👑 CHAPITRE 49 📱

Il y avait à présent un brin de vie au château et le silence habituel par moment entrecoupé par le sifflement du vent s'engouffrant fut dorénavant remplacé par des pas pressés, quelques fois des éclats de rire et d'autres fois des murmures. Je présume que ceci se rajoute à la longue des situations auxquelles je devrais m'ajuster même si je ne suis pas certaine d'apprécier réellement leur présence. En peu de temps, j'avais réussi à poser mes marques et à prendre mes habitudes, en outre, cet endroit n'est pas sûr pour eux. Il ne l'était déjà pas pour nous. Ce qu'il s'est passé l'autre nuit peut se reproduire et cette fois, il n'est pas question de me protéger en m'enfermant dans une pièce mais si ces gens restent ici, alors que croient-ils qu'il va se passer ? Pour mes aînés, ce ne sont là que des moutons rassembler dans un abattoir, des cibles faciles et privilégiées. Ils sauront en tirer profit. Cependant et contre toutes mes appréhensions, je dois bien admettre que le côté humain me manquait. Ma vie au Palais n'était pas différente que d'une vie de cloître, même si par moment je m'autorisais quelques petites sorties à droite à gauche, au nez et à la barbe des gardes ayant probablement plus peur des colères d'Ivory ou des insatisfactions de Byron plutôt que de la huitième princesse se promenant en plein centre-ville déguisée.

- Votre Altesse, Votre Altesse, Votre Altesse !

Une voix m'interpelle tandis que débarque devant moi, tel un boulet de canon, une jeune fille aux courts cheveux bruns. Je ne lui donnerais pas plus de deux ans de moins que moi. Sur son visage apparaît des tâches de poussières tandis que dans ses cheveux se sont collées de nombreuses, probablement trop nombreuses, toiles d'araignées. Où donc est-elle allée pour finir dans un tel état ?

- Qu'y a-t-il ? demandé-je inquiète de son état d'éssouflement.

- J'ai fini de nettoyer deux pièces !! s'exclame-t-elle alors en levant les bras en signe de victoire.

Suis-je supposé la féliciter ? La remercier ? Je n'ai jamais eu l'habitude de traiter avec les domestiques, mais je ne peux guère considérer ces gens venus prêter main forte comme étant des domestiques. Alors que suis-je supposée faire ?

- C'est bien... Je n'en demandais pas autant. Vous avez le droit de repartir également quand vous en aurez terminé pour la journée.

- Non, non, non ! Nous avons juré de vous servir et de vous aider ! Nous resterons. Vous nous avez sauvé Votre Altesse...A nous de vous rendre la pareille.

- Je ne pense pas que mon action soit à la hauteur de vos efforts.

- Bien sûr que si ! Vous savez au village, on ne parle plus que de vous. Robin dit d'ailleurs qu'il hâte que tout le monde voit ce qu'il a vu en vous.

Je ne suis pas certaine de vouloir être à la hauteur des espoirs de Robin.

- Quel est ton prénom, dis-moi ?

- Nora.

- Dis-moi Nora, est-ce que tu voudrais me rendre un service ?

- Bien sûr ! Dites-moi tout et je m'exécute sur le champ.

Autant de dévouement dans la tâche m'effraie.

- Peux-tu empêcher toute personne arrivant par ici d'aller plus loin ? J'aimerais rester seule un instant.

- Oh...je vois. Vous devez être fatiguée avec tout ce que vous avez à faire. Je comprends ! Je garderais ce couloir précieusement !

- Je n'en demande pas autant, mais je te remercie.

Elle est si jeune et pourtant si pleine d'énergie tandis que j'ai l'impression d'avoir épuisé tout mon stock. Je suis épuisée. C'est un fait. Je vis au jour le jour et chacun me demande de redoubler d'effort. Je n'ai pas de grand plan de bataille ni même de grande idée générale. Tout ce que j'ai ou plutôt, tout ce qu'il me reste, c'est ma volonté de vouloir en finir avec le jeu, mais à ce stade-là, je sais que je finirais pas le prochain mois. Pas avec ce qui arrive. La peur de voir mes frères et soeurs utiliser leurs gages contre moi dans quelques jours, me monopolise l'esprit. Mes nuits ne sont que cauchemars ou mauvais rêves. Mes journées se passent dans l'appréhension.

