12. Quelque chose est en train de changer...

Faire les courses à quatre au lieu de deux avait considérablement rallongé le temps que ça devait initialement prendre.

Seungcheol était un bavard. Jeonghan le savait déjà mais savoir que le proviseur n’était jamais à court de sujets était toujours aussi surprenant.

Il avait pratiquement fait toute la discussion tout seul. Surtout que les deux lycéennes suivaient les deux adultes sans rien dire.

Seungcheol paya ses articles en premier, Jeonghan suivit avec les siens et ceux de Nawon (il eut du mal à convaincre celle-ci de lui laisser payer le tout). Il fut surpris de se rendre compte que le proviseur et Mina les attendaient à la sortie du supermarché.

« Bon hé bien moi je vais y aller ! » s’exclama la jeune-fille quand Jeonghan s’arrêta à côté de Seungcheol. Elle eut tout juste le temps de faire un clin d’œil à l’infirmier avant que l’homme plus âgé se tourne vers elle pour la remercier encore de lui avoir rappelé qu’il avait des courses à faire. « Bonne soirée messieurs ! »

Il ne resta donc que les deux hommes et Nawon. Cette dernière tenta de fuir discrètement avec ses courses, pas du tout à l’aise dans cette situation.

« Vous allez quelque part maintenant ? » demanda Seungcheol sans se rendre compte de la tentative de fuite qui s’opérait à quelques pas de lui. « Parce qu’on pourrait… rentrer ensemble ? » finit-il en faisant un sourire timide.

Une expression similaire se posa sur le visage du châtain.

« Non, non je rentre directement. » répondit-il en arrangeant ses cheveux. « J’ai acheté quelques— Ah Nawon ! » se rappela-t-il en tapant dans ses mains. La jeune-fille se figea, jurant mentalement.

« Oui ? » elle fit un sourire poli qui ne traduisait aucunement sa détresse. Si elle les entendait encore discuter mielleusement, elle allait devenir dingue !

« Il faut que je te parle. Monsieur Choi, vous pouvez m’attendre cinq petites minutes ? »

Ils s’éloignèrent de l’homme, trouvant refuge près des distributeurs automatiques à l’extérieur du supermarché.

« Alors voilà, j’ai d’abord pensé à en parler à tes parents avant de t’en parler à toi mais je me suis rendu compte que ce serait mieux dans l’autre sens. Donc sache que si tu dis non, personne ne le saura !

-OK…

-Qu’est-ce que tu dirais d’aménager chez moi ?

-Non.

-Comme ça tu— Oh. Oh OK. Hum d’accord ! » il fit un petit rire gêné. Il ne s’attendait pas à ce que son idée se fasse rejeter aussi violemment. C’était l’un des risques, il supposa.

Nawon le fixa un moment et il hésita à partir en courant. Puis Elle soupira.

« Ecoute Oppa. C’est pas que je ne veux pas… C’est juste que ça risque d’être gênant. Et puis pourquoi tu te coltinerais la sœur de ton ex ? ça n’a aucun sens ! »

Quoi ?

« Bien sûr que si Nawon ! ça a du sens ! Je te connais depuis presque aussi longtemps que Wonwoo quand-même ! Et puis… Et puis je me sens responsable de toi.

-Pourquoi ?

-Tu es vraiment comme une petite sœur pour moi. Je sais que venant de quelqu’un que tu n’as pas vu depuis longtemps ça peut paraitre stupide mais c’est ce que je ressens. J’aime pas savoir que les choses sont difficiles pour toi.

-Oh…

-Ouais… »

Il expira l’air de ses poumons et reprit plus calmement.

« Je comprends que tu ne veuilles pas vivre avec moi mais n’hésite pas à me demander quoique ce soit, d’accord ? »

Nawon baissa les yeux vers ses courses achetés par l’infirmier.

« OK. Merci beaucoup Oppa.

-Pas de quoi Nawon. »

Elle lui fit une sorte de câlin (sans les bras, juste son front posé sur l’épaule de Jeonghan et gardant une distance entre eux). Elle prit un moment pour s’éloigner ; cherchant l’énergie nécessaire pour le faire.

