🫀Bonjour de Pologne

ANNONCE IMPORTANTE 🚨 : Les personnages d'Aleksander, Irina, Ana, Maria, Julian, Daniel, ne m'appartiennent pas. Il s'agit d'un crossover avec Amara Kline et son histoire "Je veux vivre", qui compte deux tomes. Si vous souhaitez découvrir son récit, n'hésitez pas à la lire.


***

Attachée sur le fauteuil de l'avion, je m'astreins à regarder un documentaire animalier tandis qu'Adéla, Klemens et Lucian conversent autour de la table. Divers fichiers jonchent la surface, mais je suis trop éloignée pour discerner leur contenu. Je peine à calculer la durée de notre vol, mais l'ennui me submerge déjà. Depuis hier, je ne parviens pas à chasser cette scène qui se répète fatalement dans mon esprit, cette froideur implacable dans les yeux de Lucian lorsqu'il a sciemment pressé à plusieurs reprises sur la détente. À chaque détonation, j'ai cru toucher la mort. Son sourire sadique, maudit, hante mes pensées tout comme son souffle qui effleure ma peau à chaque confrontation. J'ai tenté de rester forte, mais mes émotions m'ont trahie. Mes mains crispent les accoudoirs, ma mâchoire se serre. Il mériterait que je lui inflige l'enfer. Pourtant, en sa présence, quelque chose se réveille au plus profond de mon être, comme si tous ses sens venaient subitement à la vie. Je secoue la tête pour chasser ces pensées obsédantes.

L'avion commence à entamer sa descente, signe que nous approchons de la Pologne. Je ne connais pas notre objectif ici, mais Lucian ne m'a laissé aucun choix : soit je l'accompagnais, soit je restais recluse dans leur résidence. Bien que l'idée de le suivre me répugne, peut-être pourrais-je trouver un moyen de joindre Sharpe ou Ripper pour divulguer les maigres informations que j'ai pu glaner. Je soupire de mépris et ferme les yeux.

Quel cauchemar éveillé, bon sang. 

Cette phrase, je la répète mentalement des dizaines de fois avant de sentir le contact de paumes chaudes envelopper mes doigts. C'est Adéla. Son sourire parvient à apaiser quelque peu ce mauvais rêve chaotique. Elle retire les cordes qui me ligotent puis me tend la main pour m'aider à me relever. Nous descendons les escaliers et nous retrouvons devant une voiture noire. Une chaleur écrasante m'envahit. Les rayons du soleil frappent ma peau blafarde. Aucun nuage dans un ciel d'un bleu océan, pas même un souffle de brise pour apporter ne serait-ce qu'une légère fraîcheur. Je roule des yeux, mais les doigts de Lucian se posent fermement sur mon torse pour me stopper.

— Bonjour, monsieur Schneider, j'espère que vous avez fait bon voyage.

— Salut Julian, répond Lucian. Ça peut aller, merci.

— Laissez-moi m'occuper de vos bagages.

L'homme d'une taille imposante entreprend de charger les valises dans l'immense berline. Ses cheveux d'un brun mi-long virevoltent, comme une danse orchestrée par chacun de ses mouvements. Une fois le coffre rempli, d'une poche de son costume, il tire un morceau de tissu pour le passer à Lucian.

— Bande tes yeux ! m'ordonne-t-il.

Je soupire de mépris. Je pense qu'il prend un malin plaisir à me plonger dans un état dans lequel le monde sombre dans la noirceur.

— Vraiment, tu commences sérieusement à m'agacer, répliqué-je, irritée.

— Écoute-moi attentivement, annonce-t-il en me saisissant fermement le bras. Si tu oses encore monter d'un cran avec moi, je t'assure que ma cruauté n'aura plus de limites. Ce stand de tir à côté n'est rien en comparaison de ce que je pourrais te faire. Alors, enfile ce bandeau et ferme ta gueule pour une fois.

— Sans vous manquer de respect, déclare Julian, nous avons à disposition des barils d'acides pour faire disparaitre des corps.

