Chapitre 27 : L'ombre de Scarlet {2ème partie}

Isabelle et Cassandra entrèrent dans le salon avec une grâce étudiée. Le grand espace était baigné par la lumière douce du matin, illuminant les tapisseries richement décorées et les meubles somptueux. Au centre de la pièce, deux personnes attendaient : un homme un peu plus âgé qu'Isabelle et une dame bien plus vieille à ses côtés.

Cassandra, adoptant immédiatement une attitude accueillante, sourit chaleureusement à son amie. Elle s'avança vers la dame avec assurance, ses talons claquant doucement sur le sol poli. Isabelle suivit d'un pas mesuré, consciente de chaque mouvement, chaque geste.

- Chère Oliwia, quelle joie de vous revoir ! déclara Cassandra en s'approchant de la dame.

Les deux femmes échangèrent des bises, leurs visages illuminés par des sourires de convenance. Cassandra se tourna alors vers Isabelle, un air de fierté sur le visage.

- Permettez-moi de vous présenter ma fille, Isabelle De Rose.

Oliwia regarde la jeune fille en souriant chaleureusement.

- Quelle resplendissante jeune femme. J'aime beaucoup de vos iris mademoiselle Isabelle ! dit-elle d'une voix remplie de tendresse.

Isabelle prit une profonde inspiration, son sourire s'illuminant instantanément. Elle fit une révérence gracieuse, baissant la tête avec élégance tout en relevant légèrement les pans de sa robe.

- Enchantée de faire votre connaissance, dit-elle avec une douceur mesurée.

Son sourire éclatant masquait parfaitement le tourbillon de pensées et d'émotions qui bouillonnait en elle.Le jeune homme et la dame plus âgée observèrent Isabelle avec un intérêt poli.

La dame Oliwia, probablement l'amie de Cassandra, sourit en retour, approuvant la grâce et les manières de la jeune fille.

- Quel plaisir de rencontrer enfin la célèbre Isabelle dont Cassandra m'a tant parlé, dit-elle d'une voix douce et chaleureuse.

Isabelle se redressa, maintenant son sourire, tout en jetant un coup d'œil discret au jeune homme. Il la regardait avec une curiosité évidente, ses yeux scrutant son visage et sa posture. Elle soutint son regard un instant avant de détourner les yeux avec une grâce étudiée, reprenant une posture parfaite à côté de sa mère.

Cassandra sourit à son amie Oliwia, ses yeux pétillant de connivence.

- Nous reviendrons rapidement, Oliwia. Nous devons simplement chercher un document important, annonça-t-elle avec une assurance tranquille.

Les deux femmes échangèrent un regard complice avant de quitter la pièce, laissant Isabelle et le jeune homme seuls dans le grand salon silencieux.

Isabelle sentit une vague de nervosité monter en elle. Elle n'aimait pas l'idée de rester seule avec un inconnu, surtout dans un environnement aussi formel et rigide. Figée sur place, elle resta droite, ses mains serrées sur les plis de sa robe. Elle tenta de maintenir un air calme et composé, mais l'inquiétude était visible dans ses yeux. Pour éviter le regard du jeune homme, elle fixa un point indéfini de la pièce, son souffle légèrement saccadé.

Le silence dans la pièce semblait s'étirer interminablement, créant une atmosphère tendue. Isabelle soupira discrètement, cherchant à se rassurer. Elle se força à regarder ailleurs, loin du jeune homme, ses pensées tourbillonnant entre la nervosité et la curiosité.

Le jeune homme, observant la timidité et l'inconfort d'Isabelle, s'approcha avec une douceur et une assurance mesurée. Il s'arrêta à une distance respectueuse et fit une révérence élégante, courbant légèrement la tête.

- Mademoiselle Isabelle, permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Henri, dit-il poliment, sa voix douce et apaisante.

Isabelle tourna lentement la tête vers lui, ses grands yeux violets rencontrant enfin les siens. Elle était surprise par sa courtoisie et sa manière respectueuse. Prenant une inspiration pour calmer ses nerfs, elle répondit avec une légère inclinaison de la tête, essayant de rappeler les leçons de bienséance de sa mère.

- Enchantée de faire votre connaissance, monsieur Henri, dit-elle, sa voix trahissant une légère timidité mais aussi une curiosité naissante.

