Chapitre 26 : L'ombre de Scarlet {1er partie}
Le panier de roseaux tressés flottait doucement sur les vagues calmes de l'océan, bercé par le mouvement régulier de l'eau. À l'intérieur, Isabelle, un bébé de quelques jours à peine, regardait le ciel avec des yeux grands ouverts, remplis de curiosité et de joie pure. Ses iris violets, d'une couleur rare et fascinante, reflétaient la vaste étendue bleue au-dessus d'elle.
Elle éclatait de rire, ses petits éclats de voix se perdant dans le murmure des vagues. Son sourire innocent illuminait son visage poupin, totalement inconsciente du vaste océan qui l'entourait. Isabelle agitait ses petites mains potelées dans l'air, captivée par le spectacle des nuages qui dérivaient lentement au-dessus d'elle.
Les rayons du soleil couchant teintaient le ciel de nuances roses et orangées, offrant un contraste saisissant avec les yeux violets d'Isabelle. Elle semblait hypnotisée par les couleurs changeantes, ses rires ponctuant l'air avec une légèreté insouciante. La mer, calme et bienveillante, continuait de la porter doucement, chaque vague caressant les bords du panier.
À cet instant précis, Isabelle ne connaissait ni peur ni inquiétude. Elle flottait au milieu de l'immensité de l'océan, son cœur débordant de la pure joie de la découverte, sa naïveté d'enfant la protégeant des réalités du monde. Le vent léger jouait dans les quelques mèches de ses cheveux, et elle gazouillait joyeusement, fascinée par le ciel infini qui s'étendait au-dessus d'elle.
Le panier de roseaux finit par dériver vers le rivage d'une île isolée, porté par les courants marins. Les vagues, de plus en plus puissantes à mesure qu'elles approchaient de la terre, poussèrent le panier doucement sur le sable humide. La petite Isabelle, jusque-là émerveillée par le ciel, sentit le changement sous elle et se redressa légèrement, ses yeux violets agrandis par la peur.
Le rivage était silencieux, seulement troublé par le bruit des vagues et le bruissement des feuilles des palmiers. Isabelle, réalisant soudainement qu'elle était seule, commença à pleurer, ses cris perçant la tranquillité de l'île. Elle appelait instinctivement sa maman, les larmes coulant sur ses joues rondes.
Le panier s'était arrêté, à moitié enfoncé dans le sable mouillé. Les pleurs d'Isabelle se firent plus forts, plus désespérés, résonnant dans l'air salé. Elle ne comprenait pas où elle se trouvait ni pourquoi sa maman ne venait pas la chercher. Son petit corps tremblait de peur et de solitude.
Soudain, entre deux sanglots, elle aperçut une silhouette féminine s'approcher lentement. La femme avançait avec précaution, ses talons s'enfonçant dans le sable. Elle portait une robe simple qui flottait légèrement autour d'elle, ses cheveux longs et ondulés capturant les derniers rayons de soleil.
Une femme élégamment vêtue dans un style victorien. Elle porte une robe verte sophistiquée, agrémentée de volants noirs et d'un corset noir qui accentue sa taille fine. La robe est ornée de boutons et de dentelles, et elle porte des gants en dentelle noire qui couvrent ses avant-bras. Son col est haut et orné de broderies délicates, tandis qu'une broche avec un bijou violet se trouve au niveau de sa gorge. Sur sa tête, elle arbore un petit chapeau vert assorti à sa robe, décoré d'un voile noir et de plumes. Son visage est fin avec des traits délicats, et ses cheveux noirs sont coiffés en un chignon sophistiqué.
Isabelle cessa de pleurer, ses cris se transformant en hoquets irréguliers. La silhouette se pencha vers elle, et dans le regard de la femme, elle vit une douceur et une compassion infinies. La femme, visiblement émue par la détresse du bébé, tendit les bras pour la prendre délicatement dans ses bras.
- Chut, petit ange, vous êtes en sécurité maintenant, murmura-t-elle, berçant Isabelle doucement pour calmer ses pleurs.
Les sanglots d'Isabelle s'apaisèrent peu à peu, remplacés par des gazouillis incertains. La chaleur réconfortante du corps de la femme et la douceur de ses paroles apportèrent un sentiment de sécurité à la petite fille.
Elle abaisse lentement son regard et découvre un bracelet en or délicatement ciselé. Soudain, intriguée, elle saisit délicatement la main d'Isabelle, une jeune femme se tenant à ses côtés. Ses doigts glissent sur le bracelet, sentant la froideur et le poids de l'or. En plissant légèrement les yeux, elle lit attentivement l'inscription gravée sur la surface luisante.
