🫀Conséquences - LUCIAN

Affalé sur les barreaux du balcon, j'observe l'aube se lever progressivement. Inhalant la fumée pour intoxiquer mes poumons déjà brûlants, ma tête est assaillie par un flot de pensées, notamment cette putain de soirée. Les images répugnantes de ses mains sur elle refusent de quitter mon esprit. Pourtant, la seule chose qui me donne un semblant de vie dans ce monde est la souffrance des autres. Cette sensation m'offre une satisfaction à chaque seconde qui passe. Je serre les dents et inspire profondément. J'ai l'impression de devenir tout ce que je haïssais dans ma jeunesse, et je déteste cette transformation. Je méprise ma propre faiblesse. D'un geste brusque, je balance le verre qui trône sur la table. Un grognement de frustration s'évade de mes lèvres, tandis que je sors de la pièce, fragilisé par ce sentiment que je peine à contrôler.

— Lucian, m'interpelle Klemens. Tout va bien ? Tu n'as pas prononcé un mot pendant tout le trajet hier.

— Je t'avais demandé de la surveiller, bordel !

— Je sais, je l'ai avertie, je te le jure, répond-il d'un ton défensif.

Sans réfléchir, je saisis Klemens par le tissu de sa chemise et le projette violemment contre le mur. Ma mâchoire se serre, mes yeux le transpercent de colère. La terreur imprègne son regard, ses dents se mettent à claquer, une habitude qu'il a quand il panique.

— Pardonne-moi, s'excuse-t-il à toute vitesse. Je ne voulais pas que ça tourne ainsi. Tu sais très bien que jamais je ne discuterais tes ordres.

— Tiens, les salopes de Düsseldorf.

Jonas danse, torse nu, une bière à la main. Les sourcils haussés, mes doigts se transforment en poing et je lui assène un coup. Il perd l'équilibre et s'effondre. Ce rejeton hurle à la vue de son propre sang. Je viens de lui fracturer le nez.

— La prochaine fois, ce sera une balle entre les deux yeux, précisé-je froidement.

Un sourire satisfait se forme sur mes lèvres.

— Tu sais que tu ne peux pas, crache-t-il. N'oublie pas que je suis le fils de Tobias. Juste parce que tu es son larbin, ne pense pas que je ne peux pas transformer ta vie en enfer. Profite de l'instant, Lucian, car quand tu t'y attendras le moins, je serai là pour commencer les festivités.

Je ne prête pas attention à ses paroles et m'éloigne avant d'exploser sous le poids de ma rage.

— D'ailleurs, la nana ramenée est plutôt bandante. Comment s'appelle-t-elle déjà, Tessy... Non, Tessa, rit Jonas. Tu crois qu'elle aimerait atteindre le septième ciel, cette petite salope ?

Mes pensées s'embrument. Je me jette sur lui et le frappe à maintes reprises. Par terre, accroupi sur lui, je perds tout contrôle, aveuglé par la haine. Son visage vire au rouge sous les coups répétés que je lui inflige. Mon cœur bat à un rythme effréné, mon corps peine à suivre, mais je ne m'arrête pas. Je veux qu'il souffre, qu'il comprenne qu'ici, il n'est rien. Je serre les dents, englouti par cette foutue haine qui s'agrippe dans chaque recoin de mon être.

— Allons-nous-en ! s'exclame Klemens. Il te manipule et tu le sais. Ne le laisse pas te détruire.

Klemens m'extirpe du sol en me saisissant par le torse.

— La prochaine fois, je t'arracherai le cœur, fils de pute ! hurlé-je.

— Lucian ! Viens, sortons d'ici !

Mon ami m'entraîne plus loin, malgré ma volonté de continuer le carnage initié. Je tape du pied et finis par me résigner, quittant les lieux. J'ai besoin d'air, et vite. Je secoue la tête lorsque j'observe mes phalanges ensanglantées. Mes mains ont du mal à se clore, la douleur devient insoutenable. Je grimace et m'assois sur le rebord de l'escalier. Je ferme les yeux quelques instants et inspire. Putain, je ne me reconnais plus. Ce n'est pas moi. Qu'est-ce qui m'arrive ? Je dois faire taire ces maudites voix dans mon crâne avant de retomber dans l'obscurité, dans un chemin où je risque une fois de plus de me perdre.

— Tessa n'est pas Franziska, me confie Klemens.

— Pourquoi me parles-tu d'elle ?

— Parce que je te connais. La dernière fois que je t'ai vu ainsi, c'était quand elle était là.

— Je n'ai pas envie d'en discuter, soupiré-je, épuisé.

