Chapitre 9

La nuit est sur le point de tomber, ça fait quelques heures maintenant que Elias m'a déposé chez moi afin que je puisse me préparer pour ce soir. J'ouvre la porte de douche, toute la buée se propage dans la salle de bain, j'enroule une serviette autour de moi, et sans que sache pourquoi, je me sens nerveuse. Pourquoi je me mets dans un état pareil ? Savoir qu'il a une telle emprise sur moi aussi rapidement m'exaspère, je me sens faible, et je ne sais pas si tout ceci est une bonne chose. Je suis si vulnérable, du moins c'est l'impression que j'ai, mais je suis inévitablement attirée par lui.

Je relève les yeux vers mon miroir, recouvert par la vapeur d'eau, je passe ma main contre la paroi et fais immédiatement face à mon reflet. Mes cheveux collent sur mes épaules dénudées, mes yeux rouges et mon air fatigué font peine à voir. Néanmoins, je me sens nettement mieux qu'il y a quelques jour. Si ma mère était au courant de mon état, elle m'aurait probablement forcée à rentrer au pays, et imaginer quitter la ville me serre le cœur.
Un long soupir s'échappe de mes lèvres en y pensant, je suis beaucoup trop attachée aux choses, c'est un fait, j'ai toujours été comme ça. Malheureusement, ça me porte plus préjudice qu'autre chose.

Mon portable vibre, me sortant de ma torpeur.

« Je passe te chercher dans une heure, sois prête. - Elias »

Assez détaché, son message pourrait presque me faire penser qu'il est en colère, mais cela n'aurait aucune logique, je devrais laisser tomber.
Je lève une nouvelle fois les yeux vers le miroir. Alors, mon corps entier se crispe et mon cœur accélère. La porte de la salle de bain ouverte, je peux voir l'intégralité de ma chambre, légèrement plongée dans la pénombre. C'est là, dans un coin de la pièce de ma chambre, qu'une silhouette se dessine, dont les yeux jaunes percent la nuit. Mon corps tremblant se tourne brusquement vers la porte, mais il n'y a rien, je frissonne encore plus, la sueur froide perle mon front. Je regarde dans mon miroir, plus rien non plus.

C'est pas possible, je deviens complètement cinglée. Je soupire pour évacuer la pression, mais les tremblements persistent. Je passe mes mains sur mon visage, c'est rien que de la fatigue, juste de la fatigue, il faut que je me calme.
J'enfile rapidement mes vêtements, j'arrange mes cheveux avant de sortir en vitesse de la salle de bain.

Je n'arrête pas d'y penser, les yeux rivés vers la fenêtre de mon salon, quel genre de fatigue provoque des hallucinations ? Je ne fais peut-être pas médecine, mais je ne pense pas être aussi fatiguée que cela, physiquement, je me sens plutôt en forme, certes je ne déborde pas d'énergie mais je suis loin de m'écrouler.

Mon portable sonne de nouveau, Elias est arrivé. Mon cœur frappe contre ma poitrine, je prends ma veste ainsi que mon sac et ferme la porte derrière moi. J'emprunte l'ascenseur afin de rejoindre le hall de l'immeuble pour enfin sortir, l'air froid me frappe le visage et je le vois. Adossé contre sa voiture, les mains dans les poches de son pantalon noir, un tee-shirts blanc et une veste en cuir sur les épaules, il est terriblement beau.
Sans m'en rendre compte, trop perdue dans mes pensées, je me suis avancée jusqu'à lui, ses yeux noirs me scrutent de haut en bas, non loin d'être vulgaire, il détaille ma tenue. Vêtue d'une jupe en cuir, d'un simple haut blanc et d'une veste assortie, j'avais eu envie de me sentir bien. Un doux sourire s'étend sur ses lèvres, et à cet instant je craque complètement, comme s'il n'était pas réel. Il me donne l'étrange l'impression d'être dans un monde parallèle. C'est très perturbant, car j'ai beau eu le détester, lui pardonner m'a offert une nouvelle vision sur lui, et j'ai l'impression de déceler en lui quelque chose qui me pousse à vouloir l'explorer. Je suis sûrement aveuglée par sa beauté inhumaine, mais je me sens obligée de comprendre qui il est.

