33. Bons souvenirs d'Edmond.

Je me réveillai en sursaut. Instinctivement, je tendis la main pour attraper celle de Côme, mais... Je ne touchais que le lit vide. Je me redressai, et mon cœur s'accéléra lorsque j'entendis les pleurs d'Alexandre. Je détestais l'entendre pleurer, j'avais l'horrible impression de faillir à mes devoirs de mère.

Rapidement, j'allumai une bougie, et me relevai pour enfiler une robe d'intérieur. La chambre était bien vide, Côme n'était pas là. Je nouai mes cheveux en un chignon lâche, avant de me diriger vers la porte de ma chambre. Mais mon sang se glaça lorsque j'entendis les pleurs de Juliette se mêler à ceux de son frère. Et ce n'était pas normal. Cela faisait longtemps qu'elle ne pleurait plus. A la place, elle venait me voir.

L'angoisse étreignit mon cœur. Les mains tremblantes, je poussai la porte de la chambre, et sortis dans le couloir. Je crus défaillir lorsque je vis la porte de la chambre de mes enfants ouvertes. Des voix masculines s'en échappaient. Il y avait des hommes avec Juliette et Alexandre. Aussitôt, mon instinct de mère prit le dessus. Je me précipitai vers la chambre, prête à défendre mes enfants. J'ouvris brutalement la porte, mais me figeai, envahie par l'horreur.

Deux hommes étaient dans la pièce. L'un maintenait Juliette par les cheveux, approchant une lame de son visage. Et l'autre avait refermé ses mains autour du cou d'Alexandre. La terreur m'envahit lorsqu'ils se tournèrent tous les deux vers moi. Et l'un eut un sourire :

« - Tiens, mais qui voilà... La fameuse... Titania, c'est cela ? »

J'accrochai le regard terrifié de ma fille, tandis que les pleurs de mon fils ne cessaient de résonner dans la pièce. Mais j'étais incapable de parler, de bouger, d'aider mes enfants. C'était comme si j'étais clouée au sol. Et celui qui tenait Juliette la lâcha pour se diriger vers moi.

Aussitôt, je reculai, sortant de la chambre. Mais j'eus à peine fait quelques pas que mes jambes se dérobèrent sous moi. Je me rattrapai au mur, et une main se referma autour de mon bras. Je fus brutalement remise sur pied, obligée de faire face au visage de l'homme. Il avait une cicatrice qui partait du dessous de son œil gauche à son menton. Un violent haut-le-cœur me saisit devant son regard froid et presque sadique. Et je récupérai enfin le contrôle de mon corps.

Je levai la main et frappai l'homme au visage. Mais il n'eut qu'un éclat de rire, tandis qu'une sourde douleur explosait dans mon poing. J'eus un gémissement plaintif tandis qu'il resserrait ses doigts autour de mon bras. Et j'entendais toujours les pleurs de mes enfants. Terrifiée à l'idée qu'il ne leur arrive quelque chose, je me débattis en hurlant :

« - Laissez-mes enfants ! Je vous interdis de les toucher ! Laissez-les !

- Malheureusement, ça ne sera pas possible, ma jolie. Nous avons été payés. »

Je compris avec horreur qu'une personne était au courant de mon existence, de mon mariage avec Côme, et de nos enfants. Et que cette personne avait payé pour nous tuer.

Un cri aigu retentit. C'était Juliette. Aussitôt, je me débattis avec l'énergie du désespoir en hurlant :

« - Non, pas mes enfants ! Non ! »

Des sanglots se mêlaient à mes cris. Dans mes tentatives désespérées, je griffai l'homme au visage, le frappai. Et soudain, il me lâcha. Mais avant que je n'aie le temps de courir vers mes enfants, l'homme eut un brusque mouvement de bras. Une vive douleur sembla transpercer mon ventre. Hébétée, je le vis retirer son épée de mon abdomen. Il m'avait poignardée.

L'homme agrippa soudain mon visage d'une main, pressant mes joues avec un sourire diabolique :

« - Bons souvenirs d'Edmond. »

Il me lâcha, avant d'exercer une légère pression sur mon épaule. Je m'effondrai en arrière, ma tête heurtant brutalement le sol.

