bonne défense, outre leur petite taille leur facilitant les esquives, Eowyn est bien trop rapide et bien trop forte pour qu'ils se relèvent après un coup de poing ou de pied de sa part.

— Je sais que c'est ton genre de te laisser taper sur la figure mais fais un effort bon Dieu ! s'exclame Wartob en lui postillonnant dessus avec son haleine douteuse.

Elle feint de s'étirer pour mieux lui envoyer son coude dans le nez. Il geint de douleur et de caprice quand on fait signe à Eowyn de se remettre en position sur le tatami. Elle est encore relativement fraiche malgré la sueur. Ils ont eu beau la rouer de coups et la mettre au sol quelques secondes, cela ne suffit ni à la faire saigner, ni à la coucher.

— Vous avez trois minutes.

La cloche retentit aussitôt et les trois Aleenas, avec leur long crâne allongé, se jettent immédiatement sur la mécanicienne. Elle voit déjà les deux coups de poing qu'elle va se prendre dans la figure, par les deux Aleenas latéraux, si elle ne fait rien. Eowyn sait être rapide mais ces petits garnements savent l'être aussi. Impossible de plonger pour les esquiver, ni de faire un salto avant sous peine d'éveiller trop les soupçons sur sa nature. Elle ne voit qu'une seule solution : jouer sur la souplesse. Elle s'essaie à faire un flip arrière depuis sa position debout, une méthode qu'elle utilise régulièrement et qu'elle sait qu'elle réussira d'après le flash qu'elle vient d'avoir. Durant sa rotation, elle en profite pour esquiver les poings de ses deux adversaires et coller un de ses pieds au cul du troisième, au milieu du trio.

Si tout semblait au ralenti pour Eowyn, lui laissant le temps de réfléchir pour se sortir de cette situation, le temps revient soudainement à la normale et son flip s'accélère. Elle balance l'un des Aleenas, tel un ballon, qui part s'écraser dans le public, rencontrant le visage d'un Dowutin au sang chaud qui n'a aucun scrupule à le jeter sur le sol du gradin et à l'écrabouiller sous son énorme pied. Son flip se termine avec une grâce que les spectateurs lui apprécient généralement. Les deux adversaires rebondissent sur le tatami, l'un utilisant les cordages de délimitation et l'autre les trous prévus à cet effet sur le mur de combat.

Sachant déjà ce que vont faire ses concurrents, elle attrape le col de celui qui saute sur elle le premier, près des spectateurs, tourne sur elle-même pour prendre de l'élan et le balancer, la tête la première, vers l'un des trous du mur. Bingo, son crâne rentre parfaitement.

Elle perçoit le troisième de la clique arriver dans son dos, mais elle sait qu'elle n'est pas assez rapide pour l'esquiver, alors elle encaisse. Elle sait qu'il y en a déjà un sur trois hors course, qu'un second est actuellement coincé dans un mur et que le troisième est libre comme l'air. Un autre flash lui montre le dernier de ses adversaires en train de lui mordre le mollet, ce qui lui fait faire un jeu de jambes agile. L'opposant mord le sol plus qu'autre chose. Elle en profite immédiatement pour écraser sa tête sous son pied bandé et l'étouffer juste assez pour qu'il perde connaissance.

Elle fait volte-face pour se tourner vers son dernier adversaire qui est à deux doigts de se dégager de ses entraves. Elle balance son pied vers sa dernière cible, il vole jusqu'à Wartob qui a tout juste le temps de se baisser pour l'éviter. La tête du dernier Aleenas cogne le mur en dehors du tatami, le faisant tomber dans l'inconscience. La foule beugle, bave de l'excitation qui est ressorti de ce combat. Les ovations sont telles qu'Eowyn a l'impression d'avoir perdu l'ouïe. Elle n'entend plus que son propre souffle, son sang battant dans ses temps. Ses muscles se font progressivement douloureux.

Wartob vient enlacer ses jambes au milieu du tatami et piaille qu'il est encore le vainqueur de ce combat. Eowyn est trop fatiguée pour le remettre à sa place. Si elle voulait avant tout lui faire fermer son clapet en gagnant ce combat, tout ce qu'elle veut désormais est un peu de repos. Une ou deux heures de sommeil avant la récolte des algues.

Elle s'assied à même le sol, sans même chercher à quitter le terrain. La foule se disperse petit à petit, certains heureux d'avoir parié sur Eowyn, d'autres frustrés d'avoir misé sur le mauvais Fambaa. Mais elle ne voit rien de tout ça, n'entend rien des plaintes ou joyeuseries qui l'entoure, elle est de retour dans l'espace. La fatigue la laisse trop facilement divaguer au sein de la Force, à tel point qu'elle n'entend pas les bruits de pas, désormais familiers, du Mandalorien s'approchant du tatami ; à tel point qu'elle ne perçoit même pas l'aura, pourtant forte et envahissante, du Sensitif l'accompagnant.

