57 - Bunny
Une semaine plus tard
Hayate déposa les documents concernant ses dernières courses sur le bureau de la secrétaire de son oncle puis elle resta là, plantée devant elle.
– Ça n'est pas votre oncle qui s'occupe de ça normalement ? Dit Sako en examinant les papiers.
Hayate sortit alors un paquet de derrière son dos et elle le lui tendit.
– Des chocolats... dit-elle. Pour me faire pardonner...
La secrétaire retourna la boîte entre ses mains.
– La prochaine fois, dit-elle, souvenez-vous que je suis au régime.
Hayate écarquilla les yeux, mais Sako ajouta un clin d'œil.
– Je rigole, dit-elle, on les partagera à la pause café. Merci.
Puis elle se leva pour les emporter dans la salle du personnel.
Hayate la suivit des yeux. La première partie de son plan était une réussite. Restait la seconde. Celle-là allait être plus compliquée.
Elle abandonna l'open space où se trouvaient la plupart des employés pour gagner la zone des entrepôts. Contrairement au reste du bâtiment, l'endroit était généralement désert et glacial. Mais tout ce dont Hayate avait besoin, c'était un coin tranquille pour réfléchir.
Elle repoussa la double porte du hangar et jeta son dévolu sur une caisse rangée à l'écart en attente de livraison. Elle s'y installa en tailleur, le dos appuyé contre la structure métallique des rayonnages.
Maintenant, il fallait réfléchir.
Elle devait trouver le moyen de parler à Sano.
La semaine précédente, après avoir quitté Bunta, sa première réaction ça avait été de vouloir aller à Tokyo. Puis elle s'était souvenue que son oncle lui avait confisqué les clés de sa Civic et qu'elle devrait y aller en train.
Ça n'est pas plus mal de réfléchir un peu avant d'y aller... Je lui dis quoi une fois là-bas ? « Désolée de m'être comportée comme une garce, je sais que je t'ai embrassé et giflé dans la foulée, mais tu crois qu'on peut redevenir amis ? »
– Non, c'est n'importe quoi... Dit-elle tout haut.
Elle avait ensuite bien sûr pensé à lui téléphoner. Mais le problème restait le même.
Je dis quoi une fois qu'il décroche ?
Elle avait beau se creuser la tête, elle n'arrivait pas à imaginer un scénario où leur conversation se passait bien. Quelle que soit la façon dont se déroulait la scène, dans son esprit tous les deux se retrouvaient systématiquement à ne plus savoir quoi dire et ils raccrochaient en sachant qu'ils ne se rappelleraient probablement plus.
Tout ça parce que je suis trop conne pour réfléchir AVANT d'agir !
Non, la meilleure solution c'était de lui parler face à face.
Mais pour cela, il faudrait qu'on se voit. Sauf qu'on ne risque pas de se croiser par hasard. Lui et moi, on ne vit pas dans la même ville, on n'est même pas collègues de travail. Il pourrait se passer des années avant que je tombe sur lui et je ne vais tout de même pas passer tous mes jours de congé à traîner dans Shibuya !
Elle l'avait envisagé pour être honnête.
Hayate se laissa aller contre la charpente. Un fin ruban de buée blanche montait de ses lèvres et elle contempla les entretoises métalliques du plafond, loin au-dessus d'elle.
– Si seulement Horitaka avait encore une moto à faire réparer, dit-elle, je pourrais aller là-bas avec une bonne excuse...
Elle était sûre que la mécanique les aiderait à briser la glace. C'était leur passion commune qui les avait rapprochés après tout.
En tout cas, une chose était certaine maintenant qu'elle avait ouvert les yeux. Leurs conversations lui manquaient. Leur complicité lui manquait.
Mais plus que tout, Shin lui manquait.
– Ça y est, tu parles toute seule ? Dit Bunta en apparaissant au détour de l'allée voisine. Tu es devenue dingo ? Il faut que j'appelle un médecin ?
Hayate tourna la tête vers lui.
– Tu pourrais arrêter de surgir façon ninja quand je m'y attends le moins ? Lui dit-elle.
Sa remarque le fit sourire.
– Ça fait dix minutes que je te cherche. Lui dit-il. Qu'est-ce que tu fais planquée ici ?
– Je réfléchis, répondit-elle. C'est un endroit comme un autre et puis ici au moins, normalement je ne suis pas dérangée.
– Bouge tes fesses, dit Bunta en tournant les talons. Il y a quelqu'un qui veut te voir.
Hayate descendit de la caisse où elle était assise pour le rejoindre.
– Qui ça ?
Elle aurait juré avoir vu un petit sourire en coin sur son visage.
– Tu verras bien, lui dit-il.
Parvenue dans le hall d'accueil de la compagnie, Hayate aperçut Shin sur le parking, à côté de la petite kei-car de son grand-père. Il avait quelque chose entre les mains, mais à cette distance elle ne voyait pas de quoi il s'agissait.
Elle attrapa sa veste sur le portemanteau et sortit.
Une fois à quelques pas de lui, elle ralentit.
– Salut... Dit-elle.
Shin se retourna et il sourit.
– Salut, répondit-il.
Maintenant, Hayate voyait qu'il tenait une grosse peluche de lapin rose par les oreilles.
Tous les deux s'évitèrent du regard pendant une seconde, mal à l'aise.
– Je suis désolé... Dirent-ils en même temps.
Leur réaction les fit sourire.
Shin reprit.
– Je sais que je suis venu sans prévenir, dit-il, mais je me suis dit que ça serait bien si on pouvait parler.
Elle hocha la tête.
– Oui, moi aussi je pense qu'on doit parler, reconnut-elle.
Shin se sentit soulagé. Ça se passait mieux qu'il l'avait espéré. En partant ce matin, il s'était demandé s'il prenait la bonne décision, s'il n'existait pas un meilleur moyen de renouer avec Hayate.
Puis il avait décidé d'arrêter de se poser des questions. La franchise était la seule option. Toutes les autres lui donneraient des allures de manipulateur.
De son côté, Hayate avait, elle, de plus en plus de mal à détacher les yeux de la peluche.
Elle est... trop mignonne ♡ !
C'était un lapin de grande taille, rose et duveteux, avec des petits cœurs dans les yeux et une carotte entre les pattes. La part d'elle qui fondait devant ce genre d'objets brûlait de la prendre dans ses bras.
Shin, lui, se mit à tordre nerveusement les oreilles de la peluche.
– Ça te dirait qu'on aille se poser dans le coin pour discuter ? Dit-il avant d'ajouter : D'ailleurs, j'ai pris ça pour toi...
Il lui tendit le lapin et Hayate le lui arracha littéralement des mains.
– Ne fais pas ça avec ses oreilles, s'exclama-t-elle, tu lui fais mal !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top