13 - Baston

          Les couloirs de la compagnie située au quinzième étage de la tour étaient silencieux. Mais ils n'étaient pas vides. Des employés vaquaient encore à leurs occupations, passant à pas feutrés devant l'accueil où Hayate attendait, son pli sous le bras. Elle avait son badge autour du cou et son gilet au nom de la société de transport sur le dos. Il fallait montrer patte blanche dans ce genre d'endroits, surtout quand on transportait des documents confidentiels.

Un homme apparut au bout du couloir et il vint vers elle à pas pressés. L'hôtesse de l'accueil l'avait prévenu une minute plus tôt.

– Vous voilà, dit-il. Le président ne cesse de m'interroger pour savoir quand les contrats vont arriver !

Hayate lui tendit l'enveloppe avant de lui demander d'appliquer son sceau au bas du bon de livraison pour confirmer qu'il avait bien reçu les papiers.

– N'hésitez pas à refaire appel à nos services, dit-elle en se tournant vers l'ascenseur.





Tout en redescendant vers le hall, elle se demanda si elle devait s'arrêter en chemin pour prendre à manger.

Je n'ai pas envie de cuisiner, mais je crois qu'il me reste des nouilles d'hier...

Elle décida finalement de finir ce qui restait chez elle, plus pour être rentrée aussi tôt que possible que par réelle envie de pâtes froides.

Arrivée au pied du building, elle retira son badge et son gilet professionnel et les replia pour les fourrer dans sa poche.

Cette course lui avait fait un bien fou. il n'y avait plus trace de pensées parasites dans sa tête.

Finalement, la route, il n'y a que cela de vrai.

Parvenue au bord du trottoir, elle se figea.

Un groupe de jeunes hommes s'étaient rassemblés autour de la Civic pour la regarder de plus près.

L'un d'eux était en train de tapoter l'aileron pour vérifier sa solidité, un autre était penché sur les roues et il examinait les enjoliveurs et un troisième était même assis sur le capot pendant qu'un de ses camarades le prenait en photo avec son téléphone.

– Tch, lâcha-t-elle en claquant de la langue.

Ce n'était pas la première fois que ce genre de choses arrivait, mais ceux-là prenaient vraiment leurs aises.

Hayate traversa l'avenue déserte à grands pas et les garçons se redressèrent en l'entendant approcher.

– Dégagez de là ! Leur dit-elle en leur faisant signe de s'écarter. Vous vous croyez où ? Ce n'est pas votre voiture !

– Parce que c'est la tienne peut-être ? Répondit l'un d'eux en se redressant.

Il n'aimait pas le ton sur lequel elle les avait apostrophés.

Hayate vint le toiser sous le nez et il tiqua une seconde en s'apercevant qu'elle était aussi grande que lui.

– Je te répondrais quand tu m'auras expliqué à quel titre je dois me justifier devant toi, lui dit-elle, menaçante.

Les garçons se regroupèrent autour d'elle.

– Fais pas trop ta princesse, lui dit l'un, parce que je pourrais bien avoir envie de t'en mettre une pour te calmer.

Hayate se tourna vers lui.

– Essaie pour voir, dit-elle, et tu auras une surprise.

Ils avaient beau être nombreux, elle n'était pas impressionnée. Elle en avait maté d'autres.

Les voyous grommelèrent.

– Tu joues à quoi là ? Dit un des types. Tu fais ta belle avec la voiture de ton mec et tu voudrais qu'on te prenne au sérieux ?

Il éclata de rire et Hayate vit rouge. 

Son poing partit. Il l'atteignit à la mâchoire, et la tête du gars vola en arrière.

Pendant une seconde, les garçons furent trop surpris pour réagir.

Puis ils passèrent à l'attaque.

– Salope ! Hurla l'un d'eux.

Il voulut l'attraper par le bras, mais Hayate lui envoya son pied dans l'estomac avant qu'il ait posé la main sur elle et il se plia en deux, le souffle coupé. Un autre frappa. Elle évita son coup en se baissant et en profita pour flanquer son poing dans le ventre celui qui arrivait par derrière.

