Chapitre 1
Tout autour de moi respire le calme et la sérénité. Je contemple silencieusement l'eau calme de l'étang, entouré d'une végétation verdoyante, sous un ciel céruléen. Je suis assise sur une serviette bleue lavande avec mon calepin ébène à l'ombre d'un grand tilleul, avec ses longues et fines branches couvertes de feuilles olivacées qui effleurent l'eau miroitante. Cherchant l'inspiration, je mordille mon stylo à bille en me laissant bercer par les notes joyeuses des oiseaux cachés dans les hauts sapins, accompagnés par le bourdonnement sourd des abeilles et autres grillons. Les buissons environnant assourdissent les bruits de la route qui longe le petit plan d'eau, et j'ai presque l'impression d'être seule au monde. L'herbe chatouille mes pieds nus, je respire à plein poumon l'air saturé d'une odeur de menthe aquatique, et je profite de la douceur de ce calme après-midi de mai dans ce petit havre de paix. J'adore travailler ici, dans ce cadre magnifique. Ça m'aide à me concentrer et à trouver des idées toutes plus originales les unes que les autre. Les mots coulent tous seuls de mon stylo sur ma page, devenant des phrases, des paragraphes, des récits sous ma plume inspirée par un tel endroit. Et ce sans distraction aucune.
J'entendis cependant des pas lointains fouler l'herbe d'un rythme régulier. Il n'y avait qu'une seule personne qui sache où me trouver avec exactitude en ce moment, alors je ne lève pas les yeux de mon ouvrage, continuant de noircir ma feuille quadrillée sans m'arrêter. Le bruit se rapproche, accompagné des doux bruissements des vêtements et d'une respiration régulière. Mon visiteur s'arrête finalement près de moi, me cachant la lumière du soleil et me dominant de toute sa hauteur :
« Je savais que tu seras là..., déclara une voix masculine agréable et familière.
-Je savais que tu me trouverais ici », répliquais-je, toujours mon visage vissé à mon bloc note.
Le garçon, avec ses cheveux noirs et son air malicieux, s'accroupit derrière moi, et commence à embrasser avec lenteur mon cou, cherchant à m'empêcher de réfléchir de façon raisonnée à mon travail. Je ne prête absolument plus attention à ce que j'étais en train de faire, tant je suis à présent concentrée sur le chemin de ses lèvres contre ma peau. Néanmoins, je continue de faire semblant d'écrire, résistant à l'envie de me retourner pour lui faire face.
« Chercherez-vous à me distraire, monsieur Vallier ?, demandais-je en souriant.
-Je suis le meilleur dans ce domaine, mademoiselle Brown, dit-il en continuant de baiser la courbure de mes épaules. Je suis ta plus belle distraction...
-Tu sais que je dois travailler sur ce projet..., tentais-je de me défendre, posant tout de même mon stylo sur le sol, totalement déconcentrée par ses tendres baisers.
-Pour moi, c'est toi mon projet..., réplique-t-il en murmurant près de mon oreille. Pose voir ton carnet de malheur Fay...
-Et si je ne veux pas ?, répondis-je d'un ton volontairement provocateur et enjôleur.
-Je ne sais pas encore. Je te garderai probablement en otage, en te torturant de la pire façon... »
Je souris plus encore, rendant les armes en déposant mon ouvrage à côté de mon stylo, tandis que les bras de mon petit ami emprisonnent les miens dans leur étreinte.
« Je me rends. Tu es très convaincant quand tu t'y mets, Finn...
-Toujours... »
Une de ses mains caresse la peau découverte de mes jambes. Il soupire bruyamment d'une exaspération feinte, puis enchaîne tout en me serrant contre lui et en me privant à nouveau de l'usage de mes bras :
« Tu sais que je n'aime pas partager... »
Je portais un short en jean et un simple débardeur prune, une tenue normale et tout à fait décente en cette chaude journée de printemps. Je le reconnais cependant bien là, jaloux et possessif à l'extrême. Je tente une blague, sachant qu'il plaisante rarement sur ce sujet.
