🫀Préparation - LUCIAN
Une semaine s'est écoulée et le mystère persiste quant à la réticence de Tessa. J'ai tenté de la réconforter, de lui assurer que j'étais là, prêt à la protéger, mais elle reste évasive. Elle évite mon regard jusqu'à esquiver tout contact. Cette situation m'énerve et ravive cette colère qui peut me pousser à retrouver mon statut de connard sans cœur avant son arrivée chez nous.
Assis sur la chaise, je l'observe attentivement, paré à lui faire endurer un supplice dont même après sa mort, il se souviendra comme de la pire journée de sa vie en tant que traître. Johann a enfin repéré celui qui s'amuse à marquer mon prénom sur tous les corps qui passent par ici : Moritz, un homme du gang depuis environ quatre ans. Malgré son bon travail, étant responsable de certaines livraisons, nous devrons dorénavant trouver son remplaçant une fois que sa tête ornera le hall.
Attaché par une cordelette en chanvre solide et fine, j'ai lié les bras et la poitrine de Moritz en maintenant ses mains derrière son dos. Incapable de s'échapper ou de bouger, il devient très vulnérable. J'inhale une bouffée de nicotine et ancre mes yeux dans les siens, désormais rougis à force de pleurer.
— Je te jure, Lucian, ce n'était pas mon intention de te trahir, sanglote-t-il.
J'esquisse un léger sourire.
— Ah bien, ça éclaircit tout alors, réponds-je. On va se prendre un café maintenant ?
— Laisse-moi simplement t'expliquer, s'il te plaît !
— Tu as une minute pour me dire la vérité, car les prochaines minutes risquent d'être douloureuses.
— J'y étais contraint, avoue-t-il. Jonas m'a approché il y a quelque temps. Il prétendait détenir un dossier compromettant sur moi. J'avais le choix entre suivre ses ordres ou voir cette vidéo exposée à tous.
Le visage de ce fils de pute hante mes pensées et malgré de nombreuses recherches, il ne s'est pas aventuré à revenir ici, mais le jour où nos chemins se croiseront à nouveau, ce sera la dernière fois qu'il respirera l'air de Düsseldorf.
— Donc, pour ta putain de vidéo, tu as été jusqu'à me trahir ?
— Je... Lucian, s'il te plaît. Tu sais très bien comment les homos sont considérés dans notre cercle. Je ne pouvais pas me permettre de tout compromettre, surtout pour mon épouse et mon fils.
— Moritz, tu auras beau t'agenouiller devant moi ou m'annoncer que ton enfant a besoin de toi, je m'en tape, grogné-je.
— Je t'en prie, je ferais tout pour me racheter, mais laisse-moi en vie ! crie-t-il.
— Comme les cadavres de femmes que tu profanes ? Dis-moi, quel plaisir prends-tu ? craché-je.
— Quoi ? Mais non, pas du tout !
— Donne-moi un nom ! hurlé-je.
Je lui lance un regard glacial, prêt à démembrer chaque organe qui compose son corps. Je serre les dents, crispe mes doigts avant de me relever pour me diriger vers l'armoire où de nombreux outils sont rangés.
— Jonas ! braille-t-il. C'est Jonas qui les viole ! Lucian, je t'en prie, on se connaît depuis longtemps maintenant, tu sais comment je suis et le respect que j'ai pour toi.
La pièce est plongée dans une semi-obscurité, seulement éclairée par la lueur vacillante d'une ampoule suspendue au plafond. L'atmosphère est saturée de tension, accentuée par la musique feutrée qui s'échappe des haut-parleurs. La perceuse entre mes mains, qui émet un bourdonnement menaçant, devient l'instrument de ma justice. Les cris déchirants de Moritz s'entremêlent à la mélodie sadique de ma vengeance. Chaque rotation de l'arme résonne comme une sentence, là où sa chair marque le prix de sa trahison.