- Tu es ravissante, susurre-t-il.

Faites que je ne rougisse pas, de quoi me rendre plus ridicule que je ne le suis déjà.

- Merci, articulé-je.

Elias affiche un plus grand sourire avant de m'ouvrir la portière de sa voiture, je le remercie et grimpe à l'intérieur. Il fait rapidement le tour du véhicule pour s'installer du côté conducteur, et démarre la voiture après avoir vérifié que j'ai bien bouclé ma ceinture. Il ne fait que démontrer une attitude totalement différente, et cette attention ne m'est pas indifférente. J'en suis même assez attendrie. Lui qui a pour habitude de montrer une image froide, ces derniers jours m'ont permis de voir que ce n'était qu'un masque, évidemment je m'interroge encore sur ce changement soudain de comportement, mais je vais pas m'en plaindre, au risque de retomber comme avant.

Il engage la voiture sur la route, et prend la direction du centre ville. La radio allumée ne fait que camoufler un silence pesant, je ne peux m'empêcher de penser à l'incident qui s'est produit dans ma chambre, et qui me fait horriblement peur. Lorsque j'ai ces hallucinations, j'ai l'horrible impression d'être dans un cauchemar éveillé, et le pire c'est que tout me semble réel. Sauf que je suis la seule à voir ça, preuve que ça ne l'est pas, et que j'ai véritablement un problème.

- Tu es bien silencieuse, constate Elias en me jetant un coup d'œil.
- Désolée je réfléchissais...
- Tu veux en parler ? Tu sembles assez contrariée.

Alors j'ai l'air si préoccupée que ça ? Pas étonnant avec la tête que j'ai, mais il est hors de question que je lui dise que j'ai des hallucinations, rien de mieux pour faire peur à quelqu'un.

- C'est rien d'important je t'assure, les cours, tout ça... dis-je vaguement.

Elias pose une fraction de seconde ses yeux sur moi, les sourcils froncés. Il n'a pas l'air convaincu par ce que je dis, mais finit par hocher la tête et se concentrer sur la route. Son profil me laisse entrevoir la dureté et la douceur de son visage, il a les deux à la fois. Sa mâchoire parfaitement définie se contracte de temps à autre, tandis que quelques unes de ses petites bouclettes brunes retombent sur son front, créent des ombres soulignant son nez droit et ses long cils ornant ses iris profonds.

Qu'est-ce que je suis en train de faire là ?

Je suis définitivement folle. Sûrement attiré par mon regard trop persistant sur lui, Elias sourit de toutes ses dents sans pour autant me regarder, je suis démasquée. Je tourne vivement la tête, les joues chaudes en me maudissant d'avoir été si stupide.

- Quelque chose attire ton regard Bryséis ? dit-il d'une voix rauque.
- Absolument pas, réponds-je trop rapidement.
- Tu es une piètre menteuse, se moque t-il.

Il glousse, moqueur. Bien que son rire fait accélérer les battements de mon cœur, je roule les yeux, encore gênée par la situation.

- On dit plus rien maintenant ? me sourit le brun.
- Je n'ai pas trouvé l'utilité à te répondre, rétorqué-je en le confrontant du regard.

Il sourit en secouant la tête tout en reportant son attention sur la route.

- Insolente.
- Narcissique, réponds-je.

Finalement un sourire s'étend sur mes lèves. Enfin arrivé, Elias se gare devant le bar, et je me sens d'un seul coup nerveuse. Pourquoi ? Probablement parce que je sais que Esteban ne va pas arrêter de le charrier, qu'Eden risque de se montrer trop curieuse et Chris trop méfiant. Peut-être que je n'aurais pas dû lui proposer de venir.

- Tout va bien ?