« Je ne vois personne ici... Serais-tu jaloux des oiseaux Finn ? »
Je sens ce dernier sourire dans mon dos. Je me tourne enfin vers lui pour lui faire face et l'embrasser à mon tour. Je passe la main dans ses cheveux aile de corbeau lisses et brillants et agrippe son t-shirt gris pâle pour me coller à lui.
« Alors ? Toujours jaloux des mésanges Finn?, lui murmurais-je entre deux baisers.
-J'me fiche des piafs, Faybelle..., chuchota-il d'une voix légèrement rauque.
-J'espère bien..., approuvais-je souriant contre sa bouche, victorieuse.
Je m'allonge sur l'étroite serviette, tandis que Finn et moi nous embrassions sans s'arrêter. Il se retrouve au-dessus de moi, et je me sentais bien. Il arrête ses assauts répétés sur mes lèvres et on se contemple, tout simplement amoureux. Ses prunelles, derrière ses lunettes cerclées de noir, mordorées dans les reflets du soleil, scrutent mes iris bleus sombres. Je profite de cet instant magique, afin d'imprégner mon cerveau du maximum de détail : Les reflets de ses verres autour de ses yeux, sa respiration calme mais saccadée par nos baisers, sa peau lisse sous mes doigts, ses cheveux doux et soyeux, la bonne et agréable odeur de lessive de ses vêtements.... Tout était parfait.
Jusqu'à ce que ma sonnerie de portable sonne, faisant voler en éclat notre bulle intime. Je rampe à quatre pattes pour récupérer mon téléphone et décrocher précipitamment :
« Allô ?
-Allô Faybelle ?
-Oui mamie, c'est moi.
-Faybelle, rentre à la maison, ta mère est là. Tu es où ?»
-J'arrive. Je suis à l'étang avec Finn...
-D'accord, dépêches-toi, ta mère t'attends devant la maison.
-J'arrive...»
Je soupire, puis raccroche, avec Finn qui ne me lâchait pas du regard. Grand-mère est douée pour venir au meilleur moment possible, comme si elle avait une horloge biologique de ma vie dans sa tête. Je n'ai pas envie de le laisser, mais Mamie a raison : ma mère m'attend. J'ai des devoirs à terminer pour demain, et ma mère est de garde cette nuit à l'hôpital, je vais la mettre en retard. Un ange passe, tandis que nous regardons les poissons nager paresseusement à la surface, et les grenouilles faire des longueurs de leurs petites pattes musclées, créant des ronds s'étendant à l'infini sur la surface lisse de l'eau.
« Il faut que j'y aille..., lâchais-je à Finn en contemplant l'eau qui scintille sous les rayons du soleil.
-Je sais, me répond-il assis juste à côté de moi.
-Je n'ai pas envie de partir.
-Je n'ai pas envie de te laisser partir, me dit-il en tournant la tête vers moi.
-Espèce de gamin..., lui souriais-je.
-Alors je suis ton gamin à toi, me réplique-t-il en embrassant ma joue, comme un enfant embrasserait sa mère.
Ce geste tendre de sa part me fait sourire de plus belle.
- Dans ce cas sois sage, mon petit Infini.»
Je lui souris, puis me lève et range mon campement de fortune. Je secoue énergiquement ma serviette pour me débarrasser des brins d'herbes jaunis par le soleil, puis referme mon carnet. J'embrasse Finn une fois, deux fois, trois fois, sans parvenir à me décider de rentrer.
« Je t'aime, Faybelle, me déclare-t-il, ponctuant sa phrase d'un ultime baiser.
-Moi aussi, Finn.
-A demain mon cœur.
-A demain, Finn. »
Je me dirige vers la maison de ma grand-mère, songeant à cette merveilleuse fin d'après-midi.
