The story of evil


À seulement 23 ans, il était l'un des plus grands tueurs au monde. Bouffé par la solitude sans pourtant la ressentir, envahit par une tristesse agressive chaque fois qu'il fermait l'oeil, guidé par la haine et la déception, Min Yungi était le jeune homme le plus inexpressif au monde. C'était cette caractéristique qui le rendait dangereux.

Ce coréen à la peau pâle avait fait connaissance avec la mort le lendemain de son anniversaire. Il avait alors 10 ans. Un âge des plus ingrats quand nos parents se font tuer sous nos yeux, on est trop âgé pour ne pas comprendre, ne pas souffrir, et trop jeune pour se débrouiller après ou même envisager de se lever pour les défendre. Intelligent, frêle et impuissant. Voilà ce qui avait causé sa perte en cette époque. Aujourd'hui, les deux premiers adjectifs étaient toujours de mise. En revanche, pour ce qui était du dernier, les choses avaient bien changées.

C'est à treize ans, après trois années d'entraînement intensif pour apprendre à manier le sabre, l'art du combat et les couteaux qu'il avait cette fois rencontré le meurtre. Ils ne s'étaient plus jamais quittés depuis.

Cette frénésie meurtrière avait commencée avec un dénommé kim hyuk. Autrement dit, l'assassin de ses parents. Une fois qu'il se trouva avec le cadavre de cet homme sans valeur dans les main, il comprit rapidement qu'il en fallait d'avantage pour apaiser son intarissable soif de vengeance.

Il remonta ainsi, à force de patience et d'habileté, le long de la hiérarchie. Chaque membre de l'organisation qui avait tué ses parents, fait de sa vie un interminable enfer, tous y passèrent. Ils furent traqués, retrouvés et achevés. Les uns après les autres. Bien sur, l'annonce de sa venue s'était faite savoir et à chaque pas qu'il faisait il rencontrait une armée plus impressionnante, des gens plus dangereux et des pièges plus difficiles à éviter. Il parvint pourtant à ses fins, deux ans après le début de son voyage sanglant, il avait enfin achevé son sale boulot. Le dernier des dirigeants à ses pieds, il put enfin se décontracter, un peu. L'association n'existait plus. Ils avaient été 27 hommes. En comptant leurs gardes, Yungi s'était fait la main plus qu'il ne fallait.

Il n'aimait pas particulièrement tuer. Non, mais le monde était rempli de merdeux infâmes et ne demandait qu'à être purifié. Et puis, qui pourrait retrouver une vie normale après avoir gouté aux plaisirs de l'action, du sang frais et de victoires durement acquises ? Pas Yungi en tout cas. Rien ni personne ne pouvait lui apporter un semblant d'équilibre, il était seul contre ses démons.

Ainsi, quand on lui proposa de devenir tueur à gages, lui offrant deux à trois fois la somme normale pour ses services, il n'hésita pas. Il se fit chasseur de primes à conditions spécifiées, autrement dit il demandait avant chaque excursion à pouvoir analyser les dossiers de ses « clients ». Pas pour voir s'ils présentaient un éventuel danger pour sa personne, Yungi se savait fort et n'avait rien à craindre tant qu'il avait son katana à portée de main. C'était parce qu'il ne voulait pas faire à d'autres ce qu'on lui avait fait. Il refusait de tuer père et mères, il laissait ce travail aux petits exécutants.

Presque immédiatement après, en un an seulement, il se retrouva à la tête des chasseurs de prime. À seize ans il était celui que l'on sollicitait pour les missions les plus difficiles, ou pour les affaires qu'il fallait à tout prix étouffer. Yungi était devenu une machine à tuer, un maître dans l'art du combat, un pantin dénué d'âme que l'on pouvait manier à sa guise, tant que le démon y trouvait son compte.

Il avait perdu foi en l'humanité, voilà pourquoi il pouvait tuer n'importe qui. Il voulait simplement laisser une chance aux enfants de grandir meilleurs que leurs parents. Un tueur avec des principes, ça ne s'était jamais vu. Cependant personne ne lui fit jamais la réflexion, ses immenses facultés à tuer étaient très réputées et on se méfiait de lui comme de la peste, même chez l'élite des guerriers. Lorsqu'il levait les yeux sur quelqu'un, ce qui était chose rare, il y avait immédiatement de quoi se sentir menacé. Ce garçon n'avait rien d'humain.

Chaque habitant de la ville connaissait sa planque. Personne pourtant n'osait venir s'y aventurer, mis appart quelques tueurs à gages venus se mesurer à lui ou lui demander de prêter ses service à leur maître. Il passait ses journées à vagabonder, parcourant des milliers de kilomètres et revenant chaque soir. Dormir n'était qu'une option. Une à deux heures suffisaient amplement, il devait veiller à pouvoir se défendre. Plus d'une fois il s'était fait attaquer de nuit. Même endormi il restait sur ses gardes, sursautant au moindre bruit. Et puis, chaque fois qu'il dormait c'était pour se réveiller tremblant, couvert de sueur et affolé. Rien de bien reposant.

Son patron du jour était un homme d'affaires, un dénommé Kim Namjun. Et sa mission du jour était une mission de classe une, autrement dit le futur cadavre était d'une rare habileté, d'une adresse comparable à celle d'un félin. Il avait deux jours pour mettre à bien sa mission, l'échec n'était acceptable que si sa proie avait déserté le pays, ce qui était impossible en vue de ses responsabilités. Un soir suffirait.

Kent Chao. Deux mots, un lieu, une mise en garde, et aucune description. Sa proie. Cet homme était connu comme une légende, personne de vivant ne l'avait jamais vu. Il dirigeait ses affaires dans l'ombre et gagnait des sommes astronomiques. Plusieurs chasseurs étaient passés avant Suga dans le mois. Aucun n'était revenu. Alors Namjun avait fait appel à lui.

Ce grand blond de 20 ans n'était pas le chef de l'entreprise, il n'était que le fils de celui ci. Pourtant, en dépit de son jeune âge, il avait déjà été mêlé à de nombreuses affaires au cours desquelles son intelligence et ses actes mûrement prémédités avaient su être appréciés. Il n'était pas rare qu'il soit messager entre les chasseurs et les dirigeants, présentant une source sure pour les uns comme pour les autres. Mais il ne voyait Yungi que rarement, la société jugeait bon d'agir avec prudence concernant ce ninja dont on ne connaissait rien.

Il n'éprouvait guère de sympathie pour ce jeune chien errant, sans but, sans lois. En revanche, il ne pouvait qu'être intimidé, impressionné dès qu'il se tenait à coté de lui. Sa taille, sa silouette importaient peu. Yungi dégageait quelque chose, quelque chose qui faisait dresser ses poils sur ses bras et sa nuque. Ce solitaire éveillait un instinct, celui de la soumission. Yungi, n'éprouvait pas non plus de sympathie à son égard. Pas non plus de l'admiration. Seulement du désintérêt.

-Sois de retour dans les temps, et mon père te récompensera de sorte à ce que tu ne doive plus jamais travailler. Chao est un insecte dans notre chaussure, écrase le et tu sera aussi riche qu'un prince. Ah, et même s'il est soumis à un code d'honneur strict, Kent Chao ne fera preuve d'aucune pitié. Reste sur tes gardes, tue le et ramène une preuve de ton honnêteté.

Yungi écouta avec attention les dernières indications que lui donnait Namjun, puis adressa un coup de tête reconnaissant au blond avant de se détourner de lui. Vêtu de noir, le visage couvert jusqu'aux yeux, il enjamba le rebord de la fenêtre et atterrit sur un toit, s'aidant de sa main libre pour alléger sa chute et se poser silencieusement. Sans perdre une seconde il se mit en chasse, courant sans bruit au dessus de la ville, surplombant les rues désertes, volant au milieu des étoiles. Le prédateur venait d'être lâché sur les quartiers nord de Séoul, la nuit était devenue son terrain de jeu.

