🖤 Tentative désespérée (2/2)
Tandis que mon amie ferme la porte, je contemple le corps de Lucian. Ses traits autrefois imposants et sombres sont à présent marqués par la vulnérabilité et l'impuissance, reflétant tout ce que je ressens actuellement. Il serait mensonger de prétendre que je n'éprouve pas de douleur en le voyant ainsi, mais je suis parvenue à un stade où je ne peux plus supporter l'inaction. J'ai atteint le bout du tunnel de ma vie, là où le vide m'attend les bras écartés.
— Qu'allons-nous effectuer maintenant ? me questionne Irina.
— On lui arrache le cœur ? plaisanté-je, nerveusement.
Irina lève les yeux au ciel.
— Tu n'as pas une idée moins dégoûtante ?
— Je n'y ai pas vraiment réfléchi. Mais on pourrait...
Je suis interrompue dans ma phrase par des tambourinements à la porte. On sursaute toutes les deux, submergées par la panique. Irina s'avance doucement, colle son oreille, puis prononce :
— Oui, c'est qui ?
— Je vous donne trente secondes pour ouvrir cette porte, s'énerve Alek.
— Ce n'est pas que je ne veux pas, Alek. Mais je te sens un peu trop tendu pour effectuer ta demande.
— Je dispose toujours de deux places pour un massage apaisant pour soulager la tension de tes muscles contractés, au cas où, ajouté-je.
Un rire soudain résonne à l'autre bout, mais il ne porte pas de trace d'humour. Je reste perplexe, ne comprenant pas sa réaction.
— Vous savez que je connais Lucian depuis mon époque de mercenaire ? annonce-t-il. De ce fait, j'ai pu lui enseigner certaines de mes techniques, comme... se libérer de ses liens. Ou encore, retourner une torture contre son bourreau.
Ce n'est pas sans raison qu'Alek prononce ces mots, j'en suis persuadée. Rapidement, mon cœur s'accélère, je déglutis avec peine. Mes mains tremblent, mais je n'ose pas regarder derrière moi, là où Lucian siège. L'adrénaline du début décline à une vitesse vertigineuse, et à présent, c'est la peur qui me tenaille. Je crispe la mâchoire tandis qu'Irina se tourne vers moi.
D'un seul coup, ses yeux s'écarquillent. Elle commence à élargir la bouche, mais les mots ne parviennent pas à s'échapper. Elle lève lentement l'index dans ma direction, mais je ne désire pas savoir ce qu'elle m'indique. J'ai bien trop peur pour le vouloir.
— Heum... Je... Il faut qu'on sorte d'ici, Tessa ! panique-t-elle.
— Ouvre la porte, m'angoissé-je. Ouvre cette foutue porte !
Irina se tourne afin de trouver la clé dans le trousseau, cependant, ses membres tremblent tellement qu'elle le laisse s'évader.
— Dépêche-toi ! m'écrié-je.
Alek rit de l'autre côté.
— Oui ! J-Je fais au plus vite, panique-t-elle.
À peine quelques secondes plus tard, Irina réussit à ouvrir. Alors que je me hâte vers elle, une main saisit sans ambages mon poignet, et la porte se referme brusquement. Mon souffle se coupe, mon cœur tambourine avec une folle intensité. Des sueurs froides enveloppent mon corps. Je me retourne lentement, plongeant mes yeux dans les siens, aussi obscurs que son âme. Sa mâchoire serrée, son visage s'est éteint, comme si la dernière lueur s'était dissipée. Il n'est plus reconnaissable. L'ancien Lucian a disparu, et cela me déchire l'être.
Il finit par me libérer pour se diriger vers l'armoire à sa droite. Lucian fouille jusqu'à trouver l'objet de sa convoitise : un couteau. L'incertitude m'étreint, car je ne sais pas quelle intention sombre il nourrit. Pour la première fois, une angoisse profonde me pénètre, redoutant qu'il me fasse expier sa souffrance.
Retenant les larmes coincées dans mes paupières, je le vois avancer vers moi. D'un geste brusque, il me propulse l'arme, puis, avec lenteur, il déboutonne sa chemise avant de la jeter non loin de sa position.
— Je te laisse deux minutes, car si tu ne le réalises pas, sache que ta vie sera pire que l'enfer, crache-t-il.
— Comment ça ? réponds-je, surprise. Je ne comprends pas où tu veux en venir.
— Tu envisageais de me torturer, n'est-ce pas ? C'est ce que tu avais l'intention d'effectuer, alors je t'en donne l'occasion, mais ne manque pas les points qui peuvent m'envoyer six pieds sous terre, parce que moi, je ne te raterais pas.
— Mais n'importe quoi ! m'offusqué-je. Je ne suis pas toi, Lucian. Jamais je ne causerais du tort aux autres pour mon propre plaisir ou pour soulager ma douleur. Mon unique volonté était d'avoir une conversation avec toi, car tu ne m'en laisses jamais l'opportunité. Tu évites de me voir. Que pouvais-je opérer de différent ?
Ses mains se referment en poings tandis qu'il me dévisage avec mépris. J'inspire profondément, tentant de retenir les larmes qui menacent de s'enfuir, mais la situation m'échappe. L'impression qu'il n'y a aucun retour possible m'enveloppe.
— Existe-t-il un espoir de reconstruire tout ce qui a été brisé ? sangloté-je.
— Je ne t'aime plus, Tessa. Il va falloir que tu le comprennes, crache-t-il.