Henri lui sourit, cherchant à mettre Isabelle à l'aise.

- Je comprends que cette situation peut être intimidante, ajouta-t-il avec un ton de compréhension. Mais je suis ravi de faire votre connaissance. Ma mère m'a beaucoup parlé de vous et de votre famille !

Isabelle, bien que toujours sur ses gardes, sentit une petite étincelle de réconfort dans les mots d'Henri. Elle hocha doucement la tête, un sourire timide apparaissant sur ses lèvres.

- Merci, monsieur Henri. C'est également un plaisir de vous rencontrer.

Henri rigola doucement, un son léger et chaleureux qui résonnait dans le grand salon. Son rire, bien que destiné à apaiser, ne faisait qu'ajouter à la nervosité d'Isabelle. Il s'approcha lentement d'elle, réduisant la distance entre eux, son regard fixé sur elle avec une intensité croissante. Isabelle sentit une vague d'inconfort monter en elle, ses mains se crispant légèrement sur les plis de sa robe.

Malgré son sourire et ses efforts pour rester calme, elle ne pouvait ignorer la proximité croissante de Henri. Chaque pas qu'il faisait semblait alourdir l'air entre eux, rendant sa respiration plus difficile. Isabelle évita son regard, tentant de se concentrer sur quelque chose, n'importe quoi d'autre dans la pièce.

Soudain, Henri leva la main et effleura doucement sa joue. Isabelle sursauta légèrement à ce contact inattendu, ses grands yeux violets s'écarquillant de surprise. Leurs regards se croisèrent alors, et elle se sentit piégée sous son regard perçant.

Henri, ignorant ou indifférent à son malaise, continua de fixer ses yeux violets avec une fascination apparente.

- Vos yeux...Ils sont vraiment uniques, Isabelle, murmura-t-il, sa voix douce mais chargée d'une étrange intensité.

Isabelle sentit sa peau picoter là où sa main avait touché sa joue. Elle fit un pas en arrière, créant une distance entre eux.

- M-merci, Monsieur Henri, répondit-elle, sa voix tremblant légèrement malgré ses efforts pour paraître calme. J-je...J-je suis ravie que vous les trouviez beaux.

Henri baissa lentement sa main, mais ne détourna pas son regard.

- Ils sont plus que beaux. Ils sont...Envoûtants, ajouta-t-il, son sourire toujours présent mais avec une nuance plus sombre.

Isabelle, cherchant à regagner son calme et à mettre fin à ce moment de malaise, se redressa avec dignité.

- Vous êtes très aimable, monsieur Henri, dit-elle, sa voix plus ferme. Mais je crains que je ne sois pas habituée à de telles...Attentions !

Henri se moqua, un rire sournois et glaçant qui résonna dans la pièce. Avant qu'Isabelle puisse réagir, il s'approcha d'elle d'un pas rapide et l'attrapa fermement par la taille. Isabelle sentit une vague de panique monter en elle. Elle tenta de se débattre, ses mains poussant désespérément contre lui.

- Non, arrêtez ! C'est malsain ! s'écria-t-elle, sa voix trahissant sa peur et son indignation.

Henri sourit d'un air narquois, son regard devenu cruel.

- C'est votre rôle de jeune femme de garantir le plaisir d'un homme, murmura-t-il d'une voix basse et menaçante. Un objet ou un toutou, comme j'aime appeler !

Il se pencha vers elle, essayant de capturer ses lèvres dans un baiser forcé. Isabelle, sa peur se transformant en colère, bougea frénétiquement, rendant ses efforts vains. Elle se débattait de toutes ses forces, ses mouvements désespérés cherchant à échapper à son emprise.

Soudain, Henri tenta d'arracher le haut de sa robe. La fureur remplaça la peur dans le cœur d'Isabelle. Avant qu'il ne puisse réussir, elle réagit avec une rapidité surprenante. Fermant les yeux et fronçant les sourcils, elle rassembla toute sa force et donna un coup de poing fulgurant sur le visage de Henri.

Le coup le surprit et le fit reculer, une expression de choc et de douleur sur le visage. Isabelle, tremblante mais déterminée, se tenait droite, le poing encore levé, prête à se défendre de nouveau si nécessaire.

Henri porta une main à son visage, ses yeux remplis de rage et d'incrédulité.