- Isabelle...Oh, vous vous appelez Isabelle ? Un nom si original ! déclara-t-elle chaleureusement, en souriant.
Le nom d'Isabelle est gravé avec soin, chaque lettre reflétant une histoire précieuse. La femme relève alors la tête, un sourire chaleureux éclairant son visage, et regarde le bébé dans les bras d'Isabelle avec une joie palpable.
Isabelle, désormais lovée dans les bras réconfortants de la jeune femme, fixait son regard sur ce nouveau visage avec une curiosité innocente. Elle tendit une main potelée et attrapa délicatement le doigt ganté de la femme, le serrant avec ses petits doigts. La sensation du tissu contre sa peau douce la fascinait, et elle agita doucement sa main, comme pour explorer cette nouvelle texture.
La femme, touchée par ce geste, éclata d'un rire léger et mélodieux.
- Vous êtes vraiment une petite exploratrice, n'est-ce pas ? dit-elle avec une tendresse infinie dans la voix.
Elle caressa doucement la joue d'Isabelle avec son autre main, un sourire chaleureux illuminant son visage.
- Je m'appelle Safa, poursuivit-elle, son regard doux et bienveillant. Et j'ai seize ans.
Elle fit une pause, observant le visage de la petite Isabelle se détendre à son contact.
- Ne vous inquiétez pas Isabelle, je vais prendre soin de vous ! dit-elle d'une voix douce.
Safa s'assit sur le sable, maintenant Isabelle près d'elle, la berçant doucement. Le bébé continuait de jouer avec le doigt ganté, ses yeux violets brillant de curiosité et de confort. Le rire de Safa avait apporté une nouvelle couche de tranquillité, dissipant les dernières traces de peur dans le cœur d'Isabelle.
Lentement, Isabelle commença à se détendre complètement, ses paupières s'alourdissant sous l'effet du bercement apaisant. La chaleur du corps de Safa et le son rassurant de sa voix créèrent un cocon de sécurité autour d'elle. Pour la première fois depuis qu'elle avait été mise dans le panier, Isabelle se sentit en paix.
Le soleil continuait de descendre à l'horizon, peignant le ciel de teintes dorées et pourpres. Safa, consciente du moment précieux qu'elle partageait avec la petite fille, resta immobile, savourant la douce tranquillité de l'instant. La mer, le sable et le ciel formaient un cadre parfait pour cette rencontre inattendue, marquant le début d'une nouvelle histoire pour Isabelle et sa jeune protectrice, Safa.
Ensuite, elle sourit doucement en voyant les yeux violets d'Isabelle briller d'innocence et de curiosité. Il y avait quelque chose de profondément envoûtant dans le regard de la petite, une pureté rare qui touchait Safa au plus profond de son cœur. Elle caressa tendrement la joue d'Isabelle une dernière fois avant de se redresser lentement, gardant le bébé fermement contre elle.
- Nous devons rentrer maintenant, déclara-t-elle avec douceur, ses yeux fixés sur le visage d'Isabelle. Je vais tout faire pour que mes parents vous adoptent, petite fille mignonne.
Isabelle, comme si elle avait compris les paroles rassurantes de Safa, esquissa un sourire radieux. Ses petites mains s'accrochaient aux vêtements de Safa et elle émit un petit gazouillis joyeux, ses yeux étincelants de confiance et de bonheur.
Safa sourit en retour, son cœur se réchauffant à la vue de ce sourire innocent. Elle ajusta Isabelle dans ses bras et commença à marcher le long du chemin sablonneux qui menait au manoir de ses parents. Le sentier serpentait à travers des palmiers et des buissons fleuris, leurs feuilles et pétales frémissant sous la brise douce du soir.
Le manoir apparaissait au loin, majestueux et imposant, ses murs de pierre blanche se dressant fièrement contre le ciel crépusculaire. Safa avançait avec détermination, son regard fixé sur sa destination, chaque pas renforçant sa résolution de donner à Isabelle un foyer aimant et sécurisant.
Isabelle, apaisée par le rythme régulier des pas de Safa et le bercement de ses bras, regardait autour d'elle avec émerveillement. Le monde lui semblait vaste et plein de promesses, et elle se sentait en sécurité avec Safa. Le doux murmure des vagues s'estompait derrière elles, remplacé par les sons plus feutrés de la nature qui les entourait.
Alors qu'elles approchaient du manoir, Safa jeta un coup d'œil affectueux à Isabelle.
- Nous allons trouver un moyen, ma petite. Je vous le promets ! murmura-t-elle, sa voix emplie de conviction.
