77 - Plus qu'hier et moins que demain
Hayate s'arrêta le long du trottoir, non loin du S.S Motor, et se mit à tapoter le volant de la Civic du bout des doigts. Finalement, elle se gara dans l'allée à côté du garage et coupa le contact avant de sortir de la voiture.
Trente minutes plus tôt, à la fin de l'après-midi, elle avait quitté son travail en trombe.
– J'ai-fini-au-revoir-à-après-demain ! Avait-elle lancé à son patron sans même ralentir.
Une fois sur la route, elle s'était sentie soulagée de pouvoir enfin passer à l'action.
Depuis qu'elle avait quitté Chiyo, à la porte du restaurant, le sentiment de peur qui lui avait étreint la poitrine avait disparu. Il avait cédé la place à quelque chose de plus chaud et de plus agréable.
Mais je ne dois pas m'emballer, se raisonna-t-elle, je ne sais pas encore si Chiyo senpai et moi avons vu juste.
Elle était persuadée cependant qu'elles avaient tapé dans le mille. C'était la seule explication connaissant Shin'ichirō Sano.
Je ne vois pas pourquoi il aurait réagi ainsi sinon.
À présent, quand Hayate repensait à la scène de la veille et aux étirements ridicules de Shin au milieu de son petit salon, elle avait envie de rire.
Non mais quel clown celui-là !
Ses pitreries le lui faisaient aimer davantage.
« Je l'aime plus qu'hier et moins que demain »... C'est ça le dicton, non ?
Elle avait l'impression de saisir la signification de ces mots avec chaque fibre de son être.
Mais avant d'aller plus loin, il faut qu'on parle.
Parvenue devant la porte du garage, elle inspira, carra les épaules et entra.
Le carillon tinta et la tête de Shin'ichirō apparut une furtive seconde au-dessus la selle de la moto sur laquelle il travaillait, avant de disparaître tout aussi vite.
Hayate avait eu le temps de voir ses oreilles rouges vifs. Elle réprima un sourire.
– Bonjour tout le monde ! Lança-t-elle.
Le tout le monde en question n'était plus constitué que de Shin et Inupi maintenant que Draken était parti travailler avec Mikey.
Hayate hésita, puis elle alla s'accroupir à côté de Inupi.
– Tu fais quoi ? Lui demanda-t-elle.
Il était en train de travailler sur une Suzuki, vit-elle, mais elle n'aurait pas su dire de quel modèle il s'agissait, les motos n'étaient pas sa spécialité.
Pendant une seconde, elle crut qu'il n'allait pas répondre. Puis il dut se souvenir que tous les deux n'étaient plus en froid et il souffla :
– Je m'occupe de la vidange. Le client la veut pour partir en vacances.
– Hmm, ok, mais pourquoi tu as mis la moto sur un bout de planche ? Lui demanda-t-elle en lui montrant le morceau de contreplaqué sur lequel reposait la béquille centrale.
C'était plus fort qu'elle, la mécanique la fascinait et celle des motos de plus en plus parce que cela lui faisait penser à Shin.
Inupi lui montra le récipient rempli d'huile noire, à l'avant du véhicule.
– Parce que ça facilite l'écoulement de l'huile usagée, lui expliqua-t-il. En inclinant la moto vers l'avant, on est sûr qu'il n'en reste pas dans le circuit.
– C'est ingénieux ! Dit-elle. Vous faites ça sur tous les modèles ?
– Non, répondit Inupi. Uniquement sur les V-Strom de cette marque parce que le bouchon de vidange est situé à l'avant du moteur. C'est le boss qui me l'a appris...
La voix de Shin monta de l'autre côté de la boutique.
– Ne... m'ap... m'appelle pas... boss...
Il avait déraillé sur les derniers mots et Hayate dut retenir un nouveau sourire.
Elle ramena son attention sur Inupi.
– Dis, lui dit-elle, tu crois que tu pourrais aller nous chercher trois cafés ?
Elle sortit un billet de mille yens et le glissa dans la poche de sa combinaison.
– Ça te ferait une pause, ajouta-t-elle.
Inupi quêta du regard l'accord de Shin et ce dernier hocha la tête.
Lorsqu'ils furent seuls, Hayate rejoignit Shin et elle le regarda une seconde travailler.
Il y avait de la tension dans la ligne de ses épaules et ses mains étaient parcourues de frémissements.
Elle s'accroupit à ses côtés, avant de le pousser un peu pour qu'il lui fasse une place sur la caisse sur laquelle il était assis. Puis elle s'installa, collée à lui.
– Tu fais quoi ? Lui demanda-t-elle son épaule contre la sienne.
Il avait démonté une partie du moteur d'une grosse Yamaha, un de ces modèles tout-terrain avec lesquels les motards aimaient sillonner les routes de montagnes et les coins perdus.
– Je... change... la rouccoie de transpition.... Bafouilla-t-il.
Hayate sourit.
