👑 CHAPITRE 46 📱
Pendant un temps, je suis restée simplement là, allongée de tout mon long à même l'herbe mouillée par la pluie de la veille. Je suis restée plongée dans mon silence en me demandant ce que je faisais de ma vie et si vraiment c'était là la direction que je souhaitais emprunter. Je n'en avais pas la moindre idée. A dire vrai, j'ai cessé de réfléchir il y a bien longtemps car à chaque fois, tout mes plans tombaient à l'eau. Je m'exécutais tel un automate en pensant fortement que demain serait un jour nouveau. Mais en réalité, «demain» est semblable en tout point à hier. Les jours se ressemblent et s'enchaînent sans que rien ne se passe ou du moins, rien de ce que j'espère. Les jours s'enchaînent et j'en ai maintenant oublié depuis combien de temps le jeu à commencer. D'ailleurs, je pourrais presque oublier celui-ci s'il n'y avait pas un drone suspendu au dessus de mon visage à quelques mètres en complète position statique. S'il me restait la force nécessaire, je lui aurais certainement lancer la plus lourde pierre possible afin de le casser, mais mes bras et mes jambes m'ont abandonnés. Ils ont cédés dans la préparation d'une bataille qui me dépasse et d'une guerre que je ne comprends toujours pas.
Au fond, est allongée là, une enfant qui ne saisit pas les règles de la cour des grands. N'y a-t-il pas possibilité d'être élu ? De mettre en place un autre système que celui-ci complètement aberrant et tordu ? Pourquoi faut-il que l'on se sacrifie, que l'on éparpille des petits bouts de soi pour s'attirer la sympathie de gens ayant pour seul passe-temps de nous cracher dessus ? Pourquoi devrait-on se plier en deux, se courber pour plaire à des idiots croyant tout ce qu'ils voient passer sur un écran ? Je ne veux pas de ça.
Je ne veux pas être la marionnette d'un peuple irréfléchi, imbu et immoral. Je vaux mieux que ça. En tant qu'être humain, je mérite mieux que ça.
Alors je reste bêtement allongée là sentant toute l'humidité et la fraîcheur imbiber mon dos tandis qu'un soupire m'échappe. Tout ça me paraît être un vaste programme et une énorme blague. Parfois, dans de rares moments j'arrive à oublier ne serait-ce que ces yeux qui nous surveillent constamment et d'autres fois, je me sens l'irrépressible besoin de les attirer à moi. Sur moi. C'est un comportement dès plus illogique et je peine réellement à me comprendre. Je ne sais pas ce que je veux ou du moins, je n'en suis pas tout à fait certaine. La fille sûre d'elle n'est qu'une farce pour plaire à ceux s'étant aventuré avec moi et ceux comptant sur moi, mais au fond, je ne suis même pas un dixième de cette fille-là. Je ne sais pas ce que je suis. Qui je suis.
Je me suis perdue dans le processus et plus le temps passe, plus des petits bouts de moi s'arrachent progressivement. Honnêtement, j'ai peur qu'à ce rythme-là, il ne reste plus grand chose de Magdalena. De moi. Je ne suis pas tout à fait certaine de ce que je deviens et si j'en apercevais le reflet, je ne suis pas non plus tout à fait certaine de le reconnaître. Qui suis-je ?
Les uns me disent rien attendre de moi tandis que les autres murmurent leurs désirs à mon oreille en espérant que je les écoutent. Mais parmi toutes ces voix que je perçois, pas une seule ne me paraît être rassurante quant à mon avenir.
On me dit que je vais mourir. On me dit également que j'aurais alors une longue et belle vie. On me dit que je ne suis rien ni personne. On me dit aussi que je serais reine. Tant de dualités, d'opposés que je ne sais gérer. De toute mon existence, aucune formation sur le sujet ne m'a été dispensée. Je ne sais pas quoi faire. Tantôt je me sens complètement démunie, tantôt je pourrais soulever des montagnes car j'ai un plan. Mais qu'est-ce qu'un plan si ce n'est un dessin, un gribouillis sans trop de sens ?
Ma vie elle-même est un plan. Je suis faite pour peut-être un jour régner, mais en attendant, je suis faite pour participer à cette course infernale qui n'intéresse aucun membre de la famille royale. Personne ne nous prendra en pitié. Personne n'interviendra pour y mettre fin car le Royaume de Nettivia tout entier repose sur cette tradition.
Le souverain doit être aimé du peuple. Il sera donc choisi en fonction de l'amour, bien que virtuel, de ce dernier. Telle est nôtre règle la plus sacrée.
Pendant un temps, je suis restée simplement là, allongée de tout mon long à même l'herbe mouillée, me demandant si j'aurais la force nécessaire pour me relever. Encore.
Et à ma plus grande surprise, je l'ai. J'ai mal aussi bien dans mon corps, que dans mon cœur. J'ai l'impression d'être progressivement rongée par un mal qui un jour, fera probablement de moi une personne que je ne suis pas, mais ai-je le choix ? Dans de telles circonstances, j'aurais sincèrement aimé l'avoir et me dire qu'un code de conduite, des bonnes volontés et une dose de détermination et d'entêtement feront l'affaire. Mais ce n'est pas le cas. Malheureusement, je ne le réalise que maintenant. Pour gagner le Ruler Game, il faut être une personne différente et multiple. Il faut se couper et se tordre dans tous les sens. Il faut plaire aux auditeurs, mais également survivre à ses frères et sœurs. Il faut être l'enfant, mais également la Princesse.
Il faut être tant de choses à la fois que cela m'en donne le vertige et que je ne suis pas certaine d'être en mesure de correspondre aux attentes de tout à chacun.
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