Le manoir se rapprochait de plus en plus, et avec chaque pas, Safa sentait un mélange de nervosité et d'espoir grandir en elle. Mais en regardant le visage paisible d'Isabelle, elle savait qu'elle ferait tout ce qui était en son pouvoir pour que cette petite fille trouve enfin un foyer où elle serait aimée et chérie.
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Le manoir résonnait des éclats de voix de Cassandra, la mère de Safa et désormais d'Isabelle.
- ISABELLE ! cria-t-elle avec une colère perceptible, sa voix traversant les couloirs comme un tonnerre. Reviens ici tout de suite !
Isabelle, maintenant âgée de six ans, courait avec une joie effrontée à travers les longs couloirs du manoir. Ses rires cristallins résonnaient contre les murs, remplissant l'espace de gaieté. Elle adorait jouer à ce jeu de cache-cache, même si cela mettait souvent sa mère adoptive en colère.
- Non mère, JE NE VEUX PAS ! Essayez de m' attraper ! dit-elle surnoisement, en continuant de courir dans les couloirs.
Cassandra, une femme âgée mais encore énergique,
Ellee se précipita derrière sa fille, sa robe longue entravant légèrement ses mouvements. Elle détestait quand Isabelle ne l'écoutait pas, et aujourd'hui ne faisait pas exception. Sa patience était mise à rude épreuve par la vivacité et l'espièglerie de la petite.
- Isabelle, arrêtez-vous ! cria-t-elle en essayant de la rattraper, mais la petite fille, sourde à ses appels, continua de courir.
En passant devant les soldats qui gardaient le manoir, Isabelle les salua joyeusement, ses boucles brunes flottant autour de son visage. Les soldats, surpris mais amusés par cette interruption, répondaient à ses salutations avec des sourires indulgents.
Isabelle atteignit finalement le grand escalier en marbre, le cœur battant d'excitation. Elle s'arrêta un instant sur la première marche, se retournant pour voir sa mère qui approchait, haletante et furieuse. Cassandra s'arrêta en bas de l'escalier, les mains sur les hanches, fixant Isabelle d'un regard sévère.
- Ne faites pas un pas de plus, Isabelle ! ordonna-t-elle, sa voix ferme et autoritaire.
Mais Isabelle, toujours pleine de défi, tira la langue à sa mère, un sourire espiègle sur le visage.
Ignorant l'avertissement de sa mère Cassandra, elle monta sur la rampe de l'escalier et, avec une agilité enfantine, se laissa glisser jusqu'en bas. Ses rires joyeux emplirent l'air alors qu'elle dévalait la rampe, ses bras écartés pour garder l'équilibre.
Cassandra, désespérée et exaspérée, ne put que regarder sa fille dévaler l'escalier. En atteignant le bas, Isabelle sauta légèrement sur le sol en marbre, ses yeux brillants d'excitation et de triomphe. Elle se tourna vers sa mère, essoufflée mais toujours souriante.
- Vous êtes incorrigible, Isabelle, soupira Cassandra, essayant de dissimuler un sourire malgré sa colère. Mais un jour, vous apprendrez à m'écouter ! dit-elle sérieusement, en fronçant légèrement les sourcils.
Isabelle, les joues rouges et les yeux pétillants, se précipita vers sa mère et lui donna un câlin rapide avant de repartir en courant. Cassandra la regarda partir, un mélange de frustration et d'affection dans les yeux. Elle savait que, malgré ses frasques, Isabelle était une enfant débordante de vie et de bonheur, et c'était là son plus grand trésor.
Sentant la frustration de sa mère, elle s'arrêta et fit volte-face.
- Je suis désolée, mère...murmura-t-elle, ses yeux violets baissés avec un air de repentir.
Elle s'éloigna lentement de Cassandra, traînant légèrement les pieds sur le sol en marbre poli.
Cassandra, attendrie par l'excuse sincère de sa fille, sourit doucement et tendit la main vers elle. Isabelle, après une hésitation, saisit la main de sa mère. Cassandra la tira doucement vers elle et dit, avec une douceur teintée de fermeté :
- Il est temps d'assister à vos cours de couture et de bonnes manières.
Isabelle leva les yeux au ciel, son visage enfantin exprimant clairement son ennui.
- Mais mère, ces cours sont tellement ennuyeux. Je sais déjà tout faire ! protesta-t-elle, ses petites mains gesticulant pour appuyer ses propos.
Cassandra éclata de rire, amusée par la détermination de sa fille. Elle s'agenouilla devant Isabelle, de manière à être à sa hauteur, et posa délicatement une main sur son épaule.
