20. Je ne veux pas que ça se passe ainsi.

Le plus discrètement possible malgré mes bras encombrés, je poussai la porte de ma chambre, au palais. J'avais eu l'extraordinaire chance de ne croiser personne dans les couloirs. Sur la pointe des pieds, je refermai le battant d'un mouvement de hanche, avant de m'avancer dans la pièce. Les rideaux étaient tirés, plongeant la pièce dans la pénombre. En grommelant, je lâchai ce que j'avais dans les bras sur le lit, et me dirigeai vers la fenêtre. J'en tirai les rideaux, avant de me retourner.

Mais j'eus un vif mouvement de recul en apercevant une personne près de mon lit. Une exclamation de surprise m'échappa lorsque je reconnus Guillaume. Il se tenait bien droit, les bras croisés, et le regard plus noir que jamais. Je devinais aussitôt qu'il était furieux. Et je devais avouer que j'avais espéré avoir plus de temps pour réfléchir à comment l'apaiser. Mais au lieu de cela, je me retrouvais plantée en face de lui, sans savoir comment réagir.

Lentement, Guillaume fit quelques pas vers moi avant de me demander d'une voix sèche :

« - Et puis-je savoir où tu étais ? »

J'avais l'impression d'être une enfant que l'on réprimandait lorsqu'elle faisait une bêtise. Agacée, je croisai à mon tour les bras en répliquant :

« - J'étais partie voir Betty. Tu sais, mon amie ? La seule personne qui a été là pour moi depuis toute ces années ?

- Et pourquoi ne m'as-tu pas prévenu ? »

Il s'avança encore vers moi, mais je reculai de plusieurs pas, avant de m'écrier :

« - Jamais tu ne m'aurais laissée sortir ! Tu aurais préféré m'enfermer là pour m'apprendre comment utiliser des fichus couverts ! Tu t'es totalement fiché de savoir si Betty me manquait ! »

J'avais un tel besoin de lui dire tout ce que je ressentais que je ne pus m'arrêter là :

« - Mais tu ne vois pas tous les efforts que je fais pour toi ! C'est comme si... Comme si tu voulais absolument me transformer en une princesse parfaite ! Mais je ne suis pas comme ça ! Je ne suis absolument pas une princesse, ni parfaite, et tous ces gens ici me l'ont bien fait comprendre ! »

Lentement, le visage de Guillaume se modifia. Il passa de la colère à la surprise :

« - Mais je ne veux pas que tu deviennes une princesse parfaite, Lili ! Je sais que tu ne pourras jamais l'être ! »

A ces mots, je sentis mon cœur se déchirer. Et les larmes me montèrent aux yeux. J'avais l'impression de le décevoir. Jamais je ne serais ce qu'il désirait.

Mais aussitôt après, la colère sembla me fouetter le sang. Quel genre d'homme voulait ainsi formater la femme qu'il prétendait aimer ? Je reculai encore, avant de relever le menton, furieuse :

« - Alors pourquoi tu restes avec moi ? Puisque je ne pourrais jamais être ce que tu veux ?

- Je n'ai pas dit cela, Lili ! »

Guillaume s'avança brusquement et agrippa mes épaules, me dominant de sa taille :

« - Je ne veux pas que tu deviennes une princesse parfaite, parce que tu ressemblerais alors à toutes ces femmes qui arpentent les couloirs dans l'espoir d'être remarquées par l'un des princes ! Je veux... Je voulais juste te...

- Corriger mes défauts ?

- Non ! »

Il prit mon visage entre ses mains pour coller son front au mien, le regard soudain déchiré :

« - Lili, je ne voulais pas que tu ressentes cela ! C'est justement à cause des courtisans que je voulais t'apprendre les bonnes manières ! Je ne supporterais pas que l'on te fasse des remarques, que l'on te critique sans te connaître ! Mais... Oh, j'ai été si maladroit ! »

Guillaume baissa un instant le visage, avant de soupirer :

« - Pardonne-moi, je... J'ai été si stupide... »

Le cœur battant, je restai immobile. Ainsi, il avait remarqué le mépris des courtisans pour moi ? Je portai une main tremblante à mon cou, avant de murmurer :

« - Alors... Tu ne voulais pas...

- Lili, je voulais seulement te préserver des autres ! »

Guillaume me plaqua soudain contre la fenêtre, avant de m'embrasser avec urgence. Aussitôt, sans réfléchir, j'enlaçai son cou en répondant à ses baisers. Je sentais mon cœur battre de joie. Il n'avait pas voulu me changer ! Il avait seulement voulu me protéger...