Finalement, c'est quand elle voit le petit apparaître dans son champ de vision, entouré des étoiles de la Force, puis poser ses mains sur son bras avec un sourire qu'elle revient à la réalité. Elle expire sa fatigue et inspire la Force de l'aura du bambin. Elle lui sourit à son tour.

— Tu as semé ton ami en armure ? lui demande-t-elle en le prenant dans ses bras.

— Où qu'il aille, je le suis, lui répond-il en attirant son regard, réalisant sa présence.

— La devise a un peu changé, lui fait-elle remarquer en se levant. Comment vous avez fait pour entrer ici ? Les accès sont réglementés.

Le petit s'amuse à poser sa main sur son épaule et sa clavicule, luisants de sueur.

— Le beskar ne sert pas qu'à protéger contre les tirs de blaster.

Eowyn rit doucement, lui imaginant un sourire après sa petite plaisanterie.

— C'est grâce à ces combats que tu peux travailler au garage et gagner ton argent ? lui demande-t-il en s'asseyant sur un banc des gradins désormais vides.

Elle hoche la tête. En effet, après lui avoir raconté la mort de Basile, il a compris qu'elle était esclave et que malgré tout, elle gagnait sa propre oseille, ce qui remettait un peu son statut d'esclave en doute. Mais après l'avoir vu combattre trois acharnés d'Aleenas, il a vite fait le lien.

— Ouais. Wartob, mon possesseur, il a arrêté de m'envoyer chercher des taxes quand j'avais quoi... dix ans ? Il m'a fait employer au garage, et puis il a fini par m'inscrire à ces tournois de combats d'esclaves, ça lui rapportait plus que de réparer des vaisseaux.

— Qu'est-ce qui l'a incité à t'y inscrire ? Il a l'air cupide mais pas stupide, pas au point d'envoyer une ado sans compétence dans des combats de gros bras.

Elle fixe sa visière, essayant une énième fois de la percer pour trouver son regard. Il n'est pas idiot, ce Mandalorien. Il a vite compris que chaque chose est liée à une autre et que tout ne se fait pas en un claquement de doigts.

— Il se pourrait que je me sois souvent disputé avec les clients du garage, et que les disputes ne se faisaient pas qu'à coups de mots, mais aussi à coups de poing. Il a trouvé que je me débrouillais bien.

C'est bien évidemment sans compter sur la puissance que lui fournit la Force. Sans elle, Eowyn aurait autant de robustesse qu'un Ruurian sortit de son cocon et cherchant à s'accoupler.

— C'est vrai que tu as un sacré coup de pied, lui cède-t-il. Mais ça m'a l'air un peu dangereux, tout de même.

— Comme tout combat, j'ai envie de vous dire. Vous devez le savoir mieux que personne. Mais ça fait plusieurs années que je suis invaincue, même devant des colosses deux fois plus gros que moi. Ce n'était clairement pas ces trois rigolos qui allaient me mettre la pâtée.

— Tu as eu de la chance de n'avoir aucune plaie ouverte, ce qui est franchement un miracle vu le nombre de coups que tu as reçus.

Elle place l'enfant dans le berceau flottant.

— Je vous l'ai dit, ils n'étaient pas de taille à me battre. Ils étaient rapides, mais ils ne frappaient clairement pas assez fort. Il m'en faut plus pour saigner.

C'est la seule explication qu'elle a à lui donner. Il semble moins facilement embobiné, d'autant plus quand les preuves s'accumulent. Il plonge son regard dans celui lavande de la jeune Eowyn, bien qu'elle ne s'en doute pas une seule seconde.

— Si tu n'as aucun scrupule à envoyer tes adversaires dans le décor, un jour c'est un adversaire beaucoup plus fort qui t'y enverra et tu ne verras pas venir le coup du lapin qui te tuera.

Elle sourit en essayant de se retenir de rire. Il n'est peut-être pas si perspicace et elle n'est probablement pas si mauvaise cachotière, d'autant plus si cela fait des années qu'elle cache sa nature de Sensitive.

— J'apprécie votre sollicitude, mais ça ira, je sais prendre soin de moi. J'ai besoin de faire ces combats pour économiser l'argent du garage. Vous savez, tous les esclaves n'ont pas la chance d'avoir un prix pour s'affranchir. Et même si j'atteindrai le mien aux portes de la mort, la vieillesse et les années de dur labeur m'ayant usé jusqu'à la moelle, je suis prête à prendre le moindre rayon d'espoir de liberté plutôt que de rester enfermée dans une vie dans laquelle je me sais prisonnière jusqu'à mon dernier souffle.

Il se contente de hocher la tête.

— Je peux respecter ça.

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