Chapitre 30


Estéban Morales.

Les minutes s'égrènent et je suis planté là, les yeux rivés sur l'entrée comme un imbécile. Maryline s'approche; sa main se pose en une caresse légère sur mon épaule, accompagnée de quelques mots visant à me rassurer :

— Elle va venir. Laissez-lui encore un peu de temps, Estéban.

Son sourire trahit une certaine tension. Je me demande si elle est elle-même persuadée de ses propres paroles ou si elle se force à jouer ce rôle d'experte en matière d'amour.

Thomas m'a affirmé qu'il était à ses côtés lorsque le message a été délivré, qu'elle l'a bien reçu. Alors, qu'est-ce qui la retient ?

Mon cœur, déjà tendu comme la corde d'un arc, se serre un peu plus face à cette réalité amère qui prend forme : Juliette ne viendra pas. Elle a choisi de me laisser là, dans l'attente, dans l'incertitude. Elle a décidé de refermer la porte sur ce que nous étions.

J'attrape ma veste, précédemment posée sur le dossier de ma chaise, et amorce un premier pas vers la sortie. Si Juliette a choisi de ne plus faire partie de ma vie, si elle m'a rayé de son horizon, alors je respecterai son choix, aussi douloureux soit-il.

— Nous allons prendre le large ! crie le commandant du bateau parisien.

Oui, LoveScience ne lésine pas sur les moyens. La soirée de rencontre se déroule sur un restaurant flottant. Le programme est luxueux : balade romantique sur la Seine, dîner gastronomique avec une vue imprenable sur la Tour Eiffel, le tout couronné par un coucher de soleil à couper le souffle, instant que j'aurais aimé partager avec Juliette.

Je fais signe à Maryline, lui annonce que je vais descendre, mais jette néanmoins un dernier coup d'œil à tous les couples que la société a rassemblés.

Ils semblent tous ravis, heureux de se rencontrer. Certains sont déjà en train de s'embrasser, d'autres se découvrent timidement.

— Je suis sincèrement désolée pour vous Estéban, grimace la directrice. Pourtant elle...

— Ne vous en faites pas. J'ai merdé, j'assume.

Maryline sait tout. Je lui ai téléphoné dès mon retour à Paris et lui ai tout expliqué.

— Votre histoire est atypique, mais lorsque le destin permet à deux personnes de se croiser à nouveau, c'est pour une raison. Ayez foi!

— Juliette ne doit pas être de votre avis.

— Juliette manque de confiance en elle. Elle reviendra vers vous. N'en doutez pas.

Elle regarde sa montre, puis jette un œil à l'extérieur comme si elle attendait quelqu'un elle aussi.

— Au revoir, dis-je.

— Attendez !

Puis elle murmure quelque chose que je ne pense pas être autorisé à entendre :

— Où est-elle...?

Elle avance avec assurance vers le capitaine.

— Pourriez-vous patienter encore cinq petites minutes ?

— Oh là là ! Ma petite dame, on va être en retard, le coucher du soleil n'attend pas, lui, râle l'homme à la barbe blanche.

— Deux minutes, ça vous va ? Et en guise de remerciement, je vous offre un verre.

Marilyne ne lâche pas prise, l'homme cède en affichant un sourire gêné - je pense que l'idée d'un verre lui plaît - tandis que je me questionne sur l'utilité de cette attente. Cependant, mes pensées s'effacent lorsque la silhouette boiteuse de Juliette se dessine à l'entrée.

Juliette.
Waouh.

La jolie brune est vêtue d'une robe rouge qui mélange sensualité et élégance. Son vêtement, qui dénude subtilement ses épaules, arbore un décolleté plongeant qui met en lumière sa poitrine. Ses jambes sont cachées par le tissu, mais l'échancrure dévoile son plâtre décoré par un tas de petits dessins colorés, comme ceux des écoliers.

Son regard se pose sur moi, captivant le mien, tandis qu'elle avance en s'appuyant sur ses béquilles qui rythment chacun de ses pas.

— Tu es venue, soupiré-je.

Ma voix tremblante trahit mon émotion. Mais Juliette reste silencieuse. Elle pose son sac à main sur une table, l'ouvre en se tenant en équilibre et en sort une feuille pliée qu'elle me tend.

— C'est quoi ?

— Ouvre ! râle-t-elle, autoritaire.

Un sourire se dessine.
Je m'attèle au dépliage de la feuille et mes yeux tombent sur un chiffre imposant inscrit en première page.

