8. Charlie
- Poupée, ta porte d'entrée sonne, hurle Ryan depuis le salon.
Je ne l'écoute pas tentant de me reconcentrer sur mes révisions. Lorsqu'il a débarqué il y a une heure, j'ai essayé de lui expliquer que j'étais occupée mais il n'a rien voulu savoir. Mr Hale n'en a fait qu'à sa tête et s'est installé sur mon canapé pour végéter devant la télé. Je ne sais pas ce qu'il lui prend mais je pourrais parier qu'il évite quelqu'un.
- Poupée, ça sonne toujours, chantonne Ryan. Je n'ai pas l'intention de me lever et ta coloc est encore sous la douche certainement en train de titiller son abricot juteux alors bouuuuuuge !
Est-ce que le meurtre est autorisé dans cet état parce que je sens que je vais découper cet abruti de Ryan en petit morceaux !
- Ca va, j'arrive, je crie après avoir grogner.
Je me lève de ma chaise de bureau et me dirige vers la porte tout en maudissant les deux personnes qui se trouvent aussi sous ce toit. Ryan git sur le canapé, allongé de tout son long, les pieds dépassant de mon petit canapé deux places. Le voir dans cette position m'irrite et m'agace. A part ses entraînements de football et ses séances de musculations, Ryan ne fait rien d'autres. Il se fout de ses examens parce qu'il est certain de signer un contrat pro d'ici l'année prochaine.
A vrai dire, je l'envie. Je dois passer des heures à réviser en plus de mes heures de stage pour espérer avoir mon diplôme et pouvoir suivre le cursus dont je rêve depuis des années. Je n'ai plus une minute à moi et bon sang qu'est-ce que je suis fatiguée ! Hier, je me suis endormie sur un livre de psycho alors que j'avais eu dix heures de sommeil la nuit. Le cap des vingt et un ans me fait plus de mal que je ne l'aurais cru.
J'ouvre la porte d'entrée et me retrouve face à une femme d'une trentaine d'années, un immense et magnifique bouquet de roses rouge dans une main et une machine pour les reçus dans l'autre.
- Bonjour, je suis bien chez Mlle Charlie Walmont ? me demande la trentenaire.
- Oui, c'est moi.
- C'est pour vous, me dit-elle en me tendant le bouquet. Veuillez signer en bas.
Je suis ses recommandations et prends le bouquet. La livreuse me souhaite une bonne journée et part continuer son travail. Je referme la porte, pose le bouquet sur le comptoir de la cuisine et extrais l'enveloppe qui se trouve entre deux roses. Une carte se trouve à l'intérieur.
" Je ne cesse de penser à toi, ma princesse... Surtout depuis que mes lèvres ont de nouveau touchées les tiennes. Me laisseras-tu recommencer ?
PS : Regarde ton portable, quelqu'un a une question pour toi... ".
Je prends mon téléphone et vois que j'ai reçu un message photo. Je l'ouvre et souris instantanément. Il a beau être un crétin je reconnais qu'il marque des points. La photo est un selfie de lui qui fait la moue tout en portant la peluche que j'ai gagné lors de notre premier rencard et que je lui ai offert, notre très chère fille, Carlie. En légende, il a écrit :
" Quand est-ce que tu reviens à la maison, maman. Tu nous manques, et papa est triste sans toi... Reviens auprès de nous ! ".
Encore une fois, je souris. Je ne peux lui reprocher sa pugnacité, il n'abandonnera pas avant d'avoir réussi à obtenir mon pardon, il est en très bonne voie d'ailleurs. Si mon enfoiré de père ne m'avait pas menacé de s'en prendre à Carter, j'aurais pu craquer. Il faut absolument que sa guérison soit complète pour ne plus que mon géniteur s'en prenne à lui. Est-ce qu'il le peut vraiment ?
- On ne peut pas dire qu'il n'est pas tenace ton Carter ! fait remarquer Ryan en lisant le message per dessus mon épaule.
- Non, c'est certain...
- Tu vas enfin lui laisser une seconde chance ?
- Je ne crois pas que ce soit le bon moment... Carter doit regagner sa place dans l'équipe de basket, gagné le championnat et être drafté. Et moi, il faut que je me concentre sur mon stage et sur d'autres projets. Ce n'est pas la bon moment pour...
- Ce ne sont que des conneries, me coupe Ryan. Tu es effrayée à l'idée de te remettre avec lui et qu'il te fasse encore du mal ! Je ne te pensais pas lâche, poupée.