Si vous pensez me faire peur, c'est mal me connaître !

Le premier avait repris ses esprits et il revint à l'assaut. Le visage à l'abri derrière ses poings, il se mit à sautiller d'un pied sur l'autre.

Un boxeur, comprit Hayate.

Elle recula pour se mettre hors de portée de ses coups, mais celui qui se trouvait dans son dos la poussa entre les omoplates et elle bascula en avant.

Merde !

Elle essaya d'éviter le poing qui arriva vers elle et sentit sa pommette brûler au moment où il la toucha. Heureusement, elle avait réussi à détourner la tête au dernier moment.

– Bande de lâches ! Cria-t-elle.

Elle se retourna vers celui qui l'avait bousculée, mais un autre en profita pour lui balayer les jambes, lui faisant perdre l'équilibre.

C'est pas bon... Songea-t-elle en parvenant à se rétablir. Ils sont trop nombreux ! À ce rythme, je vais me faire casser la gueule !

Elle balança son coude dans le visage de celui qui avait tenté de la faire tomber et entendit son nez craquer.

Mange-toi ça !

Le visage en sang, le type ne recula pas pour autant. Au contraire. Il semblait plus furieux que jamais.

– RHAAAA ! Hurla-t-il en attaquant.

Son coup de poing balaya le vide, Hayate avait reculé, mais, du coin de l'œil, elle aperçut ses autres assaillants qui repassaient à l'assaut.





Quelques minutes plus tôt, au sud de Shinjuku

Shin'ichirō, Takeomi et Wakasa sortirent du restaurant de tempuras où ils avaient passé la soirée.

C'était Shin'ichirō qui les avait appelés. Il avait besoin de se changer les idées.

Je sais que je n'ai rien fait de mal, se répétait-il. Pourtant...

Il ne voyait pas comment il aurait dû s'y prendre pour que ça se passe autrement entre Hayate et lui.

Wakasa le tira de ses pensées en l'attrapant par le cou.

– Tu es encore en train de ruminer, remarqua-t-il.

Wakasa Imaushi était l'un de ses plus vieux amis. Avec Takeomi et Benkei, tous les quatre formaient une équipe depuis plus de dix ans et Shin'ichirō ne leur cachait presque rien.

Wakasa ajouta avec un sourire en coin :

– Elle doit être sacrément mignonne.

Shin sentit son visage prendre feu.

– Mais qu'est-ce que tu racontes ? Se récria-t-il. Pas du tout ! Enfin, je ne veux pas dire... je ne dis pas qu'elle est moche... loin de là même... mais ça ne veut pas dire... enfin, tu vois quoi...

Il s'embrouilla et Waka et Takeomi éclatèrent de rire.

– Allez, le rassura Wakasa, je te fais marcher c'est tout ! Je sais bien que tu n'es pas ce genre de mecs !

– En parlant de mecs, reprit Takeomi, on sait comment ça se passe pour Benkei ?

Ce dernier n'avait pas pu les accompagner ce soir. Il avait un rendez-vous avec une des adhérentes de la salle de sport qu'il tenait avec Wakasa et la petite amie de ce dernier.

– Aucune idée, reconnut Waka. Je n'avais même pas vu qu'une des filles lui tournait autour.

– J'espère que ça va aller, intervint Shin. C'est un gars bien, il mérite une fille sympa.

Wakasa resserra sa prise sur son cou.

– J'en connais un autre ! Dit-il.

Tous les trois se séparèrent arrivés au bout de la rue.

– Tu es sûr que tu ne veux pas que je te ramène ? Demanda Waka en enfourchant sa moto. Ça ne me gêne pas tu sais.

– Ne t'en fais pas, lui dit Shin. J'ai envie de marcher un peu et puis la gare est à deux pas.

Il était venu en train. Il n'avait pas envie d'être tenté de prendre la route après avoir bu.

Wakasa et Takeomi disparurent – ce dernier au volant d'une voiture flambant neuve –, et Shin'ichirō se dirigea vers le quartier des affaires voisin près duquel se trouvait la gare.

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