- Vous...vous osez me frapper ?! balbutia-t-il, une lueur dangereuse dans les yeux.

Isabelle, malgré sa peur, soutint son regard avec défi.

- Je ne suis ni un objet ni un toutou ! répondit-elle fermement. Et je ne vous laisserai pas me traiter comme tel ?! dit-elle sèchement, en se redressant légèrement.

La porte du salon s'ouvrit soudainement, et Cassandra et Oliwia revinrent dans la pièce. Le choc sur le visage de Cassandra se transforma rapidement en colère en voyant la scène devant elle.

- Que se passe-t-il ici ? demanda-t-elle d'une voix glaciale.

Henri recula davantage, tentant de reprendre une apparence de calme.

- Rien, madame Cassandra. Juste un malentendu, dit-il, essayant de dissimuler la marque rouge sur son visage.

Isabelle, le cœur battant encore à tout rompre, regarda sa mère, espérant que cette épreuve ne serait pas minimisée. Le regard furieux de Cassandra se posa tour à tour sur Henri et Isabelle, la tension dans la pièce devenant presque palpable.

Elle, refusa de laisser Henri s'en tirer à bon compte s'approcha rapidement de sa mère et d'Oliwia, déterminée à exposer la vérité.

- Mère, madame Oliwia, ce n'est pas vrai ! Henri a essayé de
m'agresser et de faire des avances sans mon consentement ! s'écria-t-elle, sa voix tremblant d'émotion.

Les deux femmes échangèrent des regards confus, leurs sourcils froncés de perplexité. Henri
sentant la situation lui échapper lança à Isabelle un regard meurtrier, ses poings se serrant
de frustration. Pour un instant, le silence tomba sur la pièce, lourd et oppressant.

Puis, à la surprise totale d'lsabelle, Cassandra et Oliwia éclatèrent de rire. Leurs éclats de
rire résonnaient dans le salon remplissant lair de leur amusement dérangeant. Isabelle
les regarda, horrifiée, son visage pâlissant sous le choc.

- Oh Isabelle, vous êtes tellement dramatique, dit Cassandra en essuyant une larme de rire de son œil. Henri ne faisait que plaisanter, n'est-ce pas ? Elle jeta un coup d'œil complice à Oliwia,
qui acquiesça en souriant.

Oliwia, un sourire toujours présent sur ses lèvres, ajouta :

- Ma chère, vous devez apprendre à ne pas réagir de manière excessive. Ce genre de comportement n'est pas convenable pour une jeune
dame.

Isabelle, le cœur battant à tout rompre, sentit une vague de désespoir et de trahison l'envahir

- M-mais...M-mais ce n'est pas une plaisanterie ! Il a vraiment essayé de me...-sa voix se brisa
incapable de finir sa phrase devant l'indifférence et l'amusement des deux femmes.

Isabelle recula, le regardant avec une expression de pure horreur. Ses yeux se remplirent de larmes qu'elle tenta désespérément de retenir. Elle se sentait seule et incomprise, la trahison de sa propre mère ajoutant à sa détresse.

- Venez, Isabelle, dit Cassandra en reprenant son sérieux. Il est
temps de te comporter comme une véritable jeune femme ! Asseyons-nous et continuons
cette réunion de manière civilisée.

Isabelle, sentant une boule se former dans sa gorge, se força à hocher la tête. Elle suivit sa mère
et Oliwia vers le canapé, son esprit tourbillonnant de confusion et de douleur. Le sentiment d'impuissance l'envahit alors qu'elle s'asseyait, essayant de reprendre son calme face à une situation qui lui semblait insurmontable.

Elle baissa ensuite la tête, fixant le sol avec une tristesse palpable. La scène qu'elle venait de vivre tournait en boucle dans son esprit, la laissant secouée et désorientée. L'idée qu'Henri, bien
plus âgé qu'elle, avait tenté de l'agresser lui était insupportable. Elle n'avait que douze ans, bien trop jeune pour comprendre pleinement la gravité de ce qu'il avait essayé de faire, mais assez consciente pour ressentir une profonde répulsion et un sentiment d'injustice. Elle savait que, quelle que soit la classe sociale, aucune fille ou femme ne méritait d'être traitée ainsi. La pensée que cela puisse être normalisé ou ignoré par les adultes autour d'elle la terrifiait.