Après avoir dit au revoir à ma grand-mère, je monte dans la voiture de ma mère pour rentrer à la maison. Mamie habite à une grosse demi-heure de la maison, et Finn logeait avec son frère et sa mère dans le lotissement juste à côté. Mis à part au lycée, c'est difficile de le voir tous les jours. Alors chaque moments comme celui qu'on venait de passer nous est précieux.
Ma mère garde le silence dans la voiture. C'est inhabituel, car d'habitude elle engage facilement la conversation et on discute toutes les deux allègrement, avec la radio qui diffuse les dernières musiques du moment. Là, il n'y a aucun bruit dans l'habitacle. C'est mauvais signe, très mauvais signe.
Soudainement, sans préavis, Maman, après avoir nerveusement passé la main dans ses jolies mèches auburn, enclenche froidement la conversation :
« Fay ? J'ai quelque chose à te demander...
-Oui ?
- Je veux que ta chambre soit impeccable pour demain soir.
-Heu...
-Parce que je veux qu'après-demain tu t'entraînes au code. D'ici un mois je veux que tu l'aie, afin de commencer les leçons de conduite.
-Mais-
-Ça suffit Faybelle !, s'énerve Maman en me fusillant du coin de l'œil. Ça va faire maintenant plus d'un an et demi que tu es inscrite à ces fichues leçons ! Il faudrait penser à se bouger un peu pour l'avoir.
-J'ai jamais demandé à le passer, ce permis, maugréais-je, presque pour moi. Tu sais que j'ai peur...
-Et tu crois que c'est en restant comme ça que ça va changer ? Cesse de faire des caprices d'enfant de trois ans, Faybelle ! Dans un peu plus d'un an tu seras majeure, et le permis te sera vital, pour aller travailler, ou même partir en vacances ! Je comprends que tu ais peur, mais là je te demande de passer la théorie d'ici un mois. C'est faisable non ?
-Je n'ai pas le temps de m'entrainer, avec mes devoirs...
-Ne me sors pas l'excuse des devoirs, Faybelle, me rétorque-elle. Comment elles font, tes copines ? Je suis sûre qu'Anat l'a déjà depuis bien longtemps. Pareil pour Gaby et Doriane. Et ton copain Finn ? Comment ça se fait ? Expliques-moi, je suis curieuse...
-J'en sais rien !, éclatais-je de rage. J'en sais rien comment elles peuvent avoir des bonnes notes, décrocher le permis, avoir un copain et une vie sociale. J'en sais strictement rien Maman ! Alors pourquoi me jeter dans la figure tout ça maintenant ?
-Déjà tu vas baisser d'un ton, Fay, déclare ma mère d'un ton sec. Je ne fais que constater. Es-tu au courant de la somme qu'on a mis dans ton permis B ? On a travaillé pour avoir cet argent, ton père et moi, ça n'est pas tombé du ciel. De plus, ce n'est pas la première fois que je te rappelle de travailler ton code. Maintenant qu'on approche des vacances, je veux que tu l'ais, un point c'est tout.
-Et mon bac de français ?, lui répliquais-je avec acidité. J'en fais quoi de mes révisions ?
-Ah non, tu me sors cette excuse à chaque fois, dit-elle avec un soupçon d'ironie, ça ne marche plus. Tu t'en sors en français, et puis ça ne dure pas non plus trois heures ton entraînement. Alors arrêtes-voir avec tes excuses en bois deux minutes. Tu ranges ce soir ta chambre, je l'inspecterai demain soir, et tu commenceras tes séances dans la foulée. S'il faut que je sois à côté de toi pour que tu les fasses, je le ferais !
-Quoi ? Mais-
-Fin de la discussion. », Lâche-t-elle, tuant dans l'œuf mes vaines protestations. Je voyais dans le rétroviseur principal ma mère me lancer des regards courroucés, ses prunelles chocolat d'habitude si chaleureuses pouvant presque me méduser sur place.
