Chapitre 7


Le lendemain à quatorze heures, on sonna à la porte des Stilinski et c'est un Noah épuisé qui ouvrit à Jackson Whittemore – frais et pimpant, comme à son habitude. Le shérif afficha un air étonné : si le kanima lui avait été une grande aide le jour précédent, il n'imaginait pas le revoir aussi vite. Il n'en fut toutefois pas moins heureux et un sourire soulagé apparu sur son visage fatigué. Qu'importe la manière dont il se montrait, il salua chaleureusement Jackson et le fit rentrer à l'intérieur de son humble demeure. Les deux hommes eurent une conversation d'usage et le kanima ne put s'empêcher de noter l'état du shérif, qui le lui expliqua simplement.

Stiles avait été difficile à gérer et ce, toute la nuit. S'il s'était rendormi depuis peu, ce n'était pas le cas du shérif qui restait debout, juste au cas-où l'hyperactif aurait besoin de quelque chose.

Jackson apprit ainsi que Stiles s'était vaguement plaint de douleurs – sans être capable de dire où elles se situaient –, qu'il n'avait cessé d'alterner entre le chaud et le froid, qu'il n'avait pas arrêté de faire des cauchemars, et eu une grosse crise de panique. Lorsque Noah lui avait doucement demandé ce qui l'avait angoissé, Stiles n'avait su lui répondre. Il avait été incapable de savoir la raison pour laquelle il s'était ainsi perdu dans son angoisse. De son côté, Noah avait reçu dans la matinée les résultats des examens sanguins de son fils. Des résultats que le shérif n'hésita pas à partager à Jackson.

Le kanima eut beau faire comme si la chose l'indifférait, elle le glaça pourtant de l'intérieur. Le document indiquait une utilisation récente et récurrente de la drogue, qui avait été identifiée. Un dérivé du GHB. Alors même si au fond de lui, il s'en doutait un peu, Jackson ne put maintenir plus longtemps son masque de convenance. Noah lui tapota gentiment le dos tout en essayant, parce qu'il le devait, de tenir le coup. La nouvelle, lorsqu'il l'avait apprise, l'avait cloué sur place un moment. Aussi ne fut-il pas surpris lorsque Jackson demanda expressément s'il pouvait monter voir Stiles. Avec un sourire empli d'une souffrance indicible, Noah le lui accorda.

Lorsque Jackson disparut de son champ de vision, le shérif laissa tomber les apparences et partit se servir un verre de whisky.

Le blond monta les marches quatre à quatre, sans se soucier de l'air que ça lui donnait. Une chose était certaine : il était en colère. Pas contre Stiles, pour qui il s'inquiétait sincèrement malgré leurs nombreuses mésententes. Plutôt contre celui qui lui voulait du mal et qui lui en avait peut-être déjà fait. Jackson se savait con sur certains points. Mais pas sur celui-ci. Qu'importe le fait qu'ils ne soient pas vraiment amis : ils faisaient partie de la même meute et Jackson se sentait quelque peu obligé de se soucier de lui.

Alors forcément, lorsqu'il ouvrit la porte de la chambre de Stiles et qu'il trouva celui-ci endormi, il enragea davantage. Parce que l'hyperactif n'avait en cet instant d'hyperactif que le nom. Il était immobile, les traits tendus malgré lui et le teint si blanc, si anormalement clair que Jackson peina à le reconnaître. Il ne l'avait pas vu depuis la veille, mais... Les changements qu'il notait étaient flagrants. Effarants. Affolants.

Mais ce n'est pas ce qui retint le plus son attention.

Son nez le titillait. De loin. De très loin. A vrai dire, Jackson était incapable de dire ce qui le dérangeait à cet instant. La chose ne lui paraissait même pas tangible. Mais il se sentait... Il y avait quelque chose qui faisait grogner son loup intérieur et ça, il ne pouvait pas le nier. Le kanima faisait partie du monde surnaturel depuis assez longtemps pour savoir que ce genre de sentiments instinctifs n'était pas à prendre à la légère.

Jackson s'approcha et s'installa tout naturellement au bord du lit. La manière dont il regarda Stiles devint étrange. Parce qu'ainsi près de lui, il sentait autre chose. A l'intérieur de sa tête, une sonnette d'alarme retentissait. Il devait faire attention, mais à quoi ? Jackson hésita. Il aimerait bien avoir plus d'informations, vérifier... La situation le gêna. Sauf qu'il n'avait pas le choix. Il fallait qu'il sache, qu'il découvre pourquoi son instinct s'alarmait autant. Il se pencha. Se concentra sur son odorat.