- Ma chérie, si vous assistez à vos cours, vous deviendrez une parfaite jeune femme, tout comme votre grande sœur Safa ! dit-elle honnêtement, en souriant.
Le visage d'Isabelle s'illumina instantanément à la mention de sa sœur aînée, qu'elle admirait tant.
- Je serai aussi belle que Safa ? demanda-t-elle, les yeux pétillants d'enthousiasme.
- Oui, ma douce, répondit Cassandra en souriant. Aussi belle et gracieuse !
Isabelle bondit de joie, son sourire éclatant illuminant son visage.
- D'accord, mère ! Je vais y aller et je serai aussi belle que Safa ! déclara-t-elle avec une énergie renouvelée, prête à affronter les leçons ennuyeuses avec un nouvel enthousiasme.
Cassandra se releva et serra tendrement la main d'Isabelle. Ensemble, elles se dirigèrent vers la salle de cours, le manoir résonnant de rires et de conversations animées. Tandis qu'elles marchaient, Cassandra ne pouvait s'empêcher de ressentir une profonde fierté pour ses deux filles, chacune si unique et précieuse à sa manière.
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Isabelle, maintenant âgée de dix ans, errait dans le jardin luxuriant du manoir, ses pensées vagabondant comme les papillons qui dansaient autour des fleurs colorées. Elle se sentait plus seule que d'habitude, sa grande sœur Jamila étant souvent absente ces derniers temps. Elle adorait passer du temps avec Safa, mais celle-ci semblait toujours être occupée ailleurs, loin de la maison.
Un après-midi, après avoir terminé ses leçons de couture et de bonnes manières, Isabelle vit enfin Safa revenir au manoir. Elle se précipita vers elle, ses longues jambes filant à toute allure à travers les jardins. Safa, toujours aussi gracieuse et belle, sourit en voyant sa petite sœur accourir.
- SAFA ! s'écria Isabelle en arrivant à sa hauteur. Pourquoi êtes-vous presque jamais à la maison ? demanda-t-elle sans préambule, son visage sérieux et ses yeux violets cherchant des réponses.
Safa, surprise par la question directe de sa sœur, s'accroupit pour être à sa hauteur. Elle prit les mains d'Isabelle dans les siennes, ses doigts fins et délicats enveloppant ceux plus petits de sa sœur.
- Isabelle, ma petite étoile, commença Safa avec douceur, je sais que vous vous sentez seule parfois, et je suis désolée de ne pas être là autant que vous le voudriez...dit-elle calmement, en souriant tristement à sa petite sœur.
Les yeux d'Isabelle se remplirent de curiosité et d'inquiétude.
- Mais pourquoi ? Où allez-vous tout le temps ?
Safa soupira légèrement, cherchant les mots justes.
- Je suis devenue adulte, avec cela viennent des responsabilités. Je travaille avec mère et père pour aider notre famille et les gens de notre domaine. Je suis aussi un doux mari et j'attends un enfant a l'avenir...Parfois, cela me demande d'être loin de la maison ! expliqua-t-elle calmement, en essayant d'être le plus simple possible, car sa sœur n'avait que dix ans.
Isabelle hocha la tête, essayant de comprendre.
- Mais je veux que vous restiez ici avec moi ! dit-elle, sa voix légèrement tremblante.
Safa tira doucement Isabelle vers elle et la prit dans ses bras.
- Je sais, ma chérie, mais sache que même quand je suis loin, je pense toujours à vous. Chaque moment que nous passons ensemble est précieux pour moi...murmura-t-elle tendrement, en lançant un sourire espiègle à la jeune fille.
Isabelle se blottit contre sa sœur, sentant la chaleur et le réconfort de son étreinte.
- Je vous promets que je ferai de mon mieux pour être là plus souvent, ajouta Safa en caressant les cheveux d'Isabelle. Et en attendant, vous pouvez m'écrire des lettres et je vous répondrai toujours, affirma-t-elle.
Isabelle releva la tête, un léger sourire apparaissant sur ses lèvres.
- D'accord, je vous écrirai tout le temps, alors !
Safa rit doucement et embrassa le front d'Isabelle.
- Ça me ferait très plaisir, Isabelle. Maintenant, allons trouver mère.
J'en suis sûre, qu'elle a préparé quelque chose de délicieux pour le goûter ! s'exclama-t-elle joyeusement, en tenant la main de sa petite sœur.
Ensemble, les deux sœurs se levèrent et marchèrent main dans la main vers le manoir, leur lien se renforçant malgré les distances et les absences.