Maman se gare dans notre cour, et je sors en trombe de la voiture. Je monte les escaliers en direction de ma chambre, me retenant de hurler de rage. Mon après-midi parfait avec Finn et mon sentiment de plénitude me parait dater de trois mois depuis ma dispute avec ma mère. J'en ai assez !
Je rentre dans la dernière pièce au fond du couloir et ferme la porte en bois d'un coup de pied. C'est vrai qu'un peu de ménage ne ferait pas de mal, mais je n'ai vraiment pas envie d'attaquer ça aujourd'hui. Je m'écroule sur mon lit, exténuée et regarde mon portable. Aucune notification, pas même de mon application d'histoires en ligne. Aucun chapitre n'a été posté. Alors je me relève et commence à ranger à contrecœur ma chambre bordélique.
« Fay' ! A table !
-J'arrive... »
Je descends jusqu'à la cuisine, où mon père mets la table tandis que maman fini de se préparer pour aller bosser. Je sors les verres et les dessous de plats sans piper mot. Nous nous mettons à table ; et Papa discute avec Maman sur sa journée, les nouvelles locales, en clair des banalités habituelles. Je mange en silence, les écoutant sans rien dire.
« Allez, j'y vais, lance sans préavis ma mère en consultant sa montre. Je vais être en retard.
-D'accord. A plus ma chérie», répond mon père en caressant d'un geste tendre le visage de maman.
Ils se tiennent à quelques centimètres l'un de l'autre et restent collés front contre front quelques instants. Les seules fois où je les ai vus s'embrasser, c'est lorsque Papa revenait de mission, étant dans la marine nationale. Mes parents ne sont pas démonstratifs, mais lorsqu'ils s'embrassent, ils sont extrêmement passionnés. Je salue également ma mère d'une simple bise, sans rien ajouter. Notre dispute est bien trop récente pour que j'ajoute quelque chose, et nous sommes toutes les deux bien trop fières pour nous pardonner aussi facilement.
On continue notre repas dans le silence, mon père et moi, silence tout à fait confortable seulement interrompu par le cliquetis de nos couverts. Cependant mon père le brise en lançant de but en blanc :
« J'ai reçu un ordre de mission ce matin. »
Je relève la tête, surprise.
« -Je vais bientôt partir en Antarctique, pour accompagner des scientifiques faire des recherches et tester des manœuvres sur le terrain.
-Quoi, déjà ? Mais tu viens à peine de revenir il y a deux semaines ! Tu as droit normalement à quelques mois près de ta famille, non ?
-Calmes-toi Faybelle. J'ai... Tu sais que notre situation financière est plus que limite en ce moment. Ta mère et moi-même avons convenus à travailler plus d'heures, elle en travaillant plus de nuit à l'hôpital et moi en acceptant plus de missions mieux rémunérées. Du coup, je me suis inscrit sur la liste prioritaire pour les missions en tout genre. Je suis donc en tête de file pour cette mission de sept mois... »
J'en lâche ma fourchette tant je suis stupéfiée par sa réponse :
« Sept mois ?! Mais, mais... Ça veut dire que...
-Oui Fay'. Je ne serais pas là pour ton anniversaire, ni pour ta rentrée en terminale. Je suis désolée ma puce. », déclare doucement mon père.
J'en reste bouche bée, ne sachant que dire. Il venait de revenir il y a deux semaines d'une longue mission au beau milieu du Pacifique, et maintenant Papa m'annonce tranquillement qu'il va repartir aussi sec à l'autre bout de la planète. Malgré son ton paisible et sa voix posée, je ne peux encaisser cette nouvelle sans broncher.
« Pourquoi ne pas m'en avoir fait part ?
