02. the lucky one.

𝒔𝒆𝒄𝒐𝒏𝒅 𝒄𝒉𝒂𝒑𝒊𝒕𝒓𝒆.

27 août 1976

D'APRÈS LA LÉGENDE, les unions arrangées étaient vouées à sombrer dans les tourments d'une soumission parentale démesurée. Elles étaient synonyme de captivité nocive entre les deux protagonistes qui se retrouveraient alors piégés à errer sur Terre sans même pouvoir goûter aux plaisirs qu'exhalaient la liberté et l'amour.

Lilibelle Van Laethem et Henry Belcourt deviendraient prisonniers de leur propre existence à l'aube de leur majorité respective. L'année 1977 signerait, ainsi, la suspension absolue d'une réalité espiègle et candide dont ils avaient pourtant toujours rêvé de pouvoir goûter éternellement.

Le destin, l'ironie et la cruauté se mariaient si bien ensemble.

Depuis que Lilibelle avait fait la rencontre de Henry, un voile morne enveloppait son cœur. C'était comme si elle ne serait plus jamais en mesure de sourire et de s'esclaffer sincèrement, alors qu'elle avait toujours pris plaisir à répandre la luminosité se dégageant d'elle. Tout lui semblait désormais dénué de toutes couleurs et d'espoir. Elle était endeuillée face à l'obligation de faire face à un futur dont elle ne serait jamais maîtresse.

Pourtant, après avoir passé la majeur partie de la saison estivale aux côtés du sorcier français, elle avait pu lui trouver de nombreuses qualités. Attentif, sociable et persévérant, il était même un être splendide auquel Lilibelle souhaitait ne jamais faire de mal. Mais tout comme lui, un blocage s'était créé à l'intérieur d'elle, et elle ne pouvait se résigner à ressentir une véritable attirance amoureuse à son égard.

Lilibelle se souvenait encore avec perfection du sentiment de trahison qui s'était emparé d'elle lorsqu'elle avait pris conscience que ce dîner organisé entre les Van Laethem et les Belcourt n'était qu'une mascarade cachant une piètre vérité. Les deux adolescents s'étaient rencontrés en début de soirée, et voilà qu'à peine quelques heures après cela, il leur était annoncé que pas moins de deux ans plus tard, ils se retrouveraient fiancés l'un à l'autre.

Les deux familles françaises résidant dans la capitale parisienne, leurs héritiers avaient alors été entrainé à arpenter ses rues animées et majestueuses au cours de l'été, tels deux infimes touristes ayant la sensation de n'être que de vulgaires pions voués à apporter encore plus de gloire et de statut à leurs familles respectives.

Cette après-midi du mois d'août avait réservé à Lilibelle et Henry une promenade tournée vers le Parc Monceau sous une chaleur presque étouffante. Épuisés par la puissance des rayons du soleil sur les allées sinueuses, ils avaient terminé par s'installer dans une pâtisserie moldue, ravis de pouvoir profiter de la gastronomie française.

Lilibelle s'était entichée d'une Religieuse baignant dans le chocolat et la crème pâtissière, alors que Henry avait jeté son dévolu sur un Mille-Feuille qui semblait être en capacité de le combler de bonheur. La brune ne l'avait encore jamais vu éprouver autant de plaisir qu'à cet instant présent, ce qui avait le don de la divertir fortement.

Je n'ai pas hâte de retourner en Angleterre... gémit-il avec franchise. Leur alimentation est plus que douteuse, et la pâtisserie française me manque terriblement lorsque je suis à Poudlard.

La première réaction de la Sang-Pur fut d'esquisser un sourire amusé, mais en voyant la sincérité de sa déception, elle fit de son mieux pour garder une expression compatissante sur les traits de son visage hâlé.

Peut-être que je serai en mesure de t'en envoyer quelques-unes, et j'accompagnerai mon butin d'une petite lettre contenant mes plus profondes lamentations, proposa Lilibelle en essuyant le coin de sa bouche à l'aide d'une serviette. Afin de remonter le moral de ton palais.

Cette remarqua fit naître un sourire sur les lèvres de Henry qui savait bel et bien que si elle en avait l'occasion, elle se lancerai dans cette tâche à cœur joie.

Lilibelle avait la fâcheuse manie d'exposer ses plaintes au sorcier dès qu'une mince occasion se présentait à elle. En revanche, Henry ne protestait jamais, satisfait de réaliser qu'elle était en mesure de se comporter naturellement en sa compagnie. Ils ne seraient peut-être jamais plongés dans une histoire d'amour aussi vivace et passionnée que celle des couples les plus mythiques de la littérature, mais s'ils arrivaient à se montrer à l'aise l'un avec l'autre, alors leur futur ne se présenterait peut-être pas comme une chute interminable.