Et commença à capter une fragrance qui ne devrait pas être là. Ou en tout cas pas de manière aussi poussée. En fait, sa présence lui paraissait si incongrue que Jackson eut du mal à se prendre lui-même au sérieux. Il fronça les sourcils. Se rapprocha, encore. Là, l'odeur se fit plus nette et Jackson put l'identifier avec précision. Oui mais... Ce n'était pas logique. Pourquoi le cou de Stiles sentait Scott ? D'autres parties du corps telles que les mains ou les cheveux de Stiles l'auraient moins étonné. N'auraient pas suscité la moindre interrogation chez lui. Mais le cou ? Une autre remarque lui vint à l'esprit. Une remarque étayée par une chose que Derek lui avait apprise il y a un moment déjà.

Une odeur, c'était quelque chose de très volatile. De fugace. Quelque chose de léger qui disparaissait rapidement. Une fragrance qui ne s'imposait pas... A moins d'être appliquée à répétition ou de manière poussée. C'était pour cette raison qu'il sentait autrefois toujours Boyd sur Erica et inversement. L'odeur de l'un s'était ancrée dans la peau de l'autre, et... Jackson se figea, interdit.

L'idée qui venait de pop dans son esprit était étrange, saugrenue... Impensable. Et pourtant, c'était la seule chose qui pourrait, à ses yeux, expliquer ce qu'il sentait. Ce qui le perturbait davantage, c'était d'avoir l'impression grandissante de sentir l'odeur de Scott partout. Elle semblait même émaner du lit. Et ça, ce n'était pas une chose à laquelle Jackson s'attendait. En fait, c'était carrément stupide pour lui d'imaginer ça, sauf que... Eh bien, s'il n'imaginait pas ? Le kanima trouvait cette histoire définitivement trop louche pour écarter ce que son instinct imposait comme une évidence. Une évidence invraisemblable, mais une évidence tout de même. Alors même si ça le gênait et qu'il avait peur que Stiles se réveille à ce moment-là, Jackson repoussa les draps, les descendit suffisamment pour mener son inspection à bien. Normalement, il n'était pas du genre à fourrer son nez dans des affaires qui ne le regardaient pas, mais... Stiles était un membre de la meute et on l'avait drogué. Jackson passa donc outre et se rapprocha.

L'horreur se peignit instantanément sur son visage au fur et à mesure qu'il sentait l'odeur bien connue de Scott aller jusqu'à ses narines. Elle émanait littéralement du lit et du corps de Stiles. Sans s'approcher à outrance du jeune homme en pyjama, il la sentait. Partout sur lui. Pire que ça : Jackson crut déceler une autre fragrance et avisa une petite parcelle de drap qui semblait très légèrement humide... Au niveau de la taille de l'hyperactif. Ou un peu en-dessous. Mais pas vraiment là. Jackson étendit ses sens à leur maximum pour ne pas avoir à se rapprocher encore – il y avait des limites à son inspection.


Et c'est là qu'il la sentit, cette odeur si particulière et quelque peu étiolée qui alarma davantage son loup-intérieur. Cette odeur, qui sembla tout connecter, expliquer pourquoi la fragrance de Scott était là. Emanait du corps de Stiles, mais aussi du lit. Des draps. Désarçonné, Jackson mit un peu de temps avant de bouger, d'agir. La drogue se rappela soudain à son bon souvenir. Il espérait ne pas avoir compris, que ces éléments qu'il avait reliés par instinct ne voulaient pas dire qu'il imaginait déjà. Il remit correctement les draps sur l'hyperactif toujours endormi et sortit précipitamment de la chambre. Le cœur battant, il descendit les escaliers, faillit rater des marches.

C'est ainsi qu'il débarqua en trombes dans le salon, où se trouvait le shérif, un verre de whisky à moitié vide à la main. Shérif, qui haussa un sourcil, perplexe de voir Jackson arriver ainsi, le visage aussi pâle. Aussi blanc. Les traits figés par une horreur qu'il ne lui avait jamais vue. D'ordinaire, Jackson brillait par ses expressions allant de l'arrogance à la suffisance. Celle qu'il arborait frôlait la panique.

- Qu'est-ce qui t'arrive, Jackson ? S'enquit Noah en déposant son verre sur la table basse.

