6. Fille de ...
Mes copines tiennent absolument à ce que nous fêtions mes vacances et je n'ai rien contre. Après ma sortie nocturne au club de mon père, j'ai dormi une bonne partie de la journée pour me réveiller le ventre vide. Dévorant tout ce que je pouvais, j'ai continué à végéter sur mon canapé tel une larve. L'opération répétée jusqu'à ce que je sois en grande forme.
Mais ce soir, il est question de se saouler avec mes copines et je ne refuse jamais. Shayna et Ophélie abhorrent des jupes microscopiques et un maquillage outrageux. Elles n'ont pas honte de leur corps, elles suintent le sex apeal et ce n'est pas sans raison, ces filles sont des bombes. D'un look un peu plus sage, j'ai opté aussi pour une jupe plus longue que mes amies mais moulante m'arrivant presque au genoux. Une paire de bottes à talons pour galber mes jambes et un haut tout aussi moulant et ma nouvelle veste un cuir qui rehausse le tout. Celle de Molly.
Le bar « Le Mystic » dans lequel nous nous rendons m'est inconnu comme à peu prêt tous les lieux de la région d'ailleurs. Joshua détestait sortir et nous nous contentions de repas de gala auprès des autres médecins où de plateaux télé, rien de réjouissant. Donc, j'ai pris l'invitation de mes fidèles amies comme une chance de rattraper le temps perdu.
Et l'endroit est haut en couleur, pas de doute là dessus. Composé à quatre vint dix pour cent de bois, il ne faut pas être regardant sur l'hygiène. Une musique de sourd, des centaines de bouteilles de bière et de whisky mais ça me va. Je ne suis pas regardante, tout ce que je veux, c'est me détendre. Tant que on a l'ivresse, qu'importe le flacon. Mon nouveau mantra tandis que je m'enfile la première série de plusieurs j'espère, de shooter d'alcool forte puis je fais passer le tout avec une gorgée de mon mojito me mettant directe dans l'ambiance. Le coin réservé loin du bar dédié à la danse me fait de l'œil et je sens déjà mon popotin se trémousser alors j'attrape les deux autres pour partir à l'assaut. Nous sommes en chasse toutes les trois. Et les beaux mâles, ce n'est pas ce qu'il manque, de quoi satisfaire nos envies.
On se déchaîne sur la piste, attirant plusieurs regards, quelques mouvements de hanches et le tour est joué. Après deux heures de danses langoureuses ou je me suis fais de nouveaux amis se prénommant Vodka et jus de cerise, je regagne mon tabouret, transpirante. Sirotant mon verre, je tourne la tête distraitement pour me rendre compte du monde qui a envahi le bar. Toutes sortes de personnes jeunes et un peu moins pour d'autres s'abreuvent ou sont plongés dans de longues conversations. Le printemps qui arrive enfin permet aux gens de sortir de leurs maisons. L'hiver a été rude recouvrant le Colorado d'une épaisse couche de neige pendant de long mois. Aujourd'hui tout le monde a envie de profiter des premières chaleurs et moi la première.
Je continue mon inspection et de surveiller mes deux folles. Ma vision un peu trouble me permet pourtant de repérer un individu connu, pile dans ma ligne de mire. Cette silhouette, je la reconnais et je dois avouer qu'il n'a rien à envier aux mecs de ce bar, ça serait tout le contraire. Il glisse très à l'aise au milieu de la foule comme un conquérant saluant plusieurs personnes sur son passage qui s'écarte pour le laisser passer. Il est connu des lieux bien évidement. Cet homme est fait d'acier, vêtu de manière sombre, son blouson aux manches coupées révèlent ses bras nus qui sont tatoués sur pas mal d'endroit d'encre noire.
Ice, accompagné deux autres du club, jeune comme lui. Un black au visage doux que je n'ai jamais vu ainsi qu'un cow-boy, blond et sexy à souhait que je reconnais. Je l'ai soigné celui là alors qu'il louchait sur mon décolleté. Lui, je peux volontiers en faire ma collation du soir. Il a fait de l'humour graveleux, bien qu'amoché l'autre soir. Il arrivait encore à plaisanter avec moi. Malheureusement, je me refuse à recroiser le chemin de ce petit con de Ice qui m'a fait mauvaise impression.