« A plus tard, Oppa. » s’écarta-t-elle. Elle lui fit un sourire sincère puis s’éloigna rapidement.

« Ça va ? » demanda le proviseur en s’approchant doucement de l’infirmier.

« Oui ! Oui… » répondit le châtain en levant les yeux au ciel pour s’empêcher de pleurer. Il lui fallut quelques secondes pour se recomposer et faire face au brun. « Alors ! J’ai cru voir du bœuf dans vos courses ! » dit-il pour lancer la conversation.

Le visage de Seungcheol s’illumina. « C’est pour mon chien ! » et il partit dans un énième monologue.

∘◦❁◦∘

Mina, élève au lycée Cheodong, avait une routine bien définie.

D’abord, elle se levait à six heures dix et se dirigeait immédiatement vers la cuisine. Là, elle prenait le petit déjeuner que la gouvernante lui avait préparé puis allait se préparer. A sept heures moins le quart, elle sortait de son immeuble par l’escalier de secours pour échapper à son chauffeur puis prenait le bus. Naturellement, elle arrivait en retard. Mais ce n’était pas grave temps que l’infirmier était derrière elle et pas devant ; cela voulait dire qu’elle serait excusée de son retard. Une fois dans sa salle, elle allait s’installer dans le fond et la journée commençait.

Pendant longtemps elle avait rajouté à sa routine le harcèlement scolaire et la recherche de cachettes. Depuis presque deux semaines, elle n’avait plus à le faire. Elle avait dû trouver autre chose pour combler ses pauses. Elle s’amusait maintenant à découvrir l’établissement ; les moindres petits recoins qu’elle n’avait pas pu visiter de peur de croiser Nawon et ses sbires.

A la sonnerie de midi, elle décida de visiter le couloir des salles scientifiques. Avant, elle était obligée de faire le tour du bâtiment pour ne pas prendre le même chemin que Nawon.

Elle ne fit que quelque pas dans le couloir quand on posa une main sur son épaule.

Elle sursauta puis s’écarta rapidement, les yeux grands ouverts, la respiration saccadée.

« Pardon ! » s’exclama Nawon. Elle s’approcha doucement, les mains en avant comme si elle s’apprêtait à soutenir Mina. Celle-ci s’écarta encore, son dos rencontrant un mur.

« Qu’est-ce que tu veux ? » demanda-t-elle en croisant les bras pour cacher ses mains tremblantes.

Ne lui montre pas que tu as peur, pensa-t-elle, elle ne doit plus pouvoir t’atteindre.

« Ça va ? » demanda Nawon en fixant Mina dans les yeux comme si elle essayait d’y lire quelque chose.

« Qu’est-ce que t’en as à faire ? Qu’est-ce que tu me veux ? »

Nawon recula de quelques pas, s’appuyant sur le mur opposé. Un silence lourd s’installa entre elles.
Nawon leva doucement les yeux vers l’autre jeune-fille et quand elle fut sûre que celle-ci s’était remise de sa frayeur, se décida à parler :

« Ecoute…

-Non, toi écoute ! » hurla Mina en se décollant du mur. Elle fit un pas décidé en avant. « Tu me harcèles pendant des mois et parce que soudainement M’sieur Yoon t’a pardonné, tu penses avoir le droit de venir me parler comme si de rien n’était ?! T’es complétement barge ma grande ! VA FALLOIR SE REVEILLER !

-Mina… »

La brune s’approcha de Nawon, l’index pointé vers elle. Son ongle se planta dans l’épaule de l’autre fille.

« Ce n’est pas parce que je n’ai rien dit à Choi la dernière fois que je n’hésiterai pas à te dénoncer maintenant. Rappelle-toi que ton exclusion dépend de moi. »

Nawon fronça les sourcils.

« Tu penses que je vais te laisser faire sans rien dire ? Tu penses que je n’ai vas pas dire à Jeonghan et Monsieur Choi que tu les épis comme une perverse ? »

Mina se figea. Il lui fallut qu’un instant avant d’éclater de rire.

« Pourquoi tu rigoles ?! » s’offusqua Nawon « Je t’ai vu hier ! Je sais que tu nous as entendu ! Je t’ai vu courir vers l’administration ! Espèce de tarée. »

Mina s’essuya le coin des yeux et arrangea son uniforme.

