16. Jamais je ne t'avais vue comme cela...
Allongée au milieu d'un lit, comme perdue au milieu de cette couche qui me paraissait immense, je fixai la bougie qui brûlait sur la table à mes côtés. C'était la seule chose qui me rattachait encore à mon ancienne vie. Guillaume avait insisté pour que je reste dormir cette nuit au palais, et... J'avais accepté. Mais maintenant que j'étais perdue dans cette chambre, je le regrettais.
Tout ici était démesuré, bien trop grand pour moi. En soupirant, je me blottis un peu plus contre la multitude d'oreillers, regrettant l'absence de Guillaume. Sa chaleur et sa présence m'aidaient à m'endormir, et j'avais pris l'habitude de m'assoupir dans ses bras. Mais pour cette nuit, il avait préféré ne pas dormir dans la même chambre que moi, pour ne pas « attiser les rumeurs ». Ces fichues rumeurs.
Je ne pus m'empêcher de grommeler sourdement. Je haïssais déjà ce palais et ses courtisans. Tout était bien plus simple dans ma vie à moi ! Si seulement Guillaume n'avait été qu'un artisan... Mais jamais je n'aurais connu ce luxe. Et jamais je n'aurais remangé de fraises. Un rire amusé m'échappa, que j'étouffai bien vite dans les oreillers. J'étais stupide.
Après un dernier regard pour cette chambre bien trop luxueuse pour moi, je soufflai sur la bougie, et tirai les draps sur moi. Je devais bien reconnaître que ces couvertures étaient bien plus chaudes que tout ce que j'avais connu. Avec un soupir satisfait, je fermai les yeux. J'allais bien dormir, même sans Guillaume. Après tout, je l'avais bien fait ces dernières années.
Un visage balafré se tenait au-dessus de moi, brandissant avec plaisir une lame qu'il approchait de mon visage. Des cris de femmes résonnaient autour de moi, et je voulus m'enfuir. Mais mes pieds semblaient cloués au sol, et malgré tous mes efforts, je ne pus bouger. Le visage hideux se rapprocha du mien avec un rire qui glaça mes veines. Et les cris s'amplifièrent jusqu'à m'assourdir. Un cri de bébé s'éleva, juste avant de se taire. Ma vision se remplit de rouge.
J'ouvris brutalement les yeux, la gorge comprimée par la terreur. Il était là ! Je tentai de bouger, mais mon corps était emprisonné. Un cri m'échappa, alors que je tentais de me dépêtrer de ce piège. J'essayai d'allumer la bougie, le souffle court, mais mes gestes maladroits la firent tomber. Avec désespoir, je hurlai, dans l'espoir qu'une personne m'entende. Mais tout était silencieux. Personne ne pourrait m'aider.
Terrifiée, j'éclatai en sanglots. Et à force de bouger, je tombai du lit. Aussitôt, je rampai jusqu'à un coin de la pièce, dans l'espoir d'échapper à cet homme. Mais il était là, j'entendais le parquet craquer sous ses pas. Le corps secoué par les sanglots, je me recroquevillai sur moi-même. Des bruits de pas s'approchèrent, me faisant crier de terreur. Je plaquai mes mains sur ma figure en pleurant, espérant disparaître dans le sol.
Un bruit me fit sursauter, juste avant que des bras ne m'enserrent. Aussitôt, je me débattis en criant, mais des mains repoussèrent les miennes pour agripper mon visage. Je gardai les yeux fermés en sanglotant, refusant de voir son visage défiguré. Mais ces mains secouèrent mon visage tandis qu'une grosse voix masculine résonnait tout près de mon oreille.
Brusquement, je fus serrée contre un corps. Une voix qui me semblait lointaine parlait d'un ton doux, tandis que mon dos était caressé avec douceur. Cette douceur ne pouvait être l'homme balafré. Lui... Il voulait me tuer. Un frisson me parcourut, mais j'eus soudain l'impression d'être bien, d'être en sécurité dans ces bras.
« - Lili... »
Je ne cessais d'entendre mon prénom, prononcé par cette voix si apaisante. Lentement, je cessai de pleurer, doucement bercée.
