10 - Arya
Un bruit sourd venant frapper contre la porte la fit sursauter.
-Qu'est-ce que c'était ? hurla quelqu'un.
Un bélier. Ils ont réussi à ramener un bélier jusqu'à la porte. Ils ont réussi à traverser notre immense armée, à passer la première porte, puis maintenant, ils viennent enfoncer la deuxième. La dernière.
Des hurlements retentirent. Au-dessus des remparts, des soldats balançaient des seaux d'huiles, des blocs de pierres, tout ce qui pouvait tuer ou blesser. Des archers continuaient à décocher des flèches, pour certaines enflammées. Derrière la porte, personne ne pipa mot. Tous avaient déjà l'épée en main. Sur les visages, la terreur était marquée, bien encrée dans le regard. Étrangement, elle se sentait plutôt calme. Elle avait affronté la mort. Ce n'était pas une armée d'immaculés qui allait lui faire peur. Un deuxième boum ! résonna entre les vieilles pierres du château. De nouveaux cris. Ils se remplacent. Ils remplacent leurs morts. Une flèche atteignit un soldat qui s'apprêtait à lancer un nouveau seau.
-GARDEZ VOS POSITIONS ! Hurla Arya lorsqu'elle s'aperçut que les plus jeunes commençaient à reculer au troisième boum.
Au quatrième, l'énorme porte trembla si fort que la grosse masse de bois qui la gardait fermée se fissura. Il faudrait penser à la faire en fer. Une autre flèche atteignit un archer. Un carreau atteignit un lanceur de pierre dans le cou. Du sang gicla et il s'effondra. Un cinquième boum. La fissure s'agrandit.
-On devrait maintenir la porte, lui lança un seigneur nordien dont elle ignorait le nom.
-Parce que vous croyez que vous allez pouvoir maintenir la porte alors qu'une énorme masse de bois n'y arrive pas ?
-On pourrait la retenir avec des planches.
-Vous en voyez une quelque part ?
A vrai dire, ils n'avaient pas pensé à prévoir un renforcement. L'entrée en guerre avait été précipitée et ils n'avaient pas eu beaucoup de temps pour se préparer.
Un sixième boum. La fissure s'était considérablement agrandie. Encore un et la porte allait céder.
-PREPAREZ-VOUS !
Des cris étouffés se firent entendre, par-ci par-là, des hurlements de douleur provenant de l'autre coté de la porte.
Un septième boum. La masse en bois craqua et céda puis la porte s'ouvrit brusquement. Une vague d'immaculés et de soldats de seigneurs de Westeros déferla à l'intérieur de la cour. Arya sortit Aiguille de son fourreau et se lança à l'attaque, hurlant à pleine voix « WINTERFELL ! » La plupart firent de même. Un soldat Lannister fonça droit sur elle. Elle se rua sur lui, tenta de lui asséner un coup au creux du coup, mais il para l'attaque et riposta. Elle l'évita de justesse. Son épée siffla près de son oreille. Ils se lancèrent de nouveau l'un contre l'autre, en montrant bien qu'ils se vouaient mutuellement une haine mortelle. Sentant une présence derrière son dos, elle abattit aiguille sur le poignet de l'adversaire. Il y perdit sa main. Rapide comme un serpent, elle se faufila derrière lui et l'épée de son compagnon le traversa. Elle le laissa s'effondrer à terre puis engagea une lutte contre ce deuxième ennemi qui ne dura que quelques secondes avant qu'elle n'arrive à lui transpercer son haubert. Un immaculé se rua sur elle. De justesse, elle se baissa afin d'éviter sa pique. Poussant un cri de rage, elle empoigna le manche et le brisa, s'appuyant de tout le poids de son corps pour y parvenir. Désarmé, elle lui asséna un coup dans le creux de l'épaule avec sa propre pointe. Il s'effondra, mort. Un soldat l'attaqua par derrière et tenta de l'étouffer avec une barre de bois qu'il pressa contre sa gorge. Elle asséna un coup de pied direct à un adversaire qui fonçait droit sur elle, prenant au passage de l'élan pour tourner sur elle-même et atterrir derrière l'étrangleur, inversant ainsi les positions. Tandis qu'elle l'étranglait à son tour, elle aperçut Sansa au sommet du rempart principale. Des immaculés avaient réussi à monter et s'attaquer aux gardes de la reine. Sa sœur tenait un poignard entre ses mains, mais face à des immaculés elle n'avait aucune chance. S'apercevant que son adversaire se battait toujours pour vivre, elle lâcha la barre de bois, s'empara de sa tête avec vitesse et la lui tourna jusqu'à ce qu'elle entende un énorme crac !. Elle le lassa choir au sol puis se fraya un chemin dans les coups et les attaques des hommes. Sur son passage, plusieurs essayèrent de s'interposer. Elle les esquiva, puis enfonça son épée dans les endroits où leurs armures ne les protégeaient pas. Elle arriva bientôt aux marches qui permettaient de monter aux remparts quand un soldat Baratheon la plaqua contre le mur et lui asséna un coup de poing au visage. La douleur lui arracha un cri mais elle se ressaisit et lui enfonça la pointe de son épée entre ses deux yeux. Elle repoussa son corps avec dégoût et monta les marches.
Arrivée au milieu, elle affronta un immaculé, parant sa lance avec sa lame. Elle se baissa, dégainant son poignard et le lui enfonça à l'intérieur de la cuisse. Lorsqu'elle se releva, il lui appliqua son manche contre sa gorge. Elle tituba avec lui, fit dos au vide, l'entraînant avec elle et le poussa au delà des marches. Il lâcha prise et atterrit au sol. Un chevalier du Val lui enfonça son épée dans la bouche, terminant ainsi le travail.
