105 - Le Jedi

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C'est terminé. La mission de Din aboutit enfin. Eowyn le sait. Le Jedi n'a encore rien dit à propos de l'enfant, mais elle le sait. Tout ce qu'il ont fait, toutes les planètes sur lesquelles ils sont allés. D'abord pour trouver des Mandaloriens, puis des Jedi. Leur chemin s'achève et cela la dévaste.

Eowyn se rappelle parfaitement sa première rencontre avec Grogu, comment sa petitesse, ses oreilles pointues et sa peau verte lui avaient paru farfelus, comment la Force lui avait d'abord fait croire qu'il était le mal incarné avant qu'il ne fasse un pas vers elle pour lui prouver qu'elle se trompait. Et elle se trompait si fort.

Avant même d'être affranchie, un lien s'était créé entre eux deux. Un pur lien de Force. Ce n'est qu'après quelques péripéties communes qu'ils ont pu tisser un autre type de lien, moins spirituel, plus émotionnel. Eowyn s'estime trop jeune pour le considérer comme un fils, n'ayant par ailleurs jamais envisagé d'avoir d'enfants devant une vie qui les aurait asservis tout autant qu'elle autrefois. La jeune femme le voit surtout comme un petit frère, né d'une mère plus âgée que la norme et ayant déjà eu une fille dans sa très jeune jeunesse. Elle aurait péri avant d'avoir vu grandir son bambin, laissant alors l'aînée s'occuper de l'élever.

Elle a alors un regard pour ce bambin qui est dans les bras de Din. Il semble aussi dépité qu'elle, ce qui lui fait réaliser qu'elle est plongée dans ses réflexions et n'est raccrochée à la réalité que par sa vision, là où son audition semble lui faire défaut, concentrée sur les souvenirs qu'elle a avec Grogu qui lui rappellent les adorables bruitages qu'il a l'habitude de faire.

Son regard se porte ensuite sur le Jedi qui lui offre un hochement de tête, qu'elle interprète comme un remerciement pour sa dévotion à le protéger contre vents et marées. S'il savait ce qu'elle a fait pour le protéger, ce qu'elle était prête à faire pour le protéger. Jusqu'à le sacrifier pour qu'il ne serve pas l'Empire.

Une douleur en coup de poignard dans la poitrine la secoue, la faisant lâcher son sabre qui s'éteint immédiatement. Elle entend des paroles assourdies par ses propres oreilles et par ce que son cerveau accepte d'entendre ou non, trop contrariée par l'ensemble de choses qu'elle réalise en ce jour de séparation. Elle pose sa main sur sa poitrine qui lui fait toujours mal, se sachant méritante de cette douleur pour avoir été prête à laisser Grogu mourir pour contrer l'Empire. Elle s'aperçoit qu'en réalité elle ne protégeait personne, elle s'assurait simplement que l'Empire n'ait pas ce qu'il veut. D'abord protéger l'enfant, lui trouver un professeur pour le former à devenir un Jedi afin de lutter contre l'oppression des restes Impériaux ; puis le sacrifier quand ces derniers ont mis la main sur lui et l'empêcher d'en disposer. Pourquoi ? Il existe tant de raisons à cela.

Avant toute chose, l'Empire a donné tant de pouvoirs au Grand Maître, sur Ongarth, qu'il a pu disposer de Cloddograns comme taxeurs pour remplir les caisses impériales, sans oublier les siennes. Si la défaite de l'Empire a réduit considérablement la pression contributive économique, Ongarth étant une planète de la Bordure Extérieure et la Nouvelle République encore en rémodèlement, personne n'a pu lui imposer des limites, voire le défaire. Tout ceci a engendré l'entièreté de sa vie sur Ongarth. Son esclavage, les coups de fouet, la mort de Basile, sa peur de l'eau, les combats d'esclaves, la mort de Pylar et bien avant tout cela, le génocide de son peuple. Comment ne pourrait-elle pas frôler le Côté Obscur face à tant de peine, de colère, causées par tant de négligence ?

Des larmes coulent sur ses joues, plus déçues que tristes. Elle qui pensait avoir l'étoffe d'une Jedi, que même si elle ne pouvait plus être formée, elle avait les bonnes intentions et bien évidemment les dons pour en être une. Mais les Jedi ne cherchent aucunement la vengeance, n'utilisent la violence que lorsqu'ils y sont obligés et que la diplomatie ne fonctionne pas, cherchent la paix pour tous les êtres vivants. Là où Eowyn a fait tout le contraire jusqu'à maintenant.