- Je ne suis pas lâche, rétorqué-je agacée.
Je le fusille du regard et me retient même de lui administrer une gifle dont il se souviendrait un moment.
- Oh si, poupée ! Tu aimes ton Bass et la seule chose qui t'empêche d'être avec lui c'est ta peur irrationnelle qu'il te brise encore. Tu fuis devant lui. Sérieux, poupée, Bass est dingue de toi. Il se morfond chaque jour sur son canapé parce que sa princesse refuse de lui laisser une seconde chance. Arrête d'avoir peur et laisse-toi aller avec ce pauvre basketteur, me conseille-t-il.
Je ne réponds pas. Ryan a raison sur toute la ligne et c'est ce qui m'horripile le plus. Je suis certainement lâche, c'est vrai que j'ai peur de souffrir à nouveau. Le problème est que je ne sais pas comment faire pour dépasser cette crainte. Comment est-ce qu'on parvient à accorder à nouveau sa confiance à quelqu'un qui l'a trahi ?
- Tu serais mieux avec un footballeur aussi génial que moi mais tu as des goûts affreux en matière d'hommes, ajoute-t-il en me taquinant.
- Au contraire, elle est beaucoup trop intelligente pour sortir avec un crétin comme toi, Hale, lance Pauline qui vient d'arriver dans la cuisine.
Elle prend une pomme dans la corbeille de fruits et croque dedans tout en regardant le bouquet de roses rouges et la carte qui va avec. Elle sourit en lisant les mots que Carter m'a écrit.
- Tu me brises le coeur, ma lionne, surjoue Ryan en se tenant la poitrine.
- Et j'en ai tellement rien à faire, le titille-t-elle.
Je lève les yeux au ciel fatiguée par leur comportement à tous les deux. Ils ne peuvent pas passer un moment ensemble sans se provoquer et se chercher. Ils feraient bien de coucher ensemble, ça atténuerait toute cette tension sexuelle entre eux.
- Il fait fort le basketteur, admire Pauline. Attend une minute ! Vous vous êtes embrassés, réalise-t-elle en relisant la carte de Carter.
La question de Pauline a le mérite de faire réagir Ryan qui me regarde en haussant un sourcil.
- Tu nous a caché ça, poupée ? me reproche Ryan, amusé. Je croyais que notre amitié comptait plus pour toi mais je me suis visiblement trompé. Tu commences par cacher des secrets, puis ça finira par s'éloigner et ne plus nous parler, tout ça à cause d'un basketteur dix fois moins canon que moi !
Pauline fait mine de vomir mais ça ne prend pas avec moi. Je sais qu'elle trouve Ryan à son goût, elle est juste beaucoup trop fière pour le reconnaître. Elle ne lui dira jamais parce qu'il aura une ascendance sur elle et ça c'est tout ce qu'elle déteste.
- Il ne m'a pas laissé le choix, admets-je. Je ne voulais pas mais il m'a eu par surprise et a enfouie sa langue baveuse dans ma bouche !
- Quelle mauvaise foi, ricane Pauline. Je suis certaine que tu as adoré ça et que tu as répondu ardemment à son baiser.
- Pas du tout, mens-je.
Evidemment que j'ai adoré ce baiser. Carter embrasse comme un Dieu et il est bien le seul à me faire perdre la tête avec un simple baiser tout en déclenchant une multitude de sensations dans mon bas ventre. Ce n'est pas comme si j'avais retrouvé mon oxygène à travers son baiser ou encore si je m'étais enfin senti vivante de le sentir contre moi. Non absolument pas. C'est encore plus fort que ça !
- Miss Walmont a décidé de jouer les idiotes ce matin, se moque Pauline. Le basketteur doit réellement t'aimer pour supporter ton sale caractère !
Je la foudroie du regard ce qui la fait éclater de rire. Ryan aussi ricane. Ils me fatiguent tous les deux à se payer ma tête. D'ailleurs, il s'agit du seul instant où ils ne se crient pas dessus.
Au déjeuner, ils retrouvent leur habitude de se bouffer le nez pour un rien. Pauline ne tolère pas que Ryan se soit invité à manger avec nous. Evidemment, ce cher Ryan en joue et la provoque à chaque fois qu'il ouvre la bouche. J'ai l'impression d'être avec deux gamins qui se chamaillent pour un rien, et moi je suis la mère de ces deux mioches insupportables. Au moins, ils me confortent dans l'idée que je ne veux pas de gosses maintenant !