Elle fut brusquement arrachée à ses sombres réflexions par le bruit du stylo de sa mère grattant
le papier. Levant les yeux, elle vit Cassandra penchée sur une table, en train de signer un document avec une expression de satisfaction sur le visage. Le cœur d'Isabelle se serra en
reconnaissant ce document c'était un contrat de fiançailles entre elle et Henri.

Le choc la laissa muette pendant un instant.

- Mère, non ! Vous ne pouvez pas faire ça ! s'exclama-t-elle finalement, sa voix brisée par l'angoisse.

Cassandra leva les yeux vers sa fille, son regard dur et impitoyable.

- Isabelle, vous êtes une jeune femme maintenant. Vous devez
comprendre l'importance de ces
alliances, c'est ce que ta grande sœur aurait voulu ! Henri est un bon parti et cette union est bénéfique pour notre famille, dit-elle d'une voix froide et résolue.

- M-mais...M-mais il a essayé de m'agresser ! protesta lsabelle désespérée. Comment
pouvez-vous me marier à quelqu'un comme lui ?

Cassandra soupira, visiblement exaspérée par l'insistance de sa fille.

- Vous exagérez, Isabelle. Henri est un homme respectable. Vous apprendrez à l'apprécier avec le
temps ! dit-elle sérieusement, en commençant à perdre patience avec sa fille.

Isabelle sentit une vague de désespoir l'envahir. Elle regarda
autour d'elle, cherchant du soutien dans les yeux des domestiques, mais tous évitaient
son regard. Elle était seule face à cette décision imposée.

Cassandra, indifférente à l'angoisse de sa fille, acheva de signer le document et le tendit à
Oliwia, qui apposa également sa signature en témoin.

- C'est réglé, déclara Cassandra avec satisfaction. Félicitations, ma
fille. Vous êtes maintenant fiancée à un homme de valeur !

Isabelle sentit les larmes monter mais elle les refoula, refusant de montrer sa faiblesse devant Henri.

- Je ne veux pas de cette vie, murmura-t-elle, plus pour elle-même que pour quiconque
d'autre.

Mais ses protestations se perdirent dans le silence de la pièce, alors que Cassandra et
Oliwia échangeaient des sourires satisfaits. Pour elles, tout allait selon leurs plans. Pour Isabelle,
c'était le début d'un cauchemar dont elle ne voyait pas l'issue.

Isabelle se tenait là, ses pensées tourbillonnant avec une intensité écrasante. Le sourire sournois d'Henri, la satisfaction froide de sa mère, et l'indifférence d'Oliwia, tout cela se mêlait en une cacophonie de trahison et de désespoir. Mais au milieu de ce chaos, une flamme de détermination s'alluma en elle. Elle refusait de rester passive face à une telle injustice.

Ses poings se serrèrent sur les plis de sa robe, ses ongles mordant dans sa paume, alors qu'elle fixait le document sur la table. L'idée germa dans son esprit, rapide et impérieuse. Avant que quiconque ne puisse réagir, Isabelle se précipita vers la table, saisissant le traité de fiançailles avec une détermination féroce.

- Isabelle, qu'est-ce que vous faites ? s'écria Cassandra, ses yeux s'écarquillant de surprise et de colère.

Isabelle ne répondit pas. Ses mains tremblantes mais résolues agrippèrent le papier, et elle commença à le déchirer avec une force désespérée. Le bruit du papier se déchirant résonna dans la pièce, accompagné des cris horrifiés de Cassandra et des éclats de protestation d'Oliwia.

- Non ! Arrêtez ça immédiatement ! hurla Cassandra, se précipitant vers sa fille.

Mais Isabelle continua, déchirant le document en lambeaux, ses mouvements frénétiques reflétant son désespoir et sa détermination. Henri, son sourire disparaissant, regardait la scène avec une expression de colère croissante.

- Comment osez-vous ?! rugit-il, faisant un pas vers Isabelle.

Isabelle recula, jetant les morceaux de papier déchirés au sol, son cœur battant à tout rompre.

- Je refuse d'être fiancée à un homme qui me traite comme un objet ! cria-t-elle, ses yeux brûlant de défi.

Cassandra attrapa Isabelle par le bras, la secouant violemment.

