Chapitre 3




    - Prends tes médicaments, allez, c'est pas si mauvais.

- Non, je veux pas, protesta l'enfant. Grand-mère, s'il-te-plaît j'aime pas ça, c'est vraiment pas bon.

    De son fauteuil, Annamária observa la vieille dame avec son petit-fils. Elle essayait en vain  de lui donner des antibiotiques. Mais c'était sans compter les caprices du petit garçon. Et bien qu'Anna pensa qu'ils pouvaient être difficile, elle aurait aimé connaître les joies de la maternité.

Elle n'avait pas la chance d'en avoir. Ils avaient bien essayé avec Frank, cependant, aucun bébé ne semblait vouloir grandir dans son ventre. Son mari insistait pour aller consulter un médecin, mais Anna ne voulait pas. Elle avait peur. Peur qu'on lui annonce qu'elle est stérile. Peur de ne pas pouvoir tomber enceinte. Peur que son mari se détourne d'elle si jamais ses craintes s'avéraient fondées. Elle avait souvent pensé être enceinte.

Combien de fois avait-elle acheté des tests de grossesse, et combien de fois avait-elle été déçue en observant le moins figurant sur le petit bâtonnet. À force, son espoir diminuait et son bonheur aussi. Elle s'était plongée dans le travail pour oublier, mais elle ressentait ce vide qui ne pouvait être comblé que par la présence d'un bambin qui aurait les traits de son père et, pourquoi pas les yeux de sa mère.

    Sa nouvelle place ne lui permettant pas de regarder par le hublot, Annamária s'ennuyait ferme. Les turbulences l'effrayant bien trop, elle n'arrivait ni à lire ni à dormir. Après qu'elle eut été raccompagnée, elle avait lu un article concernant les réseaux sociaux jusqu'à ce que survienne la deuxième secousse. Là, elle s'était agrippée tellement fort aux bords de son siège que ses jointures blanchirent, la respiration saccadée. Elle avait toujours eu un peu peur en avion, et les turbulences ne la rassuraient guère. Il lui tardait vivement de passer cette zone.

    La jeune femme reporta son attention sur l'enfant et sa grand-mère. Cette dernière avait finalement réussi à faire prendre son traitement au garçon. Maintenant, il était occupé à regarder par dessus la tête de son voisin les nuages, ou plutôt essayait-il. Il bondissait sur son siège comme une petite sauterelle, en tentant désespérément d'observer le hublot. La vieille dame, elle, tricotait un morceau de laine usée, sans plus se préoccuper de son petit-fils.

    Sentant soudain une chaleur humide sur sa poitrine, Anna poussa un cri. Elle bondit de son siège et remarqua une hôtesse devant elle, l'air stupéfaite. Chiara apportait un café à un monsieur qui le lui avait demandé lorsqu'elle percuta un objet qui la fit trébucher et renverser son contenu sur Annamária.

Son chemisier se trouvait complètement trempé et lui collait à la peau. Encore heureusement que le liquide n'était pas très chaud, auquel cas la jeune hongroise aurait été non seulement mouillé mais aussi brûlée. Chiara, mortifiée, se confondit aussitôt en excuses.

- Oh, mon Dieu ! S'exclama-t-elle. Je suis vraiment navrée, j'ai perdu l'équilibre. Je vais vous aider madame, à réparer mon erreur. Oh ! Vraiment, excusez-moi.

- Ce n'est pas grave, il n'y a pas de mal. Mais je peux me débrouiller toute seule, ne vous dérangez pas.

- Non vraiment, j'insiste. Venez, dit-elle en lui prenant gentiment le bras.

Anna suivit donc Chiara jusqu'aux sanitaires, où elle déboutonna sa chemise pour la donner à la main tendue de l'hôtesse. Celle-ci commença à nettoyer la tâche brunâtre en frottant énergiquement. Anna s'approcha et la regarda faire, gênée.

- Je peux m'en occuper, dit-elle, regrettant de lui avoir donné le vêtement. Ne vous dérangez pas, vous avez sûrement beaucoup de travail.

- C'est moi qui vous ai fait ça, alors c'est à moi de laver votre haut pour essayer de récupérer cette salissure. Je ne saurais comment me faire pardonner autrement, alors laissez-moi faire s'il-vous-plaît.

- Mais vous n'avez pas de travail ?

- Mon collègue pourra très bien se passer de moi cinq minutes.

Vaincue, Anna s'adossa au lavabo adjacent celui où Chiara s'appliquait à laver la chemise vermeille.

- Merci.

L'hôtesse lui sourit, puis lui demanda :

- Vous partez où ?

Anna la regarda, sans comprendre.

- Vous vous rendez où ? Quelle destination ?

- Ah ! Elle éclata de rire. Pardonnez-moi, j'étais dans la lune. Je vais à Boston, pour le travail.