Je tourne la tête vers lui, éclairé par les lumières artificielles de la ville qui passent à travers les vitre de la voiture, il est complètement tourné vers moi, un sourire rassurant sur le visage. J'ai l'envie irrésistible de m'approcher de lui, je me perds dans son regard et absolument tout autour de moi semble bouger au ralenti. Je le vois peu à peu perdre son sourire, son expression devient plus grave, tandis que ma respiration se fait plus lourde, mon cœur plus rapide, mon corps entier tremble. Doucement, il lève sa main vers moi, ses doigts chaude entrent en contact avec la peau froide de ma joue, je frissonne irrémédiablement. Ses yeux parcourent chaque parcelle de mon visage, et je ne peux me détacher des siens alors qu'il glisse délicatement une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.

Qu'est-ce qui se passe ?

Comme lors de notre première rencontre, la première fois que je l'ai vu, j'ai senti cette attraction entre nous. C'est aussi inexplicable que la première fois, aussi fort, et j'ai l'impression de me laisse tomber dans quelques chose d'agréablement dangereux, et je n'ai aucune envie de partir.

- On devrait y aller, murmure-t-il.

J'expire lourdement avant de me contenter de hocher la tête, il s'éloigne de moi puis sort de la voiture. Mon corps tremble encore légèrement, comme si ses doigts n'avaient pas quitté ma joue, je ressens encore sa chaleur.
Bordel, il faut que je me reprenne.
Ma portière s'ouvre sur un Elias souriant.

- Merci.

Je sors finalement de la voiture et l'air frais s'infiltre dans mes poumons, ça me calme. Sans un mot, je me dirige vers l'entrée du bar, suivie de près par Elias. Je remarque rapidement mes amis, assis à une table, ne semblant pas nous avoir remarqués. Je pose les yeux sur l'homme qui m'accompagne, un peu en retrait, il reste tout de même proche de moi, et baisse la tête pour pouvoir me regarder.

- Je te suis, affirme-t-il.

Je m'avance alors vers amis qui ne tardent pas à me voir, ils affichent tous les trois un grand sourire en me voyant, mais lorsqu'ils remarquent Elias derrière moi, Esteban et Eden affichent des sourires remplis de sous entendus tandis que Chris fronce les sourcils.

Tout va bien se passer.

- Qui est-ce que tu nous ramènes Bryséis ? s'exclame Esteban.
- Je vous présente Elias, commencé-je, Elias voici Esteban, Eden et Chris.
- Ravis de te connaître ! Restez pas debout, prenez une chaise, s'empresse d'ajouter Eden.

Elias reste silencieux, je prends une chaise et il tire celle à côté de la mienne.

- Vous voulez boire quelque chose ? propose finalement Chris.

Le blond n'est visiblement pas enchanté par la présence de Elias, il s'est toujours comporter comme un frère se comporte avec sa sœur, parfois trop protecteur.

- Comme d'habitude s'il te plaît, fais-je en souriant.
- Un whisky, s'il te plaît, articule Elias.

Elias est assis dans le fond de sa chaise, les bras croisés contre sa poitrine, il ne lâche pas mon ami du regard, n'importe qui pourrait voir la tension qui émane de ces deux hommes. J'entends Eden glousser avec Esteban.

- Ça commence par du lourd, glousse mon amie, je me vois dans l'obligation de suivre, Bryséis tu suis avec moi ! Rapporte nous des shots.
- Je pense pas que ça soit une bonne idée, tu as déjà pas mal bu, constate Esteban.
- Est-ce que tu es ma mère ? Non, alors la ferme.

Je ris face à l'agressivité de mon amie, et Esteban lève les mains en signe de capitulation. Eden passe vite à autre chose alors que Chris part nous chercher notre commande, et elle se penche un peu plus sur la table.

- C'est pas la première fois que tu viens ici toi, je t'ai vu quelques fois avec ton acolyte, dit-elle à Elias.
- Il m'arrive de venir ici quelque fois en effet, sourit poliment le concerné.
- D'où tu viens ? demande à son tour Esteban.
- Je suis né ici.
- Et tu as quel âge ? enchaîne Eden.
- Vingt-quatre ans.

Elias répond simplement, sans être impoli, mais sans être non plus des plus agréables.

- Qu'est-ce que tu fais dans la vie ? continue la rousse.
- Eden ça suffit ! La reprends-je, laisse le tranquille.
- Quoi ? Je me renseigne, me sourit-elle.

