🫀Retour de bâton

🚨 TW : Torture


Dans la salle, je suis frappée par l'horreur lorsque Lucian clôt la porte derrière nous. Un frisson d'effroi parcourt mon échine, mes yeux s'écarquillent de peur. Mon corps se pétrifie, telle une statue figée dans un musée. L'atmosphère oppressante, sans fenêtre, sans rien, étrangle mes sens. Les murs de briques semblent se resserrer autour de moi, comme des griffes prêtes à me saisir avec violence.

Devant moi se tient un homme, celui-là même que j'avais vu enchaîné plus tôt. Mes mots se coincent dans ma gorge afin de laisser place à un silence étouffant. Perdu dans sa conversation téléphonique, assez animée, Lucian ne prête aucune attention à ma présence alors que je m'approche de l'inconnu.

Ses cheveux bruns crasseux, mi-longs, scintillent à la lumière vacillante. Une légère inclinaison de sa tête dévoile un visage marqué par de nombreuses cicatrices. Il a sûrement été soumis à des tortures sur une période importante. Ses yeux, injectés de sang, sont encerclés par des cernes opaques.

La douleur qui se lit dans son regard pénètre en moi comme si j'arrivai à m'en imprégner. Une combinaison de froid et de chaleur m'envahit et fait naître un haut-le-cœur que je peine à réprimer, amplifiée par l'odeur nauséabonde qui émane de ses vêtements déchirés et répugnants.

— Qu'est-ce que c'est que cet endroit ? interrogé-je. Qui est-il ?

— Ne pose pas de questions et obéis à mes ordres. Ta première tâche consiste à m'assister. Je vais le torturer sans l'exécuter, puis prélever ses organes, intacts. Je n'ai aucune intention de perdre de l'argent, alors écoute-moi attentivement.

— Attends ! m'exclamé-je, tu veux que je t'aide à tuer un homme ? Tu es fou, bordel ! Je ne me salirai pas les mains pour satisfaire tes désirs sadiques !

La peur empoisonne chaque syllabe que je prononce. Je suis abasourdie. Mes larmes menacent de couler, mon cœur, sur le point de lâcher prise d'une seconde à l'autre. L'air qui se raréfie m'étouffe. Il faut que je sorte d'ici, que je m'échappe avant d'assister à cet acte de barbarie. Je tente de saisir le trousseau de clés que Lucian détient dans ses mains, mais il réussit à me capturer dans mon élan et à me plaquer contre le mur.

— Tu ne peux pas m'obliger ! hurlé-je, désespérée. Je t'en supplie !

— Tu n'as pas le choix, alors ferme-là ! s'énerve-t-il.

Les doigts de Lucian s'enfoncent dans ma peau. La rage m'envahit et m'incite à vouloir lui rendre la douleur que je ressens à cet instant. Je secoue la tête, impuissante face aux larmes qui coulent. Ma cage thoracique se serre, les vertiges m'assaillent. Il finit par me lâcher et se dirige vers une table, couverte d'instruments. Je reste là, figée. Mes yeux se perdent dans le regard de l'homme attaché par des chaînes en fer qui lui maintiennent non seulement les poignets, mais aussi les chevilles.

— Viens à côté de moi ! me demande-t-il d'une voix froide, sans compassion.

Même si je résiste, je sais qu'il trouvera un moyen de transformer ma vie en cauchemar. À contrecœur, je m'approche, luttant contre mes propres convictions. Je soupire de frustration tandis que je prends place à ses côtés. Lucian retrousse les manches de sa chemise, craque son cou et se positionne devant l'individu, prêt à faire ressurgir sa cruauté.

— S'il vous plaît ! supplie la personne. Je vous paierai plus que ce psychopathe, mais libérez-moi, je ne dirai rien à la police, je vous en prie.

La main de Lucian qui se transforme en poing s'écrase violemment sur le visage de l'homme. Il gémit de douleur, son corps se contorsionne sous l'agonie. Je ne peux que regarder, déchirée par la tristesse.

— Tu sais, fils de pute, même si tu m'implores à genoux, je n'en ai rien à foutre de ses supplications. Sache que tu ne quitteras jamais cette pièce, en vie, ricane-t-il. Un dernier mot que tu aimerais ajouter ?

— Va en enfer, enfoiré ! hurle l'homme. Je te jure que je te retrouverai et que je te tuerai !

Lucian roule des yeux, puis saisit une pince coupante posée sur la table. Un rire glacial s'échappe de sa bouche avant qu'il n'empoigne la main de l'individu et ne commence à lui arracher tous les ongles. Les hurlements de l'homme résonnent dans la salle. Je serre les dents, tente de me détourner de l'horreur qui se déroule face à moi, mais la voix impitoyable de Lucian me ramène à la réalité en un instant.

— Donne-moi l'écarteur ! ordonne-t-il.

Je le regarde, perplexe.

— Tu fais exprès ou t'es juste conne ? s'impatiente-t-il.