À ces paroles, je perds toute notion de la réalité. La respiration devient un défi, mes tentatives de contenir le chagrin sont anéanties, laissant place à une douleur lancinante qui martèle ma poitrine. Reculant légèrement, je pose ma paume sur le mur, incapable de tenir debout, submergée par mes émotions.
Le poids de mes sentiments est trop accablant. Je refuse de croire que tout ce que nous avons vécu puisse être balayé d'un revers de main, que notre amour puisse être effacé comme un mirage dans le désert. La souffrance me consume, et je me retrouve seule face à ce tumulte, sans personne pour me tendre une aide secourable afin d'éviter de sombrer dans ma douleur.
Dans l'obscurité, je ne discerne rien, incapable de trouver les mots. Il m'a abandonnée, celui qui avait promis d'être toujours présent, de me protéger de toute blessure. C'est lui qui m'a meurtrie, me détruisant complètement. Il a dérobé mon cœur, éteignant le sourire que j'avais tant peiné à raviver. C'est un drame qui s'inscrit dans les profondeurs de mon être, une tristesse joliment dissimulée derrière les silences de l'âme.
Maman, je t'en supplie, donne-moi la force de résister à ce chaos, insuffle-moi le courage d'affronter les démons qui me dévorent jusqu'au dernier morceau de ma chair.
Une main sur ma cage thoracique, je lutte pour survivre, mais la douleur demeure dévastatrice. Je tourne la tête et aperçois le couteau au sol. Je crispe la mâchoire, hésitant face à ce jeu dangereux. Si les choses ne se déroulent pas comme je l'espère, toutes mes chances s'amenuiseront. Mais il le faut, je dois savoir, je dois connaître ses pensées. Sans réfléchir, je me précipite sur l'arme et la place contre mon poignet.
— Tessa, souffle-t-il, lâche ça, immédiatement.
— Pourquoi ? rétorqué-je, effondrée. Tu n'as plus aucun sentiment pour moi, alors si je disparaissais de ta vie, tu pourrais à nouveau être heureux.
Lucian se rapproche de moi puis plonge ses iris gris dans les miens.
— Je t'en supplie, pose ce couteau, parce que si c'est moi qui te le prends, tu passeras un mauvais quart d'heure !
— Tu vas me faire souffrir, encore ? Mais regarde-moi ! Tu m'as brisée, tu m'as détruite, donc même si tu as prévu de me torturer, de m'ignorer, le mal est déjà accompli, je ne ressentirais plus rien.
— Si tu m'aimes comme tu l'as toujours prétendu, lâche ça, putain ! s'écrie-t-il.
Je m'efforce de résister, de démontrer ma force, mais mes tentatives restent vaines. Les épreuves endurées, les supplices encaissés ont laissé des cicatrices indélébiles. Le temps a apaisé mes blessures, mais à cet instant précis, je ne parviens plus à émerger des profondeurs du désespoir. Je veux seulement qu'il me tire de la douleur qui m'étreint depuis des semaines.
Les larmes coulent, la souffrance m'étouffe. Ma tête vacille, je ne suis plus qu'une ombre, étranglée dans un air que je ne peux plus respirer. Perdue dans mes pensées, je n'ai pas le temps de comprendre la scène qui se déroule lorsque Lucian accourt vers moi. Il empoigne mon bras, retire l'arme, puis la lance loin de nous. Dans ses yeux, je plonge toute ma colère, le frappant plusieurs fois au torse. Les hurlements déchirent la pièce, mon âme semble s'éteindre chaque seconde.
Je ne saisis pas l'amusement qu'il trouve à ma souffrance. A-t-il perdu toute sensibilité face à l'ampleur de cette situation ? M'effondrant, je martèle le sol à répétition. Les voix incessantes dans ma tête ne se taisent pas, je peine à réchauffer un cœur devenu aussi froid que la neige.
— Tessa, regarde-moi, murmure-t-il.
— J'avais besoin de toi, exclusivement de toi, mais tu m'as abandonnée ! sangloté-je. Je te promets que jamais je n'aurais envisagé cela, car tu étais l'amour de ma vie. C'était avec toi que je souhaitais partager mon quotidien.
— Tessa, s'il te plait.
— J'ai toujours cru que je parviendrais à oublier mon passé, celui qui m'avait tant fait souffrir. Grâce à toi, j'avais enfin retrouvé un apaisement, trouvé refuge pour mes douleurs. Je n'avais plus peur, pensant que tu me protégerais de mon frère. J'étais convaincue que tu serais là pour me garantir qu'il ne pourrait plus m'effectuer de mal, pour qu'il n'ose plus poser ses mains dégoûtantes sur moi. Avec toi à mes côtés, j'avais l'assurance que plus jamais il ne me violerait comme il l'avait fait pendant des années. Tu paraissais mon pilier, celui auquel je me raccrochais quand je sombrais, mais tu as tout détruit.
D'un seul coup, Lucian se redresse, la mâchoire crispée, les yeux assombris. Cependant, cette fois-ci, une lueur particulière, celle que j'avais observée lors de notre première nuit ensemble, refait surface. Il attrape sa chemise et se rhabille, mais son regard ne se détache pas du mien. Comme si, à cet instant précis, il saisit enfin ma souffrance, comprenant les douleurs qui m'accablent. Un silence lourd pèse dans la pièce où l'amertume de la réalité s'installe.
— Je suis navrée, bordel ! Désolée de t'avoir menti, mais je n'ai pas eu le choix. Et si je pouvais faire marche arrière, je ne le ferais pas, car je ne t'aurais jamais rencontré, et je ne t'aurais jamais aimé.
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