Un tel comportement ne saurait durer davantage. Je perds en énergie et je ne sais plus quoi faire ou comment le faire. On me dit quoi être dans le futur, mais on ne m'a jamais dit qui être dés à présent. Je ne peux pas...plus être simpelment Magdalena, j'en ai douloureusement conscience.

Je m'enferme donc dans une de ces pièces et constate effectivement que «Nora» est passée par là. Tout semble soudainement plus propre et ordonné. Moins chaotique. Moins froid. Moins lugubre. Dos contre la porte, un soupire m'échappe tandis que je me dirige vers un fauteuil menaçant de céder sous mon poids à tout moment. Pendant un temps, j'ai redouté ce moment ou du moins devoir en arriver là, mais tout compte fait, je me rends compte que ce genre de chose est quasiment inévitable. J'aurais dû commencer par ça dès le départ au lieu de tergiverser ici et là en pensant qu'à moi seule, j'allais faire des miracles. Quelle idiotie. Y croire alors que je suis certainement la mieux placée pour savoir que ça n'existe pas et que dans la vie... nous n'avons rien sans rien.

Alors je dégaine mon téléphone, le pose sur la table basse devant moi et appuie sur la touche d'appel en espérant secrètement que de l'autre côté ça ne répondrait pas.

- Bureau des complaintes et des galères, j'écoute !

Trop tard. L'hologramme se forme progressivement devant moi tandis que ce dernier affiche un large sourire satisfait.

- Un appel que j'espérais ! Non...que j'attendais avec grande impatience ! Tu en as mis du temps petite soeur.

- Bonjour Cybele.

Il y a des démons sur ces terres et mes frères Cybele et Kybele en font parties. J'aurais aimé dire que leur entrain habituel ou que leur côté enjoué perpétuel représentent ce qu'ils sont, mais c'est faux. Cybele et Kybele sont des épines dans le pied et probablement les pires de leur espèce.

- M'appelles-tu pour me remercier de t'avoir donné un coup de main avec Isidora ?

- C'était ton oeuvre ? J'aurais plutôt misé sur Kybele.

- Disons que nous avons agit de concert, trouvant un intérêt plus ou moins...commun à nous débarasser d'elle. Nous avions prévu de le faire, mais tu nous as devancé avec brio.

- Cela n'avait rien d'un coup de maître, surtout en sachant que vous avez dû y mettre du vôtre pour terminer et enterrer cette affaire.

- Il est vrai que tu as été un peu vite dans la besogne, mais c'est de famille, non ? Se débarasser de façon expéditive d'un opposant, on sait tous le faire. Mais revenons-en à nos moutons.

- Tu sais pourquoi je t'appelle, n'est-ce pas ? Tu sais pourquoi toi et pas Kybele.

- Parce que c'est une tête dure et que tu espères passer par le coeur et non le cerveau ? C'est mignon comme démarche bien qu'un peu naïf. Avec tout ce que l'on dit à présent sur toi Magdalena, j'espérais un peu plus de sagesse.

- Il s'est toujours dit beaucoup de choses sur moi et je sais que tu le sais car vous n'y êtes pas spécialement étrangers tous les deux.

Il rit à gorge déployée tandis que je reste de marbre. La conversation peut paraître banale, mais avec Cybele, un rien pourrait faire basculer l'échange gâchant complètement et totalement ce que j'espérais obtenir de sa part.

- Tu sais, nous ne le disons peut-être pas Kybele et moi, mais Magdalena, tu es notre soeur que tu le veuilles ou non et que cela te plaises ou non. Apprends à faire avec. Le sang de la famille Boùrbon coule dans tes veines. Si ce n'était pas le cas, tu aurais déjà baissé les bras dès l'instant où ton pied a foulé Celestia. Mais ce n'est pas le cas et je devine à ton appel que tu espères obtenir quelque chose de moi. Je ne suis pas un idiot fini.