Je soupire, j'adore Eden, mais elle manque cruellement de tact, et a tellement pris l'habitude de dire ce qu'elle pense qu'elle en oublie parfois les limites. Chris revient avec nos verres, j'attrape le verre d'Elias pour le lui donner. Nos doigts se touchent, me provoquant encore des frissons. Il m'adresse un sourire auquel je réponds timidement.

- Bon aller Bryséis, cul sec !

Eden pose un shot devant moi, je vois le métis en prendre un aussi, nous trinquons tous les trois avant de vider le contenu de notre verre. Le liquide me brûle la gorge, je grimace, je ne comprends définitivement pas pourquoi Eden aime ça.

- Tu verrais la tête que tu fais ! se moque Chris.
- Tais-toi un peu, ordonné-je, faussement vexée.

Leurs rires redoublent, je tourne la tête vers Elias, qui aborde un sourire moqueur. Je lui lance un regard noir, ce qui le fait sourire encore plus.

Le reste de la soirée se passe sans encombre, mes amis ont légèrement abusés de l'alcool, ils sont bruyants, Chris et Eden se moquent actuellement du manque de culture musicale d'Esteban qui n'a pas su reconnaître une seule musique diffusée dans le bar. Étant parfaitement lucide, je ne peux que rire face à leurs comportements. Quant à Elias, il n'a presque pas décroché un mot, je m'attendais à ce qu'il se retrouve dans le même état que les trois autres après ce qu'il a bu, mais il ne semble pas du tout affecté par l'alcool.

- Tu t'ennuies pas trop ? demandé-je inquiète. Je suis désolée si c'est le cas, je-
- Tout va bien Bryséis, me coupe-t-il, je t'assure ça me fait plaisir d'être ici avec toi.

Elias m'offre un beau sourire, malgré les cris de mes amis et l'agitation autour, je me sens paisible, peut-être parce que la musique rock a été remplacée par quelque chose de plus doux, ou tout simplement grâce aux yeux noirs de Elias.
Soudain, il se lève, sans arrêter de sourire, et me tend sa main.

- Danse avec moi Bryséis.

Choquée, mon cœur rate un battement, il fait soudainement chaud, je regarde tout autour de moi.

- Personne d'autre ne danse, remarqué-je gênée.
- Et alors ? lance t-il.

Je vais mourir sur place.
Je glisse finalement ma main dans la sienne, après avoir vérifié si mes amis prêtaient attention à nous, mais ce n'est pas le cas. Il sourit un peu plus, il me tire vers ce qui s'apparente le plus à une piste de danse et se positionne face à moi. Sa main glisse sur ma taille, il attire doucement mon corps près du sien. J'ai le souffle coupé, mon cœur bat la chamade, je ne sais pas ce qui me tient encore debout. Mes yeux fixés sur nos mains liées, une douce et étrange sensation s'empare de mon ventre, je me sens étrangement bien mais en même temps sur le point de défaillir.

« Can you see
The glow that I see
When I look in your eyes
I know that you feel
The spark that I felt
When you stepped in my life »

La chanson de Curtis Walsh traduit exactement ce qui s'est passé ce jour là, le jour où je l'ai vu pour la première fois.

- Regarde moi Bryséis, murmure-t-il.

Je tourne mon visage vers le sien, mes yeux se plongent dans ses iris noirs. Je la vois encore, cette lueur, je ressens toujours cette étincelle lorsque je le regarde, et c'est toujours aussi terrifiant. Comprendre ce qui se passe et une des choses qui me sont nécessaires, or dans le cas présent, je suis complètement perdue, est-ce réellement possible une attraction pareille ?

- Bryséis ? m'appelle-t-il.

Je sors de mes rêveries pour découvrir un homme visiblement inquiet, les sourcils légèrement froncés, il affiche un air étrange, alors je lui souris.

- Ça va, le rassuré-je.

Ses traits se détendent et un rictus s'étire sur le coin de ses lèvres, avant de relever la tête, le regard perdu dans le vide.
À en juger par ses mouvements, Elias semble savoir ce qu'il fait, je me laisse guidée par ses pas.