Si ça peut me permettre de goûter au bonheur une fois de temps en temps, tu sais très bien que je serai prêt à tout accepter en échange.

Ils échangèrent un regard complice, et parfois, ils avaient l'étrange impression qu'une amitié saine pointait le bout de son nez.

Peu confiants face aux silences reposés bien que relativement gênés, ils continuèrent d'échanger sur leurs écoles respectives, ainsi que leur rentrée en sixième année qui se rapprochait un peu plus chaque jours. Il ne leur restait plus qu'une courte semaine avant la reprise de leur scolarité, et malgré le changement radical qu'avait pris leur futur, les vacances s'étaient envolées en un coup d'œil.

Toutes les fois où ils se voyaient, ils arrivaient à reparler de Poudlard, et de Beauxbâtons, et de la rentrée, alors que ces sujets de discussion s'étaient déjà installés entre eux la fois précédente. C'était une habitude inlassable, mais pourtant presque devenue naturelle et inconsciente à leurs yeux.

Henry exposait sa hâte de retrouver le château écossais devenu comme une deuxième maison, ainsi que ses amis et ses habitudes, alors que Lilibelle se montrait simplement reconnaissante d'avoir la possibilité d'échapper aux regards bruyants de sa génitrices et aux remarques silencieuses de son géniteur pendant de longs mois. Tous deux mettaient en avant leur gratitude envers les biens que leur procurait l'éducation, mais simplement de façons différentes.

Secrètement, lorsqu'il lui parlait de son école, Lilibelle espérait que le prénom de Sirius Black ne traverse ses lèvres, mais cela n'était encore jamais arrivé. Et en réalité, elle n'arrivait pas à se résigner à parler de Sirius à Henry. Pourquoi le ferait-elle ?

Il lui était arrivé de penser à lui depuis le mois de décembre. Elle avait eu le temps de se remémorer les paroles et les regards qu'ils avaient échangé le temps de quelques minutes, et les traits de son faciès. Mais son visage était devenu flou dans les souvenirs de Lilibelle. C'était comme s'il n'avait existé que dans ses rêves les plus féeriques, dans lesquels il interprétait un prince charmant à la figure vaporeuse, venu la sauver d'un monde où elle était enchaînée à la volonté de ses parents.

Elle se demandait très souvent ce qu'il devenait, à quoi ressemblait-il avec plus de maturité et peut-être quelques centimètres en plus ; mais à nouveau, elle n'arrivait pas à s'imaginer évoquer le prénom du visiteur de ses rêves à celui avec qui elle se marierait un jour.

Tu es ridicule, pensait Lilibelle. Mais son ressenti était inexplicable à ses propres yeux.

Je pense qu'on devrait y aller.

La franco-néerlandaise s'autorisa à lancer un coup d'œil furtif à l'horloge murale, et Henry avait raison. Il était déjà bientôt dix-huit heures.

En posant une main dans le bas du dos de Lilibelle dans un geste délicat et affectueux — et surtout protecteur, cette dernière ne semblait pas avoir pris conscience qu'Henry avait remarqué l'appréhension dont elle faisait preuve à cet instant présent, comme toutes les fois où elle s'apprêtait à rentrer chez elle.

Et, alors qu'ils traversaient les rues de Paris afin de se rendre dans la boutique de Victoria Van Laethem, une sorcière française aussi élégante que vicieuse, son silence en était une preuve concrète.

Lilibelle redoutait sa mère aussi bien qu'elle la méprisait, et ce fut pour cette raison qu'elle ne broncha pas lorsqu'on lui annonça que cette année serait la dernière qu'elle passerait à l'Académie de Beauxbâtons, avant de rejoindre Poudlard le premier septembre 1977.

Cette décision montrait qu'en revanche, Victoria ne ressentait que de l'indifférence à l'égard de sa petite fille.

[...]

30 août 1976

Depuis l'aube, une pluie torrentielle déferlait contre les hautes fenêtres cintrées du manoir des Belcourt dans une sonorité apaisante. Le vent, tel un être indépendant, rugissait contre les fondations et entre les branches habillées des arbres. Le confort de l'automne semblait vouloir remplacer la ferveur de l'été au plus vite.

Lilibelle avait passé les trois derniers jours assise avec fainéantise sur l'un des fauteuils décorant le salon, alternant sa lecture entre plusieurs livres dénichés dans la bibliothèque à l'atmosphère feutrée qu'elle adorait déjà tant. L'odeur sénile des vieux livres et de leurs pages jaunies planait dans l'air, se mélangeant avec celle des quelques flammes s'élevant des bougies posées sur le table basse en bois.