— Ce n'est pas comme si j'étais une professionnelle de la torture, tu es mignon toi, répliqué-je indignée.

— Arrête tes conneries, Tessa, et passe-moi ce foutu truc en plastique !

Mentalement, je gronde de colère. Mes poings se serrent, prêts à riposter, mais les yeux gris de Lucian me transpercent comme des lames de couteau. Je tremble au point que je n'arrive même pas à saisir l'instrument. Perdue dans mes pensées, je m'égare. Je tente de respirer profondément pour retrouver le contrôle, mais tout me paraît infaisable. Finalement, Lucian, exaspéré, me pousse, prend l'objet avant de l'insérer dans la bouche de l'individu pour l'empêcher de fermer les lèvres. Des frissons me parcourent, une sensation de malaise grandit en moi. Qu'est-ce qui peut entraîner un homme à infliger de telles souffrances à autrui sans éprouver le moindre remords ? Cette question fuse dans ma tête et alimente ma peur face à lui.

— Tournevis et marteau, si tu sais ce que c'est, bien sûr, soupire-t-il.

Je hausse les épaules, tendant les instruments avec nervosité. Je ne comprends pas son plan, mais un pressentiment malsain me tord les entrailles. Lucian positionne l'arme sur l'une des dents de l'homme, mais ce dernier continue de bouger. La patience du dégénéré semble avoir atteint ses limites. Son visage vire au rouge, sa mâchoire se crispe.

— Fais-le ! m'ordonne-t-il. Je vais lui maintenir la tête pour le bloquer.

Je lève les sourcils, surprise par sa demande.

— Hors de question que je fasse du mal à un innocent, tu dérailles complètement ou quoi ! m'emporté-je.

À mes paroles, un rire malsain s'échappe des lèvres de Lucian.

— Innocent, lui ? Tu es vraiment plus conne que je ne le pensais, se moque-t-il. Te souviens-tu de Irina, la fille que tu as croisée dans l'escalier ? Je te présente John, l'un des fils de putes qui l'ont violée tout en filmant.

Les mots se paralysent dans ma gorge. Je lutte pour me concentrer, pour faire taire les maudites voix dans ma tête qui me rappellent mes foutus cauchemars.

— Toujours innocent, petite brebis, ou tu vas enfin bouger ton gros cul pour m'aider ?

Un sentiment de haine s'infiltre dans chaque parcelle de mon corps et ravive la douleur endurée avant de devenir Tessa. J'essaie de fermer les yeux, de chasser ces pensées qui tentent de m'engloutir dans un océan de malheur, mais c'est difficile. Je crie de toutes mes forces, cherchant à apaiser mon chagrin.

Je saisis les instruments que Lucian me donne et me dispose en face de John. Je place le tournevis entre ses deux dents de devant. Mes mains tremblent, je peine à le maintenir fermement. Je suis assaillie par le doute. Je me demande si j'ai vraiment la force d'aller jusqu'au bout, de franchir la frontière entre le bien et le mal. Je réalise que je ne pourrai plus me regarder dans un miroir après ça.

— Putain, mais tu vas le faire ou quoi ! hurle Lucian.

Sous le stress que Lucian m'impose, d'un geste brusque, je frappe avec le marteau. Les dents tombent une à une sur le sol. Je réitère l'action à plusieurs reprises. Sa bouche est emplie de sang, ses pleurs coulent à une vitesse fulgurante. À cet instant, le dégoût s'intensifie en moi, m'envahit à un point où je ne peux plus contrôler les larmes qui sillonnent mes joues. Ma respiration se fait laborieuse, mon cœur martèle ma poitrine. C'est un fardeau bien trop lourd à porter sur mes épaules. Je me recule lentement, les yeux rivés sur ce que je viens de faire. Je n'arrive pas à croire que j'ai pu commettre ça.

Je... Je ne suis pas Lucian.

Cette phrase, je me la répète un nombre incalculable de fois sans réussir à apaiser le mal qui me ronge.

Après de longues hésitations, Lucian opte pour une batte de baseball. Comme à son habitude, un sourire cruel se dessine sur son visage avant qu'il ne s'acharne violemment sur les genoux de John à maintes reprises. Rien qu'à voir cette scène, l'envie de vomir m'engloutit. Le prisonnier se débat, tentant désespérément de se libérer des flammes de l'enfer qui le dévorent, mais en vain. Les bruits des os qui se brisent me donnent des sueurs froides. Je finis par détourner le regard. Je ne peux plus supporter ça.

— Merde ! Ce chien s'est évanoui, soupire Lucian. Apporte-moi le brancard, juste à côté de toi.