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La matinée était calme et tranquille dans le manoir, et Isabelle, maintenant âgée de douze ans, dormait paisiblement dans son lit. Les draps en soie étaient tirés jusqu'à son menton, et sa respiration était régulière, témoignant de la profondeur de son sommeil. Les premières du soleil filtrée à travers les rideaux en dentelle ajoutait une touche de sérénité à la pièce.
Soudain, le calme de la matin fut brisé par le bruit des portes qui s'ouvraient brusquement et des voix de femmes discutant activement. Les dames de la maison, agitées et bruyantes, se déplaçaient rapidement dans la chambre d'Isabelle, leurs robes bruissant et leurs voix étouffées par l'excitation du matin.
Isabelle, perturbée par ce vacarme inattendu, émergea lentement de son sommeil. Elle cligna des yeux, ses cheveux en désordre autour de son visage, et murmura d'une voix ensommeillée :
- C'est trop tôt pour se lever !
Elle s'étira et se frotta les yeux, tentant de se réveiller.
Cassandra, les traits marqués par l'impatience, fit irruption dans la chambre. Elle était vêtue d'une robe élégante mais démodée, et son visage affichait une expression de détermination sévère. Sans prêter attention aux plaintes d'Isabelle, elle s'approcha rapidement du lit. La lumière du matin qui filtrait à travers les rideaux accentuait les ombres sous ses yeux et la dureté de ses traits.Cassandra saisit le bras d'Isabelle avec une fermeté inattendue, la tirant violemment hors de son lit.
Isabelle, encore engourdie par le sommeil, laissa échapper un cri de surprise et une plainte douloureuse en sentant la pression sur son bras. Elle se redressa péniblement, les yeux encore mi-clos, et fixa sa mère d'un regard confus et contrarié.
- Mère, pourquoi ? demanda-t-elle, sa voix tremblante et désorientée, tandis qu'elle essayait de se libérer de l'emprise de sa mère.
Cassandra, ignorant l'inconfort de sa fille, continua avec une dureté inébranlable.
- Il est grand temps que vous vous préparez. Nous avons une journée chargée et vous ne pouvez pas vous permettre de traîner ! déclara-t-elle fermement.
Malgré les tentatives d'Isabelle de se rendre plus compréhensible et son bras en souffrance, Cassandra ne relâcha pas sa prise. Elle regarda les dames autour d'elle, qui continuaient leurs préparatifs avec une rapidité effervescente, et dirigea ses yeux de nouveau vers Isabelle.
- Levez-vous maintenant, Isabelle. Nous avons des choses importantes à accomplir aujourd'hui !
Isabelle se leva enfin, ses mouvements lents et maladroits, encore engourdie par le sommeil et par la brusquerie de l'éveil. Elle se laissa conduire hors du lit, les yeux rivés sur le sol. Les deux femmes de chambre, habillées de façon austère mais efficace, se déplacaient rapidement autour d'Isabelle, qui se tenait debout, les bras en l'air pour faciliter le processus. Les murs de la pièce résonnaient des bruits de leurs mouvements précipités et des murmures de leurs instructions.
L'une des femmes de chambre, concentrée et méthodique, ajustait le corset d'Isabelle avec une précision déterminée. Le corset en satin bleu, décoré de broderies délicates, était déjà fermement attaché, mais il fallait maintenant le serrer davantage. L'autre femme de chambre tenait la partie supérieure du corset, essayant de faire coïncider les lacets et les boucles pour que le vêtement épouse parfaitement la taille d'Isabelle.
Cassandra, se tenant à une courte distance, observait le travail avec une impatience croissante. Ses yeux perçaient chaque détail avec une sévérité glaciale, cherchant la moindre imperfection. Lorsqu'elle jugea que le corset n'était pas assez serré, elle se redressa, ses bras croisés sur sa poitrine.
- Resserrez encore plus fort, ordonna-t-elle d'une voix autoritaire, son ton ne souffrant aucune discussion.
Isabelle, le visage blême sous l'effort, essaya de protester.
- N-non, mère, je ne peux pas respirer-
Sans avertissement, Cassandra leva la main et donna une claque cinglante sur la joue d'Isabelle. Le bruit sec de la claque résonna dans la pièce, et Isabelle poussa un cri de douleur. Les larmes montèrent à ses yeux tandis qu'elle se pliait légèrement sous l'effet du choc. Cassandra, impassible, braqua un regard dur sur sa fille.
- Resserrez-le encore plus ! ordonna Cassandra d'une voix glaciale, ses yeux perçants fixés sur les femmes de chambre.