Elle monta un peu plus haut, pourfendant de sa lame la tête d'un soldat ennemi qui lui faisait dos, libérant un nordien de son adversaire. Son regard se reporta de nouveau sur sa sœur. Il ne restait plus beaucoup d'hommes autour d'elle. Impuissante, elle les regardait se battre, le poignard à la main. Arya monta jusqu'à atteindre le chemin de ronde. Là-haut, elle fit la rencontre de plusieurs immaculés qui ne tardèrent pas charger. Elle se battit férocement. Elle veilla à ne pas gaspiller ses coups, mais s'employa à frapper de son mieux, bosselant et fauchant leur heaume, faisant voler les mailles des hauberts, combat si rude qu'elle se couvrit de flot de sang. Elle ne sut combien elle en avait fait tomber du haut de l'enceinte, ni dans combien de corps elle avait enfoncé sa lame.
Son but restait unique. Chaque seconde qui passait, sa sœur se retrouvait plus en danger encore. Il ne restait que quelques mètres de distance entre elle et Sansa. Plusieurs hommes, profitant de son déblayage, montèrent à sa suite et se ruèrent sur les soldats ennemis. Arya n'eut qu'à écarter quelques corps pour pouvoir passer.
Soudain, à son grand effroi, elle aperçut une broche représentant un dragon tricéphale entouré sur lui même, accrochée sur une armure d'immaculé. Torgo Nuhdo. Il avançait vers Sansa à grand pas. Celle-ci était malheureusement trop occupée à enfoncer son poignard dans un soldat Baratheon pour s'apercevoir que le plus féroce des Immaculés approchait d'elle. Il fallait qu'elle s'enfuie. Mais Arya avait beau le lui hurler, elle n'entendait pas : les cris et hurlements qui retentissaient et résonnaient entre les murailles couvraient n'importe quel bruit. Elle courut, écartant sauvagement chaque ennemi qui se dressait sur son passage. L'immaculé était presque arrivé à sa hauteur, mais Sansa était toujours de dos.
-SANSA ! DERRIERE TOI !
Mais elle ne l'entendit pas. Elle courut plus vite encore. La terreur lui tordit les entrailles lorsqu'elle vit Torgo Nuhdo brandir sa pique derrière Sansa qui enfonçait son poignard dans un autre soldat.
Elle n'était qu'à quelques pas.
Elle bouscula le dernier combattant qui se dressait sur son chemin.
L'immaculé s'apprêtait à abattre son arme sur Sansa.
Non.
Pas elle.
-Nooooooon !
Un froid immense lui emplit la poitrine. Elle était arrivée à sa hauteur. Elle se trouvait désormais entre Torgo Nuhdo et sa sœur.
Mais la lance l'avait transpercée.
Elle échappa un hoquet de douleur, ouvrit la bouche pour laisser échapper un cri qui ne vint jamais. Elle retira la lance, dans un effort qui lui fit arracher une grimace.
Puis avec toute la force qui lui restait, elle retourna l'arme et enfonça la pique dans la gorge de l'immaculé. Un filet de sang s'échappa, et le plus féroce et fort immaculé de Daenerys Targaryen tomba du haut de l'enceinte pour s'écraser avec le plus grand fracas au sol.
Le froid qui se propagea à travers son corps était horriblement douloureux.
Ses jambes ne la supportèrent plus, mais au lieu de rencontrer le sol, dur et gelé, elle se retrouva dans les bras de sa sœur, qui la maintinrent légèrement au dessus du sol.
Sansa était à présent accroupie à ses côté, une expression d'effroi marqué sur son joli visage.
Arya hoqueta. Un liquide chaud se répandait à travers sa peau et les couches de tissus.
Elle ne sentait déjà plus ses mains.
Était-ce le froid ?
Non, elle n'avait jamais vraiment craint le froid.
Elle était une Stark.
-Arya... sanglota Sansa.
Elle s'aperçut que des larmes coulaient le long de sa joue.
Elle ouvrit la bouche pour parler mais aucun son ne sortit.
Elle allait mourir.
Sous ce ciel nuageux, au-dessus de combats acharnés, elle allait mourir.
De tout les visages de la Mort, il ne lui restait que celui-ci à découvrir.
Voyez, Dieu Multiface. Je suis arrivée au bout du chemin.
-Non...
La voix de Sansa la ramena au présent.
Elle observa le visage de sa sœur. Ses joues étaient trempées. Elle pleurait.
Elle était sauvée à présent. Elle l'avait sauvée. Elle ne regrettait rien.
Un filet de sang coula le long de sa bouche.
Elle n'arrivait plus à inspirer. L'air ne rentrait plus dans ses poumons.
Elle étouffait de l'intérieur.
Elle ne sentait plus ses membres. La seule partie de son corps qu'elle percevait encore était la douce brise glacée qui caressait la peau de son visage.
Elle ouvrit la bouche une nouvelle fois.
Cette fois-ci, elle put murmurer une dernière parole, dans un ultime effort :
-Sansa...
Un dernier hoquet secoua son corps, puis sa tête bascula légèrement en arrière. Son regard fixa une dernière fois le ciel, puis s'éteignit. Sa main, posée sur sa plaie, tomba mollement au sol.
Ainsi mourut Arya Stark de Winterfell, fille de lord Eddard Stark et Lady Catelyn Stark.
Pour toujours,
Et à jamais.
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