- VOUS AVEZ ruiné tout ce que nous avons construit ! VOUS ÊTES une honte pour cette famille ! siffla-t-elle, sa voix tremblant de rage.

Les larmes brûlaient les yeux d'Isabelle, mais elle se força à soutenir le regard de sa mère. 

- Je préfère être une honte que d'être vendue comme un simple bien, dit-elle, sa voix tremblante mais résolue.

Oliwia, tentant de calmer la situation, leva les mains en signe d'apaisement.

- Cassandra, calmons-nous. Peut-être pouvons-nous discuter de cela plus tard...dit-elle d'un ton conciliant.

Mais Henri, furieux, pointa un doigt accusateur vers Isabelle.

- Elle doit être punie pour cela. Aucun homme ne voudra d'une fille aussi insolente et indisciplinée !

Cassandra, le visage rouge de colère, hocha la tête.

- Elle sera punie. Isabelle, montez dans votre chambre immédiatement ! Nous réglerons cela plus tard, ordonna-t-elle d'une voix froide et autoritaire.

Isabelle, sentant son courage vaciller mais refusant de montrer sa peur, tourna les talons et quitta la pièce, ses jambes tremblant légèrement. Alors qu'elle montait les escaliers, elle pouvait entendre les murmures furieux derrière elle, mais elle se sentait étrangement libérée. Pour la première fois, elle avait pris une décision pour elle-même, refusant d'être manipulée et contrôlée.

En fermant la porte de sa chambre derrière elle, Isabelle sentit une vague de soulagement la submerger. Elle savait que les conséquences seraient sévères, mais elle ne regrettait rien. Elle avait défendu son intégrité et son droit à décider de sa propre vie, et pour cela, elle se sentait fière et déterminée à continuer à lutter pour sa liberté.

🏴‍☠️✨️🏴‍☠️

Isabelle claqua la porte de sa chambre avec une force qui fit trembler les murs, ignorant les femmes de chambre qui tentaient de l'empêcher d'entrer. Elles la suivaient, essayant de la calmer, mais Isabelle était sourde à leurs supplications. Elle était épuisée, à bout de nerfs, incapable de supporter davantage la rigidité et la cruauté de sa mère depuis le départ de sa grande sœur Safa.

Sa respiration était haletante, chaque souffle lui rappelant à quel point le corset était serré. Dans un geste brusque, elle arracha les lacets et libéra son corps de la prison de tissu. L'air frais envahit ses poumons, mais le soulagement physique ne parvint pas à apaiser la tempête émotionnelle qui faisait rage en elle. Elle s'avança vers son bureau, le regard sombre, les mains tremblantes de rage.

Ses yeux se posèrent sur les lettres soigneusement empilées, des lettres qu'elle avait écrites à sa grande sœur, implorant son aide, cherchant des réponses, espérant un signe de soutien. Des lettres restées sans réponse, trahissant la promesse que Safa lui avait faite. Une promesse de toujours être là pour elle, de la protéger. La trahison de Safa alimentait sa colère, ses yeux se voilant d'un sombre ressentiment.

Dans un accès de fureur, elle balaya d'un geste violent toutes les lettres de la table. Les papiers volèrent dans la pièce, retombant au sol comme une pluie de désespoir. Isabelle éclata en sanglots, ses larmes coulant librement, noyant son visage dans une marée de chagrin et de frustration. Sa vie à douze ans était devenue un véritable cauchemar, une prison dorée où chaque jour apportait son lot de souffrances.

- JE VOUS HAIS !

Elle s'effondra sur le sol, son corps secoué par les sanglots, ses pensées tourbillonnant autour de la trahison de Safa. Sa grande sœur lui avait vendu des rêves de bonheur et de liberté, mais en réalité, elle l'avait laissée à la merci de leur mère tyrannique. Isabelle sentait une haine grandissante envers Safa, envers sa mère, envers le monde entier. Elle détestait tout et tout le monde.

En essuyant ses larmes, elle remarqua les marques sombres autour de sa taille. Des ecchymoses laissées par le corset trop serré, des marques de la torture quotidienne qu'elle subissait. Son corps était devenu fragile, sa peau trop fine à cause du manque de nourriture imposé par sa mère. Chaque bleu, chaque cicatrice était une preuve de la cruauté qui l'entourait.