C'est certain que lui me connaît mais qui est-il ? J'ai fais le tour dans ma mémoire, recherchant à plusieurs reprises où j'aurais pu le connaître. Mon surnom Speedy m'a été donné gamine et je doute qu'il soit beaucoup utilisé depuis mon départ. Il ne s'agit pas de l'école, ça n'a jamais été employé sinon je m'en souviendrais bien. Non c'est forcement au club mais je n'arrive pas à mettre un visage enfantin sur sa gueule à lui et j'ignore son vrai prénom, ce qui me gonfle sérieux.
Essayant de me faire toute petite, je me tasse dans mon fauteuil pour ne pas être vue. Je vois mes copines me rejoindre au même instant, elles vont faire un très bon bouclier. Pas discrètes pour un sous et alcoolisées, elles hurlent mon prénom hors norme faisant tourner des têtes. Je plaque ma main sur mon visage de dépit. Si je ne suis pas repérée, c'est que j'ai une chance de cocue. Malheureusement, je suis célibataire. Je vois les missiles à la place des yeux de Ice se braquer sur moi.
Je suis marron.
Il avance vers nous, ses deux complices sur les bottes jusqu'à notre table. Les filles les ont déjà repéré et se mettent à glousser. Je me demande bien comment va se passer cette entrevue. La seule et unique fois que nous avons communiquer, il y a eu peu d'échange de mot et ce n'était pas plaisant pour moi. Le sergent d'armes s'avance vers nous décidé et s'arrête devant notre table. De ses yeux bleus, il nous sondent toutes les trois. Les filles ont la bouche grande ouverte sans pouvoir prononcer le moindre mot. Elles n'ont pas l'habitude d'être abordées par de tels hommes. Ceux que nous fréquentons dans nos vies sont des médecins ou des infirmiers et ils n'ont pas un dixième dans leur petit doigt d'allure que les trois alphas devant nous possèdent, de quoi vous rendre muette.
J'ai un peu plus l'habitude pour ma part, des années de pratique mais je ne suis pas rassurée face à Ice, je l'avoue. Il est impressionnant, aspire à la crainte. Cette aura sombre et dangereuse qu'il dégage me percute mais le plus impressionnant reste ses yeux, sans aucun doute. Ils sont deux billes d'un bleu cristallin qui vous perfore. Ce soir son regard est franc et alerte pas comme cette fameuse nuit où il était imbibé d'alcool. Et je dois dire que cette transparence est dur à soutenir mais je ne me laisse pas démonter.
—Mesdames, bonsoir.
Il fait un sourire carnassier à mes amies après m'avoir lâcher alors que moi, je respire enfin. Les filles se présentent, tout sourire et poitrines en avant.
—Je m'appelle Ice, dit-il avant de se tourner vers ses frères. Voici mon ami Billy the Kid.
Il nous désigne le black au yeux en amande, de long cil et un visage d'ange.
—Lui, c'est Rabbit.
Au même moment le lapin hausse ses sourcils l'air de dire et Shayna glousse comme une dinde. Je lui fais une grimace de mécontentement pour la calmer.
—Se sont vos vrais prénoms, demande Ophélie, la naïve.
—Non Lie, je réponds énervée. Se sont leurs noms de route. Des bikers.
Les deux nanas ont de la bave aux lèvres et les reluquent comme des friandises. Puis j'entends la voix de l'éternel idiot.
—Dis donc Speedy, tu te dévergondes, me demande Ice avec un air supérieur. Qu'est ce que tu fous dans ce bar ? Tu veux te choper un motard ?
Quel salop ! De quoi je me mêle!
Il me parle comme si on était ami et en plus ça le fait rire. Il n'a aucune gêne de me toiser de cette manière mais je ne compte pas me laisser faire. S'il cherche la bagarre, il va me trouver.
—Et toi, tu les préfères barbus, je réplique.
Il se contente d'un rictus narquois, une vraie tête à claque. Moi, je me renfrogne à l'évocation de mon surnom. Ça m'énerve de ne pas savoir et j'ai l'impression d'être pris pour une débile. L'alcool que j'ai bu ne m'aide pas à garder mon sang froid.
—Comment tu connais ce nom, je réplique.