« Je ne fais pas ça parce que je suis une « perverse », comme tu dis si bien. Je le fais pour Monsieur Yoon sinon il restera célibataire toute sa vie.

-Quoi ?

-Tu crois que ce loser ferait le premier pas tout seul ? Il est persuadé que, je cite : « Il me trouve sympathique » alors que le gars lui fait des cadeaux tous les jours. »

Nawon fit une grimace. L’homme que lui décrivait Mina n’était pas celui qu’elle connaissait. Jeonghan était un gros flirt ; qu’il le veuille ou non, les gens tombaient toujours à ses pieds et il le savait. Un divorce peut vraiment détruire une confiance en soi alors…

« Il était très populaire. Mon frère se plaignait toujours du nombre de numéros qu’on donnait à Jeonghan dans une journée. Il revenait toujours avec un petit tas de papiers. Plein de numéros de téléphone. » dit Nawon en fronçant les sourcils. Elle n’arrivait pas à croire que Jeonghan ait pu tant changer.

« Vous vous connaissez depuis longtemps ? » demanda Nina. Elle semblait avoir oublié sa haine envers Nawon.

« Mon frère est son ex-mari.

-Le gars de la dernière fois ? » Nawon hocha la tête. « Je vois…

-Mon frère est remarié. » continua la châtaine. « J’étais persuadée que Jeonghan le serait avant lui. Je ne veux pas qu’il finisse seul. »

Mina hocha la tête, toujours plongée dans ses pensées.

« Il ne croit plus en l’amour. Mais Choi est raide dingue de lui.

-Et il ne le laisse pas indifférent non plus. » rajouta Nawon.

Mina leva enfin les yeux vers elle.

« Toi… » elle soupira. Elle passa sa main dans ses cheveux, se décoiffa, se recoiffa ; soupira encore, fit un tour sur elle-même, s’accroupit et se releva au rapidement. « Ecoute. Ecoute-moi bien ! Je ne peux pas faire tout le boulot toute seule. Va falloir que tu m’aides. »

Nawon voulut dire quelque chose mais Mina l’interrompu.

« Tu fais ce que je te dis, tu ne discute pas mes ordres. C’est clair ?

-Mais—

-C’est clair ?! »

Nawon fonça les sourcils. Mina était trop à l’aise à son goût.

Mais si c’était pour Jeonghan…

« D’accord.

-Bien. Rendez-vous ce soir devant l’école. Ne me fais pas poiroter. »

Puis Mina partit.

Et Nawon se demanda dans quoi elle avait mis les pieds.

∘◦❁◦∘

Jeonghan ouvrit la porte de la laverie automatique et tourna directement son regard vers le fond de la pièce. Choi Seungcheol était déjà là, assis avec son sac de linges sales. Dès qu’il se rendit compte de la présence du châtain, il se leva.

D’un même mouvement, ils se dirigèrent vers les machines à laver. Chacun lança sa lessive puis ils repartirent ensemble vers les bancs.

Jeonghan s’assît, prenant soin de laisser une dizaine de centimètres entre l’autre homme et lui.

Les néons qui diffusaient d’habitude une douce lumière blanche contrastant avec les guirlandes bleues et violettes dispersées partout dans la laverie automatique étaient éteints. L’atmosphère était encore plus douce que d’habitude.

Jeonghan appuya sa tête contre le mur derrière lui, un soupir d’aise traversant ses lèvres.
Seungcheol tourna doucement sa tête vers lui. Ses yeux tracèrent son profil. Ils observèrent son long cou, sa pomme d’Adam, son fin menton, ses lèvres joliment étirés dans un petit sourire, son petit nez ne demandant qu’à être embrassé, ses beaux yeux brillants et ses cheveux tout doux.

Il se força à baisser les yeux vers ses cuisses pour ne pas être prit sur le fait.

« Il fait si sombre. C’est agréable, n’est-ce pas ?

-Très… » répondit le proviseur.

Il aurait aimé rajouter que de toute manière, tout était agréable tant que Yoon Jeonghan était à ses côtés.

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