Rapidement, une étrange sensation tirailla mon ventre, alors que les baisers de Guillaume se faisaient plus passionnés. Ma respiration s'était accélérée, tandis que je sentais une chaleur inconnue grimper en moi. Et soudain, Guillaume me souleva dans ses bras, serrant mes jambes entre ses bras pour que j'en enserre sa taille. Me soutenant ainsi, il cessa de m'embrasser pour promener ses lèvres sur ma mâchoire, et dans mon cou.

J'avais la délicieuse sensation qu'il laissait des sillons enflammés sur ma peau. Et un gémissement s'échappa soudain de ma gorge sans que je ne puisse le contrôler. Guillaume se mit en mouvement, avant de s'écrouler avec moi sur le lit. Avant que je ne puisse réagir, il recommença à m'embrasser avec une fougue nouvelle. Et l'inconfort grandit en moi. Je me tortillai sous lui, haletante sous ses baisers.

Mais brusquement, Guillaume s'écarta de moi, roulant sur le lit pour s'asseoir au bord du lit, la tête entre ses mains. Le cœur battant, je restai immobile, allongée sur le lit. Mes mains tremblaient, et je sentais mes entrailles se tordre. Lentement, je tournai la tête vers lui, et murmurai :

« - Guillaume...

- Pardonne-moi ! »

Il revint s'agenouiller à mes côtés, son regard noir brillant. Il déposa un baiser sur mon front, avant de soupirer :

« - Je suis désolé, je n'aurais pas dû... Ce n'est pas comme cela que ça doit se passer. »

Je n'y comprenais rien. Les sourcils froncés, je levai la main pour caresser sa joue :

« - De quoi parles-tu ?

- De toi et moi, dans ce lit... Je ne veux pas que ça se passe ainsi. »

Les battements de mon cœur s'accélérèrent lorsque je compris enfin de quoi il parlait. De ma virginité. Je sentis une vague de gêne me frapper, et me tournai pour enfouir mon visage dans son cou, mortifiée. Guillaume eut un rire amusé, avant de s'allonger contre moi pour me prendre dans ses bras :

« - Je sais que cela te gêne d'en parler, mais... Je ne veux absolument pas te forcer. Et je ne veux pas que cela se fasse avec une dispute.

- Le terme fait très sérieux... »

Il rit de nouveau, avant d'embrasser ma tempe :

« - Je suis désolé, ma Lili. J'aurais dû me douter que Betty te manquait. Mais j'ai été égoïste, j'ai voulu te garder pour moi. Pardonne-moi... »

Je relevai le visage pour le regarder, un sourire aux lèvres :

« - Je te pardonne. Mais promets-moi que je pourrais retourner la voir quand j'en aurais envie...

- Bien sûr ! »

Il embrassa mon nez, avant de tourner la tête en fronçant les sourcils :

« - Et qu'est-ce que tout ce désordre ? »

Je suivis son regard, et aperçus tout ce que j'avais ramené. Aussitôt, je me redressai :

« - J'ai ramené des affaires de chez Betty et de chez moi. Il y a... »

Je plissai le nez. Certaines choses m'avaient paru essentielles, mais... A les voir maintenant, dans le palais, je comprenais que je m'étais trompée.

Guillaume s'assit, et me demanda à l'oreille d'une voix amusée :

« - Donc... Tu as ramené... Des feuilles de thé ? »

Je rentrai la tête dans les épaules, avant de me frotter la nuque :

« - Oui, j'ai pensé que...

- Qu'il n'y avait pas de thé au palais ? »

Je devinais son amusement dans sa voix. Il tendit la main, et je le vis hausser un sourcil lorsqu'il s'empara d'un bracelet :

« - Je ne t'ai jamais vu avec...

- C'est Betty qui me l'a offert hier. »

J'avais préféré éviter de le porter pour rentrer au palais, de peur de le perdre.

Guillaume prit doucement ma main, et me noua le bracelet autour du poignet. Le bijou était tout simple, un simple lien de chanvre attaché autour d'une perle, mais il avait pour moi une grande valeur. C'était un cadeau de Betty. Son regard noir plongé dans le mien, Guillaume embrassa ma paume de main, avant de souffler :

« - Ne disparais plus jamais comme tu l'as fait, Lili... J'ai cru mourir. »

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