Combat de regard, c'est à celui qui gagnera mais j'avoue qu'il est difficile de tenir face à Ice, décidément, ce nom. Il sourit mystérieusement, lui sait très bien et s'en délecte. Puis les trois tournent d'un même homme avant de partir. Mais je n'en reste pas là, armée de courage, je gueule.
—Hey je te parle connard !
Les épaules de Ice se redressent et sa silhouette se tourne très lentement, pour m'offrir un nouveau sourire railleur. Il avance vers moi très lentement et je dois dire que je flippe un peu mais je ne l'avouerais jamais.
— Toujours aussi sanguine dit-il d'une voix calme que je suis la seule à pouvoir entendre. Ça commence à me plaire Speedy.
Et sa main se perd dans mes cheveux pour tirer une mèche. Ça ne me fait pas mal mais je trouve cela hyper humiliant. Je suis prête à l'étriper pour son geste alors qu'il s'éloigne déjà plus au fond du bar.
Le temps de nous remettre de nos émotions et j'ai avalé mon dernier shoot sur la table. Je suis énervée, ce n'est pas peu dire.
—Qui est cet gravure de mode qui vient de te tirer les cheveux, me demande Shayna en agitant sa main devant son visage pour se donner de l'air. Retiens moi ma chérie, je vais m'effondrer.
Elle trouve cela drôle et Ophélie se marre en même temps alors que je fulmine. Je suis déjà en train de tourner sur mon siège à la recherche de la serveuse pour me repayer une tournée et faire passer la scène.
—Oh merde et ils ne sont pas seuls, d'autres canons en vue.
Je dévie ma tête pour voir leur table remplit de plusieurs hommes, ils sont au nombre de cinq. Tous la même veste que je maudis. Des gueules à faire peur, personne ne s'approchent d'eux. La meute comme ils se nomment à investie les lieux et on ne remarque plus qu'eux. Leurs voix fortes s'élèvent malgré le bruit ambiant, des verres déjà entre leurs mains. Ils sont le centre de l'attention de beaucoup et surtout des femmes qui lorgnent sur cette bande comme des femelles en chaleur. C'est l'effet des bikers pour la plus part, elles s'imaginent tout un tas d'histoires d'amour torride et en mouillent leurs petites culottes. Si elles savaient ce qu'il se trame derrière ses belles gueules et leurs écussons, se sont plutôt des cauchemars qui seraient le plus plausible dans ce décor.
—Si j'avais su, je serais venu avant, rajoute Ophélie. Ça pousse comme des champignons dans le coin.
Je continue à maronner dans mon coin alors que les deux folles s'échangent leurs points de vues sur celui qui est plus sexy. Je prend la mèche de cheveux que l'autre con a touché et y passe mes doigts. Tout à un rapport avec mon enfance, c'est certain. Avant mes onze ans aussi et avec le club, je n'ai plus de doute la dessus.
Ça tourne à mille à l'heure sous mon crâne. Tirer les cheveux, tirer les nattes, ça me dit quelque chose. Encore un écho amenant une image, un souvenir, enfin.
Je revoie à l'école ma jupe se soulever et ce gosse rire aux éclats devant mes joues rouges de honte. Encore ces yeux de glace.
Et un deuxième se déverse directement sur mon cerveau comme une coulée de lave.
Je suis dans le pré derrière la grande maison de bois. Une fête à été organisé, il y a beaucoup de monde, le repas a été servi mais on s'en fiche un peu. J'ai suivi le groupe de garçons qui s'est éloigné à la lisère de la forêt mais ils ne semblent pas d'accord que je sois là et je leur fais face, mes poings serrés.
—T'es une fille, tu peux pas grimper aux arbres !
Le garçon me pousse de toutes ses forces et je tombe à la renverse. J'ai mal à mes mains qui sont écorchées et saignent un peu. Alors que je suis sur le point de pleurer, les autres autour de moi se moquent et rient aussi. Je suis en colère après eux, je veux juste m'amuser. Les autres filles jouent aux poupées mais moi, ça ne m'intéresse pas. Je veux faire comme les grands et un jour, j'aurais une moto aussi.
Celui qui m'a bousculé me point du doigt sans jamais s'arrêter de rire et ses yeux bleus me fixent sans me lâcher. Je le déteste.