- Donc vous n'allez pas en vacances ?

- Je crains que non, malheureusement. Mais j'espère pouvoir bientôt, avec mon mari.

- Oh vous êtes mariée ? Depuis combien de temps ?

- Cela fera douze ans dans deux mois. Et vous êtes aussi mariée ?

- Non, mais j'ai un petit-ami. Il ne s'est pas encore décidé à demander ma main.

- Je suis sûre que cela arrivera bientôt.

- Oh, je ne suis pas vraiment pressée. Le mariage impose beaucoup de contraintes.

- Vous trouvez ? Pourtant, je vous assure du contraire.

Chiara décida de changer de sujet.

- Et sinon, que faites-vous comme travail ?

- Je suis webmaster, répondit Anna. Je conçois des sites internet pour ceux qui en ont besoin, précisa-t-elle en voyant le regard interrogateur de l'hôtesse, et je m'assure de leur bon fonctionnement.

- C'est intéressant ! s'enthousiasma Chiara. Et depuis combien de temps travaillez-vous ?

À présent, elle séchait le vêtement devant le séchoir à main.

- Ce n'est sûrement pas autant intéressant qu'être hôtesse de l'air. Cela fait cinq ans.

- Oui c'est vrai qu'être hôtesse est vraiment enrichissant. Bien que fatiguant, je suis heureuse de pouvoir exercer ce métier. Cela apporte une véritable culture que je n'aurais jamais acquise en faisant un autre métier. Voilà, dit-elle en lui tendant son chemisier à présent lavée. Encore pardon, madame.

- Appelez- moi Anna, et ne vous excusez pas, ça peut arriver à tout le monde. Je vous remercie beaucoup de l'avoir lavé.

- Moi c'est Chiara et c'est avec plaisir de vous avoir aidé, c'était entièrement ma faute. C'était le moins que je puisse faire.

- Enchantée.

Elles se serrèrent la main, puis Annamária se rhabilla. Elles se dirent au revoir et repartirent chacune d'un côté.

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    Un violent tremblement réveilla Perrine en sursaut. Elle regarda autour d'elle, et vit des enfants se serrer contre leurs parents, des gens parler entre eux à voix basse, et d'autres, beaucoup moins discrets, crier , complètement paniqués en s'accrochant de toutes leurs forces à leurs sièges.  Des hurlements stridents d'une fille pas loin d'elle lui parvint aux oreilles. L'avion tangua dangereusement d'un côté, puis de l'autre, en secouant violemment les passagers terrorisés.

    Mike et Chiara, qui avait rejoint son collègue, s'accrochèrent aux dossiers de sièges devant eux. Quand le New Blackburn redevint stable, après un long moment, ils s'empressèrent de partir à la recherche de Wiliam, après avoir rassurés les passagers inquiets. Perrine les vit partir avec crainte. Elle avait bien vu qu'ils avaient l'air eux-même anxieux et agités, ce qui était loin de la rassurer. Ils devaient être habitués aux turbulences, il n'était donc pas normal d'observer une certaine inquiétude se peindre sur les visages du personnel.

    Ces derniers se trouvaient en salle de repos où ils avaient rejoint Mila. Par chance, cette dernière n'avait pas de nouvelle blessure. William était avec eux, il avait convoqué toutes les hôtesses et le steward pour une réunion.

- Qu'est-ce qu'il dit, Alaric ? S'enquit Clara. C'est normal pour lui ce qui vient de se passer ?

- D'après lui, on a traversé la zone de turbulences depuis un moment, avoua William. Il essaye de comprendre ce qui s'est passé.

- Comment ça, il essaye ? Il ne sait pas d'où ça vient ?

- Non, Chiara, pour l'instant il ne peut qu'émettre des hypothèses. Comme à l'accoutumée, il a procédé aux vérifications de routine et rien ne paraissait suspect.

- Donc tu penses que ce n'est pas un problème technique ? demanda Mila.

- Honnêtement, je ne sais pas quoi penser. J'attends d'avoir des nouvelles d'Alaric. Mais il est certain que ces turbulences, ou en tout cas la dernière, n'était pas normale.

- Elle a duré plus longtemps que les deux premières, intervint Mike, et elle était plus violente.

- Oui c'est vrai, approuva Amy. Clara et moi on a pu se tenir de justesse aux accoudoirs des sièges à proximité.

- Nous aussi, avec Mike on s'est accrochés aux sièges des voyageurs. Et je suis sûre que cela n'a fait qu'ajouter de l'inquiétude à ces derniers.

- Pour l'instant, dit Wiliam avec gravité, il est important de ne rien leur dire. Nous allons faire tous notre possible pour repousser le moment d'annoncer que quelque chose ne va pas.

- Ça va être difficile étant donné que je suis moi-même effrayée.