Une brûlure atroce envahit mon ventre. Je pressai mes mains sur mon abdomen, sentant le sang chaud glisser entre mes doigts. J'entendis les deux hommes parler entre eux, et soudain, les cris d'Alexandre se turent. Je compris avec horreur et souffrance qu'ils l'avaient tué. Une douleur sans nom courut dans mon corps, se logeant dans mon cœur, y déchirant tout. Ils avaient tué mon enfant. Des violents sanglots silencieux me secouèrent, ravivant la douleur de mon ventre. Ils avaient tué mon fils.

Les bruits de leurs pas résonnèrent à mes oreilles. Et je vis l'autre homme se tenir au-dessus de moi. Il leva le bras, avant de l'abaisser brutalement, un éclat brillant dans la main. Une seconde vague de douleur explosa dans mon ventre. En voyant son épée teintée de sang sortir de mon abdomen, un haut-le-cœur me secoua. Je fermai les yeux en pleurant, ravagée par la douleur physique et morale. Je voulais que tout s'arrête !

Mais je reçus soudain un violent coup de pied dans le ventre, qui me fit hurler de douleur. Je sentis l'un des hommes agripper mon cou, me soulevant de terre. Je rouvris faiblement les yeux, avant de me figer. Une image s'imprima sur ma rétine, que je ne pus assimiler. L'homme maintenait devant mon visage la tête de mon fils. Je ne pus que rester là à regarder les yeux grand ouverts d'Alexandre, incapable de bouger, subissant la vision de mon fils décapité.

Sûrement satisfait, l'homme me lâcha, et je retombai au sol, sur le flanc, mes mains pressées sur mon ventre. Peu à peu, leurs voix et le bruit de leurs pas s'estompèrent, pour finir par disparaître. Je sentais toujours du sang couler de mes blessures. Et je me sentais de plus en plus faible, secouée par les sanglots. Si seulement Côme ne pouvait rien voir de tout cela... Si seulement ce n'était qu'un rêve !

Mais soudain, de petites mains se posèrent sur mon visage. Je rouvris les yeux, pour me plonger dans le regard vert terrifié de Juliette. Juliette... N'osant y croire, je levai faiblement la main, et touchai sa joue. Aussitôt, ma fille se jeta contre moi en pleurant, enlaçant mon cou. Malgré la douleur que son geste engendra, je la serrai contre moi d'un bras en sanglotant. Elle était vivante...

Saisie brusquement de terreur, je l'écartai de moi pour lui murmurer :

« - Juliette, écoute-moi... Va te cacher... Tout de suite.

- Mais... Maman... »

Des larmes coulaient sur ses joues rebondies. Elle ne semblait pas être blessée. Peut-être l'avaient-ils épargnée... Ou l'avaient-ils oubliée ? N'ayant pas de réponse, je levai la main pour caresser sa joue :

« - Juliette. Va te cacher dans l'armoire, et... N'en sors pas avant que quelqu'un ne te trouve. Tu m'entends ? »

Un spasme de douleur me coupa la parole. Mais je continuai en grimaçant :

« - Même si tu entends des voix que tu connais... Même si tu entends papa, Séraphine, Léandre... Ne sors pas. Tu as compris ? »

En sanglotant, elle acquiesça. Mon cœur se déchira à l'idée de ne plus jamais la revoir. Je savais que j'allais mourir. Personne ne pouvait plus me sauver. Mais Juliette était si jeune... Se souviendrait-elle de moi ?

En pleurant, je lui murmurai :

« - Prends mon collier, Juliette. »

Ses petites mains tremblaient, mais elle passa tout de même ses mains dans mon cou pour dégrafer l'attache de mon collier. Puisant dans mes dernière forces, je le lui passai autour de son cou, et l'attachai. La petite fée retomba sur sa chemise de nuit tachée de sang. Mes bras retombèrent sur mon ventre. Et je soufflai :

« - Je t'aime, ma Juliette... Souviens-toi de moi. »

En pleurant, elle se serra une dernière fois contre moi. Je humai une dernière fois son odeur d'enfant, avant de secouer faiblement la tête :

« - Va te cacher. Maintenant. »

Juliette eut un sanglot, mais se releva et courut jusqu'à sa chambre. Alors, je reposai ma tête au sol, et fermai les yeux.