Elle leva la main et elle lui chatouilla la joue du bout du doigt.
– Tout va bien Shin, lui murmura-elle.
Il inspira brusquement.
– Haya je suis désolé ! S'exclama-t-il. Je ne savais pas comment te le dire, mais je n'ai jamais couché avec une fille alors j'ai pris peur et je suis parti, pardon !
Elle posa la tête sur son épaule.
C'était bien ça.
– Tout va bien je te dis, répéta-t-elle. C'est moi qui m'excuse. Je t'ai un peu forcé la main, comme si c'était normal d'attendre d'un homme qu'il soit toujours prêt. Pardon. Je suis désolée. On fera à ton rythme, ok ? Rien ne presse...
Shinl acquiesça.
– Ok, renifla-t-il.
Elle leva la tête. Il avait les yeux rouges. Il était bouleversé. Hayate se sentit coupable. C'était de sa faute. C'était elle qui s'était montrée maladroite.
Je ne me suis pas souciée un instant de ce qu'il voulait lui... Je me suis juste préoccupée de moi sans chercher à savoir ce dont il avait envie.
Elle n'en était pas fière. Elle se faisait l'effet de s'être comportée comme un de ces ces types qu'elle avait toujours détestés, ceux qui ne voyaient dans leurs partenaires que des objets juste bons à assouvir leurs désirs.
Je ne veux pas être comme eux.
Elle passa son bras sous celui de Shin et se serra contre lui, cachant son visage contre la manche de sa combinaison.
– Pardon Shin... Murmura-t-elle. Pardon... On en parlera, toi et moi, d'accord ? Et à l'avenir, on décidera ensemble de ce qu'on veut faire, ça te va ?
Elle le sentit opiner au-dessus d'elle.
Il s'essuya le nez d'un revers de la manche au moment où la porte se rouvrait devant eux.
Inupi se figea en découvrant Shin, les larmes aux yeux, et son expression se durcit.
C'est encore elle ! Gronda-t-il.
Shin lui coupa l'herbe sous le pied en répondant à Hayate :
– Merci Haya chérie. Je suis désolé, je t'aime tu sais.
– Moi aussi je t'aime, lui dit-elle sans lâcher son bras.
Inupi se détendit. Il s'était trompé, elle n'y était pour rien cette fois.
Il leur apporta les cafés.
– Un déca pour toi boss, dit-il, parce que ta sœur...
– ... veut que je réduise ma consommation de café, je sais, soupira Shin. Et arrête de m'appeler boss.
Inupi ne savait pas de quoi ils avaient parlé, mais Shin avait l'air d'aller beaucoup mieux.
Son état, quand il était arrivé ce matin-là, ne lui avait pas échappé. Shin était agité, soucieux et il ne cessait de surveiller l'écran de son téléphone comme s'il souhaitait et redoutait en même temps recevoir un message.
Quand il était revenu en début d'après-midi, après avoir été déjeuner, c'était encore pire. Il était sur les dents, à tel point qu'il oubliait la moitié de ce qu'il devait faire et que Inupi l'avait vu démonter et remonter plusieurs fois le carter de la Yamaha comme s'il ne se rappelait pas de ce qu'il devait faire dessus.
La situation n'avait fait qu'empirer jusqu'à ce que Hayate arrive.
En quelques minutes seulement, Shin était passé de tendu à presque joyeux et il n'y avait que ses yeux rougis qui témoignaient encore de leur discussion.
Bon, reconnut Inupi en silence, ce n'est peut-être pas une sorcière finalement.
Hayate était toujours assise à côté de Shin, sur l'étroite caisse sur laquelle il s'installait pour travailler. Elle lui tendit sa propre tasse que Inupi venait de lui donner.
– Si tu veux, dit-elle espiègle, on échange nos tasses et on ne le dit à personne !
Elle avait un petit sourire en coin. Elle aussi semblait plus sereine à présent.
Shin prit ses mains entre les siennes, emprisonnant la tasse entre eux.
– Laisse-moi juste boire une gorgée, dit-il en l'amenant à ses lèvres. Pour me rappeler quel goût a un vrai café.
Hayate éclata de rire.
– Comme si tu n'en buvais pas dès qu'Emma a le dos tourné ! dit-elle.
– Chut ! Chuuut ! Dit Shin avec de faux airs de conspirateur. Il ne faut pas le dire !
Puis il ajouta à l'intention de Inupi :
– Inupi tu ne le dis à personne, ok ?
– Ok boss, répondit-il.
Il se sentit sourire. Tout allait bien.
Finalement, Hayate laissa Shin pour retourner prendre place à côté de Inupi.
– Montre-moi comment tu fais une vidange sur ce genre de motos, dit-elle, j'ai envie d'apprendre moi aussi !
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NDA : Shin me fait fondre ! Je l'imagine vraiment cute comme ça ! Il n'y a que moi ?
( 人' ∀ ')~ ♡
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