- J'ai posé plusieurs CV dans les commerces aux alentours, m'annonce Pauline en enfournant sa fourchette entortillée de spaghettis dans sa bouche.
- Je t'ai dit que ce n'était pas nécessaire, lui rappelé-je.
- Charlie, je ne peux pas te laisser tout payer puis j'ai besoin de bouger un peu. Je passe mon temps à ne rien faire à part courir dans la ville ou à sortir boire des verres avec les voisins du dessous. Il me faut autre chose pour m'occuper la journée surtout que tu n'es pas là...
- Je comprends, approuvé-je. Seulement, tu me laisses prendre en charge le loyer, c'est non négociable !
- Tu es têtue, c'est pas croyable, ricane-t-elle.
Evidemment que je le suis !
Pauline ne se rend pas compte de tout ce que je lui dois. Sans elle, je n'aurais jamais pu m'ouvrir aux autres. Je serais certainement devenue une garçe de bourge qui prend tout le monde de haut et qui dépense son fric dans n'importe quoi tant que c'est luxueux. Puis, jamais je n'aurais trouvé ma voie.
- Les voisins du dessous, sérieux ? intervient Ryan.
- Quoi ? Qu'est-ce qui ne va pas encore, Hale ? s'impatiente Pauline.
Et c'est reparti !
- J'ai cours avec eux. Ce sont deux crétins qui parient sur le dos des filles, ont une liste de leurs conquêtes qu'ils se tapent en même temps et les notes sur leur performance au lit, explique-t-il. Tu ne comptes pas aussi t'envoyer ces types ?
Pauline le regarde en haussant un sourcil. Je sens que les choses vont vite déraper entre eux.
- Comment ça " aussi " ? Tu as quelque chose à me dire, Hale ?
- Je ne sais pas ce que tu cherches, Pauline, mais coucher avec n'importe qui ne va rien t'apporter, raille-t-il en tentant de cacher son agacement.
- Je te demande pardon ? éructe Pauline en jetant ses couverts sur la terre violemment.
Mayday, mayday, mayday ! Que quelqu'un me vienne en aide, la troisième guerre mondiale est sur le point de démarrer !
- Tu m'as très bien comprise ! Je ne sais pas ce que tu as fui en France ou ce que tu essaies d'oublier mais t'envoyer en l'air avec des abrutis ou des gamins à peine majeurs ne règlera aucun de tes problèmes. Bien au contraire !
Ryan a presque hurler en lui balançant ces mots. Je ne l'ai jamais vu s'emporter de cette façon en l'espace de deux minutes, il est d'habitude si calme que je ne le reconnais pas.
- Je n'ai aucun problème, sale fouineur à la con, rétorque-t-elle folle de rage. Qui plus est, je fais ce que je veux avec mon corps. Si j'ai envie de baiser avec un gamin, un enfoiré ou autre, ça me regarde moi et uniquement moi alors mêle toi de ton cul !
Une personne normale se contenterait de ne plus rien dire ou de se faire petit mais Ryan ricane tout en regardant Pauline les yeux remplis de colère et de désir.
- La seule chose qui te fait chier c'est que tu ne sois pas l'un de ces mecs, ajoute Pauline, provoquante.
- Si j'avais vraiment envie de te baiser, crois-moi on serait déjà à poil, ma lionne !
- Tu es bien trop arrogant pour croire que j'accepterai de te laisser poser tes sales pattes sur moi. tu n'es pas à la hauteur pour une femme comme moi, jamais tu ne suivrais la cadence, le titille-t-elle.
- Tu veux parier ?
Bon sang mais qu'est-ce que je fous encore là ?!
Je me sens carrément de trop. Ils se regardent à la fois plein d'envie et plein de rage. Soit ils finissent au lit à copuler comme des bêtes, soit ils s'entretuent vraiment et ruine le parquet de mon appartement.
- Charlie, dis à ton pote que jamais de ma vie je ne m'abaisserai à coucher avec cet abruti !
- Je...
- Poupée, répond à cette agaçante lionne qu'elle ne réussira pas à me résister, m'interrompt Ryan. Son désir pour moi est déjà bien trop évident.
Je sens que je vais très vite en prendre un pour taper l'autre !
J'ouvre la bouche mais suis une nouvelle fois coupée dans mon élan.
- Dis-lui que je préfère me taper Donald Trump que le rouquin homme des cavernes qu'il est !
- Répond-lui que...