Soudain, mon cœur s'emballe dans ma poitrine. Je plonge mon regard dans le sien afin de chercher avidement un mensonge qui aurait pu naître pour m'effrayer. Pourtant, une étincelle de vérité scintille dans ses iris. Un souffle de terreur m'échappe alors que je fixe Lucian, où son sourire malicieux se meuve aux bords des lèvres. D'un geste brusque, j'arrache le tissu de ses mains et le place sur mes yeux. Bien que l'envie me manque, je n'ai aucune intention de rencontrer la mort.

***

Après une vingtaine de minutes de route, la voiture se stationne enfin. Par ordre d'Adéla, je retire le bandeau et reste immobile, frappée par ce que je vois. Je ne peux identifier l'endroit exact, mais c'est d'une grandeur impressionnante. Julian baisse légèrement la vitre, et aussitôt, un homme masqué, dont seul le regard bleu perçant transparaît, nous observe comme s'il nous passait au crible. Finalement, il incline la tête en signe d'approbation, et le véhicule se met en mouvement jusqu'à l'entrée. La villa se dresse, moderne et austère. Ses couleurs sombres évoquent une froideur qui me glace le sang. À droite, une porte de garage se dessine, tandis que deux grandes fenêtres habillent la façade du premier étage avec des balcons de fortune. Nous sommes isolés du monde, en plein cœur de la forêt. Un sentiment de malaise m'enveloppe.

Tandis que je contemple les horizons, trois dobermans se précipitent vers nous. Leurs aboiements retentissent, me poussant à me cacher derrière la silhouette de Klemens, qui, lui, éclate de rire.

— Si les chiens te font peur, quelle sera ta réaction quand tu seras jetée dans la fosse aux serpents lors de ton initiation ? s'amuse-t-il.

— Pardon ? m'exclamé-je, terrorisée.

Mon corps se met à trembler sous le poids de ses paroles. Ma respiration haletante peine à retrouver sa stabilité. Je cherche un réconfort auprès d'Adéla, mais elle me sourit en haussant les épaules, comme pour m'indiquer sans mot dire que je dois affronter ça seule.

— Je plaisante, reprend Klemens. Nous avons simplement une vieille piscine infestée d'araignées.

Je le fixe d'un regard méprisant et lui donne une tape légère sur l'omoplate.

— Moi aussi, je suis ravi de vous retrouver ! s'exclame Lucian en caressant les animaux. Mota, je constate que tu n'as pas changé, toujours douce.

— Heureux de te revoir, Schneider !

Je me retourne vers cette voix étrangère. L'homme élève ses mains, où je remarque directement son tatouage : un serpent qui enlace un couteau, dessiné sur son avant-bras. Son t-shirt gris-noir laisse apercevoir sa silhouette athlétique. Une cigarette pend nonchalamment à sa bouche, tandis qu'il exhale la fumée dans l'air, un sourire de satisfaction aux lèvres. Ses yeux, identiques à ceux de Lucian, se posent sur moi. Je tente de refouler mes craintes, mais les rides sur mon front trahissent mon anxiété.

À peine avons-nous franchi le seuil de la porte qu'une atmosphère lugubre me glace le sang et fait naître des frissons le long de ma colonne vertébrale. Les murs revêtent une obscurité aussi intense que celle de la mort. Seul le tapis rouge gigantesque à l'entrée vient apporter une note colorée, mais sinon, l'ensemble exhale une morbidité troublante. Nous nous dirigeons vers le salon, lorsqu'une voix douce résonne dans la pièce.

— Bonjour, dit-elle avec politesse.

Ses longs cheveux noirs dissimulent légèrement son visage, mais je peux discerner ses yeux d'un bleu profond. Son teint de porcelaine évoque pour moi un ancien conte que ma mère me lisait lorsque j'étais enfant. Cette pensée esquisse un sourire sur ma bouche, mais la douleur reste ancrée dans mon cœur.

— Moja słodka¹, je te présente Lucian Schneider, un très vieil ami. Et là voici Klemens, sa femme Adéla et ça c'est...

— Une emmerdeuse de première, rétorque Lucian.