Entendre ce prénom depuis quelques années tord mon visage. Je n'ai aucun besoin de revisiter mes souvenirs qui me collent à la peau comme une sangsue. Je me redresse et frappe violemment les poubelles à l'entrée. Ça ne peut pas recommencer, je le refuse. Et si ça devait se reproduire, j'y mettrais moi-même un terme.

Je me tiens devant la chambre de Tessa, un seau d'eau glacée entre les mains. J'insère la clé dans la serrure et ouvre la porte. Les volets sont clos, elle doit sûrement dormir. Je reste là, aux pieds de son lit à l'observer en silence. Ses longs cheveux blonds cachent son dos, le drap ne couvre que le bas de son corps. Cette vision provoque une étincelle qui se propage rapidement dans tout mon être. Mon pénis devient dur et assez douloureux. J'ai envie de la prendre dans tous les sens, la baiser toute la nuit. Je secoue la tête pour essayer d'enlever ces images de mon esprit. Je finis par lui jeter l'eau au visage et en quelques secondes, elle se redresse, apeurée.

— Tu es complètement fou, ce n'est pas possible ! s'écrie-t-elle.

Je me dirige vers la porte et allume l'interrupteur. Les mains posées sur sa poitrine dénudée, son regard glacial me transperce comme si elle envisageait sérieusement de me tuer. Je souris légèrement et m'assois dans le fauteuil.

— Prépare-toi ! lui ordonné-je, on sort.

— Je n'ai aucune envie de bouger, surtout pas avec toi, grimace-t-elle.

— Ce n'est pas une option, alors lève-toi avant que je m'en charge moi-même.

— Tu es sacrément perturbé, pauvre type !

— Oh, arrête de crier, soupiré-je.

Tessa se redresse brusquement et vient coller son visage près du mien. Je sens son souffle sur ma peau. La tension devient palpable.

— Va te faire foutre, Lucian, va vraiment te faire foutre !

Elle soulève la main pour me gifler, mais je l'en empêche en agrippant son poignet. Mon regard descend maintenant sur son sein droit, totalement découvert. Son téton pointe et m'excite terriblement. Je passe ma langue sur mes lèvres. Cette blondasse n'a même pas eu l'intelligence d'enfiler un pantalon, puisque sa petite culotte met en évidence ses belles formes.

— Dépêche-toi, Tessa, je vais perdre patience ! m'énervé-je.

Tessa roule des yeux puis se dégage de mon emprise. Elle se retourne et, comme à son habitude, lève son majeur. Je serre les dents. Elle a de la chance, une foutue chance que je ne lui arrache pas pour lui fourrer dans la gorge.

Elle commence à attacher ses cheveux et mon sang bout quand j'aperçois les cicatrices qui marquent son dos. Rapidement, elle se rend compte que je l'observe et s'habille en un éclair. Je plonge mes yeux dans les siens, mais Tessa ne me prête aucune attention. Qui lui a fait ça ? Pourquoi ? Trop de questions virevoltent dans ma tête. Je frappe violemment les accoudoirs, où cette emmerdeuse sursaute. Je me lève puis ouvre la porte, l'incitant à effectuer la même chose.

— Tu vas me punir pour hier ? me demande-t-elle.

— La ferme et suis-moi.

— Toujours aussi poli, à ce que je vois. Tes parents semblent avoir oublié de t'éduquer, souffle-t-elle.

Aussitôt, je la plaque contre le mur, puis agrippe sa gorge. Une pulsion me pousse à serrer, mais je me retiens.

— N'ose plus jamais parler d'eux, sinon l'enfer te paraîtra un paradis comparé à ce que je te réserve, compris ?

Elle est terrifiée, je le vois dans la lueur de ses yeux, prête à éclater en sanglots. Tout son corps se met à trembler.

— Désolée ! Désolée !

Je secoue la tête, puis la libère. Encore une journée de merde qui s'annonce.

***

Après trente minutes de route, le chauffeur nous dépose au stand de tir. Je tiens Tessa par le bras, ses yeux bandés pour des raisons de sécurité. Je n'ai pas confiance en elle, donc je préfère prendre des précautions. J'entre dans le bâtiment, mais Vinzent n'est pas encore là, probablement occupé à l'arrière-boutique.

— Tu ne veux toujours pas enlever ce fichu tissu ? gémit-elle.

— Tu ferais mieux de te taire. Tu me gonfles, répliqué-je.

— Si tu prévois de me frapper, j'adorerais quand même pouvoir te voir et me souvenir de ton regard de clochard quand je te ferai payer ma vengeance.

— La ferme, Tessa ! ordonné-je, perdant mon sang-froid.

Je scrute la zone avec impatience. Même si je connais cet endroit comme ma poche, j'aime vérifier s'il y a du nouveau matériel. Cependant, les armes restent inchangées, toujours accrochées au mur derrière le comptoir. Je m'approche des vitrines devant moi et j'inspecte les différentes grenades et les couteaux de formes variées. Ils sont tous de bonne qualité, mais Vinzent devrait penser à renouveler son stock avant que je ne me tourne vers la concurrence.