« - Lili, regarde-moi... »
Je secouai la tête en fermant les paupières de toutes mes forces. Je ne voulais pas ouvrir les yeux.
« - Ma Lili, mon ange... Je t'en prie, regarde-moi... »
Cette voix... Je la connaissais, elle m'était familière ! Je frissonnai, et aussitôt, je sentis une couverture m'envelopper.
Lentement, je reprenais pied avec la réalité. D'autres voix inquiètes me parvenaient, tout comme la lumière, que je distinguais à travers mes paupières closes. Et surtout, la chaleur de ce corps qui me gardait serrée contre lui, qui me berçait doucement, et qui m'avait apaisée.
J'ouvris craintivement les yeux, et les refermai aussitôt à cause de la lumière. J'entendis un soupir soulagé, et la personne cessa de me bercer. Je soulevai de nouveau mes paupières, lentement, et clignai des yeux pour m'habituer à la luminosité. La première chose que je vis fut du blanc. Une chemise. Je levai le visage, remontant de la chemise à un cou, couturé de cicatrices, puis au visage empreint d'inquiétude de Guillaume.
Aussitôt, il agrippa mon visage pour coller son front au mien :
« - Seigneur, Lili... J'ai eu si peur ! »
Il m'embrassa avec prudence, comme s'il craignait que je ne refasse une crise. Mais tant que j'étais avec lui, je ne craignais rien. Je me blottis contre lui en murmurant contre ses lèvres :
« - Reste avec moi...
- Bien sûr. »
Il me reprit dans ses bras en embrassant ma tempe :
« - Jamais je ne t'avais vue comme cela... »
J'eus un frisson en repensant à mon cauchemar, et enfouis mon visage dans son cou pour tenter d'échapper à ces images.
Je le sentis me soulever dans ses bras, et il me déposa sur le lit avant de s'écarter de moi. Aussitôt, je le cherchai du regard, le cœur battant à tout rompre à l'idée qu'il ne parte. Mais il était tout près de moi, occupé à refaire le lit, dont j'avais rejeté les couvertures. A peine s'était-il rapproché de moi que je m'agrippai à lui, le serrant de toutes mes forces contre moi.
Guillaume eut un soupir, et tenta de me faire lâcher prise :
« - Lili, je suis là...
- Ne me laisse pas, s'il te plaît...
- Regarde-moi, mon ange. »
Il prit mon visage entre mes mains pour plonger mon regard dans le sien :
« - Je resterai avec toi. Mais là, je dois m'assurer que tu n'aies pas froid pendant la nuit.
- Je n'aurai pas froid avec toi... »
Je le vis sourire doucement, mais il secoua la tête :
« - Lili. Laisse-moi dix secondes. »
Je me mordis la lèvre, avant de souffler :
« - Seulement dix, hein ?
- Bien sûr. »
A contrecœur, je le lâchai. Aussitôt, il remit les couvertures sur le lit, et se glissa à mes côtés. Je m'empressai de me blottir dans ses bras, fermement accrochée à sa chemise. Guillaume embrassa mon front avant de tirer les draps sur nous. Là, il m'enlaça avec force.
Rassurée, je me détendis contre lui. Je ne craignais plus rien. Mais je l'entendis me demander à l'oreille :
« - De quoi as-tu pu rêver pour me faire une telle crise de panique ? »
Le visage balafré de l'homme me revint en mémoire. Un gémissement terrifié s'étrangla dans ma gorge. Et aussitôt, Guillaume me serra davantage contre lui :
« - Non, ne réponds pas. Je ne veux pas le savoir. »
Je le remerciai en déposant un baiser dans son cou, à côté de l'une de ses cicatrices. Guillaume eut un soupir, avant de bouger pour poser sa tête à côté de la mienne :
« - Tu devrais dormir, Lili.
- Tu resteras ?
- Evidemment. »
Rassurée, je l'enlaçai en me nichant au creux de ses bras. Je me sentais, de nouveau, parfaitement bien.
Et alors que je m'assoupissais, je l'entendis me murmurer à l'oreille :
« - J'ai été stupide d'accorder plus d'importance aux rumeurs qu'à toi, mon ange... J'espère que tu me pardonneras. Je t'aime tellement... »
***********
Hey !
Dur cauchemar, hein ?
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top