Je roule des yeux, mais je retiens mes mots. Il suppose que je ne maîtrise pas le français, mais au contraire, j'en connais tous les secrets puisque j'ai pratiqué des cours pendant mon adolescence. Il frôle Lucian, échange avec lui des paroles à voix basse, dont le sens m'échappe. Cet emmerdeur incline la tête en signe d'approbation avant que l'homme aux cheveux bruns ne quitte les lieux. Juste après, une femme s'approche de nous, probablement la servante, à en juger par son chignon impeccable et son tablier blanc qui moule ses courbes gracieuses.

— Bonjour, je suis Arleta, veuillez me suivre, je vais vous montrer vos chambres, nous dit-elle avec un accent que j'ai du mal à déchiffrer.

Nous montons les escaliers en verre pour aboutir dans un long couloir plongé dans l'obscurité. Le son de nos pas résonne sur le marbre gris et s'estompe doucement alors que nous nous arrêtons devant la première porte. Adéla et Klemens s'engagent en premier, tandis qu'Arleta poursuit son chemin jusqu'à celle voisine. Elle esquisse un sourire timide avant de disparaitre. Je fronce les sourcils, lançant un regard interrogateur à Lucian, qui entre, puis s'affale dans un fauteuil noir près de la fenêtre. Je reste figée sur place, me demandant si c'est une erreur, mais il semble que je doive partager ma chambre avec lui. Je serre les dents et claque la porte derrière moi, laissant un sentiment de confusion planer dans l'air.

— Il est hors de question ! m'exclamé-je fermement.

— De quoi tu me parles ? soupire-t-il.

— Ne fais pas l'innocent, Lucian. Tu le sais très bien.

— De dormir ensemble ? rétorque-t-il. Je n'avais pas l'intention de partager mon lit, donc tu iras sur le tapis.

Stupéfaite, mes sourcils se froncent brusquement. Pense-t-il sérieusement que j'accepterai de m'installer sur le sol ? Il possède un don certain pour me contrarier et son sourire malinois en est la preuve manifeste. Je lui lance un regard assassin puis m'assieds sur l'immense matelas.

— Es-tu toujours aussi aigri ? l'interrogé-je.

— Avec les connes dans ton genre, oui, répondit-il d'un ton cinglant.

— Et pourquoi donc ? Il doit bien y avoir une raison à ton attitude odieuse, non ?

— Sache que certains ont perdu la vie pour moins que ça, Tessa. Alors, fais attention à tes mots quand tu t'adresses à moi, fulmine-t-il.

— Ainsi, tu as le privilège de me manquer de respect, mais l'inverse est inacceptable ? Ton comportement est désolant. Si tu as une femme, j'espère qu'elle partira aussi rapidement qu'elle est venue, murmuré-je.

Je n'ai même pas le temps de comprendre ce qui m'arrive que Lucian s'élance vers moi, se positionne sur mon corps et m'immobilise en maintenant mes poignets contre les draps. Chaque fois que notre contact physique s'atténue, une terreur diffuse s'insinue dans chaque parcelle de mon être pour réveiller une tension à la fois déroutante et enivrante. Je voudrais apaiser la vibration de ma jambe, mais je suis totalement soumise à cette émotion. Cette proximité entre nous m'angoisse, mais en même temps, elle exerce sur moi un pouvoir magnétique et inquiétant. Je peux observer sa mâchoire se crisper sous le poids de sa colère, son regard brûlant se rapprochant de mon visage pour intensifier mon trouble.

— C'est parfait, rétorque-t-il, elle est morte depuis longtemps. Mais si tu désires la rejoindre, ça ne me pose aucun problème.

— Tu... Tu l'as...

Je subsiste muette, les mots restent pris au piège dans ma gorge. Sa nature imprévisible aurait pu la conduire à sa perte sans le moindre remords. Mon cœur bat la chamade, des frissons incontrôlables me parcourent.

— Arrête de chercher à en savoir plus, petite brebis, conclut-il avant de se redresser.