-Pour ne pas te peiner, Fay'. Tu as bientôt tes épreuves, et tu dois passer ton code alors, on pensait bien faire en-
-Ah, vous pensiez bien faire... Vous pensiez que je ne pouvais pas comprendre, n'est-ce pas ? »
Je m'énerve d'un coup, laissant libre court à toute la colère que j'ai accumulée jusqu'à maintenant :
« Pourquoi ne m'avoir rien dit ? Je ne suis plus une enfant papa ! Alors pourquoi avoir gardé le secret, POURQUOI ? Pourquoi ne pas m'avoir dit que tu prenais des heures supplémentaires, j'aurais pu aider ! J'aurais pu refuser ce voyage scolaire dans les Alpes ! J'aurais pu chercher un travail ! J'aurais pu... J'aurais pu...
Je m'interromps soudainement. Ne m'étant même pas rendue compte que je m'étais levée de ma chaise, je me rassois, ravalant mes larmes qui mouillaient mes yeux. Je le relève péniblement vers mon père, qui me fixe de ses beaux iris verts opaline remplis de compassion à mon égard. Il restait néanmoins stoïque, ne laissant aucune autre émotion apparaître sur son visage dur et militaire. C'est dans le silence que je me force à ravaler mes sanglots inutiles et pathétiques. Je me lève à nouveau de ma chaise, range sans rien dire mon assiette et mes couverts dans le lave-vaiselle, puis me dirige vers la porte de la cuisine, me retournant juste avant de passer l'encadrement de la pièce :
« Très bien. Et quand pars-tu, exactement ?, ai-je repris, d'un ton que je voulais garder neutre malgré les petits trémolos ténus mais présents dans ma voix.
-Demain...
-Évidemment... », Répliquais-je, sarcastique
Je lui tourne à nouveau le dos pour fuir cette ambiance tendue et malaisante dans ma chambre sans rien ajouter, et laisser mes vraies larmes tomber, mon visage vissé contre mon oreiller. Papa ne viendrait pas me voir, étant très mal à l'aise dès que je pleure. Il m'a pourtant apprit à être forte, à ne pas pleurer comme ça, surtout que ce n'était pas la première fois qu'il partait pour un long moment. Cependant, il fallait que j'évacue toutes mes émotions négatives de la journée. J'oublie Maman et ses remontrances, la nouvelle de Papa, mes exams qui approchent, mes obligations... Je savais au fond de moi qu'ils avaient raison, qu'ils ne pensaient pas à mal et qu'ils ne veulent que mon bien. Mais j'avais envie de me déconnecter de mes responsabilités, de toute rationalité. J'avais envie que tout s'envole, que je m'envole loin de tout ça, juste le temps d'un instant.
Au bout d'une petite demi-heure, je reviens à la réalité froide et logique pour aller me passer un peu d'eau sur le visage. Le miroir me renvoie l'image d'un visage rougit par mes pleurs, avec des yeux légèrement bouffis et des joues striée de sillons transparents mêlés de légères traces noirâtres, derniers pauvres restes de mon mascara. Je reprends doucement figure humaine en aspergeant vigoureusement ma peau avec l'eau fraîche du robinet, essuyant ainsi les traces de mon honteux et puéril moment de faiblesse.
Une fois que je me sens mieux, je retourne dans ma chambre, décidant qu'une bonne lecture m'aidera à oublier mon accès de colère d'aujourd'hui. Je fouille dans ma bibliothèque pour dénicher le livre idéal, sans le trouver. Pourtant, en retirant quelques ouvrages, je finis par mettre la main sur un roman que je pensais ne plus jamais revoir de ma vie. Je passe la main sur sa couverture de cuir brun abîmée par le temps, puis sur le titre et l'image gravés dessus, dont les dorures commençaient déjà à s'estomper. Me mettant en tailleur au milieu de des mangas et autres livres délaissés, je me mets à murmurer, comme pour le prouver à moi-même que je ne rêvais pas :
Peter Pan et Wendy.
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