- J'en ai conscience, mais s'il-vous-plaît faites ce que je vous demande. Souriez, soyez confiant et surtout, rassurez-les. Nous n'avons pas besoin d'une émeute.

- Compte sur nous, Will, assura Mike.

- Merci, Mike. Vous pouvez retourner travailler, je vous en dis plus dès qu'Alaric m'aura donné des nouvelles.

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    Dans le cockpit, Alaric prenait des mesures de sécurité. Il avait pris le talkie et informait l'assistance des récents événements. Asher avait pris momentanément les commandes principales en attendant que le pilote ait terminé.

Comme l'avait précisé William, la zone de turbulences était passée depuis un certain temps et Alaric ne comprenait d'où pouvait venir le problème. Il avait vérifié lui-même toutes les pièces ce matin même, à moins que... Excédé, il se frappa le front d'un mouvement si brusque qu'il fit sursauter Asher. Il marmonna des excuses en se traitant mentalement d'idiot.

Comment n'avait-il pu ne pas y penser plus tôt ? Il n'avait pas tout vérifié lui-même. C'est l'OMN qui avait terminé le travail, en étant lui-même submergé avant l'arrivée des voyageurs. Cependant, les Officiers Mécaniciens Naviguant connaissaient leur travail, et celui qui l'avait secondé n'était pas un débutant. Il avait été affecté à Denver depuis presque quatre ans et Rick n'avait jamais rien eu à redire de son travail.

Se pourrait-il qu'il ait commis sa première erreur ? Il repoussa cette pensée, l'OMN connaissait son travail, il n'avait pas à douter de lui. 

    Ce ne fut seulement que vingt minutes plus tard qu'Alaric reprit les commandes. Pour la première fois depuis longtemps, il sentait dépassé. Bien sûr, il gardait la tête haute et ne montrait rien devant Asher. Il n'avait pas pu détecter le problème.

- T'as rien trouvé ?

Rick regarda son copilote en secouant la tête.

- Non, tout est normal. Ça ne peut pas être les moteurs, sinon on aurait eut un accident dès le décollage, et cela vaut également pour une bonne partie des appareils.

- T'as pas une idée de ce que ça peut être ?

- Pas la moindre, soupira le pilote.

- Et l'ingénieur de l'assistance, il dit quoi ?

Les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne assurent la régulation et la sécurité des mouvements d'avions sur les aéroports. Mais Asher préférait les appeler les ingénieurs de l'assistance, c'était plus facile, d'après lui, et aussi plus cool.

- Nous devront interrompre le vol si une autre turbulence survient. Atterrir sur la piste la plus proche.

- Les autres sont au courant ?

- Pas encore. Je vais en parler à William et il se chargera de prévenir les autres.

- Pourquoi pas appeler Mila ? proposa Asher.

- Parce que ce n'est pas de sa responsabilité. Et pourquoi voudrais-tu que ce soit une hôtesse qui s'en occupe ?

- Tout simplement parce que je l'aime bien et que toute occasion est bonne pour la voir.

- T'es pas croyable, s'esclaffa Rick. Toi et les femmes...

- Quoi ? Je les trouves charmantes moi les italiennes.

- C'est vrai, admit Rick. Surtout les Siciliennes.

- Euh, t'es pas marié toi ?

- Si, à une Sicilienne.

Les deux hommes se regardèrent en éclatant de rire.

Plus sérieusement, pourquoi tu ne l'invites pas à dîner ?

- Elle a l'air inaccessible, non ? Je penses pas qu'elle accepterais.

Alaric observa son collègue avec curiosité. Habituellement, Asher n'avait pas de problème à inviter une femme et cela ne lui causait pas tant de soucis.

- Comme on dit, qui ne tente rien n'a rien, alors fais-le, ça ne te coûtes rien de lui poser la question.

- Tu crois ? Je suis pas très sûr.

- Depuis quand tu doutes de toi ? Tu es le charmeur de ces dames. Essayes, je te dit, si elle acceptes, t'auras la fierté d'avoir réussi, et de voir les choses se concrétiser. Dans le cas contraire, tu seras fixé.

Asher lui sourit mais n'eut pas l'occasion de répondre. Il remarqua quelque chose qui l'inquiéta, et son visage devint blême. 

- Rick ! s'exclama-t-il. Regardes l'anémomètre !

Alaric observa l'appareil. L'anémomètre indiquait au pilote la vitesse conventionnelle de l'avion. Il permettait, en quelque sorte, de mesurer la vitesse et la pression. Cependant, l'aiguille était pointée sur le zéro, ce qui signifiait, évidemment, qu'elle n'indiquait plus rien du tout, ni vitesse, ni pression. Ce qui était très dangereux.