- Putain mais vous commencez à me fatiguer avec vos conneries, crié-je en ayant perdu toute patience. Vous vous comportez comme deux putains de gamins à vous chercher toute la journée. C'est dingue ça, vous ne pouvez pas passer ne serait-ce qu'une heure sans vous écharper ! J'en ai ras le cul de faire office d'arbitre entre vous. Couchez ensemble, tuez-vous ou ignorez-vous mais putain arrêtez de me faire chier avec votre guerre puérile et inutile !
Aucun d'eux ne parlent. Ils me regardent les yeux grands ouverts choqués que je puisse me mettre en colère contre eux. Je me lève de table ayant perdu l'appétit à cause de leurs conneries.
- Je vous laisse nettoyer et avant que vous vous plaignez c'est non négociable, ajouté-je. Vous avez encore gâcher un repas alors vous avez intérêt à vous rattraper et ça commence avec le ménage ! Putain, j'ai l'impression d'être la mère de deux gosses insupportables qui a un grand besoin de l'aide de cette pétasse de Super Nanny pour retrouver le calme ! Je me transforme en mégère à cause de vous, me plaigné-je. Quoiqu'il en soit, trouvez un terrain d'entente, signez l'armistice parce que je suis pas loin de vous dépecer ou de vous écorcher vifs à la Ramsay Bolton ! Vous savez que j'en suis capable alors fini les engueulades, les menacé-je.
Sur ces dernières paroles, je quitte l'appartement en claquant la porte. Je suis peut-être allée trop loin mais ils m'ont réellement agacée. Je ne comprends pas qu'ils passent leur temps à se chercher et se provoquer aussi vivement. Leur attirance sexuelle les rend complètement cons et fatigants. Ils ont intérêt à vite se sauter dessus ou je risque de réellement les tuer. Je m'en fous de finir en taule si je suis définitivement débarrassée de leur affrontement.
***
A treize heures quarante, j'arrive à la salle de sport des Tar Heels pour ma première séance en tant que stagiaire de Garrett Palmer. Je suis un peu en avance mais cela ne pose pas de problème aux dirigeants puisqu'ils me laissent entrer dans la salle de consultations qu'utilisent Palmer. Je suis un peu anxieuse à l'idée de me retrouver avec Carter, de le voir dans ce contexte là. Le fait qu'il soit un patient me serre toujours le coeur.
Mais surtout, être si près de lui après l'épisode baiser langoureux en plein milieu de la salle de musculation m'intimide et me rend nerveuse au plus haut point. J'ai peur qu'il fasse n'importe quoi, ce n'est pas son genre mais je ne m'attendais pas non plus à ce qu'il s'empare de ma bouche pour marquer son territoire. Il est bien décidé à me faire à nouveau craquer et je sens qu'il n'est pas loin d'y parvenir.
Le bureau de Palmer est rempli de documents éparpillés un peu partout. Il n'est pas du tout ordonné, ce qui me fait sourire. Je me faisais une autre idée de lui, le genre d'homme très sérieux, maniaque, professionnel, rangé dans sa vie privée, j'ai l'impression que je me suis bien trompée. Un seul cadre photo est posé sur le bureau, au milieu de feuilles barbouillées d'encre bleue. La photo représente Palmer tenant un petit garçon absolument magnifique dans ses bras.
Pas de doute, ce gamin est le fils de Palmer !
Ils se ressemblent comme deux gouttes d'eau. Le petit doit avoir cinq ans, peut être six, il possède de beaux cheveux blonds presque platine coupés courts, des yeux bleus translucides qui rendent leur couleur unique, une bouche boudeuse, un nez fin et une bouille tout à fait adorable. Ils sourient avec tant de sincérité que leur bonheur se devine aisément.
- Ne vous fiez pas à la photo, c'est une vraie terreur !
Je sursaute légèrement en entendant la voix rauque de Palmer. Je me retourne vers lui et souris.
- Je suis sûre que vous exagérez !
- Oh que non, rit-il. Je vous assure que mon fils est entrée dans une phase qui dissuade tout mon entourage à avoir des enfants.
- Je vois, ricané-je. Comment s'appelle cette adorable petite terreur plus efficace qu'un contraceptif ?
Palmer éclate de rire. Ce son est plutôt agréable bien que je préfère celui de Carter. Je me demande ce qu'il fait, il devrait être arrivé pour sa séance.
- Il s'appelle Max, me répond-t-il.
- Il vous ressemble énormément, lui dis-je en souriant.
- C'est vrai, mais Max a aussi beaucoup de sa mère... Dommage qu'il ne la connaisse pas vraiment, marmonne-t-il.