Le vent fouettait sans relâche son visage. Sa progression, aussi discrète que rapide, ne fut interrompue ni par la fatigue, ni par les passants. Il put profiter du calme de la nuit, de l'odeur des cerisiers et de la douce fraîcheur du soir. Ses jambes se mouvaient habilement, sautant d'immeubles en immeuble, gravissant quelques murs d'argile, courant le long des ombres de cheminées. Nul quartier n'échappait à ses yeux vifs, il quadrillait la ville pour vérifier qu'aucun convoi de nuit ne se traine dans les ruelles désertes. Il devait être près de trois heures quand il arriva à destination, soit vingt minutes après sa dernière pause.

La maison était immense. Perché sur le toit de ce qui ressemblait presque à un temple asiatique, Yungi évalua la distance qui le séparait du sol. Trente mètres, au bas mot. Pas le moindre petit arbre pour ralentir une chute, si la proie se montrait trop coriace il pouvait toujours l'acculer au sommet de cette bâtisse.

Il suffisait à présent d'entrer sans se faire repérer. En ce chaud soir d'été, il était possible que des fenêtres soient restées ouvertes, c'est par là qu'il allait entamer ses recherches. Il s'accroupit et descendit sur le second toit, là où il allait avoir accès aux premières fenêtres, en veillant bien sur à ne pas atterrir devant l'une d'elles. Au dessus de sa tête et sous la toiture, de nombreuses poutres en bois semblaient attendre sa venue. Il s'en aida pour passer au dessus des vitres sans être vu, vérifiant chacune d'elles. Arrivé au bout il se laissa tomber et continua sa descente, passant au niveau en dessous sans même prendre la peine de souffler.

C'est au troisième étage qu'il trouva enfin ce qu'il cherchait. Au lieu de se lancer, il resta suspendu aux poutres encore quelques instant. Cette fenêtre donnait sur un couloir sombre. À moins que l'habitant de cette demeure ne soit vraiment très stupide, s'il avait chaud c'était les fenêtres de sa chambre, au dernier étage qu'il aurait ouvertes. Or il était tout sauf limité en intelligence, étant une mission de classe une. Yungi remonta aussitôt sur le toit.

Sa proie l'attendait. Si elle appréhendait sa venue, elle avait certainement posé une multitude de pièges au sol et sur les murs, ou fait appel à des combattants pour lui compliquer la tâche. Mais si elle voulait qu'il entre, ce n'était surement pas par ce passage. La fenêtre n'était pas ouverte ici par hasard, elle était positionnée stratégiquement pour le dissuader d'entrer à cet endroit. Restait à savoir ce que ce couloir cachait. La proie voulait que Yungi comprenne qu'il était attendu. Après tout tous les tueurs précédent l'avaient eux aussi interprété. Ce qu'elle n'avait peut être pas deviné c'est qu'il avait plus de cran qu'un simple chasseur de primes.

Le jeune combattant sortit de son sac un rondin de bois taillé pour être de la forme et de la taille d'une tête humaine. Il l'enveloppa dans un foulard et la fit passer doucement sous le toit, devant la vitre. De l'intérieur on ne pourrait pas faire la différence entre lui et cette poupée factice. Il la rangea presque aussitôt, quelques secondes suffisaient, si quelqu'un était posté là il aurait déjà réagit, idem pour un piège. Il s'agenouilla pour attraper une poutre sous lui et descendit du toit, se laissant pendre dans les airs. Pas question de toucher le sol par ici. En deux mouvements de bras il avait rejoint la fenêtre et se glissait déjà à l'intérieur.

Dans le noir, Yungi n'était pas à l'abri d'une attaque surprise. Mais à ce qu'il sache, ses ennemis potentiels n'étaient pas non plus pourvus d'une vision de nuit, et dans ce cas tant qu'il se déplaçait sans le moindre bruit, en longeant les murs sans les toucher pour éviter de déclencher un piège, ou de renverser un quelconque obstacle placé en plein milieu pour alerter de sa venue, il était en sécurité.

Il s'appliqua à mémoriser les directions et les aspects des lieux, de ce qu'il pouvait en voir, progressant lentement et sans encombres jusqu'à la pièce principale. Il valait mieux éviter à tout prix cet endroit, c'était là qu'étaient susceptibles d'être entreposés un maximum de mécanismes visant à le tuer. Yungi contourna donc l'accès principal à la chambre en passant par de petits couloirs secondaires.

Exposé ainsi, la mort pouvait frapper à tout moment. Mais il n'avait pas peur, et c'est ça qui faisait sa force. N'importe qui de sensé serait tendu, voir terrifié mais Yungi tenait si peu à sa vie que l'idée de la perdre ne lui faisait ni chaud, ni froid. Voilà pourquoi il excellait en son domaine. Comme pour tous les sports, en combat c'était celui qui attaquait sans avoir peur de se faire mal qui obtenait les meilleurs résultats, qui restait debout, qui sortait vainqueur.

Il ne monta pas les escaliers par les marches, pour accéder au dernier étage il s'aida de la rampe, se mouvant difficilement, mais habilement au dessus du vide jusqu'à atteindre le palier en face de la chambre. À ce moment il se tapit dans l'obscurité et attendit une bonne demie heure sans bouger, se contentant de guetter un éventuel mouvement. Ce temps lui permit de récupérer de ces précédents déplacements, mais également de réfléchir à un plan d'attaque.

La personne l'attendait. Peut être n'était elle pas dans sa chambre. Ou peut être y était elle et avait préparé le terrain. Le seul moyen de savoir était d'y aller, mais il n'y avait à présent plus place pour la discrétion. Car la discrétion demandait du temps, et s'il prenait son temps il y avait de grandes chances qu'un sabre lui vole dans la nuque.

Il se redressa lentement, jambes fléchies, un bras levé pour saisir le sabre dans son dos. La lame tranchante ne fit pas le moindre bruit, glissant de son fourreau aussi facilement qu'un couteau dans du beurre fondu. Yungi progressa à pas de loup, les sens en éveil, les muscles agréablement tendus. Son adversaire maitrisait comme lui de nombreux arts, dont celui du kung fu à en juger par les écritures anciennes au dessus de sa porte. Voilà donc pourquoi il n'avait rencontré aucun homme de main durant sa route. Les combattants de ce genre tenaient aux affrontements équitables. Leur code d'honneur étaient composés de quelques impératifs.

« Combat avec noblesse » était l'inscription peinte à l'encre noire qu'il connaissait le mieux. Son ancien maitre la lui avait faite apprendre et répéter des millions de fois. Plus qu'un apprentissage visant à tuer, le sabre était une tradition. Pas de coups lâches, pas de pièges malveillants, pas de dix contre un. Seul le katana était maître dans les instants qui allaient suivre.

À un mètre seulement de la toile coulissante, il ne l'ouvrit pas, il la trancha d'un mouvement de lame et se faufila précipitamment à l'intérieur. Presque aussitôt le bruit d'un sabre qui fend l'air lui parvint sur sa droite. Un centième de seconde plus tard, un monstrueux bruit de ferraille retentissait dans la maison. Un second. Et un troisième.

Toujours dans le noir, Yungi ne se fiait qu'aux sons pour parer, attaquer et parer de nouveau. Son sabre fouettait l'air sans pourtant atteindre sa cible. Les mouvements adverses étaient amples, en fonction du style de coups qu'il eut à parer, Yungi put évaluer la taille et la force de son adversaire. Plutot petit, l'homme était loin d'être débutant, il maniait l'arme avec rapidité et puissance, chacun de ses coups était voué à tuer. La proie se défendait avec tout autant d'habileté et parvenait à se battre également dans le noir.

Mais ce genre de combat était fatiguant, impossible de viser sans voir, Yungi devait pouvoir user de sa précision pour avoir raison de son adversaire. Après un dernier coup il se baissa pour esquiver un revers et courut dans le couloir jusqu'à trouver un battant en tissus donnant sur un balcon. Comme pour son entrée, il fendit la paroi pour s'y frayer un chemin et accéder de nouveau à l'air libre. La lueur lunaire suffirait à éclairer leur combat.