Lucian laisse planer un soupçon de mystère, me jetant dans un état instable. Je ne peux échapper à l'angoisse qui s'accroche à moi. Mille questions tournent dans mon esprit. Adéla m'avait assuré qu'il respectait une règle d'or : ne pas toucher aux femmes... Avait-elle menti pour apaiser mes craintes ? Je n'en ai aucune idée, mais une certitude émerge : je commence à perdre pied. Je souffle et passe mes mains sur mon visage. Ce week-end avec lui s'annonce bien plus complexe que prévu.

Une heure s'écoule et je reste cloîtrée dans la chambre. Rien ici ne peut m'occuper, hormis une télévision accrochée au mur et une armoire. Pendant ce temps, Lucian a fumé une dizaine de cigarettes avant de finalement se plonger dans un livre emprunté à la bibliothèque collée à l'entrée. Tout à coup, un bruit retentit, quelqu'un frappe à la porte. C'est la servante qui nous demande de descendre pour le repas qu'elle vient de préparer pour l'occasion. Lucian acquiesce d'un signe de tête et m'ordonne de le suivre.

Nous pénétrons dans une salle où les couverts sont déjà disposés, où des mets dégagent une chaleur qui attise mes papilles gustatives. Immédiatement, je reconnais les plats typiques de chez nous : le Wiener Schnitzel, une escalope viennoise accompagnée de pommes de terre. Pour le dessert, Arleta a préparé une Forêt-Noire. Je souris légèrement, appréciant l'effort qu'elle a fourni en se conformant à nos traditions culinaires.

— Merci, Arleta, déclare Adéla. Ça sent hyper bon.

— Prends-en de la graine, car vu tes assiettes dégueulasses, même les chiens n'en voudraient pas, plaisante Klemens.

— Ferme-la avant que je t'en colle une là où je pense, réplique-t-elle en serrant les dents.

— Pas ici ! ordonne Lucian.

— Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas, confirme Arleta.

— Un peu de whisky serait apprécié, décide-t-il.

Le silence s'installe alors que les deux scellent leurs lèvres sous l'autorité de leur chef. Intérieurement, je ris, constatant que même ses amis les plus proches le craignent. Pourquoi ? Depuis mon arrivée ici, cette interrogation me poursuit sans relâche, sans que je parvienne à dénicher une réponse. Lucian reste marqué d'un mystère trop dense, ce qui m'empêche d'accéder à ses secrets les plus intimes. Cependant, si je veux détruire son organisation, il me faudra découvrir ses failles le plus rapidement possible. Je soupire et commence à remplir mon assiette.

— Où nous nous trouvons exactement ? demandé-je.

— Chez Aleksander Kowinski, répond Klemens. Il dirige la mafia polonaise.

Aussitôt, les poings de Lucian s'abattent sur la table, ce qui me fait sursauter.

— Tu ne peux pas fermer ta gueule un instant ? lui crache-t-il.

— Oh, ça va, ce n'est pas un secret d'État non plus, chuchote Klemens.

— Je te demande pardon ?

Mes yeux passent d'un homme à l'autre. La tension devient palpable, presque électrique. Une aura brûlante émane d'eux, prête à exploser à tout moment.

— Ce que je veux dire, Lucian, c'est que Tessa est l'une des nôtres, rétorque Klemens. Nous pouvons au moins la tenir informée, surtout que tu l'as amenée avec nous.

— Ce n'est pas parce qu'elle est là que j'ai confiance, objecte-t-il.

— Si cela peut vous rassurer, je ne dirai rien, tenté-je pour apaiser les tensions.

Son regard s'ancre en moi, tel un volcan sur le point d'entrer en éruption. Je lui souris timidement et continue à découper ma viande avec difficulté. Alors que le repas se termine dans un silence pesant, deux individus font irruption, l'un armé et l'autre enchaîné, incapable de bouger.

— Tiens, s'exclame Adéla, ton dessert est arrivé, Lucian.

Je hausse les sourcils, sans comprendre la situation. Lorsque Lucian se lève et s'approche de moi, une intuition néfaste me traverse.

— Viens avec moi.

— Tu comptes m'emmener où ? m'inquiété-je.

— J'espère que tu te souviens de tes cours de dissection sur des grenouilles, car là, nous allons le faire sur un être humain.


¹ : ma douce. 

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