👑 CHAPITRE 40 📱

Nous avons gardé le silence pendant un temps. Probablement pris tous les deux par nos propres pensées et dieu seul sait qu'il y avait à faire avec ce qu'il se passait dans nos têtes respectives. Subitement, je me suis remise à penser à cette soirée, celle où, sans attendre mon reste, je lui ai tiré dessus. Sur l'instant, j'ai éprouvé une grande satisfaction à le faire et je ne saurais pas décrire quel réel sentiment ça m'a procuré. Peut-être que ça m'a juste prouvé que tout compte fait, j'étais prête à tout pour arriver à mes fins même à ça.

Nous avons gardé le silence pendant un temps, restant assis comme figé sur l'instant.

- Que faisons-nous maintenant ? lancé-je à haute voix sans réellement me rendre compte que cette pensée m'échappe

- Tout dépend : Que voulez-vous faire ?

Je veux me battre, mais je suis effrayée. Je veux tellement gagner que la défaite me terrifie. Je ne suis pas une idéaliste, ni une utopiste et je sais que les chances, les pronostiques ou bien le sort ne me sont pas favorables. Tous les augures sont contre moi et pourtant le défi me plaît et me séduit car je le sais de taille. Je ne ferais pas de merveilles, mais je peux faire de petites choses et marquer le coup. Comme je viens de le faire. Je peux attirer l'attention de ces dignitaires et autres nobles se vautrant à la cour au Palais. Je veux que le Roi, s'étant vanté de m'avoir faite comme il le désirait tant, se morde les doigts. Je veux que les sujets, mon peuple, comprenne à quel point ce système est pourri, gangrené par les désirs des plus puissants. Je veux mettre un coup de pied dans cette immense fourmilière qui ne demande qu'à chuter.

Je veux...

- Je veux être moi. Je veux être aussi bien la fille de quinze années portant avec elle ce constant sentiment d'insécurité et sachant qu'elle se fera manger d'un moment à l'autre, comme je veux être la princesse qui a l'impression qu'elle peut mettre le monde à ses pieds avec un peu de bonne volonté. Je veux que ces deux êtres coexistent sans forcément les voir se battre et être constamment tiraillée par ce que je dois faire dans mon devoir de future souveraine et par ce que je veux faire en tant que simple personne vivante.

- Alors reposez-vous plus souvent sur nous. Je vous l'ai déjà dit et me repaîtrais autant de fois qu'il le faut pour que vous m'entendiez, mais vous n'êtes pas seule. Il y a des personnes qui veulent votre bien et qui ne demandent qu'à vous aider dans votre tâche, et ce, malgré vos décisions précipitées et incroyablement dangereuses.

- Vous savez, que je n'ai pas pour habitude de compter sur qui que ce soit pour m'assister. Je ne veux pas...

- Paraître pour une assistée justement ? Comme nous sommes récemment devenus amis, je me permet de vous dire ceci : Ouvrez-vous. Vous avez le droit de vous tromper, le droit de demander, le droit de tomber, le droit de pleurer, le droit de questionner... Ce sont tous les droits qui vous sont propres en tant que personne, me souffle le Duc en attrapant mes mains dans les siennes

- Mais mes choix ne correspondent pas forcément à vos attentes, n'est-ce pas ? repris-je en me détachant de son emprise

- Certes, admets-il enfin en se raclant la gorge. Mais il en va de même pour moi. Je n'ai que vingt ans et pourtant, me voilà Duc, devant, par la conséquence du titre qui m'incombe, m'occuper d'un domaine si large que je passe toutes mes journées enfermé dans un bureau à m'occuper de papiers qui ne me plaisent guère. A vingt ans, on découvre le monde, on s'instruit, on s'émerveille, on tombe amoureux... A vingt ans, nous ne sommes pas censés être plongés dans un quelconque chaos sans être maître de son destin. Je veux choisir ce qui est le mieux pour moi, mais également pour les gens qui me sont chers comme...une amie par exemple.

Sa parole me fait véritablement chaud au cœur. Aujourd'hui plus que jamais j'ai ce besoin constant de me sentir rassurée, entourée, soutenue. Personne ne peut me guider ni même m'indiquer la marche à suivre, pour cela je dois me débrouiller seule, mais qu'importe le chemin que je choisis de suivre, j'espère ne pas le traverser seule. La solitude est certainement le fléau vous coûtant le plus. Elle vous ronge l'âme et vous détruit petit à petit.

- Cher Duc, êtes-vous en train de me dire que vous allez vous plier à mes décisions ? sourié-je surprise

- Non, un ami, chère Princesse, ce n'est pas ça. Un ami c'est quelqu'un qui est là pour vous relever quand vous tomberez alors dans le trou pour lequel il vous a prévenu auparavant et que vous n'avez pas écouté. Je ne suis pas le meilleur des hommes, c'est un fait avéré, mais j'estime être suffisamment loyal pour vous dire «non» quand il est nécessaire de le dire. Cela sera à vous et à votre jugement de m'écouter...de nous écouter quand vous estimerez que cela sera nécessaire.

Quelque part, il a des mots différents, mais je retrouve suspendus à ses lèvres, les mêmes paroles que celles prononcées par Valerian précédemment. Je présume que c'est un travail que je vais devoir faire : apprendre à écouter. Apprendre à distinguer les mots qui blessent des mots d'une grande justesse.