Je serre les dents, l'envie de le confronter chatouille mes lèvres, mais je me retiens, me contentant d'être une spectatrice impuissante. Je fais glisser la civière jusqu'à lui. Les roues grincent sur le sol et m'envoient des frissons le long de mes bras. Je m'écarte légèrement et l'observe détacher John avec la clé pour ensuite le maintenir prisonnier sur le lit médical. Quelques spasmes agitent son corps, mais ses yeux clos indiquent que la douleur l'a rattrapé. Je déglutis avec difficulté. Lucian se dirige vers l'armoire blanche. Je ne sais pas ce qu'il cherche, mais à son retour, sa main se fond dans la courbe d'un immense tube, tel un pinceau prêt à peindre la mort.

— Que comptes-tu effectuer ? demandé-je d'une voix tremblante.

— Je vais lui administrer une décharge d'adrénaline pour le stimuler. Je veux qu'il contemple son sort quand je commencerai à ouvrir sa cage thoracique, répond Lucian.

— Tu ne vas pas vraiment faire ça, n'est-ce pas ? m'inquiété-je.

Il m'ignore, me laissant dans le noir, puis insère brutalement l'auto-injecteur dans la cuisse de John afin de le réveiller sur-le-champ. Ses yeux parcourent la pièce. Il réalise qu'il est allongé, mais impuissant, captif de son propre destin. Pendant que Lucian commence à ouvrir son abdomen avec un scalpel, je sens ma tête tourner. Je grimace de dégoût, sur le point de vomir. J'ai toujours été habituée à regarder des films assez crus, mais voir ça de mes propres yeux me donne la nausée. Le sang coule abondamment, chaque goutte qui tombe au sol me fait sursauter. Je me retourne, frottant furieusement mes mains contre mon pantalon. J'essaie de penser à autre chose, mais l'émanation insoutenable me ramène à la réalité, surtout lorsque le son d'une scie effleure mes oreilles.

Soudain, mes émotions me submergent et je vide tout ce que j'ai ingéré. C'est insupportable, je suis à bout. L'odeur de la mort, les cris de John qui révèlent sa souffrance alors que l'adrénaline s'estompe. Non, je veux simplement fuir, oublier.

— Tu es la plus lamentable des recrues que nous n'ayons jamais eues, soupire Lucian. Prends les clés et casse-toi dans la chambre. Je viens dans vingt minutes, le temps de lui extraire ses organes et de les remettre à Pitz, qui est sûrement déjà arrivé en hélicoptère.

— Va te faire voir ! m'écrié-je. Tu es un foutu dégénéré !

Le visage souillé par le liquide écarlate, il éclate de rire avant de me lancer violemment le trousseau. Prise de panique, j'ouvre la porte et m'enfuis à toute vitesse. Mes larmes coulent sans fin, mon pouls s'accélère à chaque inspiration. Mes poumons brûlent, mes jambes peinent à soutenir mon poids sous cette pression désespérée. Arrivée, je me précipite dans la salle de bain, juste à côté du lit et me verrouille à l'intérieur. Je m'adosse contre le mur, dissimule mes yeux derrière mes paumes et laisse mon chagrin s'épancher.

Après un moment plongée dans l'ombre de mes fautes, je me redresse et me rafraîchis le visage avec l'eau glacée du robinet pour effacer les marques de ma vulnérabilité. Je me rends dans la chambre, encore secouée par ce que je viens de vivre. J'ai besoin de décompresser un instant. Je tire les rideaux du lit et m'y réfugie comme pour me protéger, là où la douleur ne peut franchir cette barrière invisible. Je me tourne en quête d'une position qui pourrait m'affranchir de cet état de choc. Si seulement je pouvais revenir en arrière, si ma mère était toujours présente pour m'aider dans ce labyrinthe obscur, mais c'est une réalité impossible.

Ne trouvant pas le réconfort tant espéré, je me lève à la recherche de la télécommande de la télévision, dans l'attente du retour de Lucian. J'ai besoin de penser à autre chose. Mes yeux parcourent la pièce, mais rien n'attire mon attention. Je me dirige vers les tables de chevet. Rien sur celle de droite. Je fais le tour puis ouvre celle de gauche où je découvre ce qui pourrait me sauver la vie : un téléphone. Je le saisis et retourne au lit. Je l'allume et par chance, il ne nécessite pas de code. Je tente de me rappeler le numéro des agents et finis par le composer sur le clavier. Cependant, dès que je le porte à l'oreille, une tonalité stridente assaille mes tympans. Je grimace de frustration. La panique m'envahit. Mon cœur bat la chamade. Je dois trouver une autre solution.

Je me tourne alors vers le navigateur internet pour me diriger vers mon mail. Peut-être pourrais-je les contacter de cette façon. À toute vitesse, j'y rédige toutes les informations mémorisées depuis que j'ai rejoint les Herzdiebe : comment ils dénichent des patients adéquats à l'hôpital, la prochaine fête prévue à Düsseldorf, l'entrepôt mystérieux débordant de toutes leurs marchandises. Quand j'appuie sur « envoyer », la terreur me glace. Ma tête tourne. J'ai l'impression de ne plus pouvoir respirer comme il se doit. Alors que j'efface toutes les traces, la porte s'ouvre violemment et se referme aussitôt.

Lucian vient d'arriver.

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