Isabelle se releva doucement, ses jambes vacillantes sous le poids de son épuisement et de sa colère. Elle jeta un dernier regard autour d'elle, à sa chambre qui ressemblait plus à une prison qu'à un refuge. Une résolution se forma dans son esprit.

Elle se regarda brièvement dans le miroir pour évaluer ses blessures. Son reflet lui renvoyait l'image d'une jeune fille meurtrie, son corps couvert d'ecchymoses et de marques rouges laissées par le corset trop serré. Mais alors qu'elle observait les dégâts, quelque chose attira son attention. Sur sa poignet de main, un écriture sur son bracelet en or, étincelait sous la lumière. Elle ne l'avait jamais remarqué mise à part son prénom gravé sur le bijoux de naissance. Intriguée, elle s'approcha rapidement pour examiner l'objet de plus près.

Le bracelet, qu'elle avait toujours considéré comme un simple bijou, révélait une gravure qu'elle n'avait jamais remarquée auparavant. Ses doigts tremblants le saisirent, et elle plissa les yeux pour lire les mots écrits en petit :

- Ce bracelet symbolique notre amour pour la mer et pour notre petite ange écarlate, de la part de votre douce mère Élisabeth et de père votre courageux Tritanus...chuchota-t-elle en lisant ce qui était indiqué sur le bracelet en or.

Isabelle sentit son cœur s'arrêter un instant, le choc l'envahissant comme une vague dévastatrice. Les larmes commencèrent à couler sur ses joues alors qu'elle murmurait, incrédule,

- C-c'est impossible...

Elle comprit rapidement, grâce à son intelligence précoce, ce que cela signifiait. Ses parents, ceux qu'elle avait toujours considérés comme sa famille, n'étaient pas ses véritables parents. Tout prenait soudainement sens : l'indifférence de son soi-disant père, son absence constante, le manque d'affection de sa mère, et le fait qu'elle ne ressemblait à personne sur l'île. Elle était détestée, mise à l'écart, parce qu'elle n'était pas vraiment l'une des leurs.

Ses iris violets, pleins de larmes, s'écarquillèrent sous l'effet de la révélation. Elle se laissa tomber à genoux, écrasée par le poids de cette nouvelle vérité. Les mots gravés sur le bracelet résonnaient dans sa tête, chaque syllabe renforçant le sentiment d'abandon et de trahison.

- É-Élisabeth et Tritanus...M-mes vrais parents...murmura-t-elle entre ses sanglots, sa voix brisée par l'émotion.

Les souvenirs des années passées dans cette famille qui n'était pas la sienne, la douleur des traitements injustes, tout cela se mélangeait dans un tourbillon de confusion et de désespoir. Isabelle se sentait perdue, comme si le sol s'était dérobé sous ses pieds. Elle avait été arrachée à sa véritable famille, et sa vie jusqu'à présent n'avait été qu'un mensonge.

En se tenant là, à genoux, les yeux fixés sur le bracelet, Isabelle se rendit compte qu'elle devait tout réévaluer. Sa vie, son identité, ses origines...Tout devait être repensé. Mais avant tout, elle devait trouver la force de se relever, de continuer à avancer malgré la douleur et la confusion. Elle devait découvrir la vérité sur ses véritables parents, sur Élisabeth et Tritanus, et sur la raison pour laquelle elle avait été abandonnée.

Ses larmes se tarirent peu à peu, remplacées par une détermination renouvelée. Elle se releva lentement, le bracelet toujours fermement tenu dans sa main, et jeta un dernier regard à son reflet dans le miroir. Elle n'était pas la fille de Cassandra et de cet homme absent. Elle était Isabelle, la petite ange écarlate d'Élisabeth et Tritanus, et elle se promettait de découvrir ce qui leur était arrivé, et pourquoi elle avait été séparée d'eux.

Avec une nouvelle résolution dans le regard, Isabelle serra le bracelet contre son cœur, prête à affronter les vérités cachées de son passé et à trouver sa véritable place dans le monde.

🏴‍☠️✨️🏴‍☠️

Capitaine Scarlet se tenait devant la fontaine magique, ses yeux fixés sur les images qui défilaient dans les eaux scintillantes. Les souvenirs de son enfance, l'amour toxique familiale, sa vie stricte, son agression, l'abandon de sa "grande sœur", les coups et les blessures resurgissaient avec une clarté douloureuse. Chaque image semblait lui transpercer le cœur.