Le sang, comme une peinture macabre, trace des chemins sur sa peau. La douleur qu'il endure représente la conséquence de ses actes. Mon visage reste impassible, masquant les remous de sentiments contradictoires qui virevoltent dans ma tête. Si Tessa n'avait pas adopté une attitude aussi distante, ma vengeance aurait été plus clémente. Cependant, le fait qu'elle ne me prête aucune attention déclenche en moi une réaction que je peine à expliquer. Cette femme a réussi à rompre les barrières que j'avais érigées lorsque Franziska m'a trahi. J'avais juré que mon cœur resterait de glace, mais Tessa éveille en moi quelque chose de bien plus puissant. J'ai essayé de surmonter ces sentiments, de faire abstraction de son doux parfum et de la chaleur de sa peau, mais c'est une tâche impossible. En sa présence, je perds toute rationalité. Je lâche un soupir de frustration. Il est temps que je libère cette haine qui me consume, de laisser cette rage s'exprimer pour reprendre le contrôle sur moi-même.
Je me dirige vers l'armoire et y saisis un marteau. Moritz a tenté de me trahir, alors il va faire la rencontre avec le diable. Je lui tiens fermement la mâchoire et lui assène un coup pour briser une à une ses dents. Sa tête s'incline rapidement, donnant l'impression qu'il vient de perdre connaissance. Je hausse les épaules et prends le club de golf. Je ferme les paupières quelques instants avant de fracasser son crâne. Plusieurs chocs s'abattent sur lui. Du sang éclabousse mon visage et tache mes vêtements, mais je ne m'arrête pas, bien au contraire. Je veux qu'il souffre et se souvienne, même en enfer. Des morceaux de cervelle volent en éclats. Un de ses yeux a disparu. Un sourire se dessine sur mes lèvres. Maintenant, c'est au tour de Jonas.
***
Debout dans mon bureau, je reste planté là, whisky à la main et clope au bec. Je dois me rendre à l'entrepôt pour vérifier que tout se déroule comme attendu pour la grande fête de ce soir, où nous aurons l'opportunité de mettre la patte sur de nouvelles marchandises. J'avais initialement prévu d'y aller avec Adéla, mais je vais plutôt m'orienter vers Tessa, dans l'espoir qu'elle arrête de bouder et qu'elle me révèle enfin ce qui se passe. Je soupire en m'apprêtant à m'asseoir, cependant, quelqu'un frappe à la porte.
— Installe-toi ! ordonné-je en désignant le fauteuil en face de moi.
Adéla prend place, gardant son regard fixé sur moi.
— Reste avec Klemens aujourd'hui, je vais emmener l'autre emmerdeuse, confirmé-je.
— D'accord, de toute manière, je dois faire le point avec lui concernant les futurs clients.
— Et pour notre petite conversation de la dernière fois, qu'as-tu appris ?
— Tessa se remet progressivement. Aucune séquelle physique importante.
Je fronce les sourcils, scrutant Adéla avec suspicion. Sa manie de se triturer les ongles trahit souvent une gêne ou un mensonge.
— Qu'y a-t-il ? grondé-je.
— Rien, c'est tout ce que j'ai mémorisé, confirme-t-elle.
Elle détourne le regard, évitant le mien.
— Arrête de me prendre pour un con ! crié-je. Je te connais par cœur. Donne-moi ces putains d'informations avant que je m'énerve.
— Mais je n'en ai aucune, Lucian !
Je frappe sans retenue sur le bureau. Elle sursaute. Il est évident qu'Adéla a peur, qu'elle est effrayée, mais je sais qu'elle me cache quelque chose.
— Tu as trois secondes pour me dire tout sinon Klemens verra ta tête décorer ma chambre, exigé-je.
— Ne m'oblige pas à te dévoiler ça, pleure-t-elle. Tu es conscient que je ne trahis jamais un serment, c'est aussi ton code d'honneur. J'ai la confiance de Tessa et je n'ai nulle intention de la rompre. Si elle souhaite te révéler la vérité, elle le fera d'elle-même, mais pour ma part, je ne le peux pas. Alors, si l'envie te prend de m'exploser le crâne, fais-toi plaisir.
— A-t-elle souffert ? la questionné-je.
Un signe de tête positif de sa part et les pires scénarios défilent devant mes yeux. Je sens la haine monter en moi. Mes poings se serrent d'instinct, mais je lutte pour ne pas laisser éclater ma colère. D'un seul coup, tout ce qui se trouve sur mon bureau est renversé, et un cri de frustration s'échappe de ma gorge. Si Adéla ne faisait pas partie de mon cercle restreint, je ne me serais pas retenu de la torturer jusqu'à son dernier souffle.
— Dégage d'ici avant que je ne change d'avis, craché-je.