Elle se sentait étrangement comme chez elle, et cela se justifiait sûrement par la non-présence de ses parents. Sa mère était restée à Paris pour la sortie prochaine de sa nouvelle collection vestimentaire, et son père était parti à Amsterdam afin de régler des affaires urgentes mais secrètes, prenant place au Ministère de la Magie néerlandais.

Sortie de sa rêverie fictionnelle, Lilibelle releva furtivement la tête après avoir entendu des exclamations enjouées, et son regard endormi se posa sur Henry, accompagné de ses deux grands frères et de sa petite sœur. En les voyant aussi trempés que complices, elle esquissa un faible sourire, cachant la solitude dont son cœur d'enfant unique s'était habitué depuis aussi longtemps qu'elle s'en rappelait.

Ils revenaient de leur partie habituelle de Quidditch, et la pluie ne s'était même pas présentée comme un obstacle à leurs yeux. Pour rien au monde ils ne gâcheraient une telle tradition.

Alors, qui a gagné ? questionna Lilibelle en refermant une vieille copie des Contes de Beedle le Barde.

Les deux plus âgés de la fratrie, Émile et Léandre, échangèrent un regard complice, et ils se retinrent de glousser en voyant Aimée s'affaler sur le fauteuil avec lassitude. Une moue mécontente s'était dessinée sur les traits de son visage encore enfantin malgré ses quatorze ans.

Ils ont triché, se plaignit-t-elle en tirant la langue à ses aînés. Henry est l'attrapeur de l'équipe de sa maison, on aurait forcément dû gagner.

Mais tu oublies que j'ai été capitaine à l'époque, Léandre attrapa la queue de cheval de Aimée afin de tirer doucement sa tête vers l'arrière. Si vous arrêtiez un peu de nous sous-estimer, vous auriez plus de chance de gagner.

Place que tu as forcément dû acheter, Henry leva les yeux au ciel.

Sans rien ajouter, il prit place auprès de la cheminée qu'il venait vivement d'allumer, et devant laquelle il retira sa robe verte et argent, de façon à dévoiler un simple jean et t-shirt.

Lilibelle était fascinée par l'aisance dont il arrivait à faire preuve dans de tels vêtements sur un balais. Il réussissait tout ce qu'il entreprenait, même les choses les plus minimes. Elle appréciait également tout particulièrement son style vestimentaire ; il semblait toujours tout droit sorti d'un groupe quelconque mais populaire auprès des moldus. Et cela n'avait pas l'air de le déranger pour autant.

Comme réponse, Léandre lui adressa un geste obscène, et Henry lui jeta alors son accoutrement trempé de Quidditch à la figure.

Bande d'imbéciles, marmonna Émile en s'affalant à son tour sur le canapé.

Tu as passé une bonne après-midi ? s'intéressa Aimée à l'intention de Lilibelle afin de changer de sujet.

La concernée hocha simplement la tête, peu envieuse de s'aventurer dans la narration du temps qui venait de s'écouler et de ses états d'âme. Elle se sentait reposée et effrayée, agacée par les contradictions dont son cœur faisait preuve depuis de longues semaines désormais. Mais Lilibelle ne l'avouerait jamais. Elle allait bien.

Tout allait bien.

Mais toutes ces nouvelles obligations, ces nouvelles habitudes à prendre, ces nouveaux sujets de discussions à avoir avec ces nouvelles personnes ; Lilibelle avait compris que sa vie prenait un autre tournent, et une partie d'elle aurait préféré ne pas devoir y faire face. Les choses auraient été tellement plus facile ainsi.

Elle se torturait sans cesse l'esprit en essayant de ne pas imaginer à quoi son futur ressemblerait, ni même à quoi la minute suivante ressemblerait, mais c'était à chaque fois un échec cuisant. Lilibelle était anxieuse de tout, et le poids que ses épaules portaient semblait l'accabler et lui faire perdre espoir à petit feu.

Contradictoirement, elle se savait, en effet, espoir d'un renouvellement de fierté pour le nom des Van Laethem. Mais on lui avait menti ; ce n'était pas elle la chanceuse dans cet arrangement, c'était ses géniteurs bouffis d'orgueil et envieux d'effacer leurs erreurs.

C'était comme s'ils avaient vendu Lilibelle dans l'espérance dérisoire de redorer leur ego que personne ne savait sali.

🂡 j'adore toujours autant ce chapitre, sans vraiment savoir pourquoi??? mais banger si on me demande

j'espère que ce chapitre vous a plu, bien que sirius et les maraudeurs ne soient pas (encore) apparus. ça ne saurait d'ailleurs tarder :)

bonne journée <3

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