- Aussi étonnant que ça soit, tu n'es pas si mauvais que ça, le taquiné-je.
- Et ce n'est qu'une infime partie de mes talent, je pourrais encore te surprendre, dit-il un sourire aux lèvres.

Il n'est pas croyable.

- Tu es très vaniteux.

Il baisse son regard vers moi, avant de rapprocher son visage du mien, qu'est-ce qu'il fait là ? Je peux sentir son souffle chaud s'abattre sur mon visage, et fait s'affoler mon rythme cardiaque.

- Et bien plus encore, me susurre t-il à l'oreille.

Un long frisson me traverse l'échine, j'avale difficilement ma salive, tandis qu'il se recule enfin.

Bordel, il va réellement finir par me tuer.

- Ça te dit d'aller faire un tour ? me propose Elias.
- D'accord, chuchoté-je.

Il me lâche doucement afin de se diriger vers notre table, et moi je reste plantée la. Qu'est-ce qui m'arrive ? Il faut que me ressaisisse, je ne peux pas me montrer aussi faible devant lui, je suis pas comme ça, alors pourquoi dès qu'il me regarde je me liquéfie ? Je suis ridicule.

- On y va ?

Elias me tend ma veste et mon sac, je l'enfile puis lui prends mon sac avant de le suivre. Nous sortons du bar, l'air frais fait enfin descendre la température de mon corps.

- Ça te dérange pas si on marche un peu ? lui demandé-je.
- Non, mais éloignons nous de tout ce bruit.

Nous marchons alors pour nous éloigner du centre ville, tout devient plus calme c'est apaisant.

- Je suis désolée pour l'indiscrétion de Eden, elle manque de tact.
- C'est rien, m'assure le brun.

Nous sommes seuls sur le bord de la route, éclairés par quelques lampadaires, nous finissons par rejoindre le parc où nous nous étions retrouvés la dernière fois. Elias propose qu'on se pose ici tranquillement, je m'assieds sur une des balançoires, alors qu'il reste debout face à moi.

- Je peux te poser une question ?
- Oui, accepté-je.
- Tes parents adoptifs n'ont rien contre le fait que tu sois venue ici, sur les traces de ta mère biologique ?
- Pas vraiment... commencé-je. Enfin, évidemment au début ils ont eu du mal à accepter l'idée que je parte aussi loin, mais parce que je voulais suivre les traces de ma génitrice, ça ils le comprennent.

Il se déplace jusqu'à moi afin d'être plus prêt, accoudé contre la poutre en bois, il ne cesse de me regarder.

- Arrêtons de parler de moi, je veux en savoir plus sur toi, déclaré-je.
- Qu'est-ce que tu veux savoir ?
- Je t'ai dit que je faisais de la danse, toi qu'est-ce que tu aimes faire pour occuper ton temps ?

Elias hausse les épaules, ses yeux ne me regardent plus, il réfléchit. Son air me montre qu'il est embêté par ma question, mais pourquoi ?

- J'aimais jouer de la guitare avant, dit-il finalement.
- Plus maintenant ?
- Non, répond-il froidement.

Bon, encore un sujet à éviter de toute évidence. Je détache mes yeux des siens, je ne le comprends définitivement pas. Il dit vouloir faire des efforts mais me parler ainsi n'en est pas.
Je l'entends soupirer, probablement exaspéré, mais ce n'est pas mon problème.

- Si tu veux pas en parler il suffit de le dire, lui fais-je remarquer durement.
- C'est mon père qui m'a appris à jouer, dit-il en ignorant ce que je viens de dire.

Il marque une pause, je pose finalement mes yeux sur lui, il se détache de la poutre en bois pour s'éloigner un peu, son torse se soulève lourdement, je peux entendre ça respiration saccadée d'ici, je fronce les sourcils. Mon cœur se serre, il semble contrarié, rongé par une certaine douleur.

- Elias... l'appelé-je doucement.
- Il est mort. Mes parents sont morts.

Je suis vraiment stupide, je ravive des souvenirs douloureux, et il a mal je le vois. Tout mon corps est crispé, je n'ose plus bouger ni même parler, j'aurai dû me taire.

- Je suis désolée, murmuré-je.