Sa silhouette massive se dessine devant moi, une cigarette au bec, les mains remplies de graisse et de crasses. Son visage scarifié s'illumine en m'apercevant. Il glisse ses doigts dans ses cheveux huileux et me fixe avec ses yeux marron. 

— Salut, l'ami ! Je n'ai pas vu ta sale gueule ici depuis un moment.

— Tu as préparé la salle ? demandé-je.

— Oui, comme convenu, répond-il.

Vinzent essuie son front couvert de sueur avec la manche de sa chemise, déjà tachée de bière, et me laisse passer derrière le comptoir.

— Tu empestes l'alcool, soufflé-je.

— Du moment que je ne pue pas la merde, ça me va, rit-il.

Je hausse un sourcil, traverse le tunnel qui relie cette pièce au stand et me dirige vers les vitres derrière lesquelles je vais tirer. Cette fois-ci, aucune cible ne va descendre, seulement le corps de Tessa. Je la pousse contre le poteau central et l'attache avec une corde trouvée sur la table à côté.

— Qu'est-ce que tu fais ? hurle-t-elle.

Je ne réponds pas et lui retire le bandeau. Rapidement, son regard balaye la zone. Elle est inquiète, sa voix tremblante en témoigne. Tessa tente de se libérer, mais j'ai serré les liens d'une telle intensité, qu'elle ne pourra pas réussir.

— Espèce d'enfoiré ! crie-t-elle.

Cette garce vient de me cracher dessus, une fois de plus. Je lui agrippe le menton avec mes doigts. L'envie de la déshabiller et de lui donner une bonne correction traverse mon esprit à une vitesse fulgurante, mais je réprime cette tentation. Je me retourne et me dirige vers les comptoirs où Vinzent a posé mon colt. J'entends ses cris, mais je m'en tape royalement. Elle va réaliser que personne n'accomplit ce qu'elle souhaite sans mon autorisation.

— Je te conseille de ne pas bouger, au risque de voir ta cervelle peindre les murs de cette pièce, avoué-je avec un sourire.

— Tu ne vas quand même pas tirer sur moi, Lucian ? s'énerve-t-elle.

— Ce n'est pas comme si c'était la première fois, petite brebis.

— Si tu oses, je te promets que tu vas souffrir !

Je revêts mon casque pour échapper à sa voix. Ses lèvres s'agitent, mais je suis trop concentré à charger mon arme pour décoder ses paroles. Je fais craquer ma nuque et pointe la pointe vers elle. Soudain, Tessa ferme les yeux, terrifiée. Ses poings sont tellement serrés que la couleur de ses paumes vire au violet.

Je prends un certain plaisir à l'observer dans cet état. Un sourire malicieux se dessine alors que j'appuie sur la détente. Première cible, atteinte. Son regard se transforme peu à peu en horreur, des larmes sillonnent ses joues rougies. Je réitère l'action et vise près de sa main, qui frémit légèrement. C'est si jouissif de sentir l'odeur de sa peur qui s'imprègne sur ma peau. Je tire une dernière fois et touche le haut de sa tête. Une de ses mèches de cheveux vole sous l'impact. Je dépose l'arme sur le comptoir métallique, enlève mon casque et me dirige vers elle.

— Tu es faible, Tessa, lui murmuré-je.

Sa bouche frémit, ses yeux humides me scrutent. Ses doigts sont crispés, prêts à m'arracher un morceau de peau. J'extirpe le couteau accroché à mon tibia et tranche les liens qui la maintenaient captive.

— Si tu n'apprends pas à être forte, je ne te donne pas une semaine, repris-je.

Alors que je m'apprête à partir, la laissant dans cet état, elle se rue vers moi et me frappe de toutes ses forces.

— Je te déteste ! s'écrie-t-elle.

Ses larmes coulent en cascade, ses poings martèlent mon torse sans relâche. Je lève les yeux et serre ses bras pour contenir la rage qu'elle déverse sur moi.

— Ne me dis pas que c'est là toute la force que tu déploies ? ironisé-je

Tessa finit par s'effondrer au sol et couvre ses paupières de ses paumes. J'entends ses gémissements, ses pleurs, mais cela ne m'atteint pas.

— Tu mérites de crever ! sanglote-t-elle.

Sur le point de répondre à ses provocations, mon téléphone vibre. J'affiche une grimace et décroche sans même vérifier le nom, trop préoccupé à surveiller ses moindres mouvements.

— Oui, énoncé-je.

— J'ai besoin de toi.

Cette voix, je peux la reconnaitre en mille.

— J'arrive, Kowinski.


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