Je préfère taire les questions qui me traversent l'esprit concernant la mère de Max pour ne pas mettre mal à l'aise Palmer et surtout parce que ça ne me regarde pas. La situation semble assez compliqué pour que je retourne le couteau dans la plaie avec ma curiosité mal placée.
- Comment va votre main ? s'enquiert Palmer en prenant ma main en les siennes pour les examiner.
- Beaucoup mieux, juste un vilain bleu mais je n'ai plus mal. Ma carrière de boxeuse est terminée, je ne tiens pas à finir une main dans le plâtre ou à endommager tous les visages des sportifs du campus même les plus difficiles, plaisanté-je.
Encore une fois, Palmer rit à gorge déployée.
- Vous êtes une personne unique, Mlle Walmont ! Je suis sûr que votre humour fait un tabac auprès des étudiants du campus...
- Pas vraiment, non, ris-je.
- Permettez-moi d'en douter, Mlle Walmont. Je suis certain qu'un tas d'étudiants est tombé sous votre charme... Je les comprends, ajoute-t-il dans un murmure.
Je ne réponds pas. A vrai dire, je me sens mal à l'aise parce qu'il est évident qu'il flirte avec moi. Carter avait raison depuis le début et je n'ai pas voulu le croire.
C'est à ce moment-là que Carter arrive dans le bureau. Au regard furieux qu'il lance à Palmer et moi, je comprends qu'il a entendu ce que le kiné m'a dit. Je culpabilise alors que je n'ai rien fait. Peut-être aurais-je dû être claire dès le début. Je me suis laissée séduire par cet homme parce qu'il ressemble à un acteur américain dangereusement sexy.
Carter marmonne un léger bonjour tout en nous faisant grâce de sa mauvaise humeur. Palmer lui explique le déroulement de la séance du jour, à savoir une heure de cardio, une demi-heure de musculation, une autre d'exercices ciblés sur les mouvements de son épaules, puis des étirements et massages. La séance est assez aujourd'hui mais Palmer pense qu'il en est capable.
Sur le chemin qui mène à la salle de musculation, je sens la présence de Carter à quelques centimètres de moi, dans mon dos. J'aime sentir son odeur boisée, un mois sans la humer a été une véritable torture. Dans ma valise, j'avais un tee-shirt à lui et j'ai eu la bêtise de le jeter dans la première poubelle trouvée.
Palmer est devant nous, son téléphone collé à l'oreille, je comprends qu'il discute avec son fils en l'entendant le surnommait " mon trésor ". Palmer se retourne vers moi et me sourit chaleureusement tout en me faisant un clin d'oeil.
- Si ce crétin continue à flirter avec toi, je vais être obligé de lui montrer à qui tu appartiens en plein milieu de cette foutue salle de musculation et crois moi tu adorerais ça, me chuchote Carter à l'oreille.
Tout mon corps frissonne. La vague de désir qui me submerge dépasse toutes celles que j'ai pu ressentir. Elle traduit ma frustration de ne pas me laisser aller avec lui, de ne pas lui laisser une seconde chance.
- Je ne t'appartiens pas, Carter.
- Continue à te mentir, princesse, soupire-t-il. Toi et moi savons à qui tu appartiens et à qui j'appartiens.
Il n'a pas tort mais je ne lui dirai pas. Carter en serait beaucoup trop heureux. Ryan a raison, je suis lâche. J'ai peur de lui pardonner et de finir par souffrir à nouveau. C'est con, je le sais, mais je n'y peux rien.
La séance se déroule parfaitement. Je suis heureuse de voir les progrès qu'il a fait, d'assister aux étapes de sa guérison. Son épaule retrouve sa mobilité, il doit être à 50 ou 60%. Carter est tellement motivé à reprendre le basket qu'il ne lâche rien. C'est le rêve de sa vie après tout. Il est né pour être une star du basket.
Je me demande où est-ce qu'il va jouer l'année prochaine. Je n'y avais pas pensé jusqu'à aujourd'hui mais il peut être recruté par une équipe de la Côte Ouest ou même du Canada. Il rêve des Lakers ou des Warriors de Golden State alors que je préfère poursuivre mes études à Charlotte, à une heure d'ici. Pourquoi devrait-on se donner une nouvelle chance pour être de nouveau séparés en Juin ?
Ca ne vaut pas le coup...