Il ne dit rien, il ne me regarde pas, mon cœur se serre.

- J'aurai pas dû en parler, je suis vraiment désolée... dis-je la gorge nouée.
- Tu ne pouvais pas savoir Bryséis.

Il se retourne vers moi, le visage adouci, il marche une nouvelle fois vers moi, toujours assise sur ma balançoire, il reste debout, la tête baissée vers moi, et je me sens directement apaisée. Elias pose sa main sur ma joue, mon corps réagit immédiatement et frissonne, son pouce caresse tendrement ma peau. Je le sens encore, cette attirance, comme si quelque chose d'inexplicable me poussait vers lui.

- Tu le ressens aussi.
- De quoi est-ce que tu parles ? lui demandé-je, encore profondément plongée dans ma torpeur.
- Ce lien qu'il y a entre nous, dit-il alors d'une voix rauque.

J'avale difficilement ma salive, je ne suis pas la seule à le ressentir, mais comment est-ce possible ? Je n'ai jamais réellement cru qu'on puisse être liée à une personne, ni au grand amour, j'ai toujours persisté à dire que c'était éphémère, bien que certains réussissent à vivre leurs vies avec la même personne, je n'ai jamais compris.

- Qu'est-ce que ça veut dire ? fais-je, perdue.

Elias ne répond pas. Perdue dans ses iris, je ne vois pas son autre main s'avancer vers moi, jusqu'à ce qu'elle se pose sur mon épaule, et ma main attrape son poignet presque instinctivement. Il lie ses doigts avec les miens, et ma main dans la sienne, il me force à me lever. Comme lorsque nous dansions, nous sommes très proche. L'air frais ne m'atteint plus, je suis touchée par la chaleur de son corps, comme enfermée dans une bulle, rassurante. Elias se rapproche un peu plus.

- Elias ! hurle soudain une voix masculine.

Immédiatement arrachée à ce moment, Elias lève précipitamment la tête tout en s'éloignant de moi, pourtant ma main toujours dans la sienne, et je suis surprise de voir Jake arriver vers nous en courant. Il semble paniqué, exténué, il me rend inquiète.

- Il faut que tu viennes maintenant, dit-il avec pression.

Ils se regardent sans prononcer un seul mot, mais au fur et à mesure que les minutes s'écoulent, je vois les yeux de Elias se noircir, sa mâchoire se serrer. Il est à cet instant presque terrifiant. Mon cœur bat de plus en plus vite, qu'est-ce qui se passe ?

- Elias ?

Celui-ci tourne son visage vers moi, il s'adoucit un court instant.

- Il faut que tu partes.
- C'est quoi ce bordel Elias ?! m'emporté-je. C'est exactement la même chose que la dernière fois, explique !
- Pas maintenant, pars, ordonne-t-il durement.
- Non.

J'ai conscience de donner l'impression d'être qu'une gamine qui fait un caprice, mais il est hors de question que je reste dans l'ignorance, c'est la deuxième fois qu'une telle chose se produit.

- S'il te plaît fais moi confiance Bryséis.
- Comment veux-tu que je le fasse ? Tu comptes m'ordonner de me barrer à ta guise combien de fois ?! hurlé-je à bout de nerfs malgré moi.

Il me regarde un instant blessé par mes paroles, que je regrette presque immédiatement, mais rapidement il reprend un expression dure.

- Dégage de là, dit-il froidement.
- Elias, s'impatiente Jake.

Elias ne détourne pas son regard de moi, les yeux noirs, le visage déformé par la colère. J'en frissonne.

- Je plaisante pas Bryséis, pars.

Il me tourne le dos pour rejoindre Jake qui me lance un regard désolé. Puis, ils courent vers la forêt avant de complètement disparaître.

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Comme promis voilà un autre chapitre qui j'espère va autant vous plaire que moi !

J'ai beaucoup aimé écrire ce chapitre, j'ai essayé de vous faire ressentir un maximum la puissance du lien qui les unie, j'espère avoir réussi ! 🙏🏼

En tous cas, le prochain chapitre risque d'être moins joyeux, avec un grand nombre de révélations...

N'hésitez pas à me donner votre avis !

Bisous

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