— 81 %, lis-je.

— Estéban.

Je grimace à ce nom. Ouais, c'est le mien. Mais dans sa bouche, il sonne comme un reproche, vu qu'elle m'a toujours appelé par mon nom de famille.

— J'ai refait le test, ajoute-t-elle.

— Jul...

— Laisse-moi parler.

Je lève les mains en signe de reddition, fais mine de verrouiller mes lèvres à l'aide d'une clé imaginaire que je jette négligemment de côté. Un petit rire s'échappe avant qu'elle ne reprenne ses explications.

— J'ai refait les tests à la demande de Maryline. Avec sincérité... Je me suis posée et j'ai répondu, non pas en imaginant les hommes que l'on peut croiser dans des films, mais bien avec ce qui m'attire et je vais te dire une chose, Estéban !

Elle inspire profondément, cherche le courage pour sortir ce qu'elle a sur le cœur.

— J'ai réalisé que j'aimais les instants que nous avons passés ensemble...

Elle rigole avec nervosité.

— Et donc... 81%, c'est bien ce que je crois ?

Juliette se tourne vers Maryline qui lui fait un clin d'œil complice.

— Elle a repassé nos réponses dans l'ordinateur ce matin.

Un soupir de soulagement m'assaille.

— Et donc, maintenant... si nous étions dans un film, tu m'embrasserais, lâche-t-elle avec assurance.

— Je n'ai pas besoin qu'un metteur en scène me dise quoi faire. C'est dans le script depuis que tu as passé cette porte !

Nous rigolons tous les deux, mais je ne résiste pas longtemps avant de poser ma bouche sur la sienne. Juliette accueille mon baiser et mordille ma lèvre inférieure. Sa langue rejoint la mienne pour se nouer, se caresser, se toucher. J'aime son goût, sa douceur. Mes bras viennent s'enrouler autour de ses hanches, les siens autour de ma nuque.

C'est bon.
C'est agréable.
C'est vivifiant.

Tout ce qui nous entoure s'efface pour ne laisser que l'explosion de nos sentiments. Le passé s'estompe, le présent se savoure et le futur s'illumine.

***

L'urgence a fait que nous nous sommes arrêtés dans un bel hôtel juste en face du bateau sur lequel nous avons mangé. Le repas était affreux, pas le dans le sens de mauvais, au contraire, mais surtout interminable. Juliette caressait sensuellement ma main, tout en me fixant avec un regard qui en disait long sur ce qui m'attendait. Si seulement ce n'était pas notre première fois! Je l'aurais guidée jusqu'aux luxueuses toilettes du bateau et lui aurait donné du plaisir avant d'en prendre à mon tour. Mais c'était impossible.

Elle mérite mieux.

Du coup, nous voilà, dans cette chambre que je me suis empressé de réserver. J'ai spécifié romantique et, franchement, ils ont géré.

Heureusement l'hôtel n'était pas complet et, d'ici, on a une belle vue sur Montmartre : je peux presque entendre les violons jouer en arrière-plan. Est-ce que ça a fait un trou béant dans mon porte-monnaie ? Oh, tu imagines bien! Mais quand on parle de Juliette, on sait tous que c'est justifié, n'est-ce pas ?

Je jette un œil à l'extérieur et je me demande si les gens en bas ont autant de chance que moi.

— Tu veux boire quelque chose ?

Je ne veux pas paraître trop impatient.

Juliette rigole.

— Non, je veux que tu me retires cette robe. Tout. De. Suite.

Mon cerveau est en mode pause.

— D'accord princesse, vos désirs sont des ordres. 

🧪  ❤️🧪  ❤️🧪  ❤️🧪  ❤️🧪  ❤️

Note de l'auteure : 

Ce chapitre est court (non non ! ne me tuez pas, surtout si vous voulez la suite...)
Effectivement, ce qui arrive après a demandé beaucoup, beaucoup, beaucoup de mots ( de ventilation, de clim et de glaçons - Oh oui ! ).
Par conséquent, je devais couper en deux et puis franchement, je sais que vous aimez mon sadisme, sinon vous ne seriez pas là 
😜 .

Rendez-vous donc mardi pour la suite mais surtout, préparez-vous à les quitter car il ne reste que 4 chapitres ( Chapitre 31 - Epilogue 1 - Epilogue 2 - Scène Bonus ).

Bonne journée.

Love.
Kate.

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