Les femmes de chambre, bien qu'elles soient visiblement mal à l'aise, obéirent immédiatement. Elles tiraient les lacets avec encore plus de force, la tension sur le corset augmentant. Isabelle sentit sa cage thoracique se comprimer douloureusement alors que le corset se resserrait, ses respirations devenant de plus en plus difficiles.
- Il faut qu'elle soit parfaite et fine, déclara Cassandra avec une froide détermination, ses yeux scrutant le corset pour vérifier le degré de serrage. Ne laissez aucune imperfection !
Les femmes de chambre continuèrent à ajuster le corset avec précision, et Isabelle, les larmes coulant le long de ses joues, se contenta de se tenir là, les mains crispées sur les bords de son corset pour essayer de soulager un peu la douleur. Elle se mordait la lèvre, essayant de rester immobile malgré l'inconfort et la douleur croissante.
Cassandra fit un dernier tour autour d'Isabelle, vérifiant minutieusement le résultat. Elle sembla satisfaite du résultat final, et ses traits se détendirent légèrement, bien que sa satisfaction restât empreinte de rigidité. Elle fit un signe aux femmes de chambre pour qu'elles se retirent, puis se tourna vers Isabelle avec un regard empreint de froideur maternelle.
- Maintenant, soyez à la hauteur et comportez-vous comme une jeune femme parfaite ! ordonna Cassandra avant de quitter la pièce.
Isabelle, encore sous le choc et la douleur, se contenta de regarder sa mère partir, se sentant à la fois accablée par l'injustice de la situation et résignée à son sort.
Les femmes de chambre se déplaçaient autour d'elle avec efficacité, s'assurant que chaque détail de sa tenue était parfait.
L'une des femmes de chambre, plus jeune et moins expérimentée, s'occupait des accessoires. Elle tenait un bracelet élégant dans ses mains, hésitant un moment avant de se tourner vers Isabelle. Avec une intention de finir les préparatifs, elle tenta de retirer le bracelet de la main d'Isabelle, probablement pour le nettoyer ou le réajuster.
Isabelle, perdue dans ses pensées et déjà mal à l'aise, n'y prêta d'abord guère attention. Mais dès que la femme de chambre commença à manipuler le bracelet, Isabelle sentit une pression incongrue et fit un léger mouvement de recul. Son visage se crispa légèrement, une expression de mécontentement traversant ses traits.
Avant que la femme de chambre puisse continuer, son regard se posa immédiatement sur l'échange. D'un ton tranchant, elle ordonna :
- Ne touchez pas à mon bracelet...C'est interdit de la toucher !
La femme de chambre, visiblement prise de court et rougissant de honte, retira brusquement ses mains, le bracelet à moitié enlevé. Elle baissa les yeux, murmurant des excuses, tandis que ses mains tremblaient légèrement de l'appréhension.
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Isabelle se tenait droite, immobilisée par les couches innombrables de sa robe somptueuse. Le tissu riche et lourd la submergeait, chaque pli ajoutant une nouvelle contrainte à ses mouvements déjà restreints par le corset serré. La robe, d'un bleu profond brodé de fils d'or, était magnifique mais imposante, étouffante. Elle ne pouvait ni se plaindre ni véritablement respirer, chaque inspiration étant un effort pénible et mesuré.
Elle soupira légèrement, sentant la lourdeur de chaque respiration et la contrainte des couches de tissu contre sa peau. Ses pensées vagabondaient, cherchant un répit dans la routine accablante.
Les femmes de chambre se dirigèrent alors vers ses cheveux. Isabelle grimaça intérieurement, sachant ce qui allait suivre. Elle détestait ces moments où l'on s'occupait de ses longues boucles brunes. Les mains des femmes de chambre étaient habiles mais impitoyables, tirant et manipulant ses cheveux sans ménagement pour réaliser des coiffures compliquées qu'Isabelle trouvait hideuses et démodées. Chaque tiraillement était une agression silencieuse, chaque boucle pincée et enroulée une perte de son naturel.
Le temps sembla s'étirer à l'infini tandis que les femmes de chambre s'affairaient autour de sa chevelure, fixant chaque mèche avec des épingles dorées et des accessoires en perles. Isabelle restait stoïque, ses pensées errant vers des rêves de liberté, loin des contraintes imposées par son statut et les attentes de sa mère.
Enfin, après ce qui sembla être une éternité, les femmes de chambre terminèrent leur travail. Elles reculèrent, examinant leur œuvre avec satisfaction. Isabelle se regarda brièvement dans le miroir, réprimant une grimace en voyant la coiffure sophistiquée qui abîmait ses boucles naturelles. Elle savait qu'il n'y avait rien à faire, rien à dire. Toute protestation ne ferait qu'aggraver la situation.