Il vérifia la distance qui le séparait de l'homme afin de pouvoir grimper en sécurité, puis se hissa de toit en toit jusqu'au sommet du temple. Là, il put reprendre sa respiration. La proie le rejoignit à deux ou trois secondes d'intervalle, et s'immobilisa elle aussi pour se remettre de son ascension. Éclairé par la lune, il pouvait désormais le voir.

Malgré les treize années qui le séparait de leur dernière rencontre, Yungi le reconnut immédiatement. Il se figea, sa respiration se coupa. Ce garçon ne pouvait pas être là. Il était mort, en même temps que ses parents et ceux de Yungi, tué par le même homme.

Pour la première fois depuis 15 ans, quelque chose remua au fond de lui. Non, pas quelque chose, un violent tourbillon de sentiments qui lui arrachèrent le ventre, lui bousillèrent le crâne et s'abattirent en rafale sur sa poitrine jusqu'à ce qu'il suffoque.

Il parcourut d'un œil paniqué son allure, ses cheveux en bataille, sa silhouette, ses prunelles sombres et le moindre détail de son visage, qu'il ne connaissait que trop bien.

Jimin.

Son sang froid était mis à rude épreuve. Il tâcha pourtant d'ignorer cette brutale révélation. Son visage couvert conserva ses airs neutre et il parla d'une voix déterminée.

-T'es qui gamin, je tue pas les mioches moi. Où est Kent Chao ?

-Et toi, qui tu es pour prétendre savoir à quoi ressemble Chao ?

-L'heure de la mort à sonnée pour lui, ce n'est pas toi qui pourra empêcher ça petit.

Un beau sourire joueur naquit sur ses lèvres, ce fut suffisant pour déconcentrer Yungi une seconde. Il para de justesse et au dernier moment le sabre de Jimin, tout près de son oreille. Le tintement aigu lui lacéra les tympans, il devait se reprendre. Sa lame fendit l'air et faillit atteindre le petit brun, mais il n'attaquait plus pour tuer. Il faisait en sorte que son cadet puisse parer, à chaque fois, laissant un temps de répit entre chaque coup. Le plus petit s'arrangeait bien de cette indulgence, il en profita pour frapper plus vite, plus fort. Yungi conservait malgré tout l'avantage.

Leurs fers se croisèrent et il fut le plus rapide pour pousser, Jimin perdit l'équilibre et tomba à terre, grimaçant de douleur sous la rudesse du choc. Son sabre toujours en main, il tenta vainement de dégager un cercle protecteur autour de lui mais d'un coup puissant du plat de l'épée, l'aîné lui fit lâcher prise et dégagea l'arme au loin. C'était fini. Accroupi au dessus de Jimin, sa lame tout contre la gorge nue, Yungi n'avait plus qu'un geste à faire pour achever sa proie du jour.

Mais son poignet refusait de bouger.

Le regard de Jimin plongé dans le sien était dénué de toute trace de peur, la petite étincelle qui s'y trouvait le défiait d'aller jusqu'au bout de sa mission. Même s'il avait beaucoup changé, le châtain avait gardé son visage de petit garçon. Yungi avait l'impression d'avoir entre les mains, sous son tranchant le gamin qui lui avait servi de petit frère, d'ami. Il avait devant lui sa pureté d'enfant, cette vision faillit le faire lâcher prise.

À dix ans, les parents de Jimin avaient trouvé la même fin que les siens, et le feu avait transformé en cendres ce qui leur avait servi de maison. En fouillant les décombres, Yungi n'avait rien trouvé, rien du tout. Personne. Jimin était mort. Du moins c'est ce qu'il croyait. Que son petit protégé était parti en fumée, qu'il le laissait seul, qu'il ne le reverrait jamais.

L'impression de lavoir perdu l'avait dévasté. Il s'était senti imploser, mourir à petit feu, parfois très brutalement. Chaque nuit Jimin criait dans ses cauchemars, il lui hurlait de le sauver, il le suppliait. Et chaque jour il lui manquait. Terriblement. Il y a certaines blessures dont on ne guérit pas, et celle là en était une. La mort de Jimin avait été encore plus dure à encaisser que celle de ses parents. Parce qu'il avait failli à son devoir de hyung, qu'il se sentait encore plus responsable. Il en avait tellement pleuré, hurlé, frappé, et le voilà aujourd'hui, face à lui , à quelques centimètres de sa peau. Son cerveau n'arrivait pas à encaisser, sa gorge le serrait atrocement.

Durant toute son enfance, c'est à dire avant ses dix ans, Jimin lui avait collé aux basques. Lui qui était d'un naturel très peu sociable, s'était vu envahir petit à petit par ce truc de rien du tout, haut comme trois pommes et débordant d'énergie. En plus d'être un pot de colle et une machine à questions inutiles, Jimin était un véritable poltron. Au moins une fois par semaine Yungi se faisait réveiller en pleine nuit par le petit énergumène terrifié, et alors qu'il se serait énervé pour n'importe qui d'autre il avait toujours accepté son cadet au creux de ses bras.

Il l'avait aimé. Comme on n'aime pas deux fois dans une vie. Si fort que parfois il en avait eu le souffle coupé. Il ne vivait plus que pour sentir la main minuscule enserrer la sienne, pour entendre sa voix flutée l'appeler tandis qu'il courrait vers lui, pour croiser son regard brillant et admiratif.

Il ne pouvait pas appuyer sous sa gorge, le regarder souffrir, puis mourir. Ce môme n'était pas un tueur, il n'était que le gosse d'il y avait quatorze ans. Le gosse de 6 ans à peine, celui qui revenait crade le soir et qu'il fallait laver parce qu'il ne savait pas le faire seul. Il n'était pas un tueur. Pour ça il était bien trop pur.

Il le fixa ainsi une bonne minute, jusqu'à ce qu'il ait repris totalement son souffle. Après tant d'années il commençait à perdre ses moyens, ce n'était pas bon. Il allait y arriver, même si Jimin voyait à un moment son visage (pour le moment encore dissimulé sous un tissus sombre), il ne saurait surement même plus qui il était, et il devait le tuer. L'image du petit garçon était toujours devant ses yeux. Au lieu d'écouter sa raison, il chercha à gagner du temps.

-Où est kent chao ?

-C'est moi.

-Ne dis pas n'importe quoi.

-Pourquoi t'es si sur de toi ? Personne n'a jamais vu à quoi il ressemblait et toi tu débarques en prétendant que je ne suis pas lui ? Qu'est c'que t'en sais ?

-Dis moi où il est sinon je te bute.

-Tu compte pas me buter, tu l'aurais déjà fait si tu le voulais. J'aimerai bien comprendre d'ailleurs, depuis quand les chasseurs de têtes font dans la pitié ?

-Tu parle trop gamin. Dis moi où est le pote que tu planques.

-Je suis kent chao, quand est ce que t-

-NON PUTAIN TOI TU ES JIMIN !

L'un comme l'autre se figèrent. Yungi eut l'impression de sentir une douche glacée lui tomber sur les épaules, ou un ouragan lui retourner le ventre. Qu'est ce qu'il venait de faire ? Que s'était il passé ? Ses émotions l'avaient avalé, englouti sans prévenir. Son corps semblait réagir tout seul face à ce puits de souvenir. Jimin fronça les sourcils dans une expression d'incompréhension.

Personne ne l'avait appelé par son véritable nom depuis..treize ou quatorze ans. Il ne parvenait même pas à se souvenir nettement de l'époque à laquelle ça remontait. Ce dont il parvenait à se souvenir en revanche, c'est qu'une seule et unique personne était susceptible de le connaître sous ce nom. Ce pouvait il que ce combattant soit..

-...Hyung ? Fit il d'une voix hésitante.

-Ne m'appelle pas comme ça ! Rugit Yungi en se redressant, comme s'il venait de se brûler à son contact.

-Yungi attend ! Mais attend te barre pas !

-Je m'apelle pas Yungi !

-Yun-

-JE M'APPELLE SUGA PUTAIN !

C'était n'importe quoi, il ne maîtrisait plus ses mots et frisait le ridicule à mentir aussi mal. Qu'est ce qui lui arrivait, pourquoi il réagissait si brutalement ? En treize ans toute personne sensée aurait déjà oublié. Pourquoi pas lui ? Hein bordel, pourquoi il réagissait comme ça, pourquoi il ne contrôlait rien ?! Il jeta un coup d'oeil paniqué autour de lui, cherchant une issue. Mais comme il l'avait remarqué plus tôt dans la soirée, il n'y en avait aucune.