Elle se lève rapidement et quitte la pièce en furie. Ma mâchoire se crispe, et j'essaie de me détendre en allumant une cigarette. Ma frustration atteint son paroxysme. Quiconque a osé lui faire du mal va bientôt comprendre qu'il a gravement sous-estimé les conséquences de menacer ce qui m'appartient.
Après avoir passé une heure à réfléchir à tout ça, je décide de me rendre dans la chambre de Tessa. Nous devons aller à l'entrepôt et voir comment les choses se déroulent. J'espère que cette journée sera moins merdique qu'elle n'a commencé. J'entre sans même frapper. Tessa est allongée dans son lit. Sa robe blanche couvre une partie de ses jambes, mais pas assez, car mon désir s'accroît immédiatement. J'aimerais la prendre ici, tout de suite, mais je ne peux pas. Je crispe la mâchoire et m'approche d'elle. Tessa se redresse légèrement et me fixe de ses yeux bleus. Je me mords la lèvre inférieure pour ne pas succomber à la tentation de lui arracher le vêtement.
— Tu es prête ? Otto nous attend dans la voiture, affirmé-je.
— Suis-je contrainte de t'accompagner ?
Je fronce les sourcils et la dévisage.
— Je ne te comprends pas, m'indigné-je. Il y a une semaine, tout était en ordre, et maintenant, tu m'évites.
— C'est simplement que je suis épuisée.
— Non, je refuse de l'accepter, m'irrité-je. Tu sais très bien que je déteste qu'on me prenne pour un con.
Tessa se lève du lit et se place devant moi. Elle appuie ses mains froides sur mon visage et soulève légèrement la pointe de ses pieds pour déposer ses lèvres sur les miennes. Je grimace et essaie de contenir l'excitation qui monte. Elle a de la chance que je la respecte, sinon je me serais fait un plaisir de la baiser sur-le-champ.
— Je vais t'accompagner, sourit-elle. Donc calme-toi. Tu sais, j'ai toujours mes places pour un massage, si tu le souhaites.
— La ferme, sifflé-je entre les dents.
Elle rit légèrement et enfile ses chaussures. J'aimerais être en mesure de découvrir ses secrets, de comprendre ce qui la tourmente, mais elle ne me dira rien. Cette réalité attise davantage ma frustration, car je ne parviens pas à lui offrir mon soutien. Je ne connais pas ce pouvoir qu'elle détient sur moi, mais elle sait y faire.
Après une demi-heure de trajet, Otto finit par garer la voiture devant notre entrepôt. Nous en possédons plusieurs, celui-ci étant principalement dédié à nos calibres, où nos hommes s'équipent avant de partir en mission. Je sors du véhicule et entoure Tessa de mon bras en la guidant. Je salue Rick, le gardien, qui ouvre la barrière pour nous laisser entrer. À l'intérieur, plusieurs personnes se préparent. Certains ajustent leurs gilets pare-balles, d'autres vérifient le bon fonctionnement de leur arme à feu.
— En quoi consiste cette fête exactement ? interroge Tessa.
— Chaque année, Dusseldorf organise un important événement pour collecter des fonds au profit d'associations. Étant donné que Conrad ne peut pas avoir une connaissance exhaustive de chaque détail, et qu'il se concentre principalement sur l'hôpital, nous effectuons un repérage, car c'est le lieu de rassemblement des grands sportifs.
— Et vous les capturez devant tout le monde ? s'étonne-t-elle.
Je ris légèrement et me dirige vers le bureau dans lequel se trouve Hass.
— Non, réponds-je. Nous mettons en place un système d'annonces que nous leur distribuons immédiatement. Nous les persuadons que nous cherchons des athlètes pour une publicité contre une belle somme d'argent, ce qui les attire directement.
— Et ensuite, comment procédez-vous ?
— Es-tu sûre de vouloir le savoir ?
— Pas nécessairement, mais je pense que nous avons franchi une étape, alors j'aimerais connaître les tenants et aboutissants si je dois partager un bout de ma vie avec toi.
Je manque de m'étouffer avec ma salive puis m'interromps devant elle. Je la détaille de haut en bas et plonge mon regard dans le sien.
— Ça change des doigts que tu me lances habituellement, souris-je.
Tessa soupire et me donne une tape sur l'épaule.
— Arrête de jouer au malin et dis-moi, rétorque-t-elle.