D'un ton glacial et détaché, elle murmura un remerciement forcé.
- Merci...dit-elle, sa voix plate et dénuée d'émotion, avant de se détourner.
Elle quitta la pièce avec une démarche mesurée, chaque pas étant une lutte contre le poids de sa robe. En se dirigeant vers le salon, Isabelle sentait le regard de Cassandra et des autres femmes de chambre sur elle, scrutant chaque détail, chaque mouvement.
En franchissant le seuil du salon, Isabelle se redressa autant que possible, prenant une grande inspiration malgré la pression du corset. Elle était prête à affronter une nouvelle journée de contraintes, de règles et de rôles à jouer, tout en rêvant secrètement d'un monde où elle pourrait être elle-même, libre de toute cette pression oppressante.
Elle descendait les escaliers avec une grâce apparente, bien que chaque pas soit une lutte contre les lourdes couches de sa robe et la contrainte oppressante de son corset. La lumière du matin baignait la grande entrée du manoir, jetant des reflets dorés sur les murs ornés et les meubles élégants. Elle maintenait son regard fixé droit devant elle, essayant de se concentrer sur chaque mouvement pour ne pas trébucher ou paraître maladroite.
Cassandra se tenait en bas des escaliers, les bras croisés, son regard sévère fixé sur sa fille. Elle observait chaque pas avec une attention impitoyable, cherchant la moindre imperfection. Son visage était une masque de rigueur, ses lèvres pincées révélant sa désapprobation avant même qu'Isabelle ne parvienne à la dernière marche.
Soudain, Cassandra éclata :
- Non, NON, ce n'est pas parfait ! Sa voix résonna dans le hall, chaque mot frappant Isabelle comme une gifle invisible. Votre démarche est incorrecte ! Vous avez encore beaucoup à apprendre !? cria-t-elle furieusement, en mettant une main sur son front pour calmer ses nerfs.
Isabelle s'immobilisa, figée par la réprimande publique. Son cœur battait la chamade, et elle sentait le regard accusateur de sa mère peser sur elle. Les paroles suivantes tombèrent comme un couperet :
- Vous mangerez moins ce soir, c'est votre punition !
L'humiliation et la déception se mêlaient en elle, mais elle savait qu'il ne servait à rien de protester. Elle serra les dents, prenant une profonde inspiration malgré la constriction du corset, et termina silencieusement les dernières marches. Chaque pas semblait plus lourd que le précédent, l'écho de ses pas résonnant comme un rappel de son échec perçu.
Arrivée en bas, elle se tourna vers sa mère, sa posture rigide et ses yeux baissés. Elle se mit à marcher aux côtés de Cassandra, qui avançait d'un pas ferme et déterminé, déjà en colère. Isabelle pouvait sentir l'aura de frustration émaner de sa mère, mais elle savait qu'elle devait rester stoïque et silencieuse. Mais, les deux femmes, se dirigeait ensemble vers le salon.
Pendant qu'elles marchaient en direction du salon, le silence pesant entre Cassandra et Isabelle était rompu seulement par le claquement des talons de Cassandra sur le sol marbré. La lumière du matin qui filtrait par les grandes fenêtres n'adoucissait en rien la tension palpable dans l'air. Isabelle, malgré ses efforts pour maintenir une apparence calme, sentait son sourire s'effacer sous le poids des critiques incessantes de sa mère.
Cassandra, d'un regard perçant, nota immédiatement ce changement. Sans ralentir son pas, elle tourna la tête vers Isabelle, ses yeux se plissant de mécontentement.
- Le sourire, Isabelle, le sourire est très important pour être une demoiselle parfaite ! gronda-t-elle, sa voix cinglante. Vous me faites honte...Comment espères-tu un jour ressembler à ta grande sœur Safa si tu continues d'être aussi inutile ?murmura-t-elle d'un air dégoûté, en jetant un regard noir à sa fille.
La dureté des mots frappa Isabelle comme un coup physique. Elle baissa légèrement la tête, ses pensées tourbillonnant entre la tristesse et la résignation. Mais Cassandra ne s'arrêta pas là. Elle se planta devant Isabelle, saisissant brusquement son visage entre ses mains. Ses doigts serrés sur les joues d'Isabelle, elle força un sourire artificiel sur le visage de sa fille. Isabelle sentit les larmes monter, la douleur et l'humiliation se mêlant dans ses yeux, mais elle savait que céder ne ferait qu'aggraver les choses.