J'entendis vaguement le sol vibrer sous des bruits de pas. J'avais fait le bon choix, Juliette était en sécurité. Une porte s'ouvrit. Je rouvris lentement les yeux, et un hurlement de douleur parvint à mes oreilles. Je reconnus après quelques instants la voix de Côme.

Celui-ci se laissa tomber à genoux à mes côtés, et prit mon visage entre ses mains :

« - Titania... Non, non... Non ! »

Il me lâcha pour se relever, et je le vis se diriger vers la chambre de nos enfants. Aussitôt, un autre hurlement de rage, de douleur et de désespoir me parvint. Côme revint à mes côtés, et pressa désespérément mon ventre :

« - Non... Titania, je t'en prie... »

Ses larmes tombèrent sur mes joues, tandis qu'il sanglotait. Et Côme me prit dans ses bras pour me serrer contre lui en pleurant :

« - Pourquoi... Pourquoi ?! Oh, Titania... »

Je n'avais même plus de force pour l'enlacer. Un sanglot m'échappa tandis qu'il gémissait à mon oreille :

« - Comment pourrais-je vivre sans toi... Oh, Seigneur, non ! »

Il me reposa au sol pour prendre mon visage entre ses mains :

« - Titania, regarde-moi... Je t'en prie, regarde-moi, tout va bien se passer ! Je vais t'aider, et quelqu'un va venir pour te guérir, et... Et Alexandre et Juliette sont morts... »

Il s'écroula sur moi en sanglotant. J'aurais tant voulu lui dire que Juliette était encore en vie, mais... J'avais juste assez de forces pour garder les yeux ouverts.

Et soudain, Côme se redressa, les yeux brillants de larmes et de détermination. Il se releva, et se dirigea vers la garde-robe. Il en revint presque aussitôt, une épée d'apparat dans la main. Je compris immédiatement ce qu'il voulait faire. Mais je ne pouvais l'en empêcher. Déjà, l'envie de fermer définitivement les yeux m'envahissait avec force.

Je le sentis bouger à côté de moi. A travers mes paupières à moitié closes, je le vis qui me fixait avec les traits déterminés. Et Côme murmura :

« - Ô heureux poignard, voici ton fourreau ! Rouilles-y, et laisse-moi mourir... »

Je reconnus aussitôt les derniers mots de Juliette, avant qu'elle ne se tue sur le corps de Roméo. De nouveaux sanglots me secouèrent, et tout se passa rapidement. Côme s'enfonça l'épée dans la poitrine au niveau du cœur, la retira, la laissa tomber à nos côtés, et s'effondra sur moi. Il m'enserra dans ses bras, et se déplaça pour enfouir sa tête dans mon cou. Là, Côme murmura à mon oreille :

« - Je t'aime, Titania... Tu es la seule femme que... Que je n'ai jamais aimée... »

Si j'avais pu, je lui aurais dit que je n'avais aimé que lui, que je ne regrettais pas un seul moment passé à ses côtés, et que je l'aimerais toujours. Mais je ne pouvais pas. A bout de force, je laissai ma tête rouler contre la sienne.

Rapidement, sa respiration se fit plus lente, tandis que son corps se faisait plus lourd. Et sa poitrine finit par ne plus se soulever. Côme reposait dans mes bras, tout comme j'allais reposer dans les siens. Déjà, je fermai les yeux, accueillant avec délices la torpeur précédant la mort.

Je ne regrettais rien de tous les moments que j'avais passés avec lui. Mon seul regret était que nous ayons été séparés si tôt. Jamais nous ne verrons Alexandre grandir, ni Juliette. Lentement, je sentais la vie quitter mon corps. A mon tour, ma respiration se fit plus laborieuse. J'inspirai doucement l'odeur de Côme, de l'homme que j'aimais plus que tout au monde, tout comme mes enfants.

Et tout s'arrêta.



********
...
............


Euh... Hey ?

Pour être honnête j'avais prévu cette fin dès le début, parce qu'il était évident que quelqu'un allait forcément apprendre l'existence de Titania et des enfants de Côme, alors... 

Mais je sais que je suis horrible ! Mais si ça peut vous rassurer, il y aura un troisième tome !


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