— Lorsqu'ils pénètrent dans l'entrepôt, Backer se charge de les asperger d'une dose de kétamine de synthèse en spray nasal. Il administre généralement 0,1 gramme par tranche de sept kilos, mais bref. Ensuite, nous les transférons à la demeure, où plusieurs salles d'opération sont équipées au sous-sol. Nous procédons par la suite à l'extraction des organes, et l'ironie, c'est quand ils reprennent connaissance et prennent conscience de ce qui s'est passé. Car parfois, nous ne prélevons pas uniquement les cœurs. Le Boucher se charge d'arracher les dents pour éviter toute identification et les plonge dans de la chaux vive. Toutefois, lorsque le temps nous presse, nous abandonnons les cadavres dans des villes ou même dans d'autres pays.
Je remarque rapidement qu'elle se décompose. Son visage change de teinte et devient blanc comme la neige. Tessa se recule légèrement et enlace ses doigts de façon répétée.
— Je t'avais prévenu, repris-je en haussant les épaules.
— C'est... C'est... Bégaye-t-elle. Et toi alors, c'est quoi ton rôle dans tout ça ?
— Je m'occupe de gérer les hommes, de voir si tout se passe bien et, de temps à autre, de torturer ceux qui osent nous trahir.
Elle arque les sourcils et avale tant bien que mal sa salive. Je fais un signe de tête, puis entre dans le bureau pour saluer Hass. Affalé sur son siège, le grand blond se lève et me tend la main. Ses yeux verts scrutent directement sur Tessa.
— Si tu ne veux pas que je te les arrache, détourne le regard, déclaré-je.
Il sourit nerveusement avant de se rendre au bar pour nous servir trois whiskys, qu'il dépose ensuite sur la table basse noire. J'observe Tessa qui porte le verre à ses lèvres, mais elle grimace immédiatement et recrache le liquide.
— C'est le prix à payer pour jouer les grandes, plaisanté-je.
Elle me tend discrètement son majeur avant de se lever et de se diriger vers la baie vitrée qui donne accès à l'extérieur. Je vais finir par le lui couper si elle continue. Je serre les doigts tout en me retenant de ne pas lui donner une fessée qu'elle n'oubliera pas de sitôt.
— Alors, comment se passent les préparatifs ? questionné-je Hass.
— Tout avance correctement, annonce-t-il. Sören a fabriqué des balles paralysantes, parfaites pour contrôler d'éventuelles victimes au cas où elles voudraient s'échapper. Une vingtaine d'hommes seront sur place pour faire des repérages, donc Jonas pourra venir les récupérer.
Le simple fait d'entendre ce nom m'exaspère, et je perçois également la nervosité de Tessa, qui se tourne vers moi. Ses yeux brillent d'inquiétude. Je lui adresse un signe de tête pour la rassurer que tout se passera bien, puis je vide mon verre d'un trait.
— Ce fils de pute ne fait plus partie des Herzdiebe. C'est Robby qui s'en chargera, affirmé-je.
— Tobias a enfin viré son rejeton ? rit-il.
— Pas encore, mais quand je le croiserai, je lui exploserai le crâne.
Hass hausse les sourcils, étonné, mais ne formule aucune réplique, conscient de ma manière de procéder. Je me lève puis me dirige vers la sortie, persuadé que tout se déroulera comme prévu. Tessa me suit de près, et ensemble, nous nous avançons vers la voiture. L'heure de rentrer a sonné.
Déjà vingt-deux heures, et je suis assis dans le bureau de Tobias. Bien qu'il m'ait demandé de le rejoindre, il semble répéter son habitude d'arriver en retard. J'allume une cigarette, étends mes jambes sur le rebord du meuble, lorsque la porte s'ouvre puis se referme rapidement. Tobias s'installe directement dans son fauteuil, puis me scrute d'un regard sombre. Il est évident que quelque chose le préoccupe, ça transparaît dans sa nervosité à trifouiller sa montre.
— Nous avons un problème, confie-t-il.
— Si tu me convoques à cette heure-ci, je m'en doutais. C'est quoi le souci ?
— Conrad vient d'être appréhendé par la police. Quelqu'un a tout révélé, fulmine-t-il.
— Pardon ? Comment ça a pu arriver ?
— Une taupe s'est infiltrée parmi nous. Trouve-la et bute-la.
Tessa.
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