Chapitre 14
Jackson n'arrivait pas à y croire. Il se savait inquiet pour Stiles – à raison et n'arrivait pas à simplement ignorer son existence. Pourtant, il le pouvait, étant donné qu'il était sous bonne garde. D'ailleurs à cette heure-ci, Isaac avait dû passer le flambeau à Derek. Néanmoins, Jackson ne pouvait tout simplement pas se résoudre à passer son chemin. D'une manière ou d'une autre, il avait besoin... Besoin de s'assurer lui-même que Stiles allait bien. Pas forcément de le voir. L'entendre respirer, percevoir les battements plus ou moins réguliers de son cœur... Et sentir une odeur un peu moins chimique et dépourvue de toute émotion malheureuse. Rien de plus.
Jackson sonna à la maison des Stilinski avant même de se rendre compte qu'il était arrivé. Voir et sentir le regard acier de Noah se fixer sur sa personne le sortit de sa torpeur efficacement. Il était glacial, affuté comme une lame. Le gentil shérif était parti en vacances, laissant la place au père détruit par le mal fait à son fils.
Et Jackson se sentit extrêmement mal à l'aise alors qu'il n'avait rien fait. Il voulut soudainement se faire tout petit, clamer une innocence qu'il n'avait même pas besoin de prouver, ou même de rebrousser chemin... Tout pour éviter de faire face à ce regard si douloureux à croiser.
- Bonjour Jackson.
La voix de Noah n'était pas foncièrement froide. Elle comportait des accents de douleur et... Une forme de soulagement à peine perceptible. Qu'on le croie ou non, le shérif n'était pas réellement mécontent de revoir le jeune Whittemore sonner à sa porte.
Encore moins de le voir aussi peu à l'aise en sa présence. Il se montrait transparent, naturel dans son inconfort.
Pour Noah, c'était là un comportement qu'il attendait et qu'il avait besoin de voir pour se persuader du bienfondé de sa décision. Faire confiance à trois loups-garous pour protéger son fils... Relevait de l'inédit pour lui, d'autant plus que le responsable de toute cette histoire... Était un autre lycanthrope. Le plus proche de la famille.
Noah n'avait même plus envie de prononcer le nom de Scott McCall. Il le dégoûtait, jusqu'au son de son patronyme.
- Bonjour shérif, articula le kanima, la bouche sèche.
Il s'efforça de relever les yeux dans sa direction, d'affronter son regard même si celui-ci continuait de le mettre mal à l'aise.
Noah envisagea un instant de le faire languir en se montrant cassant mais il se rendit vite compte que cela ne mènerait absolument à rien. Jackson n'avait rien fait, alors l'homme de loi ne devait pas le faire payer pour son humeur massacrante. Il s'était fait la même réflexion concernant Isaac et Derek, lesquels ne cachaient pas non plus complètement leur crainte en sa présence. Tant mieux, songea Noah. Il ne comptait pas se faire marcher dessus, pas même s'il n'était rien de plus qu'un humain.
Pour protéger et venger son fils, il pouvait se transformer, lui aussi. Devenir bien pire qu'une bête sauvage. Que l'on ne sous-estime pas la puissance de la rage d'un père en colère.
- Entre, finit-il plutôt par lâcher.
Jackson ne se fit pas prier. Il eut alors la surprise de croiser Derek dans le salon. Confortablement installé sur l'un des fauteuils en similicuir, l'ancien alpha buvait un café que Noah avait dû lui offrir.
- Café ? Proposa directement le shérif.
S'il n'est pas empoisonné, oui, faillit répondre le kanima qui se contenta d'un hochement de tête. Un peu de caféine ne lui ferait pas de mal, d'autant plus qu'il avait mal dormi et que ces derniers jours avaient été quelque peu... Difficiles à vivre. Harassants. Epuisants émotionnellement parlant. Evidemment, Jackson savait fort bien que ce n'était rien à côté de ce que devait ressentir le shérif : ses cernes, à eux seuls, témoignaient de bien des choses. Noah Stilinski ne devait pas beaucoup dormir, lui non plus.
- Assieds-toi.
Jackson s'exécuta tout de suite et prit place face à Derek, lequel le salua d'un simple signe de tête. Voyant que le kanima gardait le silence – ou plutôt qu'il ne savait que dire –, l'ancien alpha poussa un soupir et brisa la glace :
- Qu'est-ce que tu fais là ?
Si Derek ne semblait pas parfaitement à son aise – des raisons à cela, il en avait –, sa voix restait calme, posée et son ton ne changeait pas par rapport à l'habitude. Rien à voir avec celui qu'il avait lorsque Jackson lui avait révélé l'innommable. Était-il encore perturbé ? Probablement, mais Derek était un homme de sang froid qui avait besoin de garder le contrôle sur lui-même pour continuer de mener sa barque correctement. C'était d'autant plus nécessaire s'il devait veiller sur Stiles – et Jackson songea au fait qu'il devrait en prendre de la graine.