Dans un accès de colère mêlé de désespoir, elle donna un violent coup de poing dans la fontaine. Le bruit de la pierre se fissurant résonna, interrompant brutalement les visions. Les éclaboussures d'eau se dispersèrent autour d'elle, et une partie de la fontaine se brisa, laissant échapper un faible jet d'eau.

Elena et Eve, qui observaient en silence jusqu'à cet instant, sursautèrent de surprise. Elles n'avaient jamais vu leur capitaine perdre ainsi son sang-froid. Elena, le visage empreint de colère et de confusion, s'approcha rapidement de Scarlet.

- Pourquoi AVEZ-VOUS fait ça ? cria-t-elle, les yeux étincelants de colère. VOUS AVIEZ dit que nous pouvions voir VOTRE passé ! J'étais enfin en train de comprendre VOS sentiments !

Eve, se tenant à côté d'Elena, ajouta d'une voix tremblante mais résolue,

- Oui, et nous n'avons même pas vu votre rencontre avec Mickael Dubois ou le capitaine Alaric Brumenoire, ni la raison pour laquelle vous portez cette STUPIDE malédiction ! Ce que vous venez de faire n'est pas digne d'un capitaine humble et mature !

Elena, le visage rouge de frustration, continua,

- Nous étions enfin en train de comprendre pourquoi vous étiez égoïste, seule et sans émotions. Mais vous nous empêchez toujours de voir la vérité, Isabelle !

Capitaine Scarlet, incapable de contenir ses émotions tumultueuses, s'effondra au sol, pleurant à chaudes larmes. Ses sanglots secouaient son corps, révélant une fragilité qu'elle avait toujours dissimulée. Revoir ces images avait ravivé une douleur profonde, un chagrin qu'elle n'avait jamais véritablement surmonté.

Eve et Elena, d'abord en colère, se sentirent soudain coupables. Elles n'avaient jamais vu le capitaine Scarlet si vulnérable auparavant.

Eve s'agenouilla à côté de Scarlet, posant une main réconfortante sur son épaule.

- Nous sommes désolées, murmura-t-elle. Nous ne savions pas à quel point cela vous ferez mal...dit-elle calmement.

Elena, adoucissant son ton, ajouta,

- Nous voulons juste comprendre, Isabelle. Nous voulons savoir ce que vous avez traversé. VOUS n'êtes pas seule !

Capitaine Scarlet se redressa lentement, essuyant ses larmes d'un geste brusque et déterminé. Son visage se durcit, ses yeux glacials d'un rouge intense fixèrent Eve et Elena avec une froideur palpable. La jeune sorcière qui était toujours à terre, se levait à son tour du sol, lançant un regard confus à la jeune femme pirate.

- Vous pensez comprendre, commença-t-elle d'une voix tremblante mais autoritaire. Mais c'est facile à dire pour vous, Elena. Vous avez grandi avec un père aimant et présent, une vie parfaite et sans problèmes. Chaque moment de votre vie a été bercé par la sécurité et l'amour. Et maintenant, vous osez à nouveau me juger ?

Elena, les yeux écarquillés, ouvrit la bouche pour protester.

- ISABELLE, ce n'est pas ce que je-

- NE M'APPELLEZ PAS PAR CE NOM ! coupa Scarlet, levant la main pour la faire taire. Votre expérience de la douleur et de la perte est une erreur en comparaison à ce que j'ai traversé ! Vous n' avez aucune idée de ce que c'est de perdre tout ce qui compte, de voir vos rêves s'effondrer en un instant ?!

Elena, la gorge nouée, se tut, ses yeux brillant de larmes non versées. Elle n'avait jamais vu Scarlet aussi cruelle et désespérée.

Scarlet se tourna ensuite vers Eve, son regard perçant à travers le silence de l'autre jeune femme.

- Et vous, Eve ? Qu'avez-vous à dire ? Vous restez silencieuse tout ce temps, à l'exception de votre histoire de génocide. Mais avez-vous connu le mal-être constant, la maltraitance quotidienne, un trouble d'identité qui vous ronge de l'intérieur, la manipulation et les abus à répétition ?