- Peut-être allez-vous me trouver étrange car il est vrai que nous ne nous connaissons pas vraiment, pas réellement du moins, mais je vous apprécie Magdalena. Je vous ai apprécié dès cette soirée au Palais où vous m'avez enfermé dans votre chambre. J'apprécie sincèrement chaque moment que je passe avec vous car, même si vous répétez que vous êtes une enfant, pour moi, cela fait bien longtemps que l'enfant n'est plus. Elle a cessé de monopoliser l'espace à l'instant où nous avons foulé Celestia. Vous êtes devenu une jeune femme forte, courageuse, extrêmement entêtée, remarquable mais ayant parfois quelques petits tics discutables je dirais. Vous ne vous en rendez pas compte vous-même, mais vous êtes en train de grandir à une vitesse incroyable et je souhaiterais sincèrement et profondément avoir la moitié de la bravoure que vous portez en vous.

Avant même que je n'eus le temps de rajouter quoique ce soit ou de le remercier pour ces mots, un large sourire est venu se suspendre de part et d'autres de mon visage tandis que le sien se teinte légèrement de rose jusqu'à la pointe de ses oreilles.

- Mais comme je l'ai dis, je ne fait que répéter des mots que je vous ai déjà dit.

- La répétition a du bon, murmuré-je. Vous n'avez pas idées ô combien des mots, de simples mots, peuvent changer le cours d'une journée.

- Croyez-moi, je le sais mieux que quiconque.

S'en retournant dans la pièce principale, nous retrouvons un Valerian épuisé, se massant les tempes et relevant à peine le regard quand nous arrivons à sa hauteur.

- Tout est prêt ? demandé-je en me dirigeant vers lui

- Tout, non, mais une bonne partie de ce que tu m'as demandé l'est.

- C'est déjà un bon début, fis-je en le gratifiant d'un sourire en guise de remerciement.

- Je ne sais pas de quoi vous avez parlé tous les deux, mais cela a l'air d'aller mieux, nous fait-il remarquer

On échange alors un regard complice avec Owen avant de hausser des épaules, faisant mine de rien. Certaines choses doivent rester secrètes.

- Il était temps ! hurle-t-il en s'étirant sur sa chaise. Honnêtement, il était difficile de travailler sereinement dans une telle ambiance. Nous savons que nous sommes tous les trois présents pour nos propres raisons et motivations, mais tâchons de montrer à ces enfoirés du Palais que notre équipe, bien que bancale, ne peut guère se trouver menacée par un secret.

Pendant un instant, il m'a semblé me faire disputer comme lorsque j'étais enfant.

- Donc maintenant quel est le plan Votre Altesse Royale ? lance Valerian tandis que nous sommes tous les trois réunis autour de son poste de travail.

Maintenant, on se bats.

- Ce que je m'apprête à vous exposer n'est pas un plan, mais plutôt un début de plan. Une ébauche. Vous comme moi, Messieurs, savez qu'au vue de nos maigres ressources, nous n'avons aucune chance si guerre il y a. Connaissant suffisamment mes aînés, ces derniers ne vont pas tarder à se manifester de leurs côtés donc il faut se tenir prêts à toutes éventualités : Je propose donc ceci. Une alliance avec tous ceux qui comme nous, ont à cœur de donner un coup de pied dans ce système.

- Très bien, je présume donc que cela implique certains individus, n'est-ce pas ? relève le Duc.

- Et cela risque de ne pas plaire à Son Excellence, soufflé-je en guettant sa réaction. Mais nous avons besoin des meilleurs dans le fait de faire le pire.

- Nous avons déjà mentionné au préalable la possibilité de nous allier avec les bandits du coin, soupire-t-il en secouant la tête en signe de désapprobation totale.

- Certes et ce fut une très mauvaise idée de ma part, je l'admets, mais je ne pensais pas à ces hommes bien que certains soient juste de petits voyous de bas étage avec qui, je suis certaine, nous pourrons trouver un compromis.

- Alors à qui penses-tu ? lance Valerian curieux

- Je l'ai dit : A ceux capables du pire pour être les meilleurs. Nous sommes peut-être huit frères et sœurs aux yeux de la nation, mais pour la première fois de ma vie, je compte profiter de l'inexistence de liens dans cette famille décousue.

- Soudainement, l'idée d'envisager un dialogue avec les brigands du coin me semble une bien meilleure idée que d'en venir à requérir l'aide de ces personnes, soulève le Duc

Pourtant, j'ai besoin d'eux et eux de moi si l'on y va dans ce sens-là.

- Je crois qu'il est temps que je passe un ou deux appels, pouffé-je.

Et je sais déjà que si je veux gagner la guerre, remporter ces batailles-ci est d'une importance capitale. Je ne suis pas la seule tête couronnée à avoir une dent contre Byron et Ivory. A dire vrai, je suis presque certaine que si je le propose alors quelques uns dont je tairais le nom se feront un plaisir de me soutenir du moment que je garde la tête de la première ligne.

Ils ont toujours été comme ça, préférant jouer dans l'ombre plutôt que de dévoiler leurs véritables couleurs. Comploter, manipuler, espionner, voilà leurs mots clés, mais sans leurs talents alors la guerre est perdue d'avance et avec elle, je pourrais enterrer ma dignité comme mon rêve de voir à mes pieds, Ivory agenouillée.

- Alors ? Par qui dois-je commence ? Vais-je tirer au sort ?

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