Jackson resta un moment interdit, exsangue, avant de se laisser tomber sur un fauteuil sans demander une quelconque permission au maître des lieux. A l'heure actuelle, il était trop abasourdi et choqué pour faire cas des convenances. Au bout de quelques secondes, le kanima se racla nerveusement la gorge et demanda ceci :

- Est-ce que... Quelqu'un, à part moi, est venu rendre visite à Stiles ?

- Oui, Scott est venu hier, après les cours, répondit le shérif en fronçant légèrement les sourcils.

A vrai dire, il ne voyait pas pourquoi Jackson posait la question. Quelle importance ? Noah était d'ailleurs heureux d'avoir vu le latino présent pour son fils. En un sens, voir Jackson le ravissait également : Stiles avait des amis sur qui il pouvait compter. Des amis qui s'inquiétaient sincèrement pour lui. Il savait fort bien que cela n'avait pas toujours été le cas. En fait, Stiles avait passé la majorité de son temps seul, ou presque. Ou son hyperactivité effrayait, ou elle agaçait. Puis, Scott était arrivé dans sa vie. Ce n'était que bien plus tard, au lycée, que son cercle d'ami s'était agrandi et diversifié. C'était là qu'il avait forgé des amitiés bien plus invraisemblable et importantes qu'il n'aurait pu l'imaginer.

Mais l'annonce de Noah sembla écraser Jackson qui comprit que, quelque part, ses observations ne tenaient absolument pas du hasard. Son visage se décomposa davantage.

- Jackson ? S'inquiéta le shérif.

Si l'interpelé hésita ? Pas le moins du monde : il savait son odorat lupin infaillible.

xxx

Ce n'était pas que Noah ne croyait pas Jackson. Pas vraiment. En fait, il lui semblait plus invraisemblable qu'autre chose que Scott ait potentiellement fait du mal à son fils. Parce qu'il le connaissait... Presque depuis tout petit et Scott... Était un jeune homme qui avait toujours été charmant avec lui et adorable avec Stiles. Ces deux-là ne se quittaient plus depuis qu'ils s'étaient rencontrés à l'école primaire.

Alors forcément, l'imaginer droguer son fils avait de quoi être surprenant et particulièrement difficile à croire.

Néanmoins, Noah n'était pas complètement fermé à cette idée, tout simplement parce que Jackson n'était pas du genre à mentir. Du moins, pas pour une chose aussi grave que celle qu'il avait vaguement énoncée.

Jackson lui avait expliqué le principe des odeurs et surtout, les différentes raisons qui pouvaient les faire durer. Apparemment, Stiles puait Scott. Son lit puait Scott. Ses draps puaient Scott. Et ça, c'était plus qu'anormal. Et encore, Jackson avait gardé une information pour lui, histoire d'y aller doucement. Parce qu'il y avait bien une raison pour laquelle l'odeur de l'alpha restait ancrée dans les draps – quoiqu'elle s'effaçait doucement. De toute manière, Jackson n'était pas sûr que Noah soit prêt à entendre ça. Lui-même avait la nausée.

Oui mais voilà, le shérif restait quand même sceptique. Avec son odorat d'humain, il ne pouvait pas vérifier les dires de Jackson, dont il ne pouvait toutefois pas douter de la détresse tant elle était visible. Disons que le kanima avait bien du mal à rester de marbre face à la situation de Stiles et à ces odeurs qu'il avait découvertes. En cela, Noah le croyait. Maintenant, il avait besoin d'une confirmation.

Et pour cela, le shérif et le lycéen s'étaient mis d'accord.

Appeler un loup, et pas n'importe lequel.

Isaac leur avait convenu à tous les deux : Noah l'aimait bien et Jackson savait qu'il n'était pas plus lié à Scott que cela. Il l'aimait bien, mais sans lui apporter une loyauté aveugle comme le faisait Liam, trop récemment mordu pour être complètement indépendant moralement. Derek ? Cela avait été leur choix premier. Toutefois, il était injoignable pour le moment. Il avait un téléphone, oui, sauf qu'il avait très souvent tendance à oublier la notion de « portable » et le laissait donc chez lui, comme s'il ne pouvait pas le transporter.

Alors, Jackson téléphona à Isaac, le sommant, même s'ils n'étaient pas extrêmement proches, de venir à la maison des Stilinski. Son ton dut alarmer Isaac puisqu'au lieu de rechigner comme il en avait l'habitude, le bouclé raccrocha sans un mot.

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