Eve hocha la tête négativement, son visage grave. Elle ne pouvait pas nier la vérité des mots de capitaine Scarlet. Elle avait ses propres démons, certes, mais ils étaient d'une nature différente. Elle n'avait jamais vécu l'enfer personnel que Scarlet décrivait.

Capitaine Scarlet soupira, le poids de ses souvenirs alourdissant encore son cœur.

- Vous pensez que vous pouvez comprendre ma douleur, mais vous ne le pouvez pas. Pas vraiment ! dit-elle honnêtement, en haussant les épaules.

Elena, luttant pour retenir ses larmes, se redressa.

- Nous voulons seulement être là pour vous, Is-sa-Scarlet. Nous voulons vous aider !

- Mais vous ne pouvez pas, répondit capitaine Scarlet d'un ton coupant. Pas tant que vous n'avez pas vécu ce que j'ai vécu. Pas tant que vous n'avez pas ressenti chaque coup, chaque perte, chaque trahison !

Le silence retomba, lourd et oppressant, entre les trois femmes. Scarlet se détourna, son regard se perdant dans les fragments de la fontaine brisée. Elle savait que ses paroles étaient dures, mais c'était la réalité de sa douleur. Une douleur qu'elle ne savait pas comment partager sans la rendre encore plus insupportable.

Eve et Elena restèrent là, incapables de trouver les mots pour combler le fossé qui les séparait de leur capitaine. Pour la première fois, elles comprenaient l'ampleur de la tragédie qui avait façonné Scarlet. Mais cette compréhension, aussi profonde soit-elle, ne pouvait pas réparer ce qui était brisé.

Mais soudain, Elena, bouillonnante de colère, se tourna brusquement vers capitaine Scarlet. Ses poings étaient serrés et ses yeux flamboyaient d'une rage incontrôlable.

- Justement, si vous n'étiez pas si peureuse de parler de votre passé et de votre mal-être, on pourrait comprendre ! cria-t-elle. Non, vous préférez vous cacher derrière votre peur. Vous dites que c'est pas un comportement digne d'un pirate ? J'ai lu dans des livres que les vrais pirates n'ont peur de rien, même pas de la mort !

Capitaine Scarlet, toujours en proie à sa propre colère, répliqua avec froideur.

- Ne croyez pas tout, ce que vous lisez dans les livres, Elena. C'est purement faux...répliqua-t-elle d'un air dégoûté.

Elena, hors d'elle, attrapa son pistolet d'un geste brusque et, sous l'emprise de la rage, tira en direction de Scarlet. Eve, sous le choc, réagit instinctivement en lançant un sortilège pour arrêter la balle. Mais capitaine Scarlet, d'abord figée, sourit doucement. Avec une agilité et une précision incroyables, elle attrapa la balle en plein vol, sans faire la moindre effort. Elle regarda toujours Elena, en jouant avec la balle.

- Bien essayé, chère sœur, murmura-t-elle, son regard froid et neutre. Mais une balle ne peut pas arrêter un pirate expérimenté, n'est-ce pas ? Vos livres ne disent-ils pas comment se comporter ou bien, arrêter un vrai pirate ?

Elena resta pétrifiée, réalisant la gravité de son geste. Eve, toujours choquée, baissa lentement la main, son sortilège dissipé.

- Vous voulez savoir ce qu'est la vraie peur, Elena ? continua Scarlet, serrant la balle dans sa main. La vraie peur, c'est de perdre tout ce que voud aimez, de voir votre monde s'effondrer sans pouvoir rien faire ! La VRAIE peur, c'est de vivre chaque jour avec le poids de vos erreurs et de tes pertes. Alors, ne venez pas me parler de courage ou de comportement de pirate ! Vous êtes vraiment mal placé...dit-elle froidement.

Elena, les larmes aux yeux, secoua la tête.

- J-je voulais juste...Je voulais juste comprendre !

- Et vous le ferez, répondit Scarlet plus doucement, relâchant la balle. Un jour...Sans utiliser le moindre geste de violence.

Le silence retomba entre elles, lourd et plein de tension non résolue. Scarlet se détourna, cachant la douleur qui continuait de la ronger. Elena baissa les yeux, regrettant son geste impulsif. Eve, toujours sous le choc, tenta de rassembler ses pensées.

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