Je sens mon cœur faire des bons dans ma poitrine au fur à mesure que les souvenirs s'amoncellent. Ce n'était pas la première fois qu'il était méchant avec moi. Pourtant un jour, il m'a défendu à l'école disant qu'il était le seul à avoir le droit de m'embêter. Déjà tordu même à son plus jeune âge. Je suis ramenée dans la réalité. Quinze ans me sépare entre ce souvenir et aujourd'hui pourtant je sens la fureur me prendre.
Prise de colère par la révélation qui vient de me frapper en pleine tête, j'embarque mon verre d'une main, poussant qui conque se met en travers de mon chemin. Arrivée devant la table de ce connard d'Ice, je lui fourre mon cocktail à la gueule. Il est trempé d'alcool bon marché et d'une rondelle de citron vert ainsi que des feuilles de menthe qui sont collés sur son tee-shirt. Risible, je viens de redécorer le tortionnaire version connard des îles.
—Toujours aussi con, Luke. Tu n'as pas changé, toujours tes blagues vaseuses. Salopard de première !
Luke se lève d'un bond, bousculant la table et les verres qui sont dessus pour me foudroyer de ses yeux arctique.
—Méfie toi de ce que tu dis. Fille de ou pas, je n'aurais aucun scrupule Harley.
La menace n'est pas à prendre à la légère, le ton employé par Luke me glace le sang mais je n'ai pas le choix. Je viens de lui faire un affront devant ses potes et je me dois te tenir ce que j'ai commencé.
—C'est ça, cause toujours imbécile !
Je rebrousse chemin d'un pas rapide, pas forcément rassurée. J'ai dépassé les bornes, il nous faut quitter le lieu avant que ça ne dégénère encore plus. Je ne suis pas dans mon état normale et si Luke vient à vouloir demander des comptes, je ne répond plus de moi. Mes amies me regardent comme si une corne venait de me pousser sur le front.
Je finis d'un trait la dernière gorgée du verre traînant sur la table et j'emporte mes affaires.
—Les filles, on se casse.
Nous déambulons dans le bar comme un seul homme.
—T'es malade d'avoir fait ça, gueule Shayna dans mes oreilles. Harley, franchement. Ces gars sont dangereux. Tu n'imagines même pas.
Nous franchissons les portes pour nous retrouver sur ce parking miteux.
—Si je le sais, je lui répond tout en continuant ma route.
Je ne les connais que trop bien et je veux mettre des kilomètres entre moi et ces bikers.
—Et tu vas défier leur chef tout en sachant !? Ah non je ne crois que tu te rendes compte des conséquences de tes actes.
Je m'arrête pour foudroyer ma copine. Je ne lui en veux pas de s'énerver après moi, elle a raison et sa colère est légitime. J'en veux à ce crétin de Luke qui m'oblige à rendre des comptes.
—Luke n'est pas leur chef seulement un membre de la hiérarchie.
—Seulement, s'énerve Shayna.
La belle métisse qui marche a côté de moi tente de m'arrêter dans ma cavalcade.
—Il n'y aura aucune conséquence, je gère très bien la situation.
J'ai coupé le sifflet de Shayna et j'espère que la conversation va s'arrêter là.
—Fille de ? Tu nous expliques ?
Je m'arrête nette. Ophélie a tout entendu, pas si naïve finalement la belette alors autant jouer carte sur table.
—Mon père est le président de The Reckless Hounds, ça vous va?
J'ai lâché une bombe à la puissance dix mille face aux visages de mes deux amies. Shayna a les yeux écarquillés sous la surprise alors qu'Ophélie contemple le duel comme une partie de tennis.
—Attend, me demanda Ophélie, toujours aussi crédule. Ton père, ce gars infréquentable c'est ... c'est leur chef.
—Je commence à comprendre, souffle Shayna tout en reprenant son chemin vers la voiture.
Non Shayna, tu ne comprend qu'un quart, crois moi. J'ai mis le pied là où il ne faut pas et je m'en veux d'être si impulsive. Ophélie n'a plus ouvert la bouche de tout le trajet alors que Shayna, elle, me jette des coups d'œil inquiets.
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J'avais hâte de vous faire découvrir ce chapitre que j'adore 🤩
Ce Ice versus Harley grrrrr
Donc vous avez découvert le prénom de mon chouchou, Luke ! Ça vous plaît ?
Bises 😘
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