Ce voyage aux côtés de Din et Grogu lui aura appris au moins une chose : si d'apparence elle peut paraître serviable et généreuse, tout cela n'est qu'une façade inconsciente qu'elle sert à tout le monde dans l'unique but d'extérioriser sa déception continuelle d'avoir eu une vie misérable.

La jeune femme sent quelque chose enserrer doucement sa cheville et baisse le regard. Grogu est à ses pieds et a attrapé son pantalon. Eowyn s'accroupit pour prendre le petit dans ses bras, comprenant qu'il est venu pour elle de lui dire au revoir. Les larmes floutent sa vision, mais elle n'a pas besoin qu'elle soit précise pour le voir. Elle devine ses grands yeux sombres et perçoit ses oreilles baissées, lui aussi triste. Il passe un doigt sur sa joue et attrape une des larmes qui vient de couler. Cela fait sourire l'Ongarthienne.

— Deviens meilleur que nous, petite crevette.

Il pose une à nouveau la main sur sa mâchoire, tentant de l'apaiser une dernière fois avant son départ, puis elle le repose sur le sol et se dirige vers le Jedi qui a été rejoint par un droïde astromécano de série R2. Dans ce genre de moment, RK lui aurait manqué. La seule raison pour laquelle ce n'est pas le cas est sa déception de manquer autant à ce que lui a enseigné Pylar. Je suis désolée de vous décevoir, maître. Je n'ai pas seulement fait exactement le contraire de ce que vous m'avez demandé, j'ai littéralement tout fait pour contrer l'Empire.

Le Jedi prend Grogu dans ses bras puis offre un regard à l'assemblée avant de s'arrêter sur Eowyn.

— Que la Force soit avec vous.

Enfin, il se retourne et se dirige vers l'ascenseur, laissant tout le monde sur le pont où le Moff est encore stupéfait des mains qui lui ont été arrachées. Eowyn est restée accroupi, repassant sa réflexion en boucle dans sa tête. Mais elle entend finalement la voix de Din l'appeler et des doigts attraper son menton pour attirer son regard.

Eowyn découvre le visage d'un homme. Un visage inconnu. Des cheveux bruns et courts, une peau apte à brunir au soleil, des yeux noirs ainsi qu'une barbe et une moustache très courtes. Le genre de citoyen qu'on ne trouve pas sur Ongarth, seulement de passage parmi les voyageurs ou les pilleurs et pirates. Et si cet homme n'avait pas prononcé son nom avec la même voix que Din, elle lui aurait demandé qui il est.

— Eowyn, est-ce que ça va ?

Elle aurait presque envie de lui crier dessus pour avoir posé une question aussi bête, mais elle sait qu'il n'y est pour rien si elle se sent comme un tas de merde de Bantha. Il ne sait pas ce qui la rend réellement triste. Et elle se déteste que sa curiosité prenne finalement le dessus sur sa souffrance, maintenant qu'elle a enfin l'occasion de lever le voile d'une chose qui l'a obsédée pendant des semaines entières. Assouvir ma curiosité plutôt que me châtier, totalement moi.

Elle pose ses mains sur son visage, sentant enfin sa peau contre la sienne, voyant de ses propres yeux l'homme avec qui elle a voyagé sans jamais pouvoir mettre un visage sur un nom. Ses pleurs redoublent.

— Tu es très bel homme, Din, pleure-t-elle de déception sans pouvoir détacher son regard du sien pour autant.

Puis un autre visage apparaît, soudainement. Un homme à la peau aussi blanche que les lunes de Tatooïne et aux yeux mauves, presque identiques aux siens. Il a les larmes aux yeux. En un clignement de paupière, le visage de Din est revenu, mais elle entend une voix sortir de sa bouche sans pourtant l'ouvrir.

— Poltr, que va-t-on faire ?

Son visage reprend sa place sur celui de Din. Ses pouces sont positionnés sur les pommettes de l'homme, comme elles le sont sur celles de Din.

— Notre fille est une Sensitive, l'Empire va la traquer s'il apprend son existence, ajoute cette voix qui n'est pas la sienne mais qui sort indéniablement d'elle.

La céphalée pointe le bout de son nez et la fatigue commence à peser dans chacun de ses membres.

— Din... dit-elle finalement en ne voyant plus que cet homme qui lui ressemble. Où es-tu ?

— Je suis là, juste devant toi.

Eowyn se met à grimacer de douleur, la céphalée est pulsatile et se propage jusque dans son dos. L'homme au teint pâle est toujours devant elle.

— Je... je ne te vois plus...

Puis ses yeux se ferment, éreintés. Elle n'entend plus que la voix de cette femme demandant ce qu'ils doivent faire pour protéger leur enfant.

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Joyeux Noël à toutes et à tous <3

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