Elle se força à sourire, malgré la douleur, espérant apaiser la colère de sa mère. Cassandra, satisfaite de voir un sourire, même forcé, sur le visage d'Isabelle, relâcha sa prise. Isabelle relâcha un léger souffle de soulagement, mais le répit fut de courte durée.
D'un mouvement brusque, Cassandra redressa les épaules d'Isabelle, forçant son dos à se tenir droit.
- Tenez-vous droite ! murmura-t-elle d'une voix glaciale à l'oreille de sa fille. Aucun homme ne voudra d'une jeune fille naïve et incapable.
Les mots furent comme une lame froide se frayant un chemin dans le cœur d'Isabelle. Elle redressa son dos, ressentant la tension dans chaque muscle alors qu'elle luttait pour maintenir la posture imposée par sa mère. Les larmes menaçaient toujours de couler, mais elle les retint avec une force de volonté désespérée.
Cassandra, après avoir ajusté la posture de sa fille à sa satisfaction, se détourna et continua vers le salon, ne jetant qu'un regard en arrière pour s'assurer qu'Isabelle la suivait correctement. Isabelle, le sourire forcé toujours figé sur son visage, se hâta de suivre, ses pas mesurés et sa démarche contrainte par le poids des attentes de sa mère.
Isabelle avançait d'un pas mesuré aux côtés de sa mère, le sourire forcé toujours figé sur son visage. Chaque mouvement était calculé, chaque geste réprimé par les attentes imposées par Cassandra. Cependant, derrière cette façade de perfection imposée, l'esprit d'Isabelle bouillonnait de confusion et de frustration.
Depuis ses onze ans, sa vie avait pris un tournant drastique. Les cours de couture, de maintien, de danse, et de bonnes manières s'étaient intensifiés, devenant une part incessante de son quotidien. Isabelle ne comprenait toujours pas pourquoi sa mère était devenue si rigide, si impitoyable dans son obsession de faire d'elle une demoiselle parfaite pour la société. Les critiques étaient devenues plus fréquentes, les punitions plus sévères. Chaque imperfection, chaque faux pas était corrigé avec une froideur implacable.
Son père, autrefois une figure réconfortante malgré son absence fréquente, semblait désormais complètement effacé de sa vie. Il n'était jamais là pour elle, toujours pris par des affaires ou des voyages dont elle ne connaissait ni le but ni l'importance. Isabelle se souvenait vaguement de moments où il lui souriait avec tendresse, mais ces souvenirs étaient de plus en plus lointains, éclipsés par la réalité austère imposée par Cassandra.
Et puis, il y avait Safa, sa grande sœur. Safa avait toujours été son modèle, son refuge dans les moments difficiles. Mais même cette relation semblait s'effilocher. Depuis leur promesse de toujours se soutenir, Isabelle avait écrit à Safa à plusieurs reprises. Chaque lettre était un appel à l'aide déguisé en nouvelles innocentes, une tentative désespérée de demander à sa sœur d'intervenir, de parler à leur mère et de l'aider à se calmer.
Les lettres restaient sans réponse.
Isabelle se rappelait encore de sa dernière lettre, écrite avec soin et imbibée d'espoir :
Chère Safa, mère est de plus en plus stricte et sévère. Je ne comprends pas pourquoi ? Pourriez-vous parler avec elle ? Peut-être que vous, vous pourrez la faire revenir à la raison. Je vous attends avec impatience !
Avec tout mon amour, Isabelle.
Le silence de Safa en réponse à ses appels laissait Isabelle désemparée. Chaque jour, elle espérait recevoir une réponse, une lueur d'espoir dans la forme d'un mot gentil de sa sœur. Mais les semaines et les mois passaient sans aucune nouvelle, ajoutant à son sentiment d'abandon et de désespoir.
Isabelle se demandait si Safa recevait ses lettres, si elle les lisait, ou si elles se perdaient dans le flot incessant de la vie. Peut-être que Safa était aussi impuissante qu'elle face à la volonté inflexible de Cassandra. Cette pensée la faisait frémir, mais elle refusait de la laisser prendre racine. Elle devait croire que sa sœur finirait par venir à son aide, qu'elle n'était pas seule dans cette épreuve.
Perdue dans ses pensées, Isabelle suivait machinalement sa mère, son esprit alourdi par ces questions sans réponse et ces espoirs déçus. En arrivant dans le salon, elle reprit son masque de perfection, cachant ses doutes et ses peines derrière une façade de grâce et de conformité, comme elle l'avait appris à faire chaque jour depuis si longtemps.
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