- Merde ! jura Alaric, troublé. Mais comment n'ai-je pu ne pas le voir ? J'ai pourtant bien tout vérifié et il fonctionnait tout à l'heure ! Il faut interrompre le vol immédiatement ! Pendant que je contacte l'assistance, préviens Will !

Rick essayait de ne pas céder à la panique. En temps normal, quand l'anémomètre ne fonctionnait pas avant le décollage, le vol était soit interrompu, soit reporté. Aussi, le fait qu'il se mette à ne plus marcher en plein vol était inextricablement périlleux. Finalement, son mauvais pressentiment de ce matin n'était pas une fadaise.

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    Eliott jouait aux cartes avec son nouvel ami. Après êtres retournés à leurs places, ils avaient continué de faire connaissance. Wade n'était pas beaucoup plus âgé que lui, et il avait l'âge d'être son grand frère. Aussi, c'est avec entrain qu'il accueillit ses conseils et sa façon de voir la vie. Aux premiers abords, Wade avait pensé que le jeune homme n'était qu'un gamin en pleine crise d'adolescence.

Mais après avoir discuté avec lui, il découvrit une toute autre personne, bien différente de ce qu'il avait cru au départ. Eliott était plutôt timide, il fallait creuser sa carapace pour atteindre le côté folâtre et décontracté de sa personnalité. Et il était bien content de s'être fait un ami.

- Arrêtes de tricher, se plaignit Eliott.

- Tu m'insultes de tricheur, moi ?

- Oui, toi, arrêtes ta comédie, je sais que tu joues pas franc jeu, t'as pas arrêté depuis qu'on a commencé. 

- Même pas vrai, d'abord.

- T'as peur de perdre ?

- Bien sûr que non, riposta-t-il. Tu crois quoi ? Je triches pas, et je vais remporter la partie, observes le grand maître.

À cet instant, une annonce du pilote retenti.

- " Ici le poste de pilotage, PNC assis attachés, je répète, PNC assis attachés. turbulences fortes. "

Un brouhaha s'ensuivit alors. Tous les passagers se demandant ce que cela signifiait.

- Qu'est-que ça veut dire ?

- Je crains que cela n'augure rien de bon, répondit Wade.

Et il n'imaginait pas à quel point il avait raison.

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    Au contraire des garçons, Mila savait parfaitement ce que cela signifiait. Quand elle était en formation, cela la faisait sourire parce que c'était vraiment amusant, en simulation, de devoir s'asseoir au plus vite. Cela lui faisait penser au jeu des quatre chaises. Mais maintenant, elle en était terrorisée, parce qu'elle savait que cela n'augurait rien de bon, qu'il y avait un véritable problème, et que les PNC (Personnel Naviguant Commercial), plus précisément les stewards et hôtesses de l'air, devaient se trouver une place assise au plus vite, même sur les genoux d'un passager.

    William les avait convoqués une nouvelle fois pour leur annoncer qu'une pièce mécanique avait lâché, et que le New Blackburn devait atterrir le plus rapidement possible. La jeune italienne avait pensé qu'Alaric allait annoncer la nouvelle aux passagers, mais ce qu'elle avait entendue était bien aux antipodes de ce qu'elle imaginait, ce qui ne voulait dire qu'une chose : que les circonstances s'étaient aggravées.

    Elle était dans le galley, une petite cuisine dans le fond de l'avion, en compagnie de Mike et Chiara. Ces deux derniers devaient apporter les repas encore chaud, et Mila avait tenu à les aider malgré les protestations de ses collègues.

- Viens ! lui cria Mike en lui prenant le poignet qui n'était pas mal en point. Il faut trouver où s'asseoir.

Chiara était déjà en train de courir loin devant eux, et s'exclama :

- Regardez, il y a deux places libres là. Dépêchez-vous !

Mike accourut avec la jeune femme, essoufflés.

- Il faut que l'une de vous s'assoit sur mes genoux, pas le temps de chercher une autre place.

- Vas-y, Mila, lui dit Chiara. T'es plus légère que moi.

    Mila obtempéra sans argumenter. Chiara s'assit au moment même où l'avion commença à tanguer dangereusement vers le bas. Elle s'empressa de s'attacher malgré ses mains tremblantes et Mike fit de même en passant la ceinture par dessus Mila. Il passa ses bras autour de la jeune femme en la serrant aussi fort que possible. De fortes turbulences s'ensuivirent, qui secouèrent leurs corps dans tous les sens, les décollant presque de leurs sièges. Mila se souvint des cris, des hurlements de terreur, des sacs à mains et des sacs à dos qui glissaient d'un côté, puis de l'autre, en rythme avec les secousses.

Et enfin, le noir total l'enveloppa de ses ténèbres.

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Et voilà le troisième chapitre.

Je vous laisse avec un petit suspens, dites-moi ce que vous en avez pensé.

Et si vous avez aimé, votez.

À bientôt.

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