- Je suis venu voir si tout allait bien, répondit le kanima.
Mais le regard de Derek changea légèrement – une forme de soupçon y naquit et Jackson se rendit compte que sa phrase sonnait un peu faux, même s'il pensait sincèrement ce qu'il disait... Au départ du moins.
- En fait, je ne sais pas, avoua-t-il. Je pense que je suis venu pour ça, mais au fond... Je ne sais pas si c'est vraiment ça.
- Tu es perdu, résuma simplement Derek.
Jackson haussa les épaules même si son aîné avait raison. Il avait des choses à faire, du repos à prendre... Et il était là pour une raison incertaine.
- Ce que je pense, c'est que tu as besoin de compagnie, d'être rassuré.
La façon dont le kanima se contenta d'écouter l'ancien alpha était très parlante quant à ce fait : il ne s'offusquait pas, ne se battait pas pour lui prouver qu'il avait tort et ne cherchait pas non plus à se justifier. Son ego ? Au placard, et pour un moment. Au diable sa fierté et tout ce qui en découlait : Jackson n'arrivait pas à faire le fort, c'était au-dessus de ses forces.
- Personne ne peut te jeter la pierre, pas même moi, ajouta Derek en gardant une expression faciale fermée. Si j'avais été à ta place, si c'était moi qui avais découvert ça... J'essaierais sans doute de faire la même chose que toi.
Jackson hocha la tête. L'on disait de Derek qu'il n'était pas très doué avec les gens, qu'il maniait ses mots avec maladresse – et c'était très souvent le cas. Mais cette fois-ci, le blond donnait aisément torts aux détracteurs de son aîné car ses paroles lui faisaient du bien. Elles le rassuraient même si le ton de Derek lui paraissait aussi incisif qu'habituellement. Ses mots étaient des lames... Qui ne le coupaient pas.
- Il n'y a pas de mal à le reconnaître, lorsque quelque chose te dépasse. C'est une force que d'avouer ses faiblesses. Tu as souvent voulu les refouler, mais elles existent et cette fois... Tu les acceptes.
Derek posa sa tasse sur la table basse.
- Tu es jeune, toi et Stiles avez le même âge. N'oublie pas que tu ne peux pas minimiser l'impact émotionnel de chaque évènement que tu vis. Tu peux apprendre à le faire, mais c'est bien, parfois, de se laisser aller.
Jackson poussa un profond soupir et se prit la tête dans les mains. C'était dingue comme il n'arrivait pas à faire comme d'habitude, comme... Tout lui paraissait difficile depuis qu'il savait, qu'il avait eu le malheur de savoir. Quoique, s'agissait-il réellement d'un malheur à proprement parler ? Cette découverte avait ni plus ni moins dévoilé l'horreur pour mieux protéger la véritable victime de toute cette histoire : Stiles.
- Comment il va ? Demanda finalement Jackson.
Il s'agissait pour lui d'une question véritablement difficile à poser. Prendre des nouvelles d'autrui de façon aussi directe ne faisait pas partie de ses habitudes et... Encore moins lorsque cela concernait Stiles. C'était d'autant plus compliqué que cette question-là aurait pour réponse un euphémisme flagrant. A vrai dire, Jackson n'était plus si certain de vouloir l'entendre car au fond, il la connaissait.
Comment Stiles pourrait-il aller bien ?
Derek dut penser de la même façon que lui puisqu'il lui répondit ceci :
- Il n'a pas encore repris ses esprits. Il dort beaucoup et quand il se réveille, il n'est pas vraiment là. Ça viendra.
Jackson hocha la tête, sans trop savoir s'il devait se sentir soulagé ou non après cette annonce... Pas aussi rassurante qu'il l'aurait voulue. C'est d'ailleurs ce moment que choisit Noah pour revenir dans le séjour, une tasse de café dans la main. Il la tendit à Jackson, qui le remercia presque... Timidement. Il jeta un regard à celle, désormais vide, de Derek. Si ce dernier ne s'était pas effondré et n'avait pas vomi la moindre goutte de sang, c'était bon signe...
- Je monte, les informa le shérif. Faites-moi signe si vous avez besoin de quelque chose.
Si la proposition paraissait bienveillante, le ton glacial de Noah Stilinski lui donnait un tout autre air. L'on ne fit pas attention à son regard, qui aurait pu les aiguiller quant aux pensées et à l'état d'esprit de l'homme de loi à cet instant. Il y avait dans ses prunelles un petit quelque chose de singulier et d'un peu moins incisif.
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