- Alors tu sais ce que je veux. La question qui demeure est : Est-ce que tu es prêt à me l'accorder ?

- Honnêtement ? Il faudrait être fou pour s'associer avec toi. Personne ne l'ignore, mais d'un autre côté et au vue de tes progrès fulgurants, il faudrait être idiot de t'ignorer. La folie est une chose que je peux tolérer tant je la fréquente quotidiennement, mais l'idiote ça...c'est une autre discussion.

- Tu as toujours été brillant Cybele, même sans Kybele...

- La flatterie ne marchera pas, petite soeur.

- J'ai toujours été honnête.

- Disons que je suis dans de bonnes dispositions et que je suis prêt à...collaborer. Qu'es-tu prête à faire pour moi en échange ?

- Tout ce que tu voudras.

- Ne dit pas ce genre de chose à la légère Magdalena, tu pourrais être ammenée à le regretter.

- Je suis tout à fait sérieuse. Aide-moi et je saurais te rendre la pareille le moment que tu voudras.

Vendre mon âme au diable n'est pas quelque chose qui m'enchante, mais le tableau des choix est à présent restreint et faire autrement n'est pas envisageable. Depuis le départ, j'avais compris que m'allier à l'un d'entre eux serait sans doute une judicieuse idée.

- Et si je veux quelque chose de bien précis ?

- Je te le donnerais.

- Même si nous parlons ici du Baron Decloff ?

J'eu un léger mouvement de recul tandis que je m'étonne du choix sur lequel il s'est arrêté.

- Voyons, n'as-tu pas dit que j'étais le plus intelligent ? Ou alors était-ce véritablement de la flatterie ? Tu crois que je ne saurais pas qui est cet homme concrètement ? Tu t'es assuré un magnifique gage de la part de père avant de commencer cette aventure. Malheureusement pour toi, cet homme m'intéresse tout autant, surtout en sachant que tu gâches son talent en n'en utilisant qu'un dixième.

- Je ne peux te donner Valerian.

- Très bien. J'aurais essayé, se résigne-t-il. Je te le prendrais quand tu perdras. Après tout, je doute qu'Ivory et Byron se tiennent tranquilles encore longtemps. Tu as suffisamment eu le temps de profiter de ta bulle de confort Magdalena, maintenant, il est temps d'éclater cette dernière.

- Peux-tu vraiment parler de confort en sachant ce qui se passe ici ?

- Oh crois-moi, je suis tout ça de très près car je suis intéressé par ton parcours... mais toi, tu es très loin d'imaginer ce qui t'attends.

- Parce que tu as acquis des dons de divinations entre temps ? Je n'étais pas au courant.

- Allons... tu sais très bien quel passe-temps est le mien. Mes yeux et mes oreilles sont partout sur ce jeu et son déroulement. Je sais des choses que tu ignores et dont tu ne te doutes même pas.

- Tu sais ce que l'on dit ? L'ignorance est parfois une bénédiction.

- Mais peux-tu te permettre de l'être ? Il va falloir commencer à envisager le futur si tu espères gagner.

- Je gagnerais.

- Houla ! Je te sens bien sûre de toi...

- C'est parce que je le suis.

Si je ne crois pas un minimum en moi, alors qui le fera ?

- Tu m'amuses beaucoup ! Pour la peine, je vais t'aider pendant un temps avant de constater, avec grand bonheur je l'espère, que le petit oiseau sait enfin voler de ses propres ailes sans se casser la figure dans le nid. Alors ? Qui veux-tu faire tomber en deuxième ?

- Tu sais ce que l'on dit ? Si tu ne veux pas que le serpent te mordre le premier, alors coupe lui la tête.

- Réfléchis bien, petite soeur... Tu pourrais entrer dans un combat qui te dépasses largement et sur tous les plans.

- C'est tout réfléchi. Je veux la tête de cette vipère la première.

Un sourire en coin, voilà tout ce à quoi j'ai le droit. Un simple sourire en coin en guise de signe.

- Très bien, alors maintenons-nous au travail et allons chercher la tête d'Ivory.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top