Palmer me confie la partie étirements et massages de la séance. Il ne se rend pas compte de la difficulté que c'est pour moi de devoir toucher Carter, d'être si proche de lui. Evidemment, Carter en est ravi. Palmer ne pouvait pas lui faire de meilleur cadeau.
Pendant les premières minutes, je suis les indications de Palmer pour effectuer les bons gestes. Je m'applique, fais en sorte d'être la plus douce possible pour ne pas que Carter ressente de la douleur dans l'épaule. Evidemment, j'évite de croiser le regard de Carter que je sens partout sur moi, tout comme son sourire.
- Vous faîtes un excellent travail, Mlle Walmont, me complimente Palmer. Qu'est-ce que tu ressens Carter ?
- Aucune douleur, ça tire un peu mais c'est normal avec les exercices que j'ai enchaîné. Puis, votre assistante est vraiment très douée de ses mains, ajoute-t-il en me brûlant de son regard perçant.
Je rougis tout en baissant la tête. J'arrive pas à croire qu'il ose me taquiner en pleine séance de rééducation et devant Garrett Palmer. Il cherche vraiment à marquer son territoire avec ses insinuations ? Palmer ricane.
- Ce n'est pas le moment de flirter avec la jolie stagiaire, Carter, le réprimande Palmer.
Encore une fois, je sens le rouge me monter aux joues. Carter, lui, foudroie son kiné du regard. J'aime bien qu'il soit jaloux mais sa possessivité envers moi sur mon lieu de stage me gêne. Il devrait savoir que même si Palmer est séduisant, il ne lui arrive pas à la cheville.
- La jolie stagiaire comme tu dis est...
Je secoue la tête en lui faisant les grands yeux pour ne pas qu'il finisse sa phrase. Je ne veux pas que Palmer sache ce qui s'est passé ou se passe encore entre Carter et moi. S'il l'apprend, je ne pourrai plus travailler avec lui puisque ma vie privée empiéterait sur ma vie professionnelle.
Heureusement pour moi, Palmer est appelé par Cooper et s'éloigne de nous. Je soupire de soulagement tandis que Carter me regarde comme s'il allait me tuer.
- Tu ne veux pas qu'il sache pour nous deux pour avoir une chance de te le taper, me reproche-t-il.
- Je ne veux pas me le taper, rectifié-je. Si Palmer est mis au courant de notre relation, j'ai peur qu'il mette fin à mon stage avec lui...
- Il ne le fera pas. Tu es vraiment douée dans ce que tu fais, princesse, me rassure-t-il. Je n'aurais pas pu rêver mieux comme kiné.
Je souris timidement.
- Puis, je t'avais dit qu'un jour tu finirais par me masser, me taquine-t-il.
Je secoue la tête en levant les yeux au ciel.
- J'aurais préféré que ce soit dans d'autres circonstances, marmonné-je.
- Ce n'est pas ta faute, princesse, dit-il en me caressant tendrement la joue.
Le contact de ses doigts sur ma peau me fait frissonner. J'aimerais tellement plus, sentir ses doigts partout sur mon corps, en moi, le sentir lui en entier. Il me manque, c'est indéniable, mais où est-ce que tout cela va nous mener quand nous allons devoir nous séparer pour prendre des routes différentes ?
Bon sang, nous ne nous sommes même pas remis ensemble que je pense déjà à notre séparation. Je vais devenir dingue !
- Tu as reçu mes fleurs ce matin ? demande-t-il, changeant de sujet de conversation.
- Oui... Merci... Elles étaient très belles, bafouillé-je, gênée.
- Je sais, je les ai personnellement choisie !
- Tu sais que ce ne sera pas suffisant, n'est-ce pas ?
Ses lèvres se déforment en un léger rictus qui provoque le mien. J'ai beau être inquiète pour notre avenir ensemble, me pose encore des questions sur ce qu'il ressent vraiment pour moi ou si je peux avoir confiance en lui, je sais que je ne parviendrai pas longtemps à lui résister. C'est au dessus de mes forces.
- Je ne compte pas m'arrêter là, me prévient-il. Les fleurs ce n'était rien. Je compte bien tout mettre en oeuvre pour que Carlie retrouve sa mère. Tu n'imagines pas combien elle se sent vide sans toi... Tu es une partie d'elle. Ne l'oublie jamais, princesse...
Je sais qu'il utilise la peluche que je lui ai offert pour exprimer ce qu'il ressent lui-même.
- Carlie devra patienter encore un peu si elle veut vraiment que je revienne auprès d'elle...
- C'est tout ce qu'elle désire.
Je commence à croire que moi aussi.
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