-Suga ? Cette « ombre » dont les gens parlent ? Peu importe, pour moi t'es Yungi.

-Arrête d'avancer !

Voilà que sa voix tremblait à présent, c'était de pire en pire. Il regarda avec des yeux exorbités le plus petit progresser vers lui. Il allait flancher. Il y avait beaucoup trop d'émotions qui se bousculaient dans tout son corps et tendaient le moindre de ses muscles. Ça lui faisait tourner la tête. La pression dans son crâne augmenta encore quand Jimin tendit prudemment sa main dans sa direction.

La panique lui donnait des airs d'animal apeuré, il tremblait comme un possédé alors que les doigts de Jimin n'étaient plus qu'à quelques centimètres de sa joue, l'air s'était rarifié, qu'allait il faire, qu'est ce que lui était supposé faire maintenant ? Bordel c'était n'importe quoi, il allait finir par tomber et...

Un effleurement...Une caresse, aussi légère qu'un souffle. Jimin caressait sa joue avec une douceur infinie, son regard planté dans le sien. Le tissus tomba quand Jimin tira dessus, découvrant son visage et l'exposant au regard du plus petit. Tout s'était calmé d'un coup, brutalement. Sa formidable énergie, son flot ininterrompu de questions, ses tremblements, tout. Encore haletant, Yungi se sentit pourtant apaisé et prit une grande goulée d'air. Il ferma instinctivement les yeux, et une larme coula. Une de ses larmes. Une de celles qu'il gardait jalousement depuis quatorze ans. Il était de nouveau humain.

Il pleura silencieusement, sans le moindre hoquet. Ça faisait du bien, ça le liberait de toutes les tensions accumulées dans son corps. Jimin l'essuya, et sourit tristement.

-Qu'est-ce que le monde a fait de toi...

Les doigts de son dongsaeng fourrageaient dans ses cheveux, le calmant définitivement...

Ou presque.

Yungi venait à peine de retrouver un rythme cardiaque normal quand il sentit les lèvres gonflées de Jimin presser les siennes. Il manqua de s'étouffer. Lorsqu'il se recula Jimin avança aussitôt pour lui permettre d'y gouter encore, de manière plus chaleureuse. Le sabre tomba, la tête du cadet se perdit dans le cou du plus grand et ses bras s'enroulèrent autour sa taille.

Yungi n'osa plus bouger. Il sentait la peau de Jimin contre la sienne, il respirait son odeur comme si elle n'avait jamais disparut. Plus rien de ce qu'il tenait pour vérité n'avait de sens, il se réveillait d'un sommeil étrange après treize ans, comme si finalement le monde dans lequel il vivait n'était pas le vrai. La voix du châtain le tira de ses pensées.

-Ne me laisse pas, hyung.

Cette voix, cette phrase. Ce n'était pas celle du combattant. C'était celle du petit garçon que Jimin n'avait jamais cessé d'être. Et Alors qu'il devait le tuer, Yungi lui rendit son étreinte, le serrant du plus fort qu'il put contre son corps, contre son cœur. Instinctivement. Peu importe ce qu'en disait son cerveau déboussolé, il ne pouvait pas faire autrement, il voulait, il devait sentir son cadet.

Ce simple contact le rendit fou de bonheur. Sa tête également lovée au creux du cou de son ami, il humait son odeur à en perdre la raison, il serrait fort, le palpait sous toutes les coutures pour vérifier qu'il était bien là, pour assimiler le fait qu'il soit en vie.

Jimin le laissa faire, ça n'avait rien de désagréable et tant que son aîné ne fuyait pas, il n'avait aucune raison de se plaindre. Lui même avait longtemps cru que Yungi y était resté. C'était un véritable miracle que lui ait pu s'en tirer, alors pourquoi un second enfant aurait pu échapper à la mort alors que quatre adultes y avaient perdu la vie ? Il n'en savait rien, et surtout il s'en foutait royalement. Plus rien n'importait, rien appart son Hyung retrouvé.

Serrer l'autre dans ses bras était aussi agréable qu'inattendu pour chacun des deux jeunes hommes. Agréable était d'ailleurs un faible mot. Ils ne pouvaient pas se décrocher. Yungi retrouvait un moment de calme, d'affection, après toutes ces années sur ses gardes, à se faire broyer par sa tristesse et sa haine qu'il ne savait apaiser. Il ne saurait décrire ce que ça lui faisait de sentir Jimin. Tout contre lui, sa merveilleuse odeur d'enfant lui chatouillant le nez.

La tête vidée de toute pensée paniquée, de toute question sur « l'après », Yungi ne repoussa pas le châtain quand celui ci se mit à parsemer son cou de petits bisous humides. Ces bisous humides dont il s'était tant plaint enfant, et qui lui avaient finalement tellement manqués. Jimin lui faisait du bien. Tout son corps reprenait vie, ses joues légèrement rosies le faisaient reprendre forme humaine.

Il avait chaud. Depuis combien de temps n'avait il pas eu chaud ? Cela ne servirait à rien de le savoir, et puis les chiffres n'avaient finalement aucune valeur, ils ne changaient rien à ce qui avait été, pas non plus à ce qui était aujourd'hui.

Leur baiser fut passionné. Plus désespéré que doux, leurs lèvres se cajolaient comme s'il elles avaient peur de devoir à nouveau se quitter. Comme si c'était la dernière fois alors que ce n'était que la première. Les mains de Yungi remontèrent le long du torse de Jimin découvrant au passage un ventre taillé par le combat à travers ses vêtements. Il s'accrocha à la nuque de son cadet pour l'attirer plus à lui.

Rapidement l'échange devint brûlant. Yungi aurait presque envie de pleurer à nouveau, d'indescriptible joie. Les lèvres de Jimin étaient incroyables, charnues et humides, elles lui procuraient déjà de nombreux frissons en se baladant maintenant sur sa gorge.

Une morsure lui tira son premier gémissement. Jimin était à la fois brutal et doux, la plus grande de ses envies n'était pas de faire l'amour à son aîné, c'était de lui faire comprendre ce qu'il ressentait, ce besoin de contact, de présence.

L'endroit, le moment et la manière étaient mal choisis. Mais en se retrouvant maintenant, si brutalement, ils ne pouvaient pas se contenter d'une étreinte. Ils voulaient plus, sentir l'autre plus près, toujours plus près. Sentir la peau de l'autre, sentir le souffle de l'autre, sentir les caresses de l'autre. Ils avaient du temps à rattraper.

Le corps vivifié de Suga ne pouvait rivaliser avec la chaleur incendiaire de Jimin. Tout son être brûlait de désir et d'amour. Un bref moment il se demanda comment il était possible d'aimer encore après tant d'années, ce questionnement ne dura qu'une seconde avant qu'il n'attrape son hyung sous les cuisses et derrière le dos pour le poser doucement au sol.

Quand son dos rencontra la surface froide et peu confortable du toit en bois, le plus vieux referma aussitôt ses jambes sur la taille de Jimin. La tête en arrière, la bouche ouverte, le cou ravagé par les dents et la langue de son cadet, Yungi ne pouvait pas le voir. Il s'appliqua donc à le découvrir avec ses mains, devinant un torse imposant, des abdominaux agréables au toucher, un dos dur, des bras musclés, des hanches fines, une peau douce, des fesses rebondies.

Il s'attarda sur ce dernier point, pressant Jimin contre lui, faisant se frotter leurs bas ventres éveillés. Il s'étonna de sa propre audace, alors qu'il n'avait aucune expérience, on aurait pu dire qu'il avait fait sa toute sa vie. Ses doigts se faufilèrent sous le pantalon du plus jeune pour palper ses fesses avec envie. Il soupira d'aise quand Jimin continua de sa propre initiative de lentes ondulations. Son haut ne fit pas long feu.

