60 - Emma

          Dès le lendemain, Hayate passa un coup de fil à Emma, la petite sœur de Shin, après avoir demandé son numéro à ce dernier. Elle n'avait pas oublié ce qu'elle lui avait dit le soir de Noël :

La prochaine fois que tu iras faire les magasins tu n'auras qu'à m'appeler !

Elle s'était dit que cette corvée serait sûrement plus vite expédiée en compagnie de quelqu'un qui connaissait les boutiques de la capitale.

En plus, si je lui explique que je ne veux pas trop changer de look, que je veux juste m'arranger un peu, elle comprendra.

Hayate avait beau réfléchir, elle n'arrivait pas à s'imaginer dans une tenue féminine. Elle avait passé trop de temps à s'habiller aux rayons hommes pour avoir seulement une idée de ce que voulait dire se faire belle.

Je suis sûre que je vais ressembler à un clown... Enfin, au moins comme on est en hiver, je ne mettrai pas quelque chose de trop découvert.

Ces préparatifs toutefois, c'était une nouveauté pour elle qui avait toujours vu les rendez-vous amoureux comme une sorte d'affrontements dont elle devait sortir victorieuse.

Le samedi suivant, toutes les deux avaient convenu de se retrouver devant la gare de Shibuya en fin de matinée.

– On ira manger ensemble après si tu veux, avait ajouté Hayate au téléphone. Je te dois bien ça, les magasins, c'est ma hantise.

Ce qui la surprit toutefois, ce fut la réaction de Shin.

– Le numéro d'Emma ? Lui avait-il demandé, intrigué, alors que Hayate et lui étaient allés déjeuner au comptoir d'un petit izakaya, non loin du S.S Motor. Pour quoi faire ? Vous allez faire quoi ?

Il semblait sincèrement curieux.

– Des trucs de filles, avait-elle éludé.

Elle était déjà gênée, elle n'allait pas en rajouter. 

Shin cependant, n'avait pas voulu lâcher l'affaire.

– Mais quoi comme trucs de filles ? Avait-il insisté en se penchant vers elle, les yeux brillants d'intérêt.

Apparemment, le fait que sa petite amie veuille rencontrer sa sœur piquait sa curiosité.

– Tu sais bien, lui avait-elle répliqué, les trucs habituelles : sorcellerie, poupées vaudous... Ce genre-là. D'ailleurs tu ne veux pas me donner une mèche de tes cheveux ?

Shin s'était redressé, pâle, et elle s'était sentie obligée d'ajouter:

– C'est une blague ! Ne fais pas cette tête ! Je plaisante !

Elle avait tout de même éclaté de rire.

Après avoir garé la Civic dans un parking de la capitale, elle se dirigea vers la gare et leur point de rendez-vous avec Emma.

Le froid était toujours aussi vif même si la neige avait été déblayée des rues et Hayate serra sa veste contre elle, le menton enfoui dans son écharpe.

Il est presque onze heures... Ça nous laisse une heure pour faire les magasins. Ensuite nous irons manger. Je devrais être rentrée en début d'après-midi.

Quatre silhouettes lui firent signe depuis l'autre côté du boulevard, et Hayate les fixa d'un air incrédule.





Emma se confondit en excuses.

– Je suis désolée, lui dit-elle. Je ne pensais pas qu'elles viendraient toutes !

Hinata, mais aussi Chiyo et Yuzuha, cette fille dont le frère était mannequin se souvint Hayate, s'étaient jointes à elle.

Hina sourit, gênée.

– Pardon de m'être invitée comme ça, dit-elle. Emma m'a demandé conseil et, comme j'ai toujours aimé faire les boutiques, je me suis dit que je ne dérangerais pas.

Yuzuha, elle, détaillait déjà Hayate des pieds à la tête en lui tournant autour.

– Moi, je suis là parce que je crève d'envie de te relooker depuis que je t'ai vue, lui dit-elle en toute franchise. Avec ta silhouette, s'habiller comme un sac, c'est presque un crime.

Chiyo mangeait un éclair au chocolat qu'elle avait acheté dans la pâtisserie voisine.

– Et moi, dit-elle, je me doutais que tu me laisserais sur la touche, alors j'ai fait parler Emma.

Elle semblait parfaitement sûre d'être dans son bon droit.

C'est une blague ? Se dit Hayate en les regardant tour à tour.

Tandis qu'elle cherchait un moyen de se tirer d'affaires, Yuzuha examina sa tenue du jour.

– Qu'est-ce que c'est que ce jean informe ? Dit-elle en claquant de la langue. Tu l'as trouvée au rayon hommes, ou quoi ? Et puis cette veste ne va pas du tout avec... Elle ne va avec rien d'ailleurs.

– C'est une catastrophe, hein ? Confirma Chiyo en finissant son éclair.

– Attendez une minute ! Les interrompit Hayate. Moi, tout ce que je veux, c'est deux ou trois vêtements sympas ! Il n'a jamais été question de me relooker !

– Elle montre les crocs, remarqua Chiyo pas le moins du monde impressionnée.

Yuzuha revint se planter devant Hayate. Elle croisa les bras sur la poitrine et Hayate s'aperçut alors seulement que, même si elle n'était pas aussi grande qu'elle, elle était plus élancée que la moyenne des japonaises et n'avait aucun mal à la regarder dans les yeux.

Deux ou trois vêtements sympas ? Dit-elle. Parce que tu as l'intention d'aller à un rendez-vous habillée comme ça ? Tu ne feras pas plus effort pour ton petit ami ? C'est tout ce qu'il mérite ?

Son ton était acide. Hayate grinça des dents et Hina et Emma détournèrent la tête, gênées.

– Ça va, arrête ton cirque, lui rétorqua Hayate. Je les connais les filles comme toi. Dans votre tête, il n'y a que l'apparence qui compte. Et vous vous étonnez de ne pas être prises au sérieux ? Laisse-moi rire ! Hors de question que je te laisse me transformer en barbe à papa sous amphétamine pour occuper ton samedi !

Cette Yuzuha représentait tout ce qu'elle détestait : les filles qui ne pensaient qu'à leurs vêtements et à leur maquillage.

Si cette gamine superficielle croit qu'elle m'intimide, elle va avoir une surprise !

Yuzuha cependant, se contenta de ricaner.

– Évidemment, lui dit-elle, c'est tellement plus facile de se déguiser en homme pour ne pas avoir à se fatiguer à se faire respecter en tant que femme. Ça va ? Tu ne te foules pas trop ?

Hayate serra les poings.

– Laisse-moi te dire une chose, reprit Yuzuha sans la laisser parler. Les vêtements ont toujours servi à présenter celui qui les porte. Et quand je te regardes, tout ce que je vois, c'est une fille qui se cache derrière un sexe qui n'est pas le sien !

Autour d'elle, les trois autres ne savaient plus quoi dire et même les passants leur jetaient des regards à présent en faisant un crochet sur le trottoir pour les éviter.

– Espèce de... Commença Hayate.

– Alors tu as deux solutions, continua Yuzuha. Soit tu viens avec nous et tu me montres que tu as des couilles, soit tu te tires la queue entre les jambes et tu vas te planquer chez toi.

La tension entre elles était presque palpable, mais Yuzuha tourna les talons sans s'en inquiéter.

– Mais du peu que j'ai pu voir, conclut-elle, je pense que tu vas venir. Parce que tu n'es pas une lâche.





NDA : Yuzuha supremacy...

(シ_ _)シ

Après avoir grandi auprès de Taiju, on comprend qu'une fille comme elle n'ait plus peur de rien.

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