Exhibé ainsi à son cadet, dominé de surcroît, Yungi ne put s'empêcher de grogner sous la gêne. Jimin, au dessus de lui paraissait intimidant. Ses prunelles dans les siennes, il lui faisait une impression incroyable.

Un déhanché aguicheur le força à revenir sur leurs activités, il se frotta à son tour contre Jimin, cherchant à lui exprimer son envie de le sentir plus encore. Mais Jimin ne fit rien, pour le moment il ne sentait pas le besoin de passer à l'acte. Ses bras s'enroulèrent autour de son aîné, sa tête se posa contre son torse et il savoura simplement ce contact, sans pour autant arrêter ses mouvements de bassin.

Yungi lui rendit son étreinte, mais ne pouvait s'en contenter. Il quémanda bien vite sa bouche pour unir leurs lèvres, puis leurs langues, suçotant tout ce qui pouvait passer à sa portée jusqu'à ce que Jimin décide enfin à se redresser. Yungi le suivit, continuant de l'embrasser tandis qu'ils se débarrassaient de leurs vêtements devenus encombrants.

Le vent frais caressa sa peau, Yungi frissonnait sous les doigts du châtain. Son bas glissa doucement sur ses hanches, sur ses cuisses, sur ses mollets. Le cadet s'arrêta à ce point pour retirer ses chaussons de combat et fit voler le tout plus loin avant de s'occuper de ses propres vêtements, toujours entre les jambes de son aîné. Yungi s'appuya sur ses coudes et le regarda faire, parcourant des yeux le torse dont il avait deviné la forme, savourant tout de même de pouvoir l'observer à présent.

Jimin n'avait plus rien du petit garçon, excepté peut être son visage. Il était grand, beau et fort, pourvu d'une certaine assurance tout en gardant ses airs joueurs. Déshabillé ainsi face à lui, il chauffait les reins de Yungi, qui ne pouvait qu'apprécier sa vue nouvelle sur son dongsaeng.

Quand le châtain se recoucha sur lui, il ne put retenir un gémissement. Le sexe de Jimin contre lui, à deux doigts d'entrer, c'était autre chose que lorsqu'ils étaient habillés. Une bouffée de plaisir lui dévora le ventre et dévasta tout sur son passage. De nombreux frissons parcoururent son corps, sa tête se perdit dans le cou de son cadet, y répendant son souffle discontinu.

Il sentait l'extrémité humide jouer entre ses fesses, il la sentait monter, descendre, effleurer son orifice sans pourtant y rentrer et ça le rendait fou. Il était à la merci de son dongsaeng, et il n'aimait pas ça. Ses mains retrouvèrent leur place au niveau des fesses de Jimin, il appuya d'un coup sec lorsqu'il fut certain de le faire entrer en lui. Le cadet gémit de surprise, et sourit ensuite, visiblement amusé par l'impatience du plus grand.

Jimin comprit au visage de Yungi qu'il ne devait plus bouger. Mais c'était difficilement faisable. Son membre était si divinement pressé dans cette antre chaude, il était en train de bouillir de l'intérieur. Il ne connaissait pas meilleure sensation, même leur semi union de tout à l'heure n'était rien en comparaison avec ce moment. Il était en Yungi.

Sa respiration était haletante, le plaisir montait trop vite et se retenir d'entamer l'acte devenait presque impossible. Yungi ne faisait rien pour l'aider, dès que le brun se décontractait, Jimin bougeait à peine et il resserrait sur lui ses parois, enserrant involontairement son érection et manquant chaque fois de le faire venir.

-hhn..aah...

Au dessous de Jimin, Yungi commençait à apprécier la sensation. Voir son cadet dans un tel état ne pouvait qu'éveiller ses sens, il voulait lui aussi gouter à ce qui faisait trembler le plus petit.

Il n'eut pas besoin de bouger, un regard suffit pour qu'il sente Jimin se mouvoir lentement en lui. La douleur revint au grand galop lui lacérer les reins, et pourtant Jimin y allait sans une once de brusquerie. Les deux mains plaquées sur les hanches de ce dernier, Yungi guidait l'acte, ne le laissant s'enfoncer que progressivement en lui. Le plus jeune se pliait docilement aux exigences de son hyung, se concentrant uniquement sur son plaisir, sur ce moment intense, sur le fait que lui et son aîné ne faisaient plus qu'un.

Quand enfin il fut totalement entré, Jimin était au comble du bonheur. Pas besoin de bouger, la sensation était déjà horriblement délicieuse, il n'avait pas de mots mais avait envie de sourire, presque de rire ou de pleurer tant il se sentait heureux. Le plaisir ravageait son corps et il aimait ça.

Yungi soufflait, grognait et s'accrochait aux épaules musclées au dessus de lui. Ça faisait mal, mais bizarrement le fait de savoir que Jimin était en lui, le fait de réaliser ça adoucissait le tout et faisait monter l'envie de continuer. Il donna le feu vert d'un coup de reins et griffa méchamment le dos du cadet quand celui ci entama ses vas-et-viens. Ça le brûlait, il serra les dents en attendant que la douleur ne s'en aille. Ça n'allait pas tarder, le châtain faisait les choses bien.

Quand Yungi rouvrit les yeux pour penser à autre chose qu'au mal qu'il ressentait, il trouva remède en ce jeune homme, transpirant, haletant et gémissant superbement au dessus de lui. La vue de ses bras musclés, de part et d'autre de sa tête, de son bassin qu'il ramenait claquer contre le sien et de son regard incendiaire estompa toute trace de la douleur qu'il avait éprouvée, pour ne laisser place qu'à un début de plaisir. Jimin dut sentir qu'il se détendait car il entama de plus rapides mouvements, pénétrant Yungi plus profondément et plus fort.

L'aîné sentait Jimin aller plus loin à chaque fois, et le plaisir commençait à le rendre dingue. Il ne savait plus où placer ses mains, que faire de cette accumulation d'énergie, il ne pouvait que crier, laisser partir sa tête en arrière et apprécier ce qui arrivait à son corps. Brusquement, il se cambra et gémit violemment, collant son ventre contre celui de Jimin en mordant son épaule presque à sang. Le cadet couina à son tour, mais cette brutalité faisait partie de l'amour et ne lui fit que plus de bien. Il plongea ses dents sous le menton de Yungi en s'appliquant à faire rougir la peau claire, et continua à pilonner son hyung, au même endroit que celui qui lui avait valut sa morsure.

Ses coups étaient devenus secs, durs et profonds, il faisait crier son aîné et se laissait submerger avec joie par d'immenses vagues de plaisir. L'extase n'était pas loin, Jimin la sentait monter en lui. Comme il doutait pouvoir tenir encore longtemps, il prit appui sur son bras gauche uniquement et descendit sa main nouvellement libre le long des cotes, puis du ventre de Yungi avant de d'enrouler ses doigts autour de son membre prêt à éclater.

Le plus vieux n'avait rien vu venir (bien trop perdu au milieu d'un flot de sensations bouversantes) et cria quand l'étreinte chaude et peu délicate de Jimin lui procura une nouvelle source de plaisir. C'était trop, il se tortillait, se cambrait, gémissait violemment et s'agrippait où il pouvait, tout son corps bouillonnait et frémissait, de l'énergie à l'état brut semblait couler dans ses veines, quand soudain il atteignit le point de non retour.

Tout son corps était parcourut d'ondes de plaisir, crispé et cambré, délicieusement victime de soubresauts dus à l'extase. La main du plus petit continua autant que ses coups de bassin jusqu'à ce qu'il se libère à son tour. Les parois de Yungi qui se refermaient autour de lui ne pouvaient avoir d'autre effet, il gémit très fort en ondulant jusqu'à sa fin.

À bout de souffle, Jimin ramena sa main à coté de la tête brune pour tenir sur ses deux bras tendus, au dessus de Yungi. Il ne s'était pas retiré et ne le fit pas, profitant encore quelques instants de la sensation d'être en lui. Leurs regards s'accrochèrent, le châtain avait les larmes aux yeux.

-Tu es là, dit-il, essoufflé. Son rire tinta doucement dans la nuit, de la joie à l'état pur.

Des larmes roulèrent sur ses joues bombées, elles étaient dues à l'importance de son bonheur. Il s'écroula finalement sur son aîné, le souffle court, la tête dans son cou. « Tu es là », répéta t il en un murmure presque inaudible. Son hyung était là, il ne serait plus seul, plus jamais hanté par sa souffrance, plus jamais frigorifié et terrorisé. Il hésita à dormir en restant en son hyung, mais se retira en sentant l'envie remonter rapidement.

Il s'écarta, conscient de son poids, gardant malgré tout une proximité importante. Le plus vieux le laissa faire quand il entremêla ses jambes aux siennes, quand il attrapa son bras comme un doudou que l'on serre fort et qu'il déposa sur son épaule un dernier baiser avant d'y laisser reposer son front. Il aimait sa proximité, mais n'en profita que très peu de temps avant de s'endormir, porté dans le royaume des songes par un nuage de plaisir. Cette nuit là, Min Yungi ne fit pas de cauchemar.

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-Pourquoi désirez vous le tuer ? Demanda Yungi d'une voix neutre.

Le président de la firme toshiboto, et accessoirement le père de Kim Namjun, était dos à lui, affalé dans un riche fauteuil de cuir blanc, un gros cigare en main. Kim Bae-hwa. Plus d'un an les séparaient de leur dernière rencontre. À cette époque ils étaient alors alliés aux affaires, Yungi avait tiré de leur association de quoi rivaliser avec les plus riches marchands de Séoul.

Aujourd'hui les choses allaient être différentes. Pas qu'il n'ait envie de se battre contre cet homme, mais ce n'était pas comme s'il avait le choix. Il connaissait le dirigeant depuis 7 ans, à force il savait comment il fonctionnait. S'il n'avait pas ce qu'il voulait, Bae-hwa mettrai tout en œuvre pour l'avoir quand même. Et s'il ne pouvait vraiment pas, il pourrirait la vie de ceux qui l'en avait empêché. Aller au devant d'une confrontation n'était aucunement une possibilité. C'était une certitude.

-Tiens, Suga...ça faisait longtemps que je ne t'avais pas vu en personne. Il tourna son siège pour lui faire face. Je suppose que je ne t'invite pas à t'asseoir pour prendre le thé ?... C'est bien dommage, tu ne sais pas ce que tu rate. Bon dis moi, depuis quand t'intéresse tu aux motifs du m-

Yungi abattit son sabre sur le bureau et le fracassa dans un bruit infernal.

-POURQUOI DOIT IL MOURIR, hurla t il.

S'il laissait faire le milliardaire, il parlerait des heures et chercherait à l'embobiner. Yungi avait beau être malin, comme tout bon homme d'affaires monsieur Kim possédait une rare habileté pour endormir la vigilance et tromper les gens.

-Ah, fit il. J'étais sur que cette qualité anglaise ne valait rien. Ses yeux remontèrent se plonger dans ceux de Yungi. J'avais oublié qu'avec toi, le baratin ne passe pas.

-La flatterie non plus.

Bae-hwa se leva de son siège en contemplant sa table de travail dévastée et la contourna. Il observa ensuite Yungi se tendre, prêt à tirer son katana au moindre mouvement suspect. Un soupir excédé lui échappa. Dire qu'il pensait que Yungi avait les qualités pour entrer dans la société.

-Tu es supposé le tuer Suga, pas le protéger. T'as pas oublié qui tu étais tout de même, dans ce foutu temple ? T'es quoi, amoureux de chao ? Je m'étonne qu'il te laisse en vie alors qu'il n'a jamais laissé personne le voir sans le tuer ensuite, mais je suppose que c'est parce que tu sais te défendre. Alors il essaie autrement. Ne crois pas qu'il est ton ami, il ne l'est pas plus que moi je le suis. C'est un maitre de l'illusion, du mensonge, il est une homme d'affaires alors je sais de quoi je parle. Tourne lui le dos une seconde avec une arme près de toi et tu te fera empaler.

Pour toute réponse, Yungi fléchit ses jambes et tira lentement son sabre entre ses mains. Un nouveau soupir passa la barrière des lèvres de Kim Bae-hwa. Il retourna derrière le bureau à contre cœur. Suga aurait put venir le voir demain plutôt, il avait une réunion importante tôt dans la matinée...Bah, il la reporterai, c'était lui qui prenait les décisions après tout.

La petite clef en argent qui ouvrait le double tiroir tomba en tintant de sa manche, il déverrouilla calmement celui ci et balança subitement une poignée de petites bombes collantes sur Yungi, qui les esquiva de justesse en sautant sur le coté. Il se réceptionna d'une main et se releva après l'explosion, couvrant son visage de son masque pour le protéger des éclats de bombe et de la fumée provoquée.

-Attention Suga, prévint Bae-hwa, moi je ne suis pas vos codes à deux balles, j'ai perdu mon honneur depuis longtemps. C'est la vie de Chao ou la tienne, je te laisse encore deux secondes pour réfléchir.

Tournant le dos à Yungi (sachant qu'il ne risquait rien grâce au code que le plus jeune se devait de suivre), il brisa la vitre devant lui d'un coup de sabre pour libérer la fumée, qui s'échappa dans la nuit comme un voile sombre. Ce geste qui paraissait si anodin signifiait surtout que Bae hwa allait avoir du renfort d'ici quelques minutes, une colonne de fumée ne passe pas inaperçue. Yungi devait faire vite.

-Pas décidé ? Bon. Dans ce cas tu vas crever bouche ouverte et chao te rejoindra rapidement.

Bae-hwa sauta le bureau et se rua sur Yungi, brandissant son propre katana, jusqu'à présent dissimulé sous ses vêtements. La puissance de l'impact fit trembler le brun jusqu'aux coudes, il mit un pied en arrière pour ne pas perdre l'équilibre et frappa à son tour aux cotes. Le dirigeant n'eut pas le temps de parer et se recula en pressant la plaie, légèrement apparente sous ses vêtements déchirés.

Le jeune combattant essuya sa lame et se prépara à l'assaut suivant. Celui-ci ne tarda pas. Leurs fers se croisèrent de nouveau, frappant en même temps avec une synchronisation et une vitesse inégalables. Même s'il savait se montrer habile, Kim se faisait largement dépasser. Une nouvelle fois il ne put contrer à temps et sa peau se para d'une nouvelle entaille, sur le torse, non loin de sa gorge.

Cette blessure était plus profonde que la précédente, il en lâcha son épée et tomba en sentant la lame de Yungi lacérer sa jambe droite. Au dessus de lui, le chasseur le regardait froidement, tête haute. Yungi en avait presque fini. Il fit un tour sur lui même pour augmenter la puissance de sa frappe et se stoppa à deux millimètres de la gorge de l'homme aux cheveux décolorés. Namjun était là, dans l'encadrure de la porte et il le regardait.

Yungi releva la tête pour croiser le regard perdu du jeune blond, qui n'osait même plus bouger sous la terreur. Ses sentiments pour Namjun étaient toujours les mêmes, inexistants, mais s'il tuait bae-hwa, il lui retirait son père. Et ça il le refusait catégoriquement.

Il dirigea son sabre loin de la gorge intacte et se retira, progressant vers la sortie en soufflant d'énervement, les sourcils froncés. Il entendit à peine le timide « merci » de Namjun, puisqu'il fut étouffé par un horrible bruit de ferraille tout près de sa tête. En se retournant il put constater que Jimin n'était pas resté là où il le lui avait demandé, il se tenait entre lui et Bae-hwa, sa lame contre la sienne.

Son sang ne fit qu'un tour et il reprit une pause de défense, faisant face au dirigeant, Jimin à sa droite.

-Ton maître ne t'as jamais appris à ne pas tourner le dos à un ennemi? S'amusa ce dernier.

-Tu ne devrais pas être là.

-T'as vraiment cru que j'allais t'attendre dans ce trou ? Brailla le petit garnement avec entrain. Heureusement que je t'ai suivit et que j'ai regardé le combat, sinon c'est toi qui serait plus là !

-Espèce d'abruti.

Yungi lui adressa un regard mi amusé, mi agacé et se relâcha quelque peu. L'homme qui lui faisait face c'était relevé malgré ses blessures, il ne l'en aurait pas cru capable. Cependant, compte tenu de son état, il ne servait à rien de continuer, ce court affrontement ferait office d'avertissement. Il esquissa un pas en arrière, jugeant bon de ne pas traîner, mais la voix grave de kim lui rappela que rien ne s'obtenait facilement dans la vie.

-Si tu pars t'es foutu.

L'ancien chasseur s'immobilisa et attendit, patient, la suite des évènements. Jimin en fit de même.

-Tu sera jamais tranquille, j'enverrai des gens te faire chier jusqu'à ta mort. Si tu pars je te jure que tu regrettera Suga.

Quelque chose n'était pas normal. Pourquoi tenait il tant a l'affronter au péril de sa vie, a le retenir pour finir le combat alors qu'il était déjà si mal en point ? Il devait attendre quelque chose de lui, c'était même certain. Yungi devait connaître un détail que lui ignorait, et qu'il lui fallait. Un détail qui concernait chao. Ou...ou sa maison. Il fit rapidement le lien entre ce mystère et un autre, celui du couloir par lequel il était entré.

-Jimin, qu'y a t il au cinquième étage, dans l'allée où la fenêtre était restée ouverte ? C'est ça qu'il veut n'est-ce pas ?

Ce jeune garçon, Jimin, était donc le légendaire Kent chao...Voilà qui se révèlait bien intéressant.

Bae-hwa rigola doucement, amusé par la situation dans laquelle le jeune couple était en train de se glisser, et dont il connaissait l'issue évidente.

-Il comprend vite le gars. Tu vois ce que j'attend de toi yungi ? Ne le tue pas si ça t'amuse de faire joujou avec, mais conduis moi à cet objet que je recherche.

-Jimin, c'est quoi cet objet ?

L'interpellé fuyait son regard, visiblement terrorisé et les yeux humides. Pas un mot ne sortit de sa bouche et Yungi sentit que la réponse à sa question allait le mettre en colère. Il n'imaginait pas un seul instant à quel point. Ses yeux se posèrent sur Namjun, toujours présent dans la pièce, toujours figé.

-C'est quoi cet objet ? Interrogea-t-il encore.

Le blond sursauta en voyant qu'on s'adressait à lui, son regard vrilla de gauche à droite, se posa sur son père puis enfin sur Yungi. Il parla d'une voix tremblante, mais qui gardait malgré tout des intonations assurées.

-Une pierre ancienne, qui vaut des millions.

-Mais encore ? Yungi était certain que ce n'était pas tout, loin de là.

-Un objet très convoité dont a hérité une famille aujourd'hui éteinte, Kent Chao l'a en sa possession mais on ne sait pas pour quelle raison.

-Ce n'est pas que ça. Monsieur Kim planta son regard sur Jimin, qui gardait la tête baissée. Mais je crois que tu commence déjà à comprendre, n'est ce pas Suga ?

Parmi l'immense liste de scénarios qui se bousculaient dans sa tête, seul le plus horrible était envisageable. Oui, il commençait déjà à comprendre, malgré lui, alors qu'il ne voulait pas et tentait de refuser la vérité. Il niait, mais il s'avait déjà. La vie n'en avait pas finit avec lui, elle tenait visiblement à le détruire jusqu'au bout.

La seule possibilité admissible, pour lui qui connaissait chaque bribe du passé, s'imposait à ses yeux et faisait monter une chaleur mauvaise le long de sa colonne vertébrale. Ses doigts s'agitèrent sur le manche du sabre et il ferma les yeux, se concentrant uniquement sur sa respiration et autres bruits environnants.

-Si Kent Chao est Park Jimin, le petit garçon disparut et supposé mort, alors ton cher ami de longue dat-

-LA FERME !

Emporté par une brutale montée d'adrénaline, Jimin se jeta sur Bae-hwa, lui asséna un violent coup qui le mit à terre et leva son sabre très haut au dessus de sa tête. Il ne voulait pas que le vieil homme ne gâche tout, il venait de retrouver son hyung, il l'avait retrouvé putain et il ne voulait pas le perdre ! Il ne laisserai personne gâcher ce qu'ils avaient reconstruit hier soir, personne, il ne voulait pas qu'on supprime ce qui pouvait être, ce qui venait de naître et qui avait un avenir certain, il ne voulait plus passer un jour un seul sans Yungi !

Vif comme l'éclair il abattit son sabre sur celui qui menaçait son bonheur, mais le katana de Yungi y fit obstacle. Jimin releva ses yeux larmoyants pour rencontrer le regard noir de son aîné. Tout était déjà perdu.

-Terminez ce que vous avez commencé, monsieur Kim. Exigea Yungi en retrouvant son regard neutre. Crachez le morceau, et tant que vous y êtes avouez l'ampleur de votre participation à cette histoire.

-Qu'est ce qui te fit croire que j'ai quelque chose à y voir Suga ?, ricana le plus vieux.

-Vous semblez connaître plus de choses que moi sur la question, et pourtant vous n'étiez pas là. Que je sache, il n'y a eu ni témoins, ni survivants autre que moi et lui. Ne perdez pas votre temps en parlementations inutiles, rien ne vous sauvera ce soir.

-Rien ?

-Ri- ..

Des bruits de pas, mêlés à des cris l'interrompirent. Il releva la tête pour écouter avec plus d'attention et reporta ses prunelles sombres sur monsieur Kim. Des gens arrivaient, ils étaient au moins une vingtaine, il n'allait pas pouvoir assurer le combat et protéger Jimin. Ce qu'ils avaient à faire ici était terminé, cela ne servait à rien de s'acharner.

-Je n'ai pas commandé le meurtre de tes parents. Bae-hwa reposa son sabre en signe de paix. Il n'allait pas pourchasser Yungi toute sa vie, ce qu'il allait lui apprendre le ferait à sa place. Ses yeux se plantèrent dans ceux de son ancien allié. J'ai juste participé à l'organisation et à la planification de celui des parents de ton ami. Le chasseur envoyé sur le terrain à l'époque n'a su tirer des renseignements sur la pierre aux Parks, voilà pourquoi il est venu trouver les tiens. Mais si tu veux le réel responsable, je te conseille de regarder derrière toi.

À sa gauche, légèrement reculé, Jimin se recroquevilla sur lui même. Yungi avait besoin d'entendre, il savait mais voulait être sur de bien comprendre, de ne louper aucun détail pour bien interpréter les choses. C'était essentiel.

-Le petit Park Jimin avait enterré ou caché la pierre. Surement parce qu'elle était belle et qu'il avait prit l'habitude de jouer avec. Ah, et quand un meurtrier à débarqué, sabre en main et ayant déjà tué le chien pour montrer qu'il était sérieux, qu'a t il fait ? Il s'est terré dans un coin et n'a plus bougé, écoutant sagement les cris déchirants de ses proches. Il aurait suffit qu'il rende la pierre pour que ses parents, les tiens de ce fait soient toujours là, et que tu n'ait jamais vécu cet enfer. Tu lui dois tout ça Suga.

Le regard dans le vague, Yungi tremblait. Son crâne le brûlait, son cœur battait à tout rompre et son sang pulsait dans ses veines. Des hommes entrèrent à l'extrémité de la salle, dans une dizaine de mètres ils seraient là. Il les ignora dans un premier temps, la rage lui montait aux lèvres et il rêvait de saigner à blanc cet être infâme, aux paroles si abominablement tranchantes. Ses yeux brillaient d'une lueur folle, ses pupilles s'agitaient sous l'hésitation.

Il était l'un des dirigeants de l'opération, il avait agit dans l'ombre, il avait fait tuer son père et sa mère sous ses yeux d'enfants. Sa lame le démangeait, tout ce flot de pensées le dévora de l'intérieur l'espace d'un huitième de seconde, Yungi réfléchissait vite.

Il se détacha de sa haine pour trainer Jimin jusqu'à la fenêtre et sauter en premier sur le toit du dessous. Il vérifia que le châtain suivait et se mit à courir, accélérant son rythme d'emblée pour évacuer ses émotions. Oppressé par la sensation de vide, sa poitrine était complètement écrasée, il fut contraint de hurler de rage pour se libérer en partie et pouvoir respirer correctement. Ses oreilles sifflaient furieusement, sa lame sortie arrachait tout ce qui passait à sa portée, laissant derrière lui des vitres aussi brisées que son âme. Ils parcoururent des kilomètres ainsi et ne s'arrêtèrent que lorsque bâtiments et lumières furent derrière eux.

Tous ses muscles le brulaient et semblaient prêts à se déchirer au moindre mouvement supplémentaire. Yungi arracha son masque noir et le jeta au loin, respira un grand coup et n'attendit pas d'avantage avant de continuer en marchant. La gorge en feu, il plaqua l'une de ses mains contre sa pomme d'Adam pour moins la sentir.

Jimin reprenait tant bien que mal son souffle quand il vit que son hyung allait continuer sa route sans lui. Tous ses membres protestèrent mais il lui courut après, manquant de tomber de nombreuses fois à cause de petits arbustes ou de buissons.

-Yungi attend, j'ten supplie !

Contrairement à ce qu'il s'imaginait, son aîné ne se fit pas prier d'avantage et s'arrêta net, le défiant du regard. Prit de court, Jimin ne trouva plus ses mots. Il essaya pourtant, mais aucun son ne voulut sortir de sa bouche. Lassé, Yungi l'écarta de son chemin. Le plus petit fut pris de panique et l'arrêta une nouvelle fois, parvenant à retrouver la parole.

-Je sais que tu ne peux que m'en vouloir, que c'est de ma faute, que tout est de ma faute. Il s'interrompit pour prendre une respiration tremblante. Mais me laisse pas...Tu..tu sais ce que j'ai du porter seul ? Tu imagine ce que ça a été pour moi ? Je veux plus être seul, je veux plus être sans toi Yungi, me laisse pas...

Son aîné ne broncha pas, Jimin eut l'impression de heurter un mur en pleine vitesse. Le choc fut au moins aussi violent. Ce manque de réaction fit monter ses larmes et trembler sa lèvre inférieure, ça lui donnait l'impression d'avoir dressé un gouffre infranchissable entre lui et Yungi. Il aurait préféré que son Hyung crie, qu'il hurle, le frappe, l'embrasse puis le morde, qu'il le secoue comme un prunier et le laisse pour mort, mais Yungi restait obstinément impassible. Ce n'était pas fini, non Jimin ne voulait pas y croire ne serait-ce qu'une seconde.

-J'étais qu'un gosse, continua t il d'une voix rendue aiguë par le chagrin, je savais pas ce qu'ils voulaient, à l'époque je savais même pas qu'on pouvait mourir, je savais pas..Un volent sanglot secoua sa poitrine, sa vision devint floue à cause des larmes salées qui lui incendiaient les yeux. Il soutint le regard neutre de son aîné, qui finit par le dépasser sans avoir esquissé la moindre expression.

-Yungi...

Le plus vieux s'immobilisa, encore, partagé entre haine, souffrance et amour. Sa colère pompait son énergie, sa raison, il était submergé par des envies de hurler, de frapper. Ce qu'il venait d'apprendre ce soir l'avait dévasté. Il voudrait pleurer pour se libérer de tout, comme la veille mais rien ne voulait sortir.

Tout à coup, il frissonna en sentant de petits bras musclés enserrer sa taille, ainsi qu'une tête se poser dans son dos. Il avait envie de vomir, de crier, et de courir, de se battre, de vaincre ou de mourir. Il se contenta de briser sèchement l'étreinte de Jimin, et de le laisser seul, au milieu d'une nuit d'encre dépourvue d'étoiles. En deux pas il avait déjà rejoint les ténèbres de la forêt, de son âme. Trois mots lui firent serrer les dents.

-Je savais pas...

La voix de Jimin se brisa dans son dos, étouffée par un sanglot à déchirer le cœur.

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Allongé dans l'herbe sèche de cette petite crique, à proximité d'un point d'eau, Yungi contemplait le ciel de l'aube, parsemé de sombres couleurs. Il n'avait pas dormi, alors qu'il était pourtant en sécurité dans les bois. À présent calmé, l'odeur de Jimin lui manquait déjà, et le souvenir de son visage larmoyant l'avait marqué au fer rouge. Indélébile, invisible blessure qui s'ajoutait à sa collection.

Ça avait du être bien plus dur pour Jimin. Infiniment plus dur. Là où lui avait eu dix ans, le petit châtain en avait eu six, là où lui avait eu un maître, son cadet avait du vivre au crochet des passants jusqu'à être en âge de se relever, là où lui avait porté la mort de ses parents, Jimin avait enduré la culpabilité en plus de son chagrin. À six ans il avait dû encaisser tout ce qu'il y avait de pire, et jamais il n'avait vendu la pierre, la pierre qui valait des millions.

Sa gorge était douloureuse, mais toujours aucune trace de larmes. En fermant les yeux, il repensa à la nuit précédente, douce et chaude, ainsi qu'au réveil qui avait suivit. Son dongsaeng, hier, s'était réveillé tôt pour aller chercher de quoi manger sur le toit, courant joyeusement, les fesses à l'air, jusqu'à l'extrémité du toit pour accéder aux fenêtres laissées ouvertes. Il était réapparut quelques minutes plus tard, des fruits et des pâtisseries plein les bras, un immense sourire accroché aux lèvres. Cette vison contrastait avec celle qui avait suivit dans la soirée. Plus Yungi réfléchissait, plus il se trouvait bête d'en avoir voulut à un enfant de six ans. Son cadet ne pouvait qu'être sincère.

Actuellement le petit brun devait dormir dans un coin, ou pleurer s'il n'avait pas épuisé ses réserves dans la nuit. Yungi se tourna sur son flanc droit, passant une main sous sa tête en guise d'oreiller. Il laissa son regard se balader sur les reliefs de la forêt encore endormie, et songea qu'il devrait lui aussi réessayer de se reposer. Une brise balaya ses mèches de cheveux sombres et il rouvrit soudain bien grand ses yeux. Jimin. C'était son odeur, Jimin n'était pas loin.

Il n'eut pas le temps de se redresser que quelqu'un s'allongeait lourdement à ses cotés et enserrait sa taille, si fort qu'il en eut du mal à respirer. Sa tête se vida, une sensation jusque là inconnue résonna dans son ventre et se répandit en ondes dans son corps. Une brusque chaleur remonta dans son dos tandis que des frissons incontrôlables suivaient le chemin inverse, ses muscles se détendirent et il se sentit aussi léger qu'une plume. L'instant d'après il s'était retourné pour enserrer Jimin autour de son cou, mêler leurs cheveux sombres, cogner leurs fronts et unir leurs lèvres avec tendresse.

Étouffé par la proximité, le souffle chaud de son cadet sur son visage, Min Yungi tremblait de bonheur. Il mit quelques minutes à s'apaiser et tendit ensuite ses lèvres jusqu'à l'oreille du plus petit pour lui murmurer son amour, s'excuser et lui promettre de ne plus le laisser seul, jamais.

Jimin répondit à ces mots par de doux baisers au creux de son cou. Ils restèrent longtemps sans bouger, laissant l'envie de dormir les surprendre peu à peu. Le châtain balada ses doigts sur la joue de Yungi et se mit à grimper sur lui. D'abord ses jambes, puis ses bras et finalement tout son corps s'affalèrent sur le plus vieux. Sa tête se cala contre sa poitrine, il rabattit ses bras de part et d'autre de la taille sous lui et pressa ses cuisses contre celles de son hyung.

Yungi servait de matelas. Cette position pouvait paraître inconfortable, mais il adorait sentir son cadet au plus près de lui. C'était dans cette position qu'ils dormaient durant leur enfance, quatorze ans auparavant. Et c'est dans cette même position qu'ils dormirent ce soir là, ainsi que tous les autres soirs. C'était comme s'ils n'avaient jamais quitté cette époque, jamais été martyrisés par la vie